S INFORMER en 1914 et en 2014

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1 Journal gratuit - Édition spéciale En supplément Nos 3 fiches zoom Un bon titre Identifier la ligne éditoriale De la difficile interprétation des chiffres Dans ce numéro : S INFORMER en 1914 et en 2014 Intro-quizz : les canaux d information Édito : La Presse en Et en 2014? 1. Une à Une, 100 ans d écart 1.1. L image avant la couleur 1.2. Dis-moi comment tu t organises, je te dirai qui tu es 1.3. La publicité 1.4. C est combien? Un journal de moins en moins cher 1.5. Des nouvelles fraîches Les éditions quotidiennes 1.6. Ni pour, ni contre? Bien au contraire, en Les sources d information 1.8. Une page plus si blanche 1.9. Plus de médias, moins de papier 2. Quoi? Qui? Où? 2.1. Les journaux et leurs lecteurs : Diversification des publics et des contenus 2.2. La structure économique 2.3. La localisation 3. Le choc de la guerre et la presse SHOCK! 1914 Et si la guerre commençait demain? Le 4 août 1914, l armée allemande envahit la Belgique. Pour la population belge, protégée par un statut de neutralité depuis 1839, c est le choc. Les Archives de l'état en Belgique, le CEGESOMA et la Bibliothèque royale de Belgique reconstituent les semaines chaotiques de l été et l automne Le visiteur pourra revivre ces événements traumatiques jour après jour à travers les communiqués officiels, la presse écrite et des témoignages personnels. LE DOSSIER PÉDAGOGIQUE DE LA RÉDACTION

2 Intro-quizz Les canaux d in Aujourd hui, nous disposons de multiples moyens d information pour nous tenir au courant de l actualité : presse papier, presse en ligne, revues, radio, télévision, sites d info, réseaux sociaux, etc. Nous pouvons aussi compléter notre information par des contacts téléphoniques, mails, postaux, vidéos, sms, en envoyant ou recevant des photos, etc. Une conversation directe reste également un vecteur d information non négligeable! Les Nouvelles de la guerre (coll. KBR, S IV 5307) «La ville bruisse de rumeurs au cours de ces premiers jours d août. Les banques sont assaillies par leurs clients, ainsi que les magasins vendant des denrées alimentaires. On se prépare à une période où la ville sera encerclée ; on craint le pire.» Marie-Elisabeth Belpaire, Anvers, 1914 En 1914, à l aube de la guerre, de quels moyens disposait la population belge pour s informer de l actualité et se tenir au courant de l évolution d événements qui allaient la concerner directement? Voici des documents d époque témoignant des moyens par lesquels étaient informés les Belges d il y a 100 ans. Pourrez-vous en identifier 8? Pourquoi Pas? (Coll. KBR) «Quelle journée. Dimanche jour ultimatum allemand expirant ce matin à sept heures : la Belgique livrera passage ou je lui déclare la guerre. La Belgique a répondu : M Panique; à 11 heures, on disait les Allemands à Landen. Nous décidons de rentrer à Bruxelles : plus de téléphone, de télégraphe, d auto, de chauffeur, de pain» Georges Terlinden, Bruxelles, le 3 août 1914 Réponses : Journaux /Presse périodique/ Affiches, proclamations, avis / Courrier postal / Rumeurs /Actualités ciné / Téléphone / Télégraphe

3 formation Edito La Presse en Et en 2014? En 1914, la presse écrite belge se trouve au sommet d un âge d or entamé au début des années Même si la première retransmission a eu lieu en 1914 depuis le château de Laeken, la radio en est encore à ses balbutiements. La télévision et internet n existent pas encore. Il y a bien des «actualités ciné» diffusées dans les quelques salles existantes mais cela reste très peu répandu. La presse écrite occupe donc presque à elle seule le paysage médiatique. Elle a un quasi monopole sur l information de masse. Une centaine de quotidiens sont alors publiés dans le pays ainsi qu un millier d autres publications périodiques, généralistes ou spécialisées. En quoi cette presse quotidienne est-elle différente ou semblable à celle d aujourd hui? C est ce que nous allons envisager dans les pages suivantes. Carte postale (coll. AGR, WWI 339) Cette comparaison se veut une mise en perspective de l information actuelle, une autre façon de l interroger. Nous vous proposons donc régulièrement des questions que nous ont évoquées les différents éléments envisagés ici. Nous avons choisi de ne pas y apporter de réponse mais de vous laisser le soin d en débattre en classe, en famille, etc. Selon les réactions, nous pourrions envisager ultérieurement de fournir des documents permettant d enrichir la réflexion sur ces questions. Carte postale (Coll. KBR)

4 Une à Une, 100 ans d écart Voici la Une du journal Le Bien Public du 29 juin Munissez-vous d un journal actuel et comparons-les. Quelles sont les différences et/ou similitudes qui vous sautent aux yeux à première vue? Affinez l analyse en considérant différents éléments constitutifs de la Une puis allez encore plus dans le détail en parcourant le texte. Fondé à Gand en 1853, Le Bien Public était un journal quotidien catholique, conservateur et patriotique qui s'opposait au gouvernement libéral et anticlérical. Guillaume Verspeyen, entré au journal en 1860, en fera un des principaux organes de presse du pays. Pendant la Première Guerre mondiale, le journal est condamné et supprimé, son caractère francophone et belgicain ne cadrant pas avec la Flamenpolitiek mise en place par les Allemands. Réapparu en 1918, Le Bien Public cessa définitivement de paraître à partir de Le Bien Public, (Coll. KBR, JB 432) Dis-moi comm schéma tiré du «Manuel de journalisme» Au niveau de la structure de la page, on retrouve dans les deux cas le titre du journal en haut, assorti d informations de part et d autre. La structuration est par contre fort différente pour le reste de la page. Voici un schéma d organisation de Une actuelle. Comme c est le cas de notre exemplaire du Bien Public, la majorité des journaux de 1914 sont structurés en colonnes. Notons que les évolutions techniques dans le domaine de la mise en page permettent déjà d étaler un «gros titre» sur plusieurs colonnes, ce qui permet de rythmer la mise en page et d attirer l attention du public sur certaines informations. Traditionnellement, à l époque, la zone «noble» de la Une se situe en haut à gauche et est réservée non pas aux faits mais aux idées. On la nomme «la

5 L image avant Première constatation générale en observant les deux Unes : une grande différence dans la place accordée à l image et l utilisation de la couleur. Une Une actuelle ne se conçoit pas sans image(s) en couleurs (sauf exceptions jouant justement sur la surprise provoquée par leur absence). Même si on ne la retrouve pas dans cette Une, l image est déjà bien présente dans la presse quotidienne en 1914, à travers des dessins mais aussi des photos. En Belgique, La Dernière Heure, créée en 1906, s en est fait une spécialité, consacrant notamment tous les mardis une page entière à l illustration. la couleur innove en étant le premier quotidien belge à publier une Une en quadrichromie* sur ses toutes nouvelles rotatives offset. Il faut cependant attendre 1986 pour qu apparaissent les premières photos en quadrichromie*, d abord dans Het Laatste Nieuws, vite suivi par La Dernière Heure puis les autres quotidiens. À quelques rares exceptions près, le journal reste cependant en noir et blanc jusque dans les années Ce sont les évolutions des techniques d impression qui vont permettre d y intégrer la couleur, très progressivement. Ses portes d entrée seront la bande-dessinée et la publicité (qui trouve toujours les idées et les moyens pour attirer l attention). Elle reste longtemps monochrome*. En 1970, Het Belang van Limburg Publicité en couleur monochrome, La Libre Belgique, (Coll. KBR, JB 427) La Dernière Heure, (Coll. KBR, JB 835) Question Cette place prépondérante de l image dans les médias actuels, quelle influence a-t-elle sur notre perception de l information? *Monochrome : qui est d'une seule couleur / * Quadrichromie: procédé de reproduction des couleurs basé sur la séparation des couleurs fondamentales plus le noir. ent tu t organises, je te dirai qui tu es chandelle». C est la place de l éditorial dans les feuilles politiques, de la chronique dans les organes dits d information. Les nouvelles arrivent plus bas et/ou à droite. Les journaux d aujourd hui s organisent en «rubriques». Les articles sont «rangés» ensemble selon le type de sujets qu ils traitent. Belgique, international, société, régional, économie, beauté, jeux, sport, peps, culture Leurs noms et leurs importances relatives varient en fonction de la ligne éditoriale du journal (voir notre fiche spéciale : Définir la ligne éditoriale d un journal). Journal de Bruxelles, (Coll. KBR, JB 567)

6 Publicité Il y a très probablement une ou plusieurs publicité(s) sur la Une actuelle que vous avez choisie. Si elle n apparaît pas ici en Une, la publicité est déjà bien présente dans les journaux de Aussi appelée réclame ou annonce, son développement va de pair avec la massification et la démocratisation de l information. Elle est indispensable pour le financement des journaux de l époque. Ainsi, l Annuaire de la presse belge de se présente entre autres dans son introduction comme un «indicateur de la publicité, principal aliment de nos journaux». Elle coute ainsi de 1 à 7 francs 50 la ligne dans Le Petit Bleu. Le tarif est plus élevé dans les parties «Echo de la Ville» ou les faits divers que dans le carnet de la ménagère. Aujourd hui, la publicité reste une source essentielle de rentrées financières pour la presse quotidienne. Elle dépasse les rentrées liées à la vente pour tous les journaux, sauf pour Vers l Avenir côté francophone, la Gazet van Antwerpen, Het Laatse Nieuws et De Tijd côté néerlandophone. En 2010, il y a eu environ millions d euros d investissement publicitaires dans les quotidiens nationaux pour approximativement millions liés aux ventes. Le prix d une pleine page de pub (en couleurs) était cette année-là de dans Le Soir, dans la Dernière Heure et dans la Libre Belgique. Pour être complet, il faut mentionner que les gouvernements de la Communauté française et la Communauté flamande versent également des aides financières à la presse quotidienne. Question L importance vitale de la publicité dans les rentrées financières des médias a-t-elle une influence sur l information qu ils nous donnent? Le saviez-vous? À ses débuts, en 1887, le journal Le Soir était distribué gratuitement aux habitants des rez-de-chaussée de Bruxelles, son financement étant assuré par la publicité. Le Métro fonctionne aujourd hui un peu sur le même principe, de même que les sites d informations gratuits en ligne. De façon générale, une information coûte de l argent. Si vous y avez accès gratuitement, c est que quelqu un d autre la finance. Dans quel but? La question mérite d être posée avant de se plonger dans la lecture des articles.

7 Journal Le Bien Public 29 juin 1914 C est combien? Un journal de moins en moins cher Ce Bien Public coutait 10 centimes. C est beaucoup pour l époque. Le prix de la plupart des autres quotidiens belges s élevait plutôt à 5 centimes. Difficile évidemment de comparer avec les euros mais pour vous faire une idée, 1kg de café coutait alors 7,5 centimes, une brique de savon 0,7 et le pain probablement moins d 1 centime. Aujourd hui, les journaux payants coutent environ 1,5 (souvent plus le week-end), le pain s élevant à un prix relativement similaire. Analphabétisme Si l illettrisme a connu un net recul au XIX e siècle, il reste encore très élevé en On compte encore alors environ 25% d analphabètes en Belgique. En 1914 est adoptée une loi qui devrait notamment faire reculer ce fléau de l analphabétisme : l obligation scolaire pour tous les enfants de 6 à 14 ans. Notez qu aujourd hui, l illettrisme concernerait toujours près de 10% de la population belge. On évoque souvent la «fracture numérique» dans les facteurs d inégalités d accès à l information mais la barrière de l accès à l écrit reste encore un frein réel pour une partie importante de la population. Même si le journal coûte donc en 1914 relativement plus cher qu aujourd hui, son prix est alors nettement moins élevé qu au milieu du XIX e siècle. Les évolutions techniques dans la typographie et l impression, la baisse du prix du papier, la suppression du droit de timbre (en 1848) vont permettre de produire des journaux plus rapidement et à moindres frais. S ajoute à cela le développement des annonces publicitaires qui offre une nouvelle source de financement aux éditeurs. Le journal devenant financièrement plus abordable, il sera accessible à une plus grande partie de la population. Parallèlement, le recul de l analphabétisme, l extension du droit de vote 1 et l urbanisation font grimper le nombre de lecteurs potentiels des journaux. Il devient ainsi dès la fin du XIX e siècle un média «de masse». 1 Le suffrage universel tempéré par le vote plural est instauré en 1893 (certains électeurs ont droit à plusieurs voix). Le suffrage universel pur et simple est instauré en 1919 mais uniquement pour les hommes. Il faudra attendre 1948 pour que les femmes y aient accès également.

8 Des nouvelles fraîches Les éditions quotidiennes En haut à gauche de la Une, vous voyez que Le Bien Public paraissait deux fois par jour, une édition en matinée, une autre le soir, même le dimanche dans ce cas-ci. Cela se justifie dans un contexte où le téléphone et le télégraphe permettent d avoir rapidement des informations et où, la radio, la télévision et internet n existant pas, la presse écrite est le seul moyen d avoir des nouvelles «fraiches». Le lecteur sera susceptible d acheter les deux éditions du journal. avec cette tradition, en publiant sur son site une édition de 17h. Aujourd hui, s il y a toujours des éditions à des moments précis de la journée pour les journaux radio et télé, le fil de l actualité se déroule en continu sur internet. Les nouvelles fraîches sont mises en ligne et relayées presque instantanément. C est le règne du direct et de l instantané. Par la suite, l arrivée d autres médias permettant de transmettre plus rapidement l information amènera la presse quotidienne à se limiter à une édition par jour. Notons que Le Soir a renoué récemment Question Cette réduction du temps entre la réception de l information par le journaliste et sa transmission au public a-t-elle des conséquences sur la qualité de l information transmise? Le journaliste a-t-il réellement le temps de mettre en œuvre les démarches de base de son métier : vérifier, compléter, formuler, analyser? (Coll. KBR, S IV 5938) Le saviez-vous? C est la Sncb qui mettra un coup d arrêt aux éditions dominicales des journaux. En effet, à cette époque les hebdomadaires d information générale, destinés à la jeunesse ainsi que les hebdos féminins se sont fortement développés et rencontrent un grand succès. Leur temps de lecture, essentiellement le week-end, empiète sur celui qui était consacré à la presse quotidienne auparavant. Les ventes de journaux du week-end baissent dont fortement. Au point que la Sncb estimera qu il n est plus rentable de faire rouler des trains spéciaux pour la distribution des journaux du dimanche.

9 Ni pour, ni contre? Bien au contraire, en 1914 Sous le titre du Bien Public de 1914, la bannière en latin affirme explicitement l appartenance idéologique du journal. Nous avons affaire à un quotidien de tendance catholique. En 1914, la presse est essentiellement constituée d organes d opinion, c est-à-dire engagés dans les combats politiques et électoraux de façon tout à fait assumée, et même revendiquée. Au début du XX e siècle, trois grandes familles politiques cohabitent dans la société belge : les libéraux, les catholiques et les socialistes. À chacune correspond un parti politique mais elles encadrent également leurs membres à travers un réseaux d organisations : syndicats, mutualités, mouvements de jeunesse, écoles, associations culturelles, sociales, etc. On parle à ce propos des «piliers» qui structurent la société belge. On peut faire partie d un pilier en partageant ses idées et en fréquentant les organisations qui y sont liées sans nécessairement être membre du parti qui y correspond (sauf pour le Parti Ouvrier Belge). À l intérieur d un pilier, il y a bien entendu des divergences de vues et des «subdivisions». Ainsi les catholiques se divisent par exemple entre conservateurs et démocrates chrétiens. Il en va de même pour les journaux : ils appartiennent à une «famille idéologique» sans nécessairement être commandés par un parti et les opinions qu ils défendent peuvent varier d un organe à l autre. Un grand quotidien cependant s affirme dès sa naissance, en 1887, comme étant un organe neutre, dédié uniquement à l information: Le Soir. Aujourd hui, à l inverse, la grande majorité des quotidiens (et des médias en général), se revendiquent organes d information, indépendants de toute influence politique. Pour aller plus loin Un texte de Henry Carton de Wiart en avant-propos de l Annuaire de la presse belge de exprime une opinion argumentée en faveur de la presse d opinion, «contre» la presse d information (Coll. KBR, I B 5)

10 Nous avons regroupé par tendance des quotidiens de Pourras-tu identifier la tendance qui correspond à chaque colonne? Catholiques : ils sont très présents dans les campagnes et les villes petites et moyennes et bénéficient du soutien du clergé. De 1884 à 1919, le Parti Catholique détient la majorité absolue au Parlement. dans l enseignement et défendent une politique économique qui favorise la liberté d entreprise, la concurrence et le libre-échange. Né en 1846, le parti libéral défend la laïcisation de l État et la liberté des cultes. Socialistes : ils réclament des lois protégeant les ouvriers et revendiquent le suffrage universel. Ils sont généralement anticléricaux, antimilitaristes et opposés à la monarchie. Créé en 1885, le Parti Ouvrier Belge (POB) en est l émanation politique. Libéraux : ils entendent limiter l influence de l Eglise dans la sphère politique et Vooruit Le Peuple L écho du Peuple Le Patriote Nieuws van den dag Het Volk De Gazet van Antwerpen Le Vingtième Siècle Le Bien Public Le Courrier de Bruxelles La Réforme Het Laatste Nieuws L Express L Avenir du Tournaisis Le Petit Bleu La Dernière Heure L Indépendance belge L Étoile belge Les sources d informations Première constatation : les articles de la Une ne sont pas signés. C est un phénomène courant dans les journaux de l époque. On retrouve cependant souvent une signature sous les éditoriaux et les chroniques, sans doute parce qu ils engagent plus personnellement leur auteur (auteurs qui acquièrent généralement un statut de leaders d opinion, comme c est toujours le cas actuellement d ailleurs). On remarque aussi très vite que plusieurs articles font référence à des papiers parus dans d autres journaux. Le Bien Public recevait très probablement les dépêches émanant d une des grandes agences de presse internationales : Havas (future Agence France presse), fondée en 1835, Associated Press, fondée en 1848 ou Reuter, fondée en Pas de Lorsque la guerre éclate, il est évidemment beaucoup plus compliqué de se procurer de l information, pour les journaux comme pour les citoyens : difficile d établir des liaisons téléphoniques ou télégraphiques. Extrait de Le Bien Public, , p. 3 (Coll. KBR, JB 432)

11 dépêches de l agence Belga par contre en 1914, celle-ci n étant active qu à partir de L invention et la diffusion du téléphone, le développement des liaisons télégraphiques sans fil, autour de 1900, ainsi que l apparition du téléscripteur, ou télex, qui transforme directement les signaux en morse en mots lisibles, facilitent la diffusion rapide des informations. On voit ici par exemple, en page 3, que l assassinat de l archiduc François-Ferdinand, qui a eu lieu le 28 juin à 11h, est déjà répercuté le jour-même à 18h30. Pour les informations liées à la politique intérieure, il y avait à la Chambre une «Tribune des journalistes» où ceux-ci pouvaient entendre et interroger les députés. Aujourd hui, le nom de l auteur se retrouve sous la grande majorité des articles (parfois seulement ses initiales, à vous de retrouver le nom complet dans le reste de l édition). Les articles non signés sont généralement des dépêches d agences de presse reprises telles quelles (c est le cas dans le Métro par exemple). Le phénomène de référence à des informations tirées d autres médias est encore très présent à l heure actuelle : la presse écrite informe sur les programmes télé et commente les «buzz» sur le net, le JT titre sur une interview «choc» parue dans un quotidien Dans le cas des attentats du 11 septembre, de nombreux médias «traditionnels» ont repris comme illustrations des photographies et des films pris par des amateurs et diffusés sur internet. Autre exemple: la revue de presse de l émission d information radio «Matin Première», traditionnellement consacrée à l épluchage des journaux papier, reprend désormais également les titres de la presse en ligne. Les journalistes interviennent également pour lire les tweets et commentaires d internautes. (Coll. KBR, S IV 7906) Question Qu apporte le recours aux commentaires du public sur les forums ou les réseaux sociaux en termes d information? (Coll. KBR, S IV 8970)

12 Une page plus si blanche En 1914, le Belge lisait son journal sur papier et rien que sur papier. Aujourd hui, c est toujours possible mais vous pouvez également le consulter sur ordinateur, tablette, smartphone, etc. Le saviez-vous? Le papier qui constitue les journaux mais aussi les livres du XIX e et de la première moitié du XX e siècle souffre d une maladie «mortelle» : l acidification. Sous l action des éléments qui le composent (lignine mais aussi chlore, colles, etc.), les chaines de cellulose qui constituent le papier se détruisent. Il jaunit, brunit et devient de plus en plus cassant jusqu à se décomposer au moindre contact. La numérisation des documents, si elle ne permet pas de sauver l original, (Coll. KBR, S IV 5685) le préserve en tout cas d une consultation fréquente et permet d en sauvegarder le contenu et l apparence. La Bibliothèque royale numérise un grand nombre de documents. Ainsi, il est par exemple possible de consulter près de 3,2 millions de pages d une septantaine de journaux belges des XIX e et XX e siècle sur ordinateur dans la salle de lecture des Journaux et Médias contemporains. Trois «chiffres» à ne pas confondre Tirage : nombre d exemplaires imprimés d un journal Diffusion : nombre d exemplaires effectivement vendus (diffusion payante) ou offerts (diffusion gratuite) Audience (ou lectorat) : nombre de personnes qui ont «lu ou feuilleté» (selon la formulation des enquêtes du CIM) la publication

13 Plus de médias, moins de papier Manchette de La Dernière Heure avec mention du tirage du journal, (Coll. KBR, JB 835) À combien d exemplaires s imprime Le Bien Public? Et combien en vendent les kiosques et les vendeurs de rue? Attention, ces deux chiffres sont à distinguer (voir encadré). Le Bien Public n indique pas son tirage mais certains autres titres le mentionnent en Une. Ainsi, en 1914, Le Patriote tire à exemplaires, Le Soir à , De Gazet van Antwerpen à et Le Peuple à Notez bien que ces chiffres sont invérifiables car fruits d estimations ou de déclarations d éditeurs. À titre de comparaison, la diffusion payante (papier et digitale) la plus élevée en Communauté française en 2012 était celle des quotidiens du groupe Sud Presse (voir tableau au point 2.2) et s élevait à exemplaires seulement. Celle du Soir était de exemplaires. En Belgique, c est le Centre d Informations sur les Médias (CIM), qui collecte et diffuse les chiffres relatifs à la diffusion et l audience des différents médias. L objectif est de fournir des «informations précises objectives et fiables nécessaires à l'objectivation et à l'optimisation des investissements publicitaires en Belgique». Jusqu au milieu des années 1970 environ, on observe une augmentation du tirage global de la presse écrite à travers le monde. Ensuite s amorce une diminution progressive, dans les dernières décennies du XX e siècle, qui s accélère au tournant du XXI e au point que les observateurs parlent généralement d une crise de la presse écrite, qui doit aujourd hui se réinventer. 2 tiré de : à partir des chiffres du CIM Évolution du paysage médiatique en Belgique de 1940 à Ces chiffres sont analysés dans la fiche "De la difficile interprétation des chiffres".

14 Quoi? Où? Qui? l Annuaire de la Presse belge, (Coll. KBR, I B 5)

15 Les journaux et leurs lecteurs: Diversification des publics et des contenus Quels types d informations trouve-t-on dans les journaux d avant 1914? Pour s en faire une idée, voici les présentations de L Indépendance Belge et du Petit Bleu parues dans l Annuaire de la presse belge de Destinées essentiellement aux annonceurs, ces présentations dévoilent la diversité des contenus que chacun entend apporter à son lectorat. Dans un contexte de massification du lectorat, s est développé un nouveau type de journaux et de contenus. On a déjà vu plus haut qu à côté des journaux d opinion apparaissait une presse d information. À côté des journaux dits «sérieux» apparait également une presse plus «populaire». Voici comment Emile Zola présentait la distinction entre ces deux types de presse: «En France, il n existe que deux moyens de réussir à lancer un journal: ou bien il faut renoncer à toute décence, inventer chaque jour un nouveau scandale, brûler la chandelle par les deux bouts; ou bien il faut être rigoureux ou guindé, prendre un air solennel, publier de longs articles assommants, accabler le lecteur d un ennui artistiquement distillé.» Sans être aussi «tranchés» que Zola, nous pouvons considérer que la presse dite «de qualité» se caractérise par une présentation austère, poursuivant la tradition livresque, qui limite le recours à l image, dessin ou photo, à l exception des plans et cartes. Elle s adresse à une «élite» lettrée, habituée à la pratique de l écrit et disposant du temps nécessaire à la réflexion et à l analyse. (Coll. KBR S IV 6168) Les quotidiens populaires vont, eux, recourir volontiers à l image. Leurs gros titres se veulent autant de coups de théâtre qui entendent susciter l émotion. Dans leurs pages, de nouveaux sujets apparaissent, en particulier les faits divers et les sports. Ces journaux vont susciter un certain mépris, qu ils assument. Ainsi, on retrouvera dans plusieurs titres l adjectif «petit»: Le Petit Bleu, Le Petit Populaire, Le Petit Journal de Bruxelles Quelques organes d opinion vont créer leur propre journal populaire afin de diffuser leurs idées vers le plus large public possible. Ainsi, Le Patriote, journal catholique, crée Le National et La Meuse, journal libéral, crée Le Petit Populaire.

16 Cette distinction entre presse «de qualité» et presse «populaire» subsiste toujours aujourd hui. Il ne s agit toutefois pas d étiquettes à apposer telles quelles mais plutôt des deux extrémités d un axe sur lequel on peut situer les journaux. Cette idée d axe peut être également utilisée pour situer les journaux par rapport à d autres critères de distinction. Ainsi, Les Médias à découvert propose ce schéma des différents axes sur lesquels se situent les journaux de la fin XIX e -début XX e siècle. On peut adapter ce schéma pour les journaux actuels en ne gardant que les deux axes les plus «actuels», ce qui permet de situer chaque journal comme un point sur ce graphique. National Général Sérieux National D information D opinion Populaire Sérieux Populaire Spécialisé Régional Régional (Coll. KBR, S IV 5298) (Coll. KBR S IV 5086)

17 La structure économique En 1914, une centaine de quotidiens différents sont publiés en Belgique. La plupart sont le produit d entreprises familiales, indépendantes les unes des autres. Aujourd hui, il n y a plus en Belgique qu une vingtaine de titres édités, répartis entre cinq groupes de presse différents. La presse écrite a connu à partir de l après Seconde Guerre mondiale, un phénomène de concentration, se caractérisant par de nombreux achats et fusions entre organes de presse. Dans le même temps, de nombreux journaux ont disparu, la presse écrite subissant de plein fouet la concurrence des nouveaux médias. Journaux et groupes de presse en Belgique en 2014 Groupe de presse Rossel IPM Tecteo Mediahuis Persgroep Titre Le Soir Sud Presse : La Meuse (Liège, Namur, Luxembourg) La Capitale (Bruxelles et Brabant wallon) La Nouvelle Gazette (Charleroi, Centre et Entre-Sambre et Meuse) La Province (Mons) Nord-Eclair (Mouscron, Tournai) Métro (49%) Médiafin (50%): L Echo-De Tijd La Libre Belgique La Dernière Heure L Avenir / Brabant wallon Basse Sambre Le Courrier Le Courrier de l Escaut Le Jour Verviers Huy Waremme Luxembourg Namur Entre-Sambre-et-Meuse De Standaard Het Nieuwsblad + De Gentenaar De Gazet van Antwerpen Het Belang van Limburg Metro (51%) Het Laatste Nieuws + De Nieuwe Gazet De Morgen Mediafin (50%): L Echo De Tijd

18 Localisation Il n est pas rare en 1914 d acheter deux ou trois journaux. Si on veut les nouvelles nationales et internationales, on se procurera plutôt un journal édité à Bruxelles. Pour savoir ce qui se passe près de chez soi, on achètera: - à Anvers, La Gazet van Antwerpen, Le Matin d Anvers, La Métropole, Le Handelsblad... ; - à Arlon, L Avenir du Luxembourg ; - à Bruges, Le Réveil des Flandres, Le Patriote, Le Journal de Bruges ; - à Charleroi, La Gazette de Charleroi, Le Journal de Charleroi ou encore Le Pays wallon ; - à Gand, Le Bien Public, le Vooruit, La Liberté, La Flandre libérale ou De Gentenaar ; - à Liège, La Gazette de Liège, L Express ou La Meuse ; - à Mons, La Province ou Le Hainaut ; - à Namur, L Ami de l Ordre, La Province ; - à Ostende, Le Carillon ; - à Tournai, L Avenir, Le Courrier de l Escaut ; - à Verviers, Le Courrier du Soir. (Coll. KBR, S IV 5333) Connaissez-vous le nom du seul journal belge germanophone? Il s agit du Grenz-Echo

19 Le choc de l invasion et la guerre Le 4 août, lorsque l armée allemande entre sur le sol belge, l onde de choc est immense pour la population qui vivait dans la certitude d être protégée par sa neutralité. D autres chocs suivront : massacres et destructions ponctuent l avancée des Allemands sur notre territoire, jetant sur les routes un million et demi de Belges, soit un cinquième de la population. Les journaux se font l écho de ces événements. Cependant, tout ne peut pas être dit ou écrit dans un contexte de Le chiffon de papier deviendra leur linceul! (Coll. KBR, S III 9132)

20 La censure. Le Soir, (Coll. KBR, J.B. 838) de lettres. Cela cache quelque chose de grave.» Le marchand de journaux prohibés. s.d. (Coll. privée) guerre. La presse acceptera, au nom de l intérêt national, de taire certaines informations (voir l extrait du Soir du 19 août). La population ressent difficilement le manque de nouvelles : «Toute la journée, les bruits les plus alarmants circulent plus ou moins contredits par les journaux: les Allemands en Belgique, Liège en feu, 4000 prisonniers allemands ; Anglais débarqués à Anvers. Mais les journaux mettent en garde contre les nouvelles et l emballement.» écrit Joséphine à Bruxelles, le 3 août. «Dans l après-midi, le Soir lance la nouvelle que les Allemands envahissent Bruxelles. Panique. Journal saisi. Nouvelle contredite.» écrit Georges Terlinden le 14 août. Ou encore, le 16 : «On a pris des mesures contre la presse. Les journaux ne paraissent plus qu une fois par jour et ne peuvent publier que ce qu on leur communique, c est-à-dire rien. Pendant trois jours, on ne remettra plus Au fur et à mesure de l invasion, les journaux disparaissent. Ainsi, à Bruxelles, dès le 20 août, jour d entrée des Allemands dans la Ville, plus aucun quotidien ne parait. Avec l installation dans l Occupation, des journaux recommencent à paraître, de diverses façons. En Belgique, ceux qui paraissent officiellement acceptent d être soumis à la censure allemande. Pour offrir une information non contrôlée, des citoyens vont écrire, imprimer et diffuser en secret un nouveau type de journaux : les clandestins. Le plus célèbre et le plus important d entre eux : La Libre Belgique, créée en février D autres journaux d avant-guerre décident de s expatrier et seront publiés à l étranger, dans des pays neutres ou alliés. Extrait de Le Pourquoi Pas? Pendant l'occupation la vie bruxelloise de 1914 à 1918 (Coll. KBR, B 457)

21 L exposition SHOCK!1914 vous propose de revivre ces premiers moments du conflit comme si vous y étiez, à travers les témoignages de citoyens liégeois, bruxellois, anversois, emportés dans la tourmente de la guerre. Vous y découvrirez également les journaux et affiches par lesquels ils étaient informés. Malheureusement, après 1914, de nombreux autres chocs ont agité le XX e siècle, eux aussi répercutés dans la population à travers les médias. Cependant, ceuxci connaissant de grandes évolutions à travers le siècle, la façon de répercuter et de vivre l événement se transforme. Retrouvez ces sensations à travers quatre chocs emblématiques du siècle dernier. Et aujourd hui, quels sont les médias qui nous informent? Quelle est la qualité de ce qu ils nous transmettent? Et si la guerre commençait demain? Bibliographie Annuaire de la presse belge, , Bruxelles, 1909 AGNES, Y., Manuel de Journalisme, Paris, 2002 BOURDOUX, M.-Cl., DIERICKX, L., DUMONT, J.-Fr., Journalistes & Médias, Bruxelles, 2011 D HOORE, M., La fin de l Âge d or. L élan de la presse belge se heurte aux portes de la Grande Guerre dans Les Journaux de guerre Une collection unique de quotidiens originaux de la Grande Guerre, n 1, Bruxelles, avril 2014, p.7 DE BENS, E., RAEYMAECKERS, K., De Pers in België. Het verhaal van de Belgische dagbladpers gisteren, vandaag en morgen, Louvain, 2010 De SCHAEPDRIJVER, S., La Belgique et la Première Guerre mondiale, Bruxelles, 2004 HASQUIN, H., Dictionnaire d Histoire de Belgique. Les hommes, les institutions, les faits, le Congo Belge et le Ruanda-Urundi, Namur, 2000 LEBACQ, Eg., SHOCK!1914 Et si la guerre commençait demain? Guide du visiteur, Bruxelles, 2014 THOVERON, G., DELEPELEIRE, M., OLYEF, M., Les Médias à découvert, Bruxelles, 1988 (éd. Vie Ouvrière)

22 Quelques liens (très) utiles Europeana Une interface unique mettant à la disposition du public la plus grande collection de documents relatifs à la Première Guerre mondiale grâce au travail conjoint de dix bibliothèques nationales et universitaires. Cartes postales, journaux intimes, affiches, films, photographies pour plonger au plus près de la réalité quotidienne de la Grande guerre : Le site du Ceges consacré à la presse de guerre. Textes informatifs et possibilité de consulter en ligne des journaux censurés et clandestins : : de nombreuses images pour découvrir la vie quotidienne à Bruxelles durant la Première Guerre mondiale Le site web dédié par la rtbf à la Première Guerre mondiale, avec de nombreux reportages et documents à l appui : Le site du Conseil supérieur de l éducation aux médias : Une infographie du Soir sur les groupes de presse actuels :

23 Identifier la ligne éditoriale De la difficile interprétation des chiffres Fiche zoom Un bon titre... Comme la Une est la vitrine du journal, le titre est celle de l article. S il est mauvais, peu de chance que le lecteur aille plus loin. D où l importance de le travailler avec soin. Il laisse le champ libre à la créativité mais dans le respect de 3 règles fondamentales. Un bon titre 1 est fidèle à l article Le titre dit au lecteur ce qu il va trouver dans l article. Il ne faut pas que celui-ci se sente trompé sur la marchandise après sa lecture. Le titre se doit donc de refléter l article sur le fond et sur la forme et d en donner directement le message essentiel. Selon le ton de l article, le titre sera informatif ou incitatif. Le titre informatif donne l information essentielle là où le titre incitatif donne le sens de l article en accordant plus d importance à l accroche du lecteur. Le choix de l un ou l autre sera lié notamment au type d article et au ton du journal. Quel est le message essentiel de l article? Dans un article présentant un fait d actualité, les éléments essentiels sont les réponses aux questions de référence (Qui? Quoi? Où? Quand? Comment?). Tous ne pourront pas être repris en titre cependant, il faudra choisir. Dans un article de synthèse, d enquête, d opinion, de reportage, etc. il faut repérer l idée centrale que le journaliste a choisi de développer. À quel type d article ai-je affaire? S il s agit d un article de pure information factuelle, le titre sera probablement informatif, répondant à certaines des questions de référence. Dans les éditos, les chroniques, les critiques, les articles des pages sportives, culturelles, magazine, société, etc. on trouvera probablement plus de jeux de mots ou de références. Enfin, en titre d une interview, il n est pas rare de reprendre des propos de l interviewé. Quelques erreurs à éviter : - Confondre contenant et contenu : «l assemblée des chauffeurs routiers» n est pas une information essentielle, il faut titrer sur le résultat de la réunion - Titrer avec une information secondaire ou même absente de l article - Sous-évaluer la portée de l article (rare) - Titrer avec une information surévaluée, trompeuse (plus courant, lié souvent à un emballement «commercial» de l auteur)

24 2 est court, direct et précis Tout l art est donc d exprimer l essentiel avec le moins de mots possible, mais les meilleurs. Quelques conseils : Utiliser des mots forts et précis, qui permettent d exprimer l idée de la façon la plus concise possible ; une faute classique est de se dire qu un titre un peu elliptique va intriguer le lecteur et lui donner envie de lire. Ex. : «L Ukraine appelle l Europe au secours» (Le Soir) ; «Service minimum, tension maximum» (Métro) Utiliser un vocabulaire simple et concret : éviter les mots difficiles ou creux, les sigles peu connus. Contre-exemple : «La CNIL et la cybersurveillance des salariés» (Le Monde). Il n est pas certain que tout le monde connaisse la CNIL. En règle générale, éviter les compléments, les adjectifs et les adverbes Chasser les redondances (deux mots qui disent la même chose) Préférer la forme active à la forme passive Préférer l affirmation à la négation Jouer avec la ponctuation : les «:» permettent notamment un gain de place non négligeable. Ex. : Wilmots : «J espère que le public respectera Defour» (La Dernière Heure) ; «Marianne Thyssen désignée députée européenne, un libéral héritera du 16» (La Dernière Heure) Enlever le verbe est autorisé Ex. : «De plus en plus de femmes au travail» (Le Soir) ; «Le retour des tramways» (La Nouvelle Gazette) ; «Le budget au menu de la semaine» (Métro) Jouer avec l image Ex. : «La rupture» (Le Soir). Court, lapidaire, mais incompréhensible seul. Par contre, le titre devient limpide placé sur une photo de François Hollande et Arnaud Montebourg. Utiliser les sur- et sous-titres : ils permettent de compléter le titre Ex. : dans Le Soir du Titre : «Préventive : le bracelet se porte bien»/ Sous-titre : «Les magistrats ont privilégié cette mesure pour 150 détenus avant procès». Le journaliste a choisi un jeu de mots en titre. Le sous-titre lui permet de préciser le propos de l article.

25 Identifier la ligne éditoriale De la difficile interprétation des chiffres Un bon titre Dans La Libre Belgique du Titre : «Partis politiques cherchent présidents» / Sous-titre : «Les quatre formations traditionnelles francophones organiseront des élections au premier semestre 2015.» Le sous-titre permet ici de préciser et de compléter le titre (en ajoutant le Quand? au Qui? et au Quoi? déjà repris dans le titre) 3 attire l œil et l attention du lecteur Par sa forme graphique et sa formulation, le titre accroche le regard et retient l attention. Il se doit d être original. Diverses techniques existent pour ce faire (attention : le recours à celles-ci n est pas obligatoire : un titre informatif respectant les règles précédentes peut être tout à fait suffisant la plupart du temps). Activité Donner aux élèves une sélection de titres de journaux (papier ou en ligne) ; les faire chercher quels procédés les journalistes ont utilisés pour rendre leurs titres originaux et/ou accrocheurs. La consultation de sites web de journaux ou une revue de presse de la semaine permettent souvent une bonne moisson mais, si besoin, nous avons remis en fin de fiche l ensemble des titres utilisés ici comme exemples. NB : rien n empêche bien sûr d avoir son propre avis sur la qualité ou l opportunité de tel ou tel titre. Ceux que nous reprenons ici présentent un panel des possibilités, leur qualité est cependant variable. Le choc des mots : utiliser des mots «chocs», «forts» pour frapper l imaginaire. Typiquement, «mort», «liberté», Ex. : «Dans le PAF, il y aura des morts» (Le Nouvel Observateur) ; «Jérusalem : la paix en sang»(l Express) ; «Le paradis du fan de sport» (La Dernière Heure, 27/08) ; «4 milliards inévitables» (La Dernière Heure, 27/08) Le mot évocateur : choisir un mot, une expression en lien explicite avec le sujet traité Ex. : «Le consultant Stephan Streker laisse RTL sur la touche» (La Dernière Heure) : il s agit d un commentateur sportif ; «La Poste et le facteur profit» (L Express), «Les métallos engagent le fer» (Le Point) ; «L incertitude plane sur les montgolfières» (La Dernière Heure, 27/08)

26 Piquer la curiosité : énoncer une invraisemblance, une bizarrerie qui donne envie d en savoir plus Ex. : «Marie-Christine a trois maris!» (Madame Figaro pour un article évoquant Marie-Christine Barrault, épouse à la ville mais aussi à la scène et à l écran) Personnaliser : s adresser au lecteur directement Ex. : «Comment on vous espionne» (La Capitale) ; «Contre les bouchons, covoiturons» (Le Soir) Le jeu de mots Ex. : «Hélène Jean-Bon, du dessin rock and brode» (Le Soir) ; «Contes à dormir de Bourges» (Libération), «l art d accommoder les pestes» (Elle), «c est la guerre de récession» (France Soir) ; «Ronquières déjà en vitesse de croisière» (La Libre Belgique) La référence : reprendre, et souvent détourner, le titre d un œuvre connue (film, livre, chanson ), ou une formule connue, qu elle vienne d un dicton, d une publicité, de la religion, de la science ou autre Ex. : «Et l actrice la mieux payée de la télé est» (DH) ; «C est arrivé au port d Anvers»(La Nouvelle Gazette) ; «Le don de la rose» (Le Figaro Magazine), «faites un film, plus la guerre» (Le Nouvel Observateur), «Dites seulement une parole» (L Express), «Rap, le courant alternatif» (Le Nouvel Observateur), «L Enfer, c est les ondes» (L Express) L allitération : figure de style qui consiste à répéter les consonnes des mots dans une phrase, ce qui crée un effet de sonorité Ex : «Je hais les divas de nos divins divans» (L Evénement du jeudi) La dialectique des mots : jouer sur des oppositions de mots apparemment contradictoires (proche de l oxymore) Ex. : «Ces célèbres inconnus» (La Nouvelle Gazette, 18/08) ; «Le bruit assourdissant du monde du silence» (Le Soir, 16-17/08) ; «Ces économies qui nous ruinent» (Le Nouvel Observateur), «les vertus de l infidélité» (L Express)

27 Identifier la ligne éditoriale De la difficile interprétation des chiffres Un bon titre Activité Il est temps de passer à la pratique. Une possibilité : choisissez un article dans un quotidien dont le message essentiel vous semble suffisamment clair. Effacez son titre et proposez à vos élèves de trouver le leur. Exemples de titres utilisant des techniques stylistiques d accroche : «Dans le PAF, il y aura des morts» (Le Nouvel Observateur) «Le paradis du fan de sport» (La Dernière Heure) «Et l actrice la mieux payée de la télé est» (La Dernière Heure) «Contre les bouchons, covoiturons» (Le Soir) «Hélène Jean-Bon, du dessin rock and brode» (Le Soir) «Je hais les divas de nos divins divans» (L Evénement du jeudi) «Ces économies qui nous ruinent» (Le Nouvel Observateur) «Les vertus de l infidélité» (L Express) «La Poste et le facteur profit» (L Express) «Marie-Christine a trois maris!» (Madame Figaro) «Jérusalem : la paix en sang»(l Express) «Contes à dormir de Bourges» (Libération) «C est la guerre de récession» (France Soir) «Les métallos engagent le fer» (Le Point) «Ronquières déjà en vitesse de croisière» (La Libre Belgique) «Comment on vous espionne» (La Capitale) «4 milliards inévitables» (La Dernière Heure) «Le don de la rose» (Le Figaro Magazine) «Faites un film, plus la guerre» (Le Nouvel Observateur) «Dites seulement une parole» (L Express) «Rap, le courant alternatif» (Le Nouvel Observateur) «L Enfer, c est les ondes» (L Express) «C est arrivé au port d Anvers» (La Nouvelle Gazette) «Ces célèbres inconnus» (La Nouvelle Gazette) «Le bruit assourdissant du monde du silence» (Le Soir) «L art à la gare» (La Nouvelle Gazette) «Le consultant Stephan Streker laisse RTL sur la touche» (La Dernière Heure) «L incertitude plane sur les montgolfières» (La Dernière Heure)

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29 Identifier la ligne éditoriale Fiche zoom De la difficile interprétation des chiffres En préparant ce dossier, nous avons été confrontés à une difficulté bien connue de l historien et du journaliste. Nous voulions présenter des diagrammes permettant de se faire une idée du paysage médiatique belge en 1940, 1972, 1989 et Nous nous sommes donc mis à la recherche d informations chiffrées. Voici le résultat, sur base des bulletins de l Institut national de statistiques Nombre d appareils radio Pas de données Nombre d autoradios Pas de données Nombre de téléviseurs Pas de données Tirage global de la presse écrite Pas de données Voici ces résultats présentés sous forme de graphique linéaire Nombre d'appareils radio Nombre de téléviseurs Tirage global de la presse écrite belge Qu en pensez-vous? Plutôt convaincant, non? Pourtant, plusieurs gros problèmes de pertinence dans la comparaison de ces données se posent. Pourrezvous trouver lesquels?

30 Changement de données En 1972, on connait le nombre d appareils radio. En 1989 par contre, on a le nombre d autoradios (probablement parce que le système de taxation a changé, les données de l INS étant liées aux taxes). Mais cela ne signifie pas que les autres appareils ont disparu bien entendu. On pourrait chercher et additionner le nombre de ventes d appareils radio cette année-là mais elles ne tiennent pas compte des appareils déjà en possession du public. Si notre objectif est d estimer le nombre d auditeurs touchés, on ne peut pas non plus estimer que les autoradios viennent s additionner aux autres appareils car il est probable que les possesseurs d autoradios possèdent également un appareil «classique». Bref, ces chiffres ne permettent pas une comparaison précise. Nature des données : la comparaison se justifie-t-elle? On connait le nombre d appareils radios et de téléviseurs réellement présents chez les auditeurs/spectateurs. Pour la presse écrite, par contre, on a le tirage, c est-à-dire le nombre d exemplaires imprimés. Or celui-ci ne correspond pas au nombre d exemplaires réellement en circulation (la diffusion) dans le public, qui est moins élevé. Autre problème : combien de personnes écoutent le même poste de radio, regardent la même télévision, lisent le même journal? C est la question de l audience. On considère généralement qu il y a deux auditeurs/spectateurs pour les premiers, trois lecteurs pour le journal mais il s agit de moyennes estimées. Conclusion Impossible donc dans notre cas de fournir des graphiques précis basés sur des données chiffrées avérées. Nous avons donc choisi, sur base de recherches complémentaires, des connaissances d un expert et d estimations de fournir des graphiques «impressionnistes», sans chiffres, tout en précisant l ensemble des doutes et des démarches qui ont présidé à leur réalisation. Les chiffres posent souvent ce genre de questions. Qu en est-il alors des tableaux et «infographies» que l on retrouve dans les médias (estimations sur base des premiers bureaux de vote dépouillés, évolution du coût de la vie sur base du fameux «panier de la ménagère», etc.)? À vous de voir, sur base des infos qu ils vous donnent et de votre bon sens Évolution du paysage médiatique en Belgique de 1940 à 2001

31 Fiche zoom Identifier la ligne éditoriale d un média Impossible pour un journal, ou pour un média en général, de relayer en permanence tout ce qui se passe dans le monde. Il doit donc effectuer une sélection parmi la masse des informations qu il reçoit à chaque minute. Pour effectuer cette sélection, la rédaction se base sur certains critères, qui constituent la «ligne éditoriale» du journal. Ces critères varient en fonction de la mission que le média se donne, de son public, de sa stratégie commerciale, de son lieu d édition, de ses contraintes techniques, etc. Les choix posés par le journal vont orienter la sélection et la hiérarchisation des informations mais également la façon de les présenter : vocabulaire, style, place accordée à l image, type d image, etc. Selon les priorités que se donne le journal, le temps accordé à la vérification, l analyse, l approfondissement des informations variera également. Pour ne pas rester un «consommateur passif d information», il est donc important de savoir à quel type de média on a affaire. Activité En observant un panel de journaux et/ou de sites web, magazines, etc., vous pouvez tenter d en déterminer les lignes éditoriales. Il s agit d une sorte d enquête : il faut observer le produit fini pour tenter d en déduire les choix qui ont mené à sa création. Où chercher les indices? - La Une : les informations qui s y trouvent sont celles que le journal choisit de mettre le plus en lumière ; elle est la «vitrine» du journal, elle doit donc attirer le lecteur et lui donner une idée générale de ce qu il trouvera à l intérieur ; - Les noms des rubriques, leur ordre et l espace qui leur est réservé ; - Les titres, le vocabulaire, la place de l image, le type d image Quelles questions se poser? - Le journal privilégie-t-il l information générale ou spécialisée? - Le journal privilégie-t-il l information régionale ou nationale, voire internationale? - Le journal vise-t-il un public d adultes, de jeunes, de femmes, de seniors?