Le système concentrationnaire

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1 Le système concentrationnaire I - La «race des seigneurs» Dans «Mein Kampf», Adolf Hitler indique clairement sa conception du monde : le peuple allemand est un peuple de «seigneurs». Selon Hitler, la «race aryenne» est une «race supérieure» qui a tous les droits. Les autres peuples sont classés dans une hiérarchie dans laquelle juifs, Tziganes ou Slaves sont nuisibles, des Untermenschen (des «soushommes»), ce qui justifie leur disparition. Tous les «ennemis de la Race» doivent être éliminés, y compris les opposants politiques et idéologiques. Hitler va organiser l élimination systématique de tous ceux qui semblent être un obstacle à ses ambitions, dans le cadre d un Etat totalitaire qui ne laisse aucun espace à une quelconque résistance. II - Les premiers camps Dès leur prise de pouvoir, les nazis vont créer des camps de concentration pour interner d abord les opposants politiques (communistes, socialistes, syndicalistes ), puis les juifs et les «asociaux» (homosexuels, handicapés, témoins de Jéhovah, chrétiens qui, au nom de leur foi, réprouvent les exactions nazies ). Les camps sont le plus souvent construits par les détenus eux-mêmes et il y règne l arbitraire le plus total. Des hommes et des femmes arrêtés sans aucune garantie légale subissent humiliations, sévices et tortures qui les conduisent jusqu à la mort. L indifférence dont font preuve les opinions allemande et internationale s explique, au moins en partie, par le secret qui règne sur la réalité des camps, rigoureusement maintenu par les nazis. Avec le déclenchement de la guerre, les camps vont prendre une autre ampleur. D une part, les «ennemis du Reich» sont de plus en plus nombreux. D autre part, la main d œuvre allemande venant à manquer, les SS vont tenter de transformer les camps en «entreprises» où une main-d œuvre d esclaves travaille sans relâche. L Europe occupée se couvre de ces sinistres endroits vers lesquels affluent des convois constitués non seulement par des hommes mais aussi des femmes, des enfants, des vieillards ou des malades dont le seul «tort» pour la plupart est d être juifs. Les prisonniers russes les partisans et les résistants de toute nationalité sont aussi déportés. Certains gouvernements locaux (c est le cas du gouvernement de Vichy en France) prêtent avec un certain zèle, main forte à l occupant. Buchenwald, Auschwitz deviennent de véritables machines à tuer, Dora où l on construit des armes secrètes est la tombe de milliers de martyrs, Ravensbrück est le lieu de douleur d innombrables femmes, Treblinka engouffre monstrueusement des foules de juifs.

2 III - Le long voyage vers les camps de la mort Le chemin de déportation est balisé. Le scénario est presque toujours le même : on rafle par centaines les futures victimes, on les conduit dans un endroit clos d où elles ont transportées vers des trains. On remplit à coups de crosse les wagons à bestiaux de ce «troupeau humain» sur lequel les portes se referment. Après de très longues heures d attente, le convoi s ébranle pour une destination inconnue mais dont beaucoup pressentent qu il s agit d un voyage sans retour. Ni nourriture, ni boisson, aucune commodité, pas même la plus élémentaire, le voyage est déjà l occasion de terroriser et d avilir le déporté. Dès l arrivée des trains, après un trajet si pénible que les plus faibles ont déjà péri, s effectue sur le quai sous les vociférations des SS, un «tri», à coups de «Schlag» (matraque). Les détenus, apparemment aptes au travail, sont mis de côté, tandis que les autres sont directement dirigés vers les zones d extermination. Les familles sont séparées, les enfants arrachés à leur mère, les personnes âgées jetées au sol. Les SS, présents à l arrivée, laissent libre cours à leur sadisme, frappant au hasard de leurs désirs sanguinaires les malheureux incapables de se défendre. Ils exécutent sur place ceux qui font mine de résister ou de protéger les plus faibles qu eux. La grille du camp passée, les SS s évertuent à transformer les détenus en «sous-hommes». Poussés sans ménagement vers un premier baraquement, ils sont soumis à l épouillage, puis à une douche glacée quelle que soit la température extérieure, si bien que certains meurent sur place. Tondus, vêtus d une tenue de toile grossière à raies, ils ne possèdent plus rien qui les différencie les uns des autres. Tatoués au bras, ils n ont même plus un nom propre mais un numéro qu ils doivent hurler à la moindre réquisition des gardiens de camp. Sur leur veste est cousu un triangle de couleur qui indique la «raison» de leur internement et leur nationalité. Dans les baraquements prévus pour quelques dizaines d occupants, les déportés sont entassés par centaines, couchant sur des châssis de bois grossier superposés, sans la moindre protection contre le froid, dans une promiscuité insupportable et une crasse incroyable. La nourriture est maigre et rare, les détenus doivent se battre pour en obtenir. Le moindre objet devient une monnaie d échange, chacun doit protéger contre le vol ses maigres effets, dont la disparition peut entraîner la mort. Ces hommes, dépourvus de tout, levés aux aurores, partent, le ventre vide, vers des travaux le plus souvent au-dessus de leurs forces. La moindre marque de faiblesse en présence d un SS signifie la mort immédiate ou à brève échéance. Sur les lieux de travail, on achève ceux qui flanchent, à Mathausen, on précipite du haut d une falaise ceux que les SS baptisent par dérision les «parachutistes». Les faibles sont ainsi condamnés à périr. L «infirmerie» qui ne dispose presque jamais de médicaments sérieux, où officient rarement de vrais médecins, est souvent l antichambre de

3 la mort. Chaque jour, on aligne sur des civières ceux que l on surnomme les «musulmans», incapables de bouger, l œil brillant de fièvre. Leurs instants sont comptés. Ils trépassent dans l indifférence et sont jetés dans une fosse commune. Leurs corps nus et décharnés montrent le calvaire qu ils viennent de vivre. Chaque jour de nouveaux cadavres s amoncèlent sur ceux de la veille. La mort peut survenir à chaque instant et bien peu nombreux sont ceux qui arrivent à y échapper durablement. Les nazis condamnent et exécutent sans cesse de nouveaux déportés. On pend au milieu du camp, on abat d une balle dans la nuque les victimes agenouillées au bord d un trou, on exécute à la hache. Les «camps de la mort» méritent toujours un peu plus leur nom IV- Résister pour témoigner Dans cet univers où tout est fait pour avilir l homme, les déportés font très souvent preuve d un héroïsme extraordinaire. Des hommes se sacrifient pour d autres, tandis que certains n hésitent pas à risquer la mort pour secourir plus faible qu eux. Comme le raconteront plus tard certains rescapés, il faut aussi acquérir une grande capacité de résistance, voire d indifférence, pour échapper chaque jour à la fureur des tortionnaires, aux responsables (détenus) des baraquements et à tous ceux qui, pour survivre, sont prêts à tout. Les exécutions massives étaient tellement inhumaines que le maître d œuvre de ces éliminations, Himmler lui-même, ne peut supporter ce spectacle l unique fois où il vient «superviser» l avancement de la «Solution finale» ; il manque de perdre connaissance et est pris d une crise de nerfs. Dans ce monde de folie, un être isolé a très peu de chances de survivre? Le fait d appartenir à une organisation politique ou à un réseau de résistance permet de bénéficier d une certaine solidarité. De véritables organisations clandestines se sont développées dans les camps, elles peuvent cacher un détenu «important», lui donner une nouvelle identité, le faire bénéficier des quelques médicaments disponibles ou tout simplement le faire affecter à une tâche qui n entraîne pas automatiquement la mort. Pour autant les tortures et les exactions ne cessent pas d être plus violentes de jour en jour. Ceux qui tentent de s échapper savent que cette action est proche du suicide. La plupart du temps, ils ne dépassent pas l enceinte du camp et meurent électrocutés dans les barbelés qui l entourent. Ceux qui parviennent au-delà sont presque toujours rattrapés et leur mort est organisée de la manière la plus atroce possible. Cet enfer incite certains à se conserver en vie pour pouvoir témoigner un jour de cette affreuse réalité des camps. Conscients de la chose, les nazis veulent anéantir les témoins de leur politique et c est une des raisons (avec évidemment celle du génocide) de la «Solution finale».

4 V- Les chambres à gaz A partir de l hiver , en plus de camps de concentration où les détenus meurent en quelques semaines ou mois, victimes de la sous-alimentation, des mauvais traitements, de la torture et du travail forcé, apparaissent les camps d extermination. La torture ou du travail forcé, apparaissent des camps d extermination. Au nombre de 6, ces lieux d horreur et d abomination ont pour seul but d éliminer les hommes, les femmes et les enfants qui y entrent. On les équipe de «chambres à gaz», dans lesquelles sont assassinés des milliers de détenus. Maquillées en salles de douches, elles permettent aux bourreaux de faire entrer leurs victimes sans qu elles se doutent du sort qui les attend. Une fois les portes fermées, on envoie les gaz et, à travers les lucarnes vitrées, les SS suivent l extermination. Lorsque plus aucun signe de vie ne se manifeste, on aère la pièce, on ouvre les portes pour retirer les morts, dont les corps sont brûlés dans les fours crématoires ou les fosses communes. La haute cheminée qui domine chaque camp, ne cesse plus alors de cracher une fumée âcre témoignant de la sinistre besogne en cours. Mais les SS qui ne reculent devant aucune barbarie, dépouillent les cadavres : ils font récupérer par des détenus, les dents ou les prothèses ne or, les lunettes, les cheveux pour en faire du feutre, et la graisse des corps pour fabriquer du savon. Si un détenu possède un tatouage, il est découpé et tanné pour être conservé. Les premiers soldats alliés, arrivés sur les lieux lors de la libération des camps à la fin de la guerre, ont été bouleversés par l atroce spectacle qui s offrait à eux. De ce traumatisme est née l idée de «crime contre l humanité», dont débattra le procès de Nuremberg. Des enfants naissaient dans les camps et la plupart du temps y mouraient. Les «entrées» et les «sorties» (=la mort) étaient répertoriées : chaque détenu disposait d une fiche concernant son cas. D étranges médecins nazis comme Harteim, cherchaient à vérifier leurs idées raciales sur des cobayes humains, leur faisant subir épreuves et opérations au gré de leur fantaisie. De cette prétendue science, ils pensaient faire sortir une médecine susceptible d améliorer la «Race». Pour la première fois dans l histoire de l humanité, des hommes, au nom d un droit supérieur lié à leur «race», s arrogeaient celui d exterminer ceux qu ils considéraient comme leurs ennemis. Les juifs, principales victimes de cette tentative presque aboutie de génocide, y ont laissé 6 millions des leurs sur environ 8 millions de victimes au total. Leurs bourreaux n ont reculé devant aucune méthode pour parvenir à leurs fins, pas plus la faiblesse d un enfant que les cheveux blancs d un vieillard n ont retenus leurs coups fatals. Des communautés entières, des villages, des familles ont été ainsi détruits systématiquement.

5 La plupart des photos atroces que nous a léguées involontairement cette période, ont été prises par les tueurs eux-mêmes. On lit dans le regard des nazis assistant aux exécutions, la haine ou la curiosité morbide, et parfois se dessinent sur leurs lèvres d infâmes sourires. Au moment où ils ont dû rendre compte de leurs actes devant un tribunal allié, tous se sont retranchés derrière le fait d exécuter des ordres venus de plus haut, tout comme la plupart de ceux qui habitaient juste à côté des camps ont prétendu ne pas être au courant de ce qui s y passait Certains historiens ont récemment mis en doute scientifiquement la réalité des chambres à gaz, minimisant l ampleur du drame. Cette remise en cause d une vérité historique accablante prouve combien il est nécessaire de ne jamais oublier ce qui s est passé. Lexique Arbitraire : qui dépend de la seule volonté, n est pas lié par l observation des règles Sévices : mauvais traitements corporels par quelqu un qui exerce une autorité sur la victime Zèle : ardeur à servir une personne ou une cause à laquelle on est dévoué Avilir : rendre vil ; abaisser la valeur ; dégrader, rabaisser Promiscuité : situation qui oblige des personnes à vivre côte à côte, trop près.