Italie : l extension des dispositifs de retraite supplémentaires aux salariés du secteur public.



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ISSN 1293-2868 n o 2003 59 Mai 2003 Italie : l extension des dispositifs de retraite supplémentaires aux salariés du secteur public. par Laurent Vernière Questions Retraite en direct sur votre e-mail Si vous souhaitez recevoir automatiquement chaque mois la version pdf de Questions Retraite, il vous suffit de vous abonner gratuitement sur le site www.cdc.retraites.fr à la rubrique Questions Retraite. Vous pouvez également, à partir du site, télécharger tous les Questions Retraite parus à ce jour. Aussi sur www.cdc.retraites.fr : études et informations sur la retraite et l indemnisation des risques professionnels pour les employeurs, les affiliés et les retraités de la CNRACL, de l Ircantec et de Fonpel, simulateurs de calcul de pensions, observatoire des débats parlementaires, recueil hebdomadaire des textes et analyses, observatoire des fonds de pension, revue de presse et analyse bimensuelle, monographie des régimes de retraite publique en Europe, comparaison des dispositifs, risques professionnels. 1. L organisation de la prévoyance complémentaire. 4 2. L extension de la prévoyance complémentaire aux salariés du secteur public. 12 3. Remarques de conclusion. 15 Bibliographie. 16 Publication du Service des Études de la Branche Retraites de la Caisse des dépôts - 67, rue de Lille 75007 PARIS Directeur de la publication : Jérôme Gallot Réalisation : direction de la Communication Contacts : Laurent Vernière, tél. 01 58 50 99 62 E-mail : laurent.verniere@caissedesdepots.fr Yves Guégano, tél. 01 58 50 99 85 E-mail : yves.guegano@caissedesdepots.fr Les vues exprimées dans cette publication ne reflètent pas nécessairement celles de la Caisse des dépôts et consignations. 1

Sur la base d un accord cadre signé en juillet 1999 par les partenaires sociaux du secteur public, deux décrets du Président du conseil des ministres (décembre 1999 et mars 2001) et un décret-loi pris en décembre 2000 ont étendu aux salariés du secteur public (État, collectivités locales et services de santé) la possibilité d adhérer et de cotiser à un fonds de pension. Ces fonds de pension forment, depuis la loi du 21 avril 1993 qui les a institués, le deuxième étage facultatif du système de retraite italien. Il s agit, selon la terminologie utilisée en Italie, du développement de la «prévoyance complémentaire» («Previdenza complementare»), de nature collective ou individuelle, ouverte, sur une base volontaire, à toutes les catégories de salariés et de non salariés. L introduction de ces dispositifs supplémentaires en capitalisation avait pour objectif de permettre aux assurés de compléter, par un effort d épargne retraite, la pension versée par les régimes publics de retraite dans la perspective d une diminution des taux de remplacement induite par les réformes de 1992 et 1995 1. La «prévoyance complémentaire» en Italie a une histoire courte puisqu elle n existe que depuis 10 ans. En raison des contraintes budgétaires et de l ampleur des prélèvements déjà opérés pour financer les régimes publics de retraite de base, son développement a été d emblée conditionné par la capacité à lui transférer des sources de financement existantes, en particulier celles utilisées pour les dispositifs d indemnités de fin de carrière qui permettaient le versement d un capital au moment du départ à la retraite. C est pourquoi, dans le secteur privé, l adhésion des salariés aux fonds de pension collectifs a été étroitement liée à la possibilité de transférer une fraction de la cotisation finançant le dispositif d indemnités de fin de carrière dénommé «Trattamento di Fine Rapporto» (T.F.R.), pour abonder leur épargne retraite et bénéficier des incitations fiscales. Équivalent à un mécanisme d épargne salariale, le dispositif T.F.R. était financé exclusivement par les entreprises et utilisé comme une source d autofinancement interne. Pour développer l épargne retraite, les autorités italiennes ont choisi de «détourner» cette épargne salariale vers des fonds de pension externes, ce qui présentait l atout supplémentaire de renforcer les métiers de la gestion financière. En 1993, les salariés du secteur public ne bénéficiaient pas du T.F.R. mais d un dispositif d indemnités de fin de service dénommé «Trattamento di Fine Servizio» (T.F.S.), prestation cofinancée en répartition par l employeur et par les assurés, c est-à-dire ayant la nature d une prestation sociale d employeur. Ils étaient par conséquent virtuellement exclus du bénéfice de la prévoyance complémentaire en raison de l impossibilité de transférer le T.F.S. vers les fonds de pension. Les lois successives de réforme des retraites de 1995, 1997 et 1998 ont comblé cette lacune, d une part, en autorisant la transformation du T.F.S. en T.F.R. et, d autre part, en ouvrant aux salariés du secteur public la possibilité d opter pour la prévoyance complémentaire. L accord paritaire signé avec les organisations syndicales en 1999 et sa traduction dans les décrets de 2000 et 2001 ont ainsi concrétisé, près de 10 ans après son introduction, l extension de la prévoyance 1 Pour une description et l évaluation des réformes du système de retraite italien, cf. : Questions Retraite n o 99-22 «La réforme du système de retraite en Italie». Laurent Vernière, Octobre 1999. Questions Retraite n o 2002-45 «Italie : le rapport Brambilla sur l évaluation de la réforme du système de retraite» Laurent Vernière, Janvier 2002. 2

complémentaire aux salariés du secteur public. Cependant, si cette extension est à présent acquise, les pouvoirs publics ont retenu des modalités de financement qui s écartent sensiblement de celles en vigueur pour les salariés du secteur privé. En effet, une partie des contributions des employeurs publics pour abonder l épargne retraite de leurs salariés sera «virtuellement» versée aux fonds de pension, en ce sens que ce versement ne donnera pas lieu à un transfert financier effectif. Des droits à la retraite seront donc accumulés avec une épargne retraite «virtuelle» dont la gestion financière sera également virtuelle. Ce n est qu au moment de la liquidation que l employeur public sera mis à contribution pour financer les obligations qu il aura contracté vis-à-vis de ses anciens salariés. L histoire récente de cette réforme permet de mettre en exergue les difficultés qu a rencontrées l Italie, d abord pour introduire, ensuite pour généraliser des dispositifs de retraite supplémentaires facultatifs. La réorganisation de la structure du système de retraite qu impliquait l adjonction d un deuxième étage a été soumise, depuis les règles adoptées en 1993, à trois contraintes fortes : L absence de marges de manœuvre budgétaires pour promouvoir l épargne retraite à l aide d incitations fiscales appropriées : il en a résulté entre 1993 et 2000 une instabilité des règles fiscales et ce n est que depuis les dispositions introduites en 2000 que les pouvoirs publics ont véritablement clarifié le cadre fiscal et accordé de modestes avantages fiscaux à l épargne retraite, En raison de forts déséquilibres, le financement des régimes publics de retraite obligatoires absorbait et continue d absorber la totalité du potentiel contributif des assurés et des entreprises en faveur de la retraite, ce qui laissait a priori peu de place pour abonder un nouveau produit tel que l épargne retraite, L attractivité de l épargne retraite a été concurrencée par les produits existants tels que les dispositifs d indemnités de fin de carrière qui conservent la préférence des assurés et des employeurs, ou les produits classiques d assurance vie. En outre, la lente diminution des taux de remplacement programmée par la réforme des régimes publics de retraite n est pas encore suffisamment perceptible pour inciter les assurés à adhérer aux fonds de pension, en particulier parmi les jeunes générations. L expérience italienne visant à créer un deuxième étage en capitalisation est intéressante à examiner pour ses aspects techniques mais aussi parce que le choix de cette modalité de réforme des retraites n est pas isolé au niveau européen. Des pays tels que l Allemagne, la Suède, voire l Espagne, ont également retenu ce principe avec des modalités qui, néanmoins, diffèrent fortement d un pays à l autre. L adhésion facultative ou obligatoire aux fonds de pension, la dimension du deuxième étage, l organisation de la gestion financière de la phase d accumulation, les critères de liquidation de l épargne retraite (mutualisation, garanties apportées aux souscripteurs, sortie en rente ou en capital, etc.) et la nature des incitations fiscales sont autant de facteurs qui différencient ces pays. Après avoir rappelé le contexte et les principales dispositions organisant la prévoyance complémentaire en Italie, on présentera les règles particulières qui régissent l accès aux fonds de pension pour les salariés du secteur public. 3

1. L organisation de la prévoyance complémentaire. La prévoyance complémentaire facultative a été introduite en 1993 dans le but d offrir aux assurés la possibilité de cotiser, sur une base individuelle ou à la suite d un accord collectif, à une nouvelle catégorie d institutions de retraite, les fonds de pension en capitalisation, généralisant un deuxième étage au système de retraite. Pour les assurés, l intérêt d adhérer à un fonds de pension devait être dicté principalement par la perspective de compenser la diminution, programmée par les réformes, des taux de remplacement des pensions versées par les régimes de retraite de base. Cependant, en raison des niveaux élevés atteints par les taux de cotisation obligatoires pour la retraite, la capacité des actifs à réaliser une épargne supplémentaire affectée aux fonds de pension était fortement limitée. C est pourquoi les autorités italiennes ont cherché à encourager l affectation vers les fonds de pension d une partie des contributions utilisées jusqu alors pour financer les dispositifs d indemnités de fin de carrière (T.F.R. et T.F.S.). Ce choix revenait à privilégier et à promouvoir une sortie en rente via les fonds de pension, se substituant en partie à une sortie exclusive en capital qu induisait la nature de ces dispositifs. Ce principe de réallocation d une source de financement existante vers les fonds de pension s est toutefois heurté à de nombreux obstacles liés en partie aux comportements et aux préférences des différents acteurs. Dans le secteur privé, le dispositif T.F.R. était financé et géré en interne par les entreprises : elles disposaient ainsi d une source d autofinancement peu coûteuse qu elles ne souhaitaient pas voir disparaître. Par ailleurs, les salariés conservaient une préférence pour une sortie en capital dont le montant était garanti, d autant plus qu ils avaient la possibilité durant leur vie active de liquider une partie de cette épargne salariale pour faire face à des dépenses exceptionnelles. Dans le secteur public, comme le T.F.S. avait la nature d une prestation sociale d employeur, il ne pouvait pas être affecté directement à la prévoyance complémentaire. Ce n est qu à l issue de négociations avec les partenaires sociaux et des modifications législatives que cet obstacle a été levé en alignant partiellement le régime applicable aux salariés du secteur public sur celui du secteur privé. Dans ce cadre, les incitations fiscales destinées à rendre attractive l adhésion à un fonds de pension ont été progressivement ajustées pour donner un avantage au choix de la prévoyance complémentaire par rapport aux dispositifs d indemnités de fin de carrière. a) Le mécanisme d indemnités de fin de carrière (T.F.R.) des salariés du secteur privé. Le mécanisme d indemnités de fin de carrière des salariés du secteur privé est similaire à un dispositif d épargne salariale organisé par les entreprises. Il est financé par une contribution de l employeur au taux de 6,91 % 2 prélevée sur les salaires bruts. L épargne salariale accumulée par chaque salarié est réévaluée chaque année selon une formule fixe, à un taux égal à 1,5 % plus 3/4 du taux d inflation 2 Dans le secteur privé, le taux de cotisation au mécanisme T.F.R. est égal à 1/13.5, soit 7,41 % appliqué au salaire brut annuel. Comme 0,5 point est reversé à l I.N.P.S. pour alimenter un fonds de garantie, le taux effectif qui abonde le T.F.R. est de 6,91 %. La rémunération annuelle est composée de 13,5 «mensualités» : chaque année travaillée ouvre droit à un abondement de l employeur à l épargne salariale égal à une «mensualité», d où le taux de cotisation de 1/13,5. 4

de l année antérieure. Du côté des entreprises, il n y a pas de sortie effective de fonds, les sommes abondant le T.F.R. étant comptabilisées sous la forme d engagements inscrits au bilan. Le principal intérêt du mécanisme T.F.R. est que les entreprises disposent ainsi d une source interne de financement à moyen/long terme à un coût inférieur aux taux d intérêt du marché. Compte tenu de la règle fixe de rémunération, la rémunération réelle de l épargne salariale est faible (elle devient négative dès que le taux d inflation annuel dépasse 6 %) et elle est très inférieure au rendement des titres de taux du marché financier (obligations). Il n y a donc aucune gestion financière active de l épargne accumulée. La sortie du mécanisme se fait sous la forme d un capital versé au moment du départ à la retraite, égal à la somme des droits acquis pendant la vie active revalorisés selon la formule fixe. Toutefois, comme dans tout mécanisme d épargne salariale, l épargne n est pas totalement bloquée puisque, au cours de leur vie active, les salariés ont la possibilité d effectuer des retraits quand surviennent un certain nombre d événements (modification de la situation familiale, chômage, investissements immobiliers, etc.). Jusqu en 2000, le capital versé à la liquidation était soumis à l impôt sur le revenu : l assiette imposable était égale à l indemnité après déduction d un abattement forfaitaire de 310 par année de contribution. Cette assiette était ensuite transformée en revenu fiscal de référence en la divisant par le nombre d années de contribution, afin de déterminer le barème de l impôt. b) Le mécanisme d indemnité de fin de service (T.F.S.) des salariés du secteur public. Avant l introduction effective de la prévoyance complémentaire dans le secteur public, un dispositif d indemnités de fin de service («Trattamento di Fine Servizio» (T.F.S.)) permettait le versement d un capital au moment du départ à la retraite aux fonctionnaires de l État («Indennita di Buonuscita») et à ceux des collectivités locales et des services de santé («Indennita Premio di Fine Servizio»). Ce dispositif était financé en répartition par les employeurs et les salariés aux taux de 9,6 % dans la fonction publique d État et de 6,1 % dans le secteur local, taux s appliquant à 80 % de la rémunération de référence 3. Les cotisations étaient versées à la «caisse du T.F.S.» gérée l I.N.P.D.A.P., l organisme gestionnaire des retraites du secteur public. En raison de ce cofinancement entre les employeurs et les salariés et de la gestion en répartition par l INDPAP, le T.F.S. avait la nature d une prestation sociale. Le montant du T.F.S. liquidé était calculé en fonction de la rémunération de référence de la dernière année de service et de la durée de service accomplie, selon les formules suivantes : Indennita di Buonuscita (État) = 13/12 x 80 % x dernière rémunération de référence mensuelle x durée de service. Indennita Premio di Servizio (Collectivités locales) = (1/15) x 80 % x dernière rémunération de référence annuelle x durée de service. Les prestations du T.F.S. bénéficiaient d un régime fiscal favorable au moment de leur liquidation : l assiette imposable était égale à la prestation versée après déduction d un 3 La rémunération de référence est composée de deux éléments : le traitement brut plus 60 % de l indemnité spéciale pour les fonctionnaires de l État, le traitement brut plus 30 % de l indemnité spéciale pour les fonctionnaires des collectivités locales et les agents des services de santé. 5

abattement forfaitaire de 310 par année de service et un d abattement supplémentaire de 26,04 % pour les fonctionnaires de l État et 40,98 % pour les salariés des collectivités locales et des services de santé. Les liquidations annuelles de T.F.R. et de T.F.S. ont représenté en moyenne 1,5 points de P.I.B. au cours des années récentes. Le montant des droits accumulés est estimé à 14 points de P.I.B. en 2001 4. Au vu de ces ordres de grandeur et devant la montée en charge relativement lente de la prévoyance complémentaire, les débats ont été nombreux et permanents à propos des choix adoptés par les autorités italiennes en 1993. Beaucoup d experts considèrent que l affectation du T.F.R. au financement de la prévoyance complémentaire ne sera pas suffisante, d une part, pour généraliser rapidement le deuxième étage en capitalisation, d autre part, pour procurer un complément de pension adéquat pour faire face à la diminution des taux de remplacement. Le caractère facultatif de la prévoyance complémentaire et des incitations fiscales considérées comme insuffisantes sont à ce sujet parmi les handicaps les plus souvent cités empêchant de modifier rapidement les comportements des assurés et des entreprises vis-à-vis du T.F.R. 1995-2001. Liquidations annuelles du T.F.R. et du T.F.S. 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 T.F.R. : - En M 8 793 13 331 11 273 11 205 10 571 11 441 11 846 - En % du P.I.B. 0,95 % 1,30 % 1,10 % 1,00 % 0,95 % 1,00 % 1,00 % T.F.S. : - En M 4 375 4 541 4 542 6 377 5 202 5 535 4164 - En % du P.I.B. 0,50 % 0,50 % 0,40 % 0,60 % 0,50 % 0,50 % 0,30 % T.F.S. + T.F.S. en % du P.I.B. 1,40 % 1,80 % 1,50 % 1,60 % 1,40 % 1,50 % 1,30 % Source : I.N.P.D.A.P. c) Les taux de cotisation pour la retraite. Le développement de la prévoyance complémentaire est fortement contraint par le niveau atteint par les taux de cotisation pour la retraite. Si on accepte l hypothèse que les indemnités de fin de carrière ont constitué dans le passé un élément de retraite versé sous la forme d un capital s ajoutant aux pensions des régimes publics de retraite obligatoires, on s aperçoit qu en Italie, la somme des contributions légales pour la formation du revenu de retraite atteint près de 40 % pour les salariés des secteurs privé et public. En effet, depuis la réforme des retraites de 1995 qui a remplacé les anciens régimes rétributifs par des régimes à cotisations définies fonctionnant selon la technique des comptes notionnels, le taux de cotisation permettant d acquérir des droits dans les régimes de base est voisin de 33 % pour la population des salariés. 4 En 2001, le stock de T.F.R. et de T.F.S. est évalué à 127 Md. 6

Taux de cotisation finançant les dispositifs d indemnités de fin de carrière. Employeur Trattamento Di Fine Servizio (T.F.S.) État Salarié Collectivités locales et services de santé Employeur Salarié 7,10 % 2,50 % 3,60 % 2,50 % 6,91 % Pour le T.F.S., le taux de cotisation s applique à 80 % de la rémunération de référence. Taux global de cotisation pour la retraite. T.F.R. Secteur privé Employeur Régimes obligatoires T.F.R. et T.F.S. TOTAL Secteur privé 32,70 % 6,91 % 39,61 % Secteur public : - État 32,95 % 80 % x 9,60 % 40,63 % - Colectivités locales et service de santé 32,95 % 80 % x 6,10 % 37,83 % Les assiettes auxquelles sont appliqués les différents taux de cotisation ne sont pas strictement identiques. Le niveau du taux de cotisation global est en conséquence approximatif. Ce niveau de prélèvement explique pourquoi, à défaut de pouvoir baisser significativement les taux de cotisation des régimes de base, le développement de la prévoyance complémentaire ne pouvait se faire qu en transférant vers les fonds de pension une quote-part du financement du T.F.R. et du T.F.S. d) Le traitement fiscal de la prévoyance complémentaire depuis le décret du 18/2/2000. Il a fallu près de sept années pour que les pouvoirs publics italiens stabilisent et simplifient le traitement fiscal de la prévoyance complémentaire. Depuis le décret publié en 2000, le principe de taxation retenu est en fait un système hybride : exonération plafonnée durant la phase d épargne, taxation des revenus financiers des fonds de pension à un taux plus avantageux par rapport aux autres placements financiers, imposition à la liquidation du seul capital, avec un avantage donné à ceux qui choisissent la sortie en rente. d.1) Les contributions aux fonds de pension. Pour les salariés bénéficiant de l affectation d une fraction de la contribution T.F.R. au fonds de pension, les contributions totales (salarié et employeur 5 ) sont déductibles de leur assiette imposable soumise à l impôt sur le revenu lorsque les trois conditions suivantes sont remplies : le total des contributions (employeur et salarié) ne doit pas dépasser 12 % du salaire brut, il ne doit pas être supérieur à deux fois la contribution T.F.R. affectée au fonds de pension, il ne doit pas dépasser une somme forfaitaire annuelle fixée à 5165. Pour les autres catégories (salariés adhérents à un fonds de pension ouvert, non salariés, 5 Les contributions de l employeur à un fonds de pension sont considérées comme un élément de la rémunération du salarié. 7

personnes à charge d un ménage), deux conditions sont fixées : le taux de contribution ne doit pas excéder 12 % du revenu ouvrant des droits et la contribution totale est plafonnée à 5165. Les versements dépassant les seuils précédents sont réintégrés dans l assiette de l impôt sur le revenu. Depuis 1993, les nouveaux entrants sur le marché du travail ont l obligation de d affecter la totalité de la contribution T.F.R. à la prévoyance complémentaire quand leurs employeurs ont choisi d y adhérer. Pour les salariés déjà en activité en 1993, les règles fiscales ont pour objectif de les inciter à affecter une part prépondérante de la contribution T.F.R. au financement de la prévoyance complémentaire. d.2) La phase d accumulation. Durant la phase d accumulation, les revenus financiers du fonds de pension sont imposés au taux réduit de 11 % (contre 12,5 % avant 2000 et 12,5 % pour les autres produits financiers). d.3) La phase de sortie ou de décumulation. Deux cas doivent être distingués : l imposition des rentes et l imposition du capital en cas de sortie partielle sous cette forme : Pour l imposition des rentes, seule la partie de l annuité représentative du capital accumulé, hors produits financiers, perçue par le retraité est intégrée au revenu imposable. Elle est imposée selon la législation courante de l impôt sur le revenu. En effet les produits financiers, imposés pendant la phase d accumulation, sont exclus de l assiette à l impôt sur le revenu pour éviter la double taxation, En cas de sortie partielle en capital, le législateur a prévu deux modalités d imposition du capital dans le but de favoriser l option de sortie en rente. Lorsque la sortie en capital n excède pas 30 % du capital accumulé, les revenus financiers ne sont pas imposables et le capital liquidé est imposé séparément à un taux favorable (la moyenne des taux d impôt sur le revenu des cinq années précédant la liquidation). Lorsque la sortie excède 30 % du capital accumulé, les revenus financiers accumulés sur cette fraction du capital sont également imposables au taux précédent. Les revenus financiers du fonds de pension durant la phase de décumulation sont imposés au taux de 12,5 %. Les nouvelles règles adoptées en 2000 ont eu le mérite de clarifier le cadre fiscal en généralisant le principe de la déductibilité de l épargne retraite de l assiette de l impôt sur le revenu, quelle que soit la nature du revenu composant les ressources du foyer fiscal. L avantage fiscal n est plus limité aux revenus résultant du contrat de travail. La prévoyance complémentaire devient en conséquence un dispositif ouvert à tous, qu elle soit organisée via un accord collectif entre les partenaires sociaux ou qu elle résulte d une adhésion strictement individuelle en dehors de la relation de travail. Le décret de 2000 a donc établi un principe de neutralité fiscale qui s applique à toutes les formes d épargne retraite. Ce type d incitations fiscales a toutefois plusieurs inconvénients. En premier lieu, seuls les ménages imposables à l impôt sur le revenu en bénéficient, les ménages à faibles ressources étant exclus de l avantage fiscal. Toutefois, cette appréciation doit être nuan- 8

cée puisque plusieurs études ont montré que l adhésion à la prévoyance complémentaire était d abord expliquée par le montant des revenus disponibles et que les incitations fiscales n intervenaient que sur la décision concernant le montant de la contribution versée aux fonds de pension. En deuxième lieu, le choix de n imposer à la sortie que la part de la rente représentative du capital versé avantage : les titulaires de hauts revenus parce que leur taux marginal d imposition est largement supérieur au taux de taxation des revenus financiers des fonds de pension (11 %), les adhérents qui cotisent pendant longtemps aux fonds de pension parce que la part des revenus financiers durant la phase d accumulation contribuant au montant de la rente est élevée. e) Les deux catégories de fonds de pension. En 1993, la loi organisant la prévoyance complémentaire a créé deux catégories de fonds de pension : Les fonds de pension agréés contractuels («Fondi pensione negoziali») sont mis en place à l initiative des partenaires sociaux (syndicats et organisations patronales) ou d organisations à but non lucratif, sur la base d un accord collectif concernant une entreprise, un secteur d activité (chimie, industries métallurgiques, etc.), une région ou un groupe professionnel (dentistes par exemple). Ces fonds sont obligatoirement à cotisations définies. Ils sont dirigés par un conseil d administration composé de représentants des partenaires sociaux élus par les participants aux fonds. Ce conseil d administration a plusieurs fonctions : il analyse les besoins des membres du fonds, choisit la structure du fond adaptée et le profil de risque (l allocation stratégique des actifs, le benchmark, le type de gestion financière, active ou passive, les limites quantitatives des différentes catégories d actifs dans le portefeuille). Il sélectionne, par appel d offres, des gestionnaires financiers externes chargés de réaliser les investissements financiers et un ou plusieurs dépositaires. Les gestionnaires financiers réalisent l allocation tactique et sélectionnent les actifs supports des investissements financiers. Le conseil d administration coordonne également les opérations de contrôle et de suivi de l activité des gestionnaires financiers. Les fonds de pension contractuels sont alimentés par des contributions des employeurs et des travailleurs fixées par l accord collectif et par une fraction du T.F.R. Pour les assurés, l adhésion à un fonds de pension contractuel est facultative. Lorsqu ils adhèrent, ils sont soumis à trois obligations : rejoindre le fonds de pension contractuel de leur branche, secteur d activité ou aire géographique et ne pas en sortir avant trois ans pour rejoindre un fonds ouvert, respecter l accord collectif en matière de taux minimal de cotisation et de taux de transfert des contributions T.F.R., sortir en capital dans la limite maximum de 50 % de l épargne accumulée. Les fonds de pension ouverts («Fondi pensione aperti») sont créés par les différentes institutions financières (banques, gestionnaires financiers, compagnies d assurance) qui proposent des produits d épar- 9

gne retraite à leurs clients dont l adhésion n est pas dictée par la relation de travail. Les souscripteurs à un fond ouvert peuvent être les actifs n ayant pas accès à un fonds fermé contractuel, les non salariés ou les entreprises qui désirent mettre en place un dispositif de retraite supplémentaire pour une partie de leurs salariés sans passer par un accord collectif. Les deux catégories de fonds de pension sont supervisées par plusieurs types d organismes selon leur champ d activité, la C.O.V.I.P. ( Commissione di Vigilanza sui Fondi Pensione ) étant la principale institution de contrôle. Pour le législateur et les partenaires sociaux, les fonds de pension contractuels étaient appelés à former le cœur du deuxième étage du système de retraite italien. Leur développement n a toutefois pas répondu aux attentes puisque leur place demeure encore modeste au sein du système de retraite italien. f) La baisse programmée des taux de remplacement bruts des régimes de base. L enjeu de la généralisation de la prévoyance complémentaire est résumé dans les deux tableaux suivants qui simulent, pour des carrières types, l évolution des taux de remplacement bruts et nets du dernier salaire par la pension pour des liquidations réalisées entre 2000 et 2050. Les réformes de 1995 et 1997 du système public de retraite ont conduit à l adoption de régimes à cotisations définies fonctionnant selon la technique des comptes notionnels dans lesquels le montant de la pension dépend étroitement de la durée de carrière, de l âge à la liquidation de la pension et de l espérance de vie après le départ en retraite. Taux de remplacement bruts théoriques des salariés du secteur privé dans les régimes publics obligatoires de base. Année de liquidation 2000 2010 2020 2030 2040 2050 Liquidation à 60 ans : - 35 années de cotisation 67,3 % 67,1 % 56,0 % 49,6 % 48,5 % 48,1 % - 40 années de cotisation 76,9 % 76,7 % 66,2 % 58,6 % 54,8 % 54,3 % Liquidation à 65 ans : - 35 années de cotisation 67,3 % 67,1 % 62,2 % 57,8 % 56,7 % 56,1 % - 40 années de cotisation 76,9 % 76,7 % 72,4 % 66,8 % 64,0 % 63,4 % Taux de remplacement brut du dernier salaire. Hypothèses : taux de croissance du salaire individuel de 2 % par an en termes réels. Taux de croissance du P.I.B. de 1,5 %. Source : Rapporto di strategia nazionale sulle pensioni 2002. Appendice statistica. 10

Taux de remplacement bruts et nets théoriques des salariés du secteur privé (régimes publics obligatoires + prévoyance complémentaire). Année de liquidation 2000 2010 2020 2030 2040 2050 Durée de cotisation (années) : - régime de base 35 35 35 35 35 35 - prévoyance complémentaire 0 10 20 30 35 35 Taux de remplacement brut 67,3 % 71,8 % 65,4 % 64,1 % 65,2 % 64,8 % - régime de base 67,3 % 67,1 % 56,0 % 49,6 % 48,5 % 48,1 % - prévoyance complémentaire 0 % 4,7 % 9,4 % 14,5 % 16,7 % 16,7 % Taux de remplacement net 78,4 % 83,2 % 76,4 % 75,5 % 76,3 % 75,9 % Part de la prévoyance complémentaire dans le montant 0 % 6,5 % 14,4 % 22,6 % 25,6 % 25,8 % de la pension : Taux de remplacement brut du dernier salaire. Hypothèses : 35 années de cotisation, liquidation à 60 ans, taux de croissance du salaire individuel de 2 % par an en termes réels. Taux de croissance du P.I.B. de 1,5 %. Taux de cotisation à la prévoyance complémentaire : 9,25 % dont 6,91 % de transfert de T.F.R. Source : Rapporto di strategia nazionale sulle pensioni 2002. Appendice statistica. Les réformes ont prévu une longue phase de transition dont les effets sur les taux de remplacement sont fonction de l âge d entrée en activité et donc de la génération. La diminution des taux de remplacement bruts ne sera sensible qu après 2010 : elle affectera les générations qui avaient validé moins de 18 années d assurance en 1995 et tous les nouveaux entrants sur le marché du travail depuis 1995, ce qui correspond aux générations nées après 1955. Le rôle de la prévoyance complémentaire est de progressivement compenser la chute des taux de remplacement offerts par les régimes de base, l objectif étant de stabiliser le taux de remplacement brut global (base + complémentaire) autour de 65 % et le taux de remplacement global, net de prélèvements fiscaux et sociaux, autour de 75 %, pour une durée de carrière de 35 années et une liquidation à 60 ans. À terme, la prévoyance complémentaire devrait fournir 25 % du montant total de la pension pour un assuré ayant cotisé durant toute sa carrière à un fonds de pension. L adhésion à la prévoyance complémentaire devrait donc concerner en priorité les jeunes générations dans l hypothèse où elles anticipent correctement la diminution future des taux de remplacement dans les régimes publics de base. 11

2. L extension de la prévoyance complémentaire aux salariés du secteur public. L accord cadre signé par les partenaires sociaux en juillet 1999 et les décrets publiés en 2000 et 2001 ont concrétisé l extension de la prévoyance complémentaire aux salariés du secteur public. Les autorités italiennes ont toutefois adopté, à cette occasion, un schéma particulièrement complexe pour l organisation de la prévoyance complémentaire du secteur public, en particulier au niveau des circuits de financement. Ces choix s expliquent pour une grande part en raison de deux «virtuelle» parce qu elle ne donne pas lieu à un préfinancement effectif des droits acquis durant leur vie active par ceux qui adhèrent à la prévoyance complémentaire. C est donc une organisation paradoxale pour un deuxième étage fonctionnant normalement en capitalisation : un passif est créé par inscription de droits dans les comptes des adhérents sans contrepartie financière à l actif. Ce n est qu au moment de la liquidation que l employeur public devra débourser les sommes nécessaires au financement des droits acquis. Une dette publique est en conséquence temporairement accumulée, correspondant aux engagements au titre des droits acquis, dont le financement est reporté vers les générations futures. contraintes : La différence de nature à l origine entre le T.F.R. et le T.F.S. : le premier est de l épargne salariale alors que le deuxième est une prestation sociale d employeur. Il est apparu impossible de transformer instantanément le T.F.S. en T.F.R. et de contraindre l ensemble des salariés du secteur public à une adhésion obligatoire à la prévoyance complémentaire. Une telle option aurait pu remettre en cause la politique salariale du secteur public et son coût pour les finances publiques, Le traitement fiscal de ces deux indemnités dont l harmonisation aurait pu entraîner, soit une augmentation du coût du T.F.S. pour l employeur public, soit une diminution du T.F.S. liquidé net d impôts. Par ailleurs, le gouvernement italien a cherché à minimiser le coût budgétaire immédiat de l introduction de la prévoyance complémentaire : une partie du financement est a) Les principales dispositions de l extension de la prévoyance complémentaire. La première étape a consisté à autoriser la transformation du T.F.S. en T.F.R. pour les salariés du secteur public en distinguant deux catégories de population : à partir du 1/1/2001, les nouveaux embauchés dans le secteur public n ont plus accès au T.F.S. mais bénéficient du T.F.R. dans les mêmes conditions que les salariés du secteur privé (taux de cotisation de 6,91 % et formule de revalorisation du capital accumulé), les salariés en activité avant le 1/1/2001 ont la possibilité de choisir entre conserver le T.F.S. ou renoncer au T.F.S. et bénéficier du T.F.R. Ceux qui optent pour le T.F.R. adhèrent automatiquement à la prévoyance complémentaire. 12

Pour les salariés en activité, c est le principe de l option entre T.F.S. et T.F.R. qui a été retenu et l adhésion à la prévoyance complémentaire est conditionnée au choix préalable du T.F.R. Les salariés du secteur public seront en conséquence partagés en plusieurs sous-populations selon trois critères : ils étaient ou non en activité dans le secteur public avant le 1/1/2001, ils optent ou non pour le T.F.R., ils adhèrent ou non à la prévoyance complémentaire. b) Le financement de la prévoyance complémentaire. Dans le secteur public, la solution retenue pour le financement de la prévoyance complémentaire est une construction complexe car les autorités ont été amenées à introduire un financement partiel virtuel de droits à la retraite, c est-à-dire une inscription de droits sur les comptes individuels des assurés sans contrepartie sous la forme d une accumulation d épargne investie sur les marchés financiers. Cette complexité trouve en partie son origine dans le fait que les employeurs publics auront à organiser trois circuits de financement : le T.F.S. pour les salariés qui conservent l ancien dispositif d indemnités de fin de service, le T.F.R. pour les nouveaux embauchés et pour les salariés qui ont opté pour ce dispositif, l abondement aux fonds de pension pour les salariés qui ont opté pour le T.F.R. et pour la prévoyance complémentaire. Les assiettes et les taux de cotisation de ces trois dispositifs sont en effet différents ainsi que les modalités de comptabilisation et de revalorisation des droits accumulés par les bénéficiaires. Les principales dispositions retenues sont les suivantes : le T.F.S. demeure une prestation sociale d employeur financée en répartition à un taux de cotisation inchangé, 9,6 % pour l État et 6,1 % pour les collectivités locales. Les cotisations sont effectivement versées à l I.N.P.D.A.P. qui gère la «caisse du T.F.S.». Les modalités de calcul et de liquidation du T.F.S. sont inchangées, Le T.F.R. est financé par une cotisation «fictive» ou «virtuelle» au taux employeur de 6,91 % : les droits sont inscrits dans les comptes des bénéficiaires mais aucun flux financier effectif n est versé par l employeur. L I.N.P.D.A.P. est chargée de la gestion des cotisations «virtuelles» du T.F.R. des salariés du secteur public, La prévoyance complémentaire distingue deux populations : - Pour les nouveaux embauchés depuis le 1/1/2001 adhérant à la prévoyance complémentaire, la totalité de la cotisation virtuelle au T.F.R. (au taux de 6,91 %) est affectée à la constitution de droits au titre de la prévoyance complémentaire, - Pour les salariés en activité avant le 1/1/2001, la contribution à la prévoyance complémentaire se compose de trois éléments : une cotisation de 2 % effectivement versée à un fonds de pension dédié dont la part employeur est financée par une dotation budgétaire inscrite dans la loi de Finances, une quote-part de la cotisation au T.F.R. plafonnée à 2 points, une 13

cotisation «virtuelle» de 1,5 points 6. Les droits acquis par cette cotisation «virtuelle» ainsi que les droits acquis au titre de la quote-part du T.F.R. seront réévalués chaque année à un taux égal au rendement moyen d un échantillon de fonds de pension contractuels. L I.N.P.D.A.P. est chargée de la gestion des contributions «virtuelles». Un salarié en activité avant le 1/1/2001 optant pour le T.F.R. et adhérant à la prévoyance complémentaire accumulera trois types de droits à la retraite en plus de ceux versés par le régime de base : Le T.F.S. accumulé jusqu à la date d exercice de l option, La quote-part du T.F.R. non affectée à la prévoyance complémentaire, accumulée depuis la date d exercice de l option, La prévoyance complémentaire dont l accumulation de droits se fait au taux maximum de 5,5 points (cotisation effective de 2 points, quote-part du T.F.R. plafonnée à 2 points plus la cotisation virtuelle de 1,5 points). Trois formules seront utilisées pour revaloriser les droits accumulés : le T.F.S. et le T.F.R. non affecté à la prévoyance complémentaire selon la législation en vigueur avant la réforme, la quote-part du T.F.R. affectée à la prévoyance complémentaire et la cotisation «virtuelle» de 1,5 points selon le rendement moyen d un échantillon de fonds de pension, les deux points de cotisation effectivement versés à un fonds de pension dédié selon le rendement résultant de la gestion financière du portefeuille de ce fonds. La taux d imposition et les assiettes imposables s appliquant aux trois types de prestations liquidées, T.F.S., T.F.R. et prévoyance complémentaire, ne sont pas identiques. L I.N.P.D.A.P. est chargé de la gestion des deux cotisations virtuelles : celle finançant le T.F.R. et la cotisation «virtuelle» de 1,5 points abondant la prévoyance complémentaire, soit une contribution comprise entre 6,91 points de cotisation et 8,41 points selon l ancienneté du salarié. Contributions à la prévoyance complémentaire pour les salariés du secteur public. Nouveaux embauchés depuis le 1/1/2001 Salariés en activité déjà en activité avant le 1/1/2001 Cotisation effective 2 % 2 % - Employeur 1 % 1 % - Salarié 1 % 1 % Quote-part T.F.R. 6,91 % 2 % Cotisation virtuelle 1,5 % TOTAL 8,91 % 5,5 % Les assiettes auxquelles s appliquent les différents taux de cotisation ne sont pas identiques. 14 6 Les salariés optant pour la prévoyance complémentaire sont exonérés du versement de la cotisation salarié au T.F.S. égale à 2,5 points sans que leur salaire net soit ajusté. C est pour compenser cette suppression que la cotisation «virtuelle» de 1,5 points a été mise en place, sachant que les salariés cotisent effectivement à la prévoyance complémentaire au taux de 1 %.

4. Remarques de conclusion. À présent que toutes les catégories d actifs ont accès à la prévoyance complémentaire, l Italie devrait rapidement se trouver face à un choix concernant les «jeunes» générations d actifs : faudra-t-il rendre obligatoire l adhésion au deuxième étage, au moins pour le motif d offrir un taux de remplacement global satisfaisant quand elles partiront à la retraite après 2020? Le choix initial a été d autoriser différents types de véhicules pour constituer une épargne retraite : soit par une voie contractuelle collective, essentiellement pour les salariés, avec les fonds de pension agréés, soit par une démarche individuelle avec les fonds de pension ouverts. La neutralité du traitement fiscal des différentes formes d épargne retraite a été obtenue par les dispositions adoptées en 2000, permettant a priori de détacher l adhésion à la prévoyance complémentaire de la relation de travail. Toutefois, cet acquis n est pas suffisant pour inciter le plus grand nombre à adhérer bien qu un avantage subsiste en faveur des salariés avec le transfert du T.F.R. et l abondement additionnel de l employeur, avantage accru pour les foyers fiscaux dont le taux marginal d imposition est élevé. Plusieurs obstacles demeurent pour que se généralise la prévoyance complémentaire. Le niveau des taux de cotisation dans les régimes publics de base laisse peu de marges pour rendre spontanément l effort d épargne suffisant et les contraintes budgétaires de l État interdisent d accroître les incitations fiscales. Les nombreux débats sur les avantages et les inconvénients du transfert d une quote-part du T.F.R. soulignent ces contraintes. Le succès de la prévoyance complémentaire facultative repose alors sur une modification rapide des comportements et sur la capacité des fonds de pension, d une part, à réaliser des performances financières qui compensent la faiblesse initiale des contributions et, d autre part, à minimiser les risques supportés par les épargnants. Il est peu probable que soient réunies rapidement les conditions de ce succès. Il se posera alors aux autorités italiennes la question de la place du deuxième étage sous la forme de deux options déjà proposées : soit réduire la place des régimes de base pour accroître le potentiel contributif en faveur de l épargne retraite, soit rendre obligatoire l adhésion à la prévoyance complémentaire dans sa configuration actuelle avec un transfert de la totalité des contributions alimentant les dispositifs T.F.R. et T.F.S. Aucune de ces deux options n est immédiatement praticable. En effet, les réformes de 1992 et 1995 du système de retraite n ont changé qu à la marge les conditions d acquisition et de liquidation des droits à la retraite des assurés ayant validé 18 années d assurance en 1995. Cela signifie que ces assurés, qui vont liquider leur retraite jusqu en 2015/2020, ne sont pas incités à modifier leurs comportements et pourraient s opposer à une adhésion obligatoire au deuxième étage. L accord adopté dans le secteur public confirme ce «blocage» puisque la liberté de choix a été laissée aux salariés d adhérer ou non à la prévoyance complémentaire. De plus, les modalités de financement «virtuel» d engagements relatifs à l épargne retraite est une méthode très critiquable car elle revient à créer une dette publique que devront rembourser les générations futures. 15

L expérience italienne n est pas isolée au niveau européen mais elle illustre les conflits d objectifs et les contraintes d ajouter un étage supplémentaire au système de retraite. Les objectifs intergénérationnels sont normalement l argument prédominant pour offrir un produit d épargne retraite lorsqu est programmée une diminution des taux de remplacement des régimes de retraite obligatoires. Ils s opposent cependant aux comportements et aux arbitrages des individus quand il s agit de prendre des décisions les engageant à très long terme. Par ailleurs, les incitations fiscales ne sont pas ciblées sur les générations qui devraient constituer une épargne retraite. Il en résulte que le développement de la prévoyance complémentaire facultative est lent et n atteint pas les objectifs qui lui sont fixés. Bibliographie La previdenza complementare per il pubblico impiego : il rapporto tra T.F.R. e fondi pensione. Francesco Vallacqua, mimeo 2002. Pension Forum, Université Bocconi. Rapporto di strategia nazionale sulle pensioni, 2002. Ministère des Affaires Sociales. Rapporto sulla previdenza complementare. 2002. I.N.P.D.A.P. Consiglio di indirizzo e vigilanza. Rapporto sulla previdenza complementare. 2002. Pension Forum, Université Bocconi. Rapporto annuale sullo stato sociale. 2002. I.N.P.D.A.P. Il T.F.R. : una coperta troppo streta. O. Castellino, E. Fornero. CeRP, Argomenti di Discussione, 1/2000. Alcune considerazioni sui provvedimenti recenti e sul dibattito in corso in tema di previdenza complementare. L. Forni. CeRP, Argomenti di Discussione, 3/2003. 16