L'APTITUDE ANAEROBIE INTRODUCTION TERMINOLOGIE ET CONCEPTS TESTS ET MESURES Approche respiratoire... 6

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1 L'APTITUDE ANAEROBIE Le 15 Février 1999 {Troisième Colloque International de la Guadeloupe ; 15, 16, 17 Décembre 1994} {L'entraînement, sa planification, ses contrôles. Luc LEGER} INTRODUCTION TERMINOLOGIE ET CONCEPTS TESTS ET MESURES Approche biochimique Approche respiratoire Approche fonctionnelle et biomécanique LES EPREUVES GENERALISEES DE LABORATOIRE Epreuves sur tapis roulant Tapis roulant horizontal Fargeas et al. (1992) (PL) Tapis roulant incliné Test de poussée sur barre dynamométrique Dal Monte et Leonardi (1977) (PA) Cunningham et al. (1969) (EL) Epreuves sur ergocycle (jambes) Puissance à durée et résistance imposée Charge vitesse (PA) Aptitude différentielle aérobie-anaérobie (PA) Québec 10-s (PA) Simoneau et al. (1983) Wingate 30 - s (PA PL) Test de 1 min (PA, PL et EL) Québec 90-s (PA et PL) Durée à puissance imposée De Bruyn-Prévost (1975 et 1980) et De Bruyn-Prévost et Sturbois (1984) (EL)...14

2 3.3. Sauts verticaux Bosco 60-s ; Bosco, Luthanen et Komi, 1983 ; Bosco et al., 1983 (PA et PL) Escaliers et plan incliné Escalier de Margaria et al. (1966) (PA) EPREUVES LOCALISEES DE LABORATOIRE EPREUVES GENERALISEES DE TERRAIN EPREUVES LOCALISEES DE TERRAIN DEVELOPPEMENT DE L'APTITUDE ANAEROBIE...17 CONCLUSION

3 INTRODUCTION L'objet de cet exposé est de présenter une mise à jour critique des épreuves d'exercice visant à déterminer les aptitudes anaérobies. Après avoir introduit le concept et la terminologie propre à chacune des aptitudes anaérobies, les différentes méthodes utilisées pour les déterminer sont analysées en abordant respectivement les approches biochimique, respiratoire et performance. Cet exposé tire, en grande partie, son inspiration d'autres synthèses sur le sujet (Cazorla et al., 1984 ; Bouchard et al., 1991 ; Green & Dawson, 1993 ; Nadeau, 1985 ; Sale, 1991; Vandewalle et al., 1987). 1. TERMINOLOGIE ET CONCEPTS L'aptitude anaérobie est cette aptitude de l'organisme à produire de l'énergie par les voies anaérobies afin de réaliser un travail physique. Tout comme l'aptitude aérobie, l'aptitude anaérobie compte trois composantes : Puissance anaérobie. Endurance anaérobie. Rendement anaérobie La puissance anaérobie est la vitesse avec laquelle l'énergie peut être métabolisée en anaérobiose. L'endurance est la durée pendant laquelle un exercice peut être maintenu à un certain pourcentage de la puissance anaérobie maximale, elle dépend de la quantité d'énergie anaérobie en réserve dans l'organisme. Enfin, le rendement est cette quantité qui permet d'accomplir plus de travail pour une même quantité d'énergie. Par analogie avec une voiture automobile, la puissance correspond à la grosseur ou cylindrée du moteur, l'endurance à celle du réservoir de carburant et le rendement à la consommation carburant par kilomètre parcouru. L'aptitude anaérobie est aussi définie par opposition à l'aptitude aérobie. En effet, tel que l'indique son préfixe privatif, il s'agit de la fourniture d'énergie sans apport d'oxygène. Cependant, il faut savoir que cela peut se faire par deux voies énergétiques afférentes : la glycolyse anaérobie dont le produit final est le lactate (LA), d'où l'expression aptitude anaérobie "lactique", et les réserves de phosphorylcréatine (PC) et d'adénosine triphosphate (ATP) laquelle est le combustible utilisé directement par le muscle lors de la contraction musculaire. Comme les réserves de PC et d'atp sont immédiatement disponibles dans le muscle, leur utilisation préférentielle n'entraîne pas de formation de LA d'où l'expression aptitude anaérobie "alactique". Conceptuellement du moins, on peut donc distinguer six composantes de l'aptitude anaérobie : les puissances, endurances et rendements lactiques et alactiques (voir tableau suivant). D'un point de vue terminologique, précisons que les expressions "endurance" et "résistance" sont parfois réservées (Bouchard et al., 1973), pour désigner respectivement ce que nous avons présenté comme étant les endurances aérobie et anaérobie. La littérature anglo-saxonne, quant à elle, privilégie les expressions "anaerobic endurance" ou "muscular endurance" pour désigner ce que nous avons introduit sous l'expression "endurance anaérobie". Le terme "muscular" indique que les facteurs limitants sont davantage localisés au niveau musculaire que ce n'est le cas pour l'endurance aérobie ou cardio-vasculaire ("aerobic endurance" ou "cardiovascular 3

4 endutrance"). Pour certains (Bouchard et al, 1973) le terme "musculaire" fait référence à des exercices localisés à de petits groupes musculaires et, lorsque l'exercice implique plusieurs groupes musculaires ou de gros groupes musculaires, le terme "organique" est alors utilisé. Composante conceptuelle de l'aptitude anaérobie Aptitudes Anaérobies Alactique Lactique Puissance PA PL Endurance EA EL Rendement RA RL C'est ainsi que certains distinguent "résistance musculaire", "résistance organique", "endurance musculaire" et "endurance organique", ce qui, pour nous, correspond, respectivement, à "endurance anaérobie localisée", "endurance anaérobie généralisée", "endurance aérobie localisée", et "endurance aérobie généralisée" (Tableau 2). Endurance : équivalences terminologiques Endurance aérobie localisée générative Endurance aerobic endurance Cardio-vascular endurance Endurance anaérobie Résistance Anaerobic endurance Muscular endurance localisée musculaire généralisée organique 2. TESTS ET MESURES Les aptitudes anaérobies peuvent être déterminées au moyen d'approches variées : biochimique, respiratoire, 4

5 fonctionnelle et biomécanique. Approches méthodologiques utilisées pour déterminer les aptitudes anaérobies 1. Approche biochimique (enzymes et métabolites) EA PC et ATP (biopsies musculaires ou résonance magnétique nucléaire) PA CPK et AK (biopsies musculaires) EL Lactate (biopsies musculaires ou sanguines) PL PFK (biopsies musculaires) 2. Approche respiratoire EA Dette d'02 (composante alactique) EL Dette d'02 (composante lactique) EA + EL Déficit O 2 3. Approche fonctionnelle et biomécanique EA ou EL Durée à intensité imposée PA & PL Puissance à durée 2.1. Approche biochimique S'il est relativement aisé de mesurer la puissance et le rendement des processus énergétiques aérobies par la mesure directe de la consommation d'oxygène, il en est autrement pour les aptitudes anaérobies. Bien sûr, le lactate produit est bien le reflet de l'énergie produite par la glycolyse anaérobie, mais le hic, c'est que le lactate mesuré, que ce soit dans le muscle ou dans le sang est à la fois le reflet du lactate produit et du lactate réutilisé, ce qui n'empêche pas certaines personnes d'utiliser ces valeurs de lactate comme indice de l'endurance anaérobie lactique (EL). C'est un fait que les athlètes bien entraînés dans les disciplines faisant appel à EL ont des valeurs très élevées de lactate après des exercices EL ou même après une épreuve triangulaire de VO 2 max. C'est ainsi que les athlètes, bien entraînés en endurance anaérobie lactique peuvent atteindre des concentrations de lactate sanguin près de 20 mm. Le hic encore une fois, c'est que certains de ces athlètes, tout aussi bien entraînés, ne dépassent guère les 10 mm. Les mesures de lactate ne constituent donc qu'un indice grossier de l'endurance anaérobie lactique ; elles sont surtout utiles dans le cadre d'un suivi intra-individuel, et même là on ne sait pas si les changements observés à l'entraînement sont le résultat d'une plus grande production ou d'une plus grande réutilisation du lactate produit. Pour ces mêmes raisons, les mesures de la vitesse avec laquelle le lactate s'accumule ne sont guère plus utiles pour témoigner de la puissance et du rendement anaérobies lactiques (PL et RL). Pour déterminer la puissance anaérobie lactique, on peut en principe mesurer l'activité enzymatique des enzymes clefs de la glycolyse anaérobie, particulièrement de la phosphofructokinase (PFK). Cela se fait à partir de biopsies musculaires dans le cadre d'études expérimentales, où il s'agit de comparer différents 5

6 groupes expérimentaux, mais cela est éthiquement moins acceptable dans le cadre du suivi individuel et régulier de l'athlète. De plus, une biopsie n'est qu'un échantillon pas toujours représentatif du groupe musculaire concerné. Qui plus est, il s'agira toujours que d'un estimé d'un seul groupe musculaire à moins de prélever des biopsies de tous les groupes musculaires impliqués dans une activité sportive donnée. En pratique, l'approche biochimique apparaît donc peu adaptée, pour déterminer la puissance anaérobie lactique. Pour l'aptitude anaérobie alactique, les concentrations musculaires de repos de PC et d'atp témoignent de leur réserve et donc de l'endurance d'un individu pour des exercices faisant surtout appel à cette voie énergétique. Une biopsie musculaire est nécessaire à la détermination des concentrations de PC et l'atp. Autre inconvénient, les molécules de PC et d'atp se dégradent très rapidement et il faut congeler la biopsie très rapidement ce qui n'est pas toujours évident à la lumière des concentrations rapportées dans la littérature. Ce type de méthode convient plus à la recherche qu'au suivi de l'athlète. Il en est ainsi de la mesure des enzymes CPK et AK comme témoins de la puissance alactique, qui requiert aussi une biopsie musculaire. Depuis quelques années, on a aussi recours à la résonance magnétique nucléaire (RMN) pour mesurer; "in vivo" cette fois, les concentrations d'atp et PC dans le muscle. Grâce à cette technique non invasive on peut même suivre l'évolution des concentrations d'atp et PC au cours d'un exercice musculaire. En théorie idéale pour le suivi de l'athlète, cette approche est actuellement peu pratique. D'abord, le coût d'achat et d'utilisation de l'appareil en limite l'accès au milieu hospitalier et à la recherche ; ensuite des impératifs de normalisation méthodologique ne permettent actuellement que la mesure de petits groupes musculaires en contraction statique. Fort prometteuse, cette technique est pour l'instant peu utile au suivi de l'athlète Approche respiratoire Lors d'un exercice rectangulaire (intensité constante), même s'il est sous-maximal, la consommation d'oxygène prend un certain temps avant d'atteindre un état stable et d'assurer ainsi 100% de l'énergie requise pour effectuer cet exercice. Pourtant l'énergie requise était nécessaire dès le début de l'exercice. Il y a donc eu un déficit qui fut temporairement comblé en faisant appel aux voies énergétiques alactiques et lactiques. Lorsque l'exercice est supramaximal (énergie requise supérieure à VO 2 max), le déficit se maintient pour toute la durée de l'exercice. Quoiqu'il en soit, à la fin de l'exercice, même si l'individu cesse toute activité, même si l'énergie requise redescend au niveau de repos, la consommation d'oxygène, elle, prend un certain temps avant de revenir au niveau du repos. En fait, elle redescend d'abord rapidement, puis ensuite très lentement. Il s'agit en quelque sorte des phases alactique et lactique (Margaria et al., 1933 et 1963) de la dette d'oxygène dues au déficit initial. Certains ont donc utilisé les composantes rapide et lente de la courbe de récupération d'o 2 lors d'exercices maximaux ou supramaximaux pour déterminer les endurances anaérobies alactique et lactique, respectivement (Margaria et al., 1963). Mais la dette d'o 2 n'est pas égale au déficit d'o 2 créé en début d'exercice. En effet, lors du déficit, une certaine quantité d'énergie est libérée par la dégradation de PC et d'atp et par la conversion du pyruvate en lactate, même si cette énergie n'est pas égale à l'énergie nécessaire 6

7 (dette d'o 2 ) pour refaire les réserves de PC et d'atp ou pour éliminer le lactate accumulé. De plus, une partie de la dette d'o 2 sert à maintenir actif les muscles respiratoires et celui du cœur et reflète aussi une élévation de la température corporelle, phénomènes qui n'ont rien à voir avec l'énergie anaérobie dépensée lors du déficit initial. En fait, comme le métabolisme basal s'est élevé lors de l'exercice pour assurer la thermorégulation corporelle, la courbe de d'o 2 en récupération prend beaucoup de temps pour revenir au niveau de repos. Ceci a pour effet de surestimer la mesure obtenue en plus de rendre difficile et subjective la détermination de la fin de la dette d'oxygène (Grahan & Andrew, 1973). Enfin, il s'est avéré que la dette d'o 2 était très mal corrélée à la performance en course à pied sur 100 m (r = 0,01) et sur 3 km (r = 0,31). (Catch et Henry, 1972). C'est en raison de ces problèmes conceptuels et méthodologiques (Harris, 1969 ; Brooks et al., 1971 ; Stainsby & Bareclay, 1970) qu'on a cessé d'utiliser la dette d'o 2 comme témoin des aptitudes anaérobies. D'autre part, la mesure du déficit d'o 2 pour déterminer la somme des endurances alactique et lactique revient à la mode. En effet, ce concept utilisé antérieurement (Crog et Linduard, 1920 ; Szögÿ et Cherebetiu, 1974) prend actuellement un nouvel essor (Medbo et al., 1988 ; Medbo et Tabata, 1989 ; Bangsbo et al., 1993). La méthode se résume à quelques points. On établit d'abord une courbe étalon individuelle VO 2 - intensité pour des exercices sous-maximaux d'une durée suffisamment longue pour assurer l'atteinte d'un état stable. Cette courbe permettra d'établir l'énergie requise des exercices rectangulaires supramaximaux amenant l'épuisement entre 2 et 4 min. Selon Medbo et al. (1988), cette gamme de durée d'exercices semble optimale en ce sens que le déficit est maximal et constant. Cela est d'ailleurs confirmé par Gastin et al. (1995). Il est donc inutile de faire des exercices plus longs. D'autre part, le déficit cumulé pour des exercices amenant l'épuisement en moins de 2 min est inférieur à celui obtenu avec des exercices de 2 à 4 min. Gastin et al. (1995) ont aussi démontré que le déficit cumulé était semblable lors d'exercices maximaux alors que l'intensité régresse avec l'apparition de fatigue que lors d'exercices rectangulaires épuisant de 2 à 4 min. L'avantage des exercices régressifs plutôt que constants, c'est qu'on peut aussi déterminer la puissance alactique de crête et la courbe de résistance à la fatigue en plus du déficit d'o 2. En calculant le déficit à partir de l'énergie requise en aérobiose, on présume évidemment que le rendement mécanique en anaérobiose est semblable ce qui n'est pas certain. Que déficit d'o 2 calculé représente l'énergie dépensé en anaérobiose est toutefois plus ou moins important en autant qu'il soit cependant proportionnel et corrélé à celle-ci. Bien que cela n'ait été démontré, cela semble toutefois logique. Notons que certains (Szögÿ et Cherebetiu, 1974) mesurent le déficit lors d'épreuves indirectes. Evidemment, il n'est pas nécessaire de mesurer le VO 2, mais par contre, la valeur attribuée ne tient pas compte du rendement mécanique. D'autre part, cela permet d'obtenir un estimé du déficit (Y, L min -1 ) à partir de la seule puissance d'exercice (X, W) atteinte en 1 minute : Y = -152,7 + 11,23X 7

8 Ce qui apparaît plus important c'est de s'assurer de normaliser la méthode puisqu'il semble que le déficit accumulé soit proportionnel à la masse musculaire active (type d'ergomètre utilisé) et au protocole d'exercice utilisé (Medbo et Tabata, 1989 et Bangsbo, Michalsik & Petersen (1993). D'autre part, si Szögÿ et Cherebetiu (1974) ont démontré que le déficit calculé était plus important dans les disciplines sportives reconnues pour leur forte dépendance sur la filière anaérobie, d'autres tels Bangsbo, Michalsik et Petersen (1993) n'ont pu établir de telles différences entre différents groupes d'athlètes. De plus, ils n'ont pu établir de bonnes corrélations entre le déficit cumulé et les lactates maximaux et la capacité tampon du muscle. Cela est aussi conforme aux données de Scott et al. (1991) qui n'ont pas pu obtenir de bonnes corrélations entre le déficit d'o 2 et la performance de course sur 400 et 600 m. Cela jette de sérieux doutes sur cette méthode (Bangsbo, 1992) pourtant fort acceptée auprès des entraîneurs et chercheurs (Gastin et al., 1995) Approche fonctionnelle et biomécanique Vu la difficulté de mesurer les aptitudes anaérobies par les approches biochimique et respiratoire, les spécialistes se sont tournés vers la mesure des performances physiques et biomécaniques reconnues pour dépendre fortement des filières énergétiques anaérobies. La cinétique des différentes sources énergétiques (figure 1) nous indique que les puissances anaérobies alactique et lactique sont sollicitées au maximum pour des exercices amenant l'épuisement entre 10 et 20 s et entre 30 et 120 s, respectivement (figure 2). Si la contribution est maximale pour ces durées d'exercice, ceuxci ne dépendent pas pour autant exclusivement de leur filière énergétique principale comme en témoigne d'ailleurs le chevauchement des différentes filières énergétiques (figure 1). Représentation schématique de la contribution des différentes sources d'énergie en fonction du temps 8

9 Figure % VO 2 max Energie en ml.o 2.kg -1.min 100% 50% 0 Energie instantanée 0,1 1 min 0,1 Phosphagénolyse Anaérobiose Aérobiose 92% VO 2 max 1 min 10 min 100% 50% Energie en ml.o 2.kg -1.min Energie instantanée Après l'épuisement des réserves d'atp, puis de PC, la dégradation du glycogène en lactate (glycolyse) intervient jusqu'à que les mécanismes oxydatifs ou aérobies puissent entrer action. Application pour un individu ayant un VO 2 max de 50 ml.kg -1.min -1 travaillant à deux intensités différentes : 1 min à 140% VO 2 max et 15 min à 92% VO 2 max. Figure 2. 9

10 I. RESERVE ATP PC LACTATE O 2 II. VITESSE, km/h ATP-PC LACTATE O III. DUREE A VITESSE MAXIMALE ATP-PC s LACTATE s O min Endurance, puissance maximale, durée des exercices à puissance maximale pour chacune des filières énergétiques à la course à pieds, par exemple. Il devient évident que la performance physique d'un exercice épuisant de 15 s ne dépend pas exclusivement de la filière alactique, mais des autres filières aussi, tant anaérobie lactique qu'aérobie. La motivation du sujet ainsi que l'apprentissage d'une tâche aussi courte, surtout si elle est complexe et inhabituelle, affectent aussi la mesure obtenue. Enfin, en ce qui concerne la puissance alactique, il n'est pas dit que le facteur limitant soit d'ordre métabolique. En effet, il est possible que ce soit les propriétés contractiles et neuromusculaires qui limitent la vitesse d'utilisation de PC et d'atp plutôt que les enzymes CPK et AK. Ce qu'il faut retenir de tout ça, c'est qu'avec les épreuves de terrain, on ne mesure pas exclusivement ou spécifiquement telle ou telle aptitude anaérobie. La marge d'erreur de ces tests dépend de la contribution des autres facteurs limitants autres que les filières lactique et alactique. Par exemple, dans un test de 1 min à puissance maximale, réputé pour dépendre de la filière lactique, l'idée que l'on se fait de l'aptitude lactique pourra être surestimée si l'on teste un individu motivé, ayant des aptitudes anaérobie alactique et aérobie supérieures à la moyenne. Facteurs limitants introduisant un biais dans l'évaluation des différentes aptitudes anaérobies au moyen d'épreuves de performance 1. Motivation 10

11 2. Aptitude aérobie 3. Chevauchement de la mobilisation des filières alactique 4. Chevauchement des systèmes métabolique et neuromusculaire 5. Apprentissage, surtout pour les tâches complexes 6. Insuffisance de normalisation dans la tâche à exécuter 3. LES EPREUVES GENERALISEES DE LABORATOIRE Les épreuves généralisées de laboratoire peuvent aussi être classées selon l'ergomètre utilisé ou la nature de la tâche Epreuves sur tapis roulant Tapis roulant horizontal Fargeas et al. (1992) (PL) Accélération maximale de 6-10 s sur tapis roulant GYMROL non motorisé (sauf pour l'inertie de friction). En plus de la vitesse instantanée, la force de traction et les déplacements verticaux du C.G sont mesurés et permettent de calculer la puissance mécanique développée. Le test s'est avéré fidèle chez des enfants et des, valeurs normatives sont disponibles pour des enfants sportifs Tapis roulant incliné Test de poussée sur barre dynamométrique Dal Monte et Leonardi (1977) (PA) Le test consiste à pousser sur une barre dynamométrique alors que le tapis est à 10% de pente et à 1.5 m s -1. Le test mesure le travail total en 10 ou 20 s, lequel est la sommation du travail vertical (élévation du corps) et du travail contre la barre dynamométrique. Cette approche particulière n'a trouvé que très peu d'adeptes. Il semble que la mesure de la force de traction sur une barre dynamométrique ait eu plus de succès (Fargeas et al., 1992) Cunningham et al. (1969) (EL) Durée maximale à 20% de pente et 13 km/h -1 (8 mph). La durée du test varie entre 50 et 92 s. La fidélité de l'épreuve varie entre 0.76 et 0.91 et des normes sont disponibles pour des athlètes adultes pour un nombre restreint de disciplines (Bouchard et al., 1991). 11

12 3.2. Epreuves sur ergocycle (jambes) Puissance à durée et résistance imposée Tel qu'habituellement calculée, la puissance développée sur ergocycle à friction est souvent sous-estimée puisqu'elle ne prend pas en compte l'accélération de la roue d'inertie (Lakomy, 1986), problème qui est techniquement possible de résoudre (Fouquet et al., 1993). Sans toutefois aller aussi loin, d'autres (Friemet et al., 1989) ont aussi conçu un système automatisé permettant de rendre immédiatement compte de divers résultats de puissance pour les tests force-vitesse, Wingate alactique et lactique Charge vitesse (PA) Pirnay et Crielard (1979) ; Sargeant et al. (1981) ; Vandewalle (1986) Accélération maximale sur quelques secondes à différentes résistances avec repos suffisant entre chacune afin de déterminer la courbe charge-vitesse, la puissance maximale sur la courbe chargevitesse, la force maximale extrapolée à vitesse nulle et la vitesse maximale extrapolée à résistance nulle. Ce test permet aussi de déterminer la résistance optimale mettant en évidence le produit force-vitesse le plus élevé, résistance qui par la suite peut être utilisée pour réaliser les autres tests de puissance lactique tel que le Wingate Aptitude différentielle aérobie-anaérobie (PA) Brue et al., 1985 et 1988 Ce test d'aptitude différentielle est particulier en ce sens qu'il exprime l'aptitude PA du test chargevitesse en rapport avec l'aptitude aérobie (ou vice-versa). Comme le même ergomètre (ERGOMECA) est utilisé pour les deux tests, des rapports de puissance développée peuvent être calculés. Un tel rapport permet de bien discriminer les athlètes appartenant à différentes disciplines reconnues pour dépendre de filières énergétiques différentes. De plus, un indice combiné permet aussi de voir la sommation des sources énergétiques aérobie et anaérobie. Un test similaire d'aptitude différentielle aérobie-anaérobie fut élaboré pour les enfants (Blimkie et al., 1985) Québec 10-s (PA) Simoneau et al. (1983) Après un départ lancé à 80 rpm et 0 kp de résistance, la résistance est rapidement fixée à 0.09 kp par kg de poids mais ajustée par la suite pour que le sujet puisse maintenir des vitesses très élevées de 10 à 16m -1 ( rpm). Une cellule photoélectrique mesure la vitesse à chaque tiers de la roue d'inertie d'un ergocycle Monark et un potentiomètre enregistre la force de sorte que la puissance instantanée et cumulative peut être calculée de seconde en seconde. La fidélité du test fut établie à 0.98 et des données 12

13 normatives du travail cumulé sur 10 s, de la puissance de crête et de la fatigue sont disponibles pour différentes disciplines athlétiques (femmes et hommes adultes) (Voir Bouchard et al., 1991 et Serresse et al., 1989) Wingate 30 - s (PA PL) Ayalon, Inbar et Bar-Or (1974) Sans doute l'épreuve la plus utilisée à travers le monde, cette épreuve de 30 s à exercice maximal régressif se déroule à une résistance de 45 g par kg de poids sur un ergocycle Fleisch ou approximativement de 75 g par kg de poids sur ergocycle Monark. Pour les bras, les valeurs respectives sont de 30 et 50 g/kg. La fidélité du test varie de 0.90 à 0.98 d'une étude à l'autre tant pour PA que pour PL. De nombreuses valeurs normatives sont disponibles (Bouchard et al., 1991). La résistance de 45 g/kg par Ayalon et al. (1974) était la puissance moyenne optimale pour développer la plus grande puissance sur 30 s. Sur une base individuelle cependant, certains (Dotan et Bar-Or, 1983 ; Smith et Stokes, 1985 ; Evans et Quinney, 1981) préfèrent établir cette résistance en fonction d'autres paramètres que le poids (ex : volume de la cuisse). En fait, la résistance optimale est en général plus élevée pour les individus capables de développer des puissances élevées. Bien sûr le gabarit d'une personne est un facteur déterminant mais ce paramètre ne tient pas compte de l'aptitude de l'individu. Or, la méthode de Vandewalle (1986) permet de trouver la résistance optimale pour développer la PA la plus élevée possible prend en compte et le gabarit et l'aptitude du sujet. Certains (Brue, 1988) ont vite utilisé cette résistance pour mesurer la PL lors du test de 30 s de Wingate Test de 1 min (PA, PL et EL) Szögÿ et Cherebetiu (1974) Exercice maximal régressif de 1 minute sur ergocycle à freinage mécanique à résistance (R, kp) imposée selon le poids (P, kp) du sujet (R = 2,25 + 0,0333 P). Les révolutions sont comptées et la puissance calculée toutes les 5 s. La puissance moyenne sur 1 min est corrélée avec la mesure directe du déficit d'o 2 (r = 0,97). Le déficit d'o 2 peut donc être prédit à partir de PL (voir. équation 1). Des valeurs normatives sont disponibles pour plusieurs disciplines sportives (adultes) Québec 90-s (PA et PL) Simoneau et al. (1983) Le but du test est de développer la plus grande puissance en 90 s tout en ajustant la résistance pour maintenir la vitesse entre 10 et 16 m s -1 ( rpm) ce qui correspond à environ 0,05 kp par kg de poids corporel au début du test. Le test se fait sur un départ lancé à 80 rpm. En plus de la puissance maximale alactique (puissance de crête sur 5 s) et de la puissance lactique (puissance moyenne sur 90 s), un indice de fatigue (baisse de puissance de 30 s en 30 s) peut être calculé. 13

14 La fidélité s'établit à 0,99 pour la puissance lactique et des normes sont disponibles pour diverses populations athlétiques du Québec (Bouchard et al., 1991) Durée à puissance imposée De Bruyn-Prévost (1975 et 1980) et De Bruyn-Prévost et Sturbois (1984) (EL) La tâche à réaliser consiste à maintenir le plus longtemps possible une puissance de 400 W (hommes, 126 rpm à 3,2 kp) ou de 350 W (femmes, 106 rpm à 3,3 kp). Le temps requis pour atteindre la vitesse angulaire imposée est retranchée de la durée totale du test. Le test fut conçu avec de jeunes adultes actifs et la puissance imposée est trop élevée pour les jeunes enfants et les personnes âgées. Pour les athlètes, cette même puissance imposée peut être trop facile et l'aptitude aérobie peut influencer le résultat du test. Quelques données normatives pour populations adultes actives, mais non athlétiques sont disponibles pour ce test (Bouchard et al., 1991 ; De Bruyn-Prévost, 1975 et 1980 ; Heyters et Poortmans, 1977). Pour ce type de population, la durée du test aux puissances imposées varie autour de s Sauts verticaux Bosco 60-s ; Bosco, Luthanen et Komi, 1983 ; Bosco et al., 1983 (PA et PL) Le but de ce test est de sauter le plus haut possible pendant une minute en faisant des flexions de 90 aux genoux et en laissant les mains aux hanches. Un tapis électronique enregistre le nombre de sauts ainsi que le temps d'envol, le temps de contact étant obtenu par soustraction du temps total de 15, 30 ou 60 s afin de mesurer les puissances maximales alactique et lactique, respectivement. La puissance (P, W) est calculée à partir du temps en vol (Tv, s), du temps total du test (Tt, s) et du temps de contact au sol (Tc, s), du nombre de sauts (n) et de l'accélération due à la gravité (g = 9.81 m s -2 ) : P = (g 2 TvTt) / (4 n Tc) La fidélité du test est de 0,95. C'est un test qui apparaît plus spécifique que l'ergocycle pour de nombreuses disciplines sportives Plate-forme de force (PA PL) L'utilisation de la plate-forme de force permet de calculer une foule de paramètres aussi spécifiques les uns que les autres. Il serait trop long de les présenter dans le cadre de cet exposé. On retiendra cependant que la plate-forme de force a bel et bien sa place à côté des autres méthodes de laboratoire pour déterminer les puissances alactiques et lactiques (Duboy et al., 1994 ; Komi et Bosco, 1978). 14

15 3.4. Escaliers et plan incliné Escalier de Margaria et al. (1966) (PA) Dans sa version originale, avec un élan de 2 m le sujet doit monter le plus vite possible un escalier domestique (marches de 17,5 cm) deux marches à la fois. Des cellules photoélectriques ou tapis électroniques placés sur la 8 ème et la 12 ème marche permettent de déterminer au 0,01 s près la durée (T, s) de l'élévation de la masse corporelle (M, kg) correspondant à la hauteur entre la 8 ème et la 12 ème marches (H, m). La puissance (P, W) est alors calculée: P = (M x 9,8 x D) / T Le test est fidèle (r = 0.85). Kalamen (cité par Mathews et Fox, 1976) propose un élan de 6 m avec mesure du temps entre la 3 ème et la 9 ème marche, ce qui résulte en des puissances légèrement supérieures. Des normes sont disponibles pour les deux versions (Bouchard et al., 1991 ; Di Prampero et al., 1970 ; Komi et al., 1977 ; Mathews et Fox, 1991). Caiozzo et Kyle (1970), quant à eux, ont introduit une version du test alors que le sujet monte l'escalier avec ou sans surcharge de poids. Quant à eux, Nadeau et al. (1986) ont modifié le test d'escalier en demandant aux sujets de monter un plan incliné de pente semblable. Ceci présente l'avantage de diminuer les possibilités de trébuchage et facilite le transfert de l'élan horizontal sur pente. 4. EPREUVES LOCALISEES DE LABORATOIRE La gamme des épreuves localisées est étendue (Tableau 5). Signalons seulement que pour les mesures isocinétiques qu'il existe une dizaine d'appareils sur le marché, chacun ayant ses caractéristiques et avantages propres. Ceux-ci sont analysés en détail par Sale (1991) et par Malone (1988). Tableau 5. Epreuves localisées de laboratoire CONTRACTION DYNAMIQUE Isocinétique et hydraulique PA PL Cybex, Kin-Com, Arel, Biodex, Lido Merac, Hydragym, Berenice Anisocinétique PA PL Ergocycle pour les bras EA EL Appareils de musculation et haltères (Nautilus, Berenice, David...) CONTRACTION STATIQUE EA EL 15

16 Force de préhension Jauge de force Dynamométrie de Clarke 5. EPREUVES GENERALISEES DE TERRAIN Les épreuves anaérobies de terrain sont nombreuses et peuvent être regroupées selon le type d'activités (tableau 6). Tableau 6 : Epreuves généralisées de terrain COURSE Accélération sur piste balisée PL (0.5 km h -1 par min) Mercier 1988 (non publiée) Navette 30 m (30 s) Van Praagh 1990 PL PL Sprints lancés (400, m) PL ou PA SAUT VERTICAL Extension PA Flexion extension PA Saut de Sargent et de Lewis (Mathews et Fox, 1976) PA Pliométrie Komi et Bosco (1978) Cometti et al. 6. EPREUVES LOCALISEES DE TERRAIN Les épreuves localisées de terrain ne sont pas habituellement mentionnées lorsqu'on aborde la question de l'aptitude anaérobie. Pourtant, elles dépendent des mêmes facteurs limitants sur le plan bioénergétique. Elles sont cependant si nombreuses qu'il est difficile de les détailler. Mentionnons les principales catégories (tableau 7). Soulignons que la fidélité de ces épreuves est en général supérieure à 0,8 plutôt autour de 0,90 à 0,95. Les valeurs les plus basses sont associées aux tâches complexes ou encore aux tests statiques plutôt qu'aux tests dynamiques. Pour les redressements assis (sit-ups), la tendance est aux demi-redressements afin d'alléger le stress lombaire et de diminuer le rôle du psoas-iliaque tout en mettant davantage l'accent sur les abdominaux. DYNAMIQUE Pompes, redressements assis, "chin-ups" - Durée imposée (30 ou 60 s) PL 16

17 - Rythme imposé ou libre (15 à 120 s) EL STATIQUE Suspension à la barre (15 à 120 s) EL 7. DEVELOPPEMENT DE L'APTITUDE ANAEROBIE En ce qui concerne le volet développement, le cadre de cet exposé ne permet que de donner les lignes directrices (Figure 3). Ces lignes sont tout simplement déduites de la cinétique des différentes sources énergétiques (Figures 1 et 2) ainsi que des données de la littérature sur la réponse VO 2 et lactate lors de différentes formes d'entraînement intermittente (Ferretti, 1987 ; Freminet et Mottaz, 1988 ; Péronnet et Ferguson, Péronnet et Ferguson, 1977 ; Rieu, 1987 ; Rieu, 1978). CONCLUSION L'aptitude anaérobie comporte plusieurs composantes, lesquelles peuvent être déterminées au moyen d'une gamme de tests fort variée et étendue. Ces tests n'ont pas tous la même valeur, non seulement sur les plans validité et fidélité, mais aussi sur le plan spécificité. Cela est d'autant plus important que les aptitudes anaérobies sont principalement limitées par des adaptations périphériques. Il importe donc de choisir des tests qui tout en étant assez spécifiques, valides et fidèles, présentent aussi une certaine acceptation universelle afin de pouvoir faire les comparaisons qui s'imposent. La présence de données normatives rigoureuse pour différents niveaux athlétiques, hommes et femmes, d'âge varié et ce, dans différentes disciplines sportives est un atout indéniable. 17

18 Figure 3 : Entraînement intermittent et voies énergétiques sollicitées* RATIO DE LA DURÉE DES INTERVALLES D'EFFORT ET DE REPOS 15/1 5/1 2/1 1/1 1/2 1/5 1/15 Faible Elevée INTENSITE Durée Reps s 150/10 50/10 20/10 10/10 10/20 10/50 10/150 3 al al aa al aa aa aa aa Elevée Elevée 10 a al al a al al aa aa al aa al aa 20 a al al a al al aa aa al aa al aa Faible 300/20 100/20 40/20 20/20 20/40 20/100 20/300 3 a al al a al aa aa aa aa Elevée 10 a a al al al aa aa al aa al aa 20 a a al al a al aa aa al aa al aa al Faible 450/30 150/30 60/30 30/30 30/60 30/150 30/450 3 a al a al al aa aa al aa al aa al Elevée 10 a a al al a al a al aa al aa al aa 20 a a a al al a al aa al aa al aa Faible min 15/1 5/1 2/1 1/1 1/2 1/5 1/15 3 a a al al a al al aa al aa al aa Elevée 10 a a a al al a al aa al aa al aa 20 a a a a al al aa al aa al aa Faible Faible * Approximation pour une séance d'entraînement difficile constituée d'une seule série d'effort 18