Cours 7 4 Processus de Markov à temps continu 4.1 Processus de Poisson homogène On considère un processus de comptage { N(t), t > 0 } tel que les nombres d événements dans deux intervalles disjoints sont indépendants. On suppose également que le nombre d événements dans un intervalle ne dépend que de la longueur de celui-ci i.e. N(t 0 +t) N(t 0 ) dépend seulement de t et non de t 0 (stationnarité). On se donne les postulats suivants : (i) connaissant l état dans lequel se trouve le processus à la date t, la probabilité que plus d un événement se produise dans un intervalle de temps de longueur infinitésimale h (h 0) est en ce qui s écrit : P(N(t+ h) N(t)>1 N(t) x). (ii) la probabilité qu un événement se produise dans ce même intervalle est λh+, λ>0 ce qui s écrit : P(N(t+ h) N(t)1 N(t) x)λh+. On rappelle que est une fonction telle que lim 0. Le postulat (i) caractérise l idée d événement rare. On déduit de ces deux postulats que la probabilité qu il n y ait aucun événement dans un intervalle de longueur infinitésimale h est 1 λh +. P(N(t+ h) N(t)0 N(t) x)1 λh+. (9) Soit p k (t) la probabilité qu exactement k événements se produisent dans [0, t) i.e. p k (t) P(N(t) k), k 0,1,2, Nous allons calculer p k (t) pour tout k N. On suppose N(0) 0. Pour k0 Calculons p 0 (t+ h) ; le nombre d événements dans 2 intervalles disjoints étant indépendants : p 0 (t+ h) p 0 (t)p 0 (h). Or d après (9), p 0 (h)1 λh+. 27
L3 MIS On a donc : p 0 (t+ h) p 0 (t)(1 λh+ ) p 0 (t+ h) p 0 (t) λhp 0 (t)+ p 0 (t) p 0 (t+ h) p 0 (t) lim λp 0 (t)+ p 0 (t) lim p 0 (t) λp 0(t) Ainsi donc, la probabilité p 0 (t) qu il n y ait pas d événements dans [0, t], satisfait l équation différentielle : p 0 (t) λp 0(t). La solution de cette équation est de la forme p 0 (t)ce λt. La constante C est donnée par la condition initiale p 0 (0)1 et il vient : p 0 (t) e λt. Pour k>0 : On remarque que : p k (t+ h) p k (t)p 0 (h)+ p k 1 (t)p 1 (h)+ + p 1 (t)p k 1 (h)+ p 0 (t)p k (h) En remplaçant p 0 (h) par 1 λh+ et p 1 (h) par λh (postulat (ii)), il vient : p k (t+ h) p k (t) p k (t)λh+ p k (t)+λhp k 1 (h)+ On divise par h et on passe à la limite, on a alors : Or p k (t+ h) p k (t) lim p k (t)λ+ p k (t) lim + λp 1 k 1(h)+ lim i2 p k i (t)p i (h) i2 + p k i (t)p i (h) p i (h)1 p 0 (h) p 1 (h). i2 On en déduit donc que p k (t) est solution de l équation différentielle : p k i (t)p i (h) i2 p k (t) λp k(t)+λp k 1 (t), k 1,2, avec les conditions initiales p k (0)0, k 1,2,... Ces équations sont appelées : équations de Chapman-Kolmogorov. On cherche les solutions sous la forme : Q k (t) p k (t)e λt (équation différentielle du première ordre avec second membre : on résout l équation sans le second membre puis, on fait varier la constante). En remplaçant, on obtient l équation suivante : Q k (t)λq k 1(t) avec Q 0 (t)1 et les conditions 28
initiales : Q k (0)0, k1,2,... Pour k1, on a : Q 1 (t)λ donc Q 1(t)λt+ c te. Or Q 1 (0)0 donc c te 0. On en déduit : p 1 (t)λte λt. Pour k2, on a : Q 2 (t)λ2 t et Q 2 (t) λ2 t 2 2 + cte On a Q 2 (0)0 donc c te 0 et on en déduit : p 2 (t) λ2 t 2 2 e λt. Pour k3, on a : Mais Q 3 (0)0 donc c te 0 et on en déduit : Q 3 λ3 (t) 2 t2 et Q 3 (t) λ2 t 2 2 t3 3 + cte p 3 (t) λ3 t 3 3! e λt. Et finalement, on a par récurrence : p k (t) (λt)k e λt, k 0,1,2,... k! On a donc que sous les postulats (i) et (ii), la loi du nombre d événement dans un intervalle [0, t] est une loi de Poisson de paramètre λt. Le paramètre λ est appelé intensité du processus. Les postulats nous ont conduit à établir que la loi du nombre d événements dans un intervalle donné de longueur t était une loi de Poisson de paramètre λt. Nous avions désigné par intensité le paramètre λ. C est une constante. On dit que le processus est un processus de Poisson homogène qu on note parfois PPH (ou encore HPP). On peut donner la définition suivante : Définition 13 Un processus de Poisson homogène d intensité λ est un processus aléatoire {N(t), t 0} à valeurs dans N tel que : 29
L3 MIS pour tous points t 0 0< t 1 <...< t n, les accroissements du processus N(t 1 ) N(t 0 ), N(t 2 ) N(t 1 ),..., N(t n ) N(t n 1 ), sont indépendants ; pour s 0 et t>0, la variable aléatoire N(s+ t) N(s) suit une loi de Poisson de paramètre λt. N(0)0. P(N(s+ t) N(s) x) (λt)x x! e, x N. De part cette définition, il vient immédiatement : E[N(t)]λt et V ar(n(t)λt. On a la proposition suivante : Proposition 18 Soit {N(t), t 0} un processus de Poisson d intensité λ. Alors les interarrivées sont indépendants et suivent une loi exponentielle de paramètre λ. Preuve : On note X, la variable aléatoire interarrivée (temps qui s écoule entre deux événements successifs). P(X > t) esrt la probabilité qu il ne se passe rien dans un intervalle de longueur t. Le processus étant homogène, cette probabilité est égale à P(N(t 0 + t) N(t 0 ) 0)P(N(t) 0) e λt ce qui prouve que X suit une loi exponentielle de paramètre λ. Pour prouver l indépendance considérons X 1, la date du premier événement et X 2, le temps qui s écoule entre le premier et le second événement. Par définition, la densité de la loi de probabilité de (X 1, X 2 ) est : Mais d après les propriétés de N(t), P(t 1 < X 1 < t 1 + dt 1, t 2 < X 2 < t 2 + dt 2 ) f X1,X 2 (t 1, t 2 ) lim dt 1, dt 2 0 dt 1 dt 2 P(t 1 < X 1 < t 1 + dt 1, t 2 < X 2 < t 2 + dt 2 ) P(N(t 1 ) N(t 0 )0) P(N(t 1 + dt 1 ) N(t 1 )1) P(N(t 1 + t 2 ) N(t 1 + dt 1 )0) P(N(t 1 + t 2 + dt 2 ) N(t 1 + t 2 )1) e λt 1 λdt 1 e λdt 1 e λ(t 1+t 2 t 1 dt 1 ) λdt 2 e λdt 2 λe λt 1 λe λt 2 e λdt 1 e λdt 2 dt 1 dt 2 En divisant par dt 1 dt 2 et en passant à la limite, il vient f X1,X 2 (t 1, t 2 ) λe λt 1 λe λt 2 ce qui montre que X 1 et X 2 sont des v.a. indépendantes de loi exponentielle de paramètre λ. On observe donc qu un processus de Poisson homogène d intensité λ est équivalent à un processus de renouvellement dont les interarrivées sont exponentielles de paramètre λ. 30
Proposition 19 Soit {N(t), t 0} un processus de Poisson d intensité λ>0. Pour 0< u < t, N(u) sachant N(t) n suit une loi binomiale de paramètre (n,u/t). Preuve : Soit 0 k n, P(N(u) k N(t) n) P(N(u) k, N(t) n) P(N(t) n P(N(u) k, N(t) N(u) n k) P(N(t) n P(N(u) k)p(n(t) N(u) n k) ( P(N(t) n) )( ) (λu) k e λu /k! [λ(t u)] k e λ(t u) /(n k)! ( ) (λt) n e λt /n! ( )( ) u k /k! (t u) k /(n k)! ( ) t k+n k /n! n! ( 1 u ) n k ( u ) k k!(n k)! t t Ce qui démontre le résultat. 31