Géométrie II. Daniel Sprecher. Actualisé: 30 janvier 2016 vers Céva et Ménélaüs Céva Ménélaüs... 11

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Transcription:

Olympiades Suisses de Mathématiques smo osm Géométrie II Daniel Sprecher Actualisé: 30 janvier 016 vers..0.0 Table des matières 1 Triangles semblables Working Backward 4 3 La puissance d un point 5 4 La ligne de puissance 6 5 La droite de Simson 8 6 Céva et Ménélaüs 9 6.1 Céva...................................... 10 6. Ménélaüs................................... 11 7 Points spéciaux du triangle 13 7.1 Le centre de gravité.............................. 13 7. Le centre du cercle inscrit.......................... 14 7.3 Les centres des cercles exinscrits....................... 14 7.4 Le centre du cercle circonscrit et l orthocentre............... 15 8 Quadrilatères circonscrits 15

Introduction Cette deuxième partie a pour but de vous présenter les techniques les plus importantes qui interviennent dans la résolution d exercices de géométrie aux Olympiades de Mathématiques. On vous recommande particulièrement de lire les démonstrations étape par étape et d essayer de vous souvenir des idées principales, cela vous permettra de mieux comprendre les rapports entre les différents aspects de la géométrie. Toutefois le plus important reste le contenu des théorèmes. En comparaison avec la première partie, ce script contient moins de figures et moins d exemples. Cela a pour but de vous forcer à faire vos propres esquisses et à résoudre les exercices par vous-mêmes, ce qui constitue un bon entraînement. 1 Triangles semblables Les théorèmes de Thalès ont sûrement été traités à l école. Nous ne les répéterons donc ici que brièvement, sans preuve et sans exercices. Pour l application de ces théorèmes on vous propose les deux premiers exercices de ce chapitre. Théorème 1.1 (Premier théorème de Thalès). Soient a et b deux droites parallèles et S un point n étant situé sur aucune des deux droites. Un rayon quelconque partant de S coupe a en A et b en B. Un deuxième rayon coupe a en A et b en B. On a SA = SB SA SA SB SB = SA SA SB AB = SA A B. Théorème 1. (Deuxième théorème de Thalès). Dans le même arrangement que cidessus, on a de plus AA = SA BB SB. Il faut savoir que la réciproque du premier théorème est également valable. Pour la formuler correctement, nous devons utiliser des distances orientées. Par conséquent il peut y avoir des rapports négatifs. Soient X, Y et Z trois points distincts, étant situés sur une droite dans cet ordre. Dans ce cas le rapport XY est positif, car les vecteurs Y Z XY et Y Z ont la même direction. En revanche XZ est négatif, puisque les vecteurs ZY correspondants pointent dans des directions opposées. Désormais quand nous aurons affaire à des rapports ou des produits orientés, nous noterons cela entre parenthèses.

Théorème 1.3 (Réciproque du premier théorème de Thalès). Soient S, A, B sur une droite donnée et S, A, B sur une autre avec SA SB = SA (distances orientées) SB alors les droites AA et BB sont parallèles. La réciproque du deuxième théorème de Thalès n est pas valable. On le voit en construisant le cercle autour de A avec le rayon AA. En général, ce cercle coupe SB encore une fois en P A. Dans cet arrangement on a AP = SA BB SB mais les droites AP et BB ne sont pas parallèles. Le passage des théorèmes de Thalès à la similitude se fait en décalant SAA et SBB arbitrairement dans le plan (S se divise ainsi en S 1 et S ). Les longueurs des côtés ne changent pas et les relations déjà établies restent valables. Une condition suffisante pour la similitude est que les deux triangles aient les mêmes angles. On écrit alors S 1 AA S BB. Avec la réciproque du théorème de la similitude il faut être attentif. Pour décider quelle réciproque est vraie et quelle ne l est pas, on considère la réciproque du théorème de Thalès. Ici des distances ordonnées n ont pas de sens. Montrer d abord que deux triangles possèdent un angle égal et puis considérer le rapport des côtés avoisinant cet angle est une bonne variante. Voici un exemple de cette stratégie. Exemple 1. Soit un carré ABCD et soit M le milieu du côté AB. La perpendiculaire MC passant par M coupe AD en K. Montrer que les triangles CMB et CKM sont semblables. Solution. Pour démontrer la similitude de deux triangles on peut soit passer directement par la chasse aux angles (en montrant que tous les trois angles sont égaux), soit appliquer la réciproque du théorème de la similitude, ce qu on fera ici. Par hypothèse on a MBC = KMC = 90. Il nous reste à montrer MK MC = BM BC. Après une brève chasse aux angles on trouve que MBC et KAM sont semblables. Cela implique que MK MC = MA BC = BM BC. La deuxième équation repose sur le fait que M est le milieu de AB. Une dernière remarque : pour montrer que deux n-gones avec n > 3 sont semblables, il ne suffit pas de montrer que tous les angles sont égaux. Comme illustration on considère un trapèze qu on allonge le long de ses côtés parallèles. Les angles restent inchangés tandis que les rapports des côtés changent. 3

Working Backward Le Working Backward est une stratégie importante pour trouver des résultats qu on n arrive pas à prouver par la chasse aux angles. Puisque quelques preuves dans ce script (le théorème sur les quadrilatères circonscrits, théorème 6, Géométrie I, en est déjà un exemple) utilisent cette méthode on l introduit ici et on va en présenter deux exemples typiques. L approche du Working Backward ressemble à ce qui suit : Supposons qu on doit montrer qu un point P a une certaine propriété. On construit d abord un point P, duquel on sait qu il possède ladite propriété. Puis on démontre qu il n y a qu un seul point avec cette propriété et qu ainsi les points P et P coïncident. Exemple. Soit ABC un triangle et S le point d intersection de la bissectrice de BAC avec la médiatrice de BC. Alors S appartient au cercle circonscrit au triangle ABC. Solution. Si on essaye de résoudre l exercice tel qu il est donné, on remarque vite que l on n arrive pas à avancer. Le truc ici consiste à définir le point S comme le point d intersection de la bissectrice de BAC avec le cercle circonscrit au triangle ABC. L avantage de cela est que désormais nous pouvons utiliser tout ce que nous savons à propos des angles dans le cercle. Avec le théorème de l angle inscrit et en utilisant la bissectrice, nous obtenons : S BC = S AC = BAS = BCS. Le triangle BS C est ainsi isocèle, ce qui nous donne donc que S appartient à la médiatrice de BC. Alors S appartient en même temps à la bissectrice de BAC et à la médiatrice de BC, ce qui signifie évidemment que S = S. Comme S appartient par définition au cercle circonscrit au triangle ABC, nous avons terminé. Exemple 3. Soient ABC et AB C deux triangles semblables ayant le même sens et A comme sommet commun. Montrer que A, B, C et le point d intersection des droites BB et CC se trouvent sur un même cercle. Solution. Appelons P le point d intersection de BB et CC et, comme toujours, α, β et γ les angles des triangles. On veut montrer que P se trouve sur le cercle circonscrit de ABC. Avec une chasse aux angles directe on n y arrive pas. Par contre on a une symétrie entre les points B, C et B, C ce qui implique que P, s il se trouve sur le cercle circonscrit de ABC, doit également se trouver sur le cercle circonscrit de AB C. C est une raison suffisante pour définir un point P comme point d intersection des deux cercles. On a fini si on arrive à démontrer que B, P, B et C, P, C sont colinéaires. Donc P est également le point d intersection de BB et CC et il ne peut en avoir qu un, ce qui entraîne P = P. 4

Pour démontrer la colinéarité de B, P et B on a recours à la chasse aux angles : B = A + AP C + C P B = BCA + AB C + C AB = γ + β + α = 180. Par la symétrie entre B, B et C, C, les points C, P, C sont aussi colinéaires. Deux remarques pour finir. Ce qu on peut observer à travers ces exemples est valable assez généralement. Quand on a affaire à des angles, c est plus pratique d avoir des points sur des cercles que d avoir des points définis par des droites. Avec le Working Backward on peut redéfinir des points afin de pouvoir appliquer toute la machinerie des angles dans le cercle. La deuxième remarque se réfère aux arguments de symétrie qu on a invoqués dans le deuxième exemple. Si vous écrivez dans votre solution "...par symétrie on a...", n oubliez jamais de préciser entre quels points on a une symétrie. D ailleurs, "il y a symétrie entre B, B et C, C " signifie que, si on échange B avec C et B avec C, on a toujours un arrangement qui satisfait les conditions de l énoncé. 3 La puissance d un point Euclide a déjà mentionné et prouvé ce théorème important dans son oeuvre Les éléments. Théorème 3.1 (Théorème de la puissance). Soit un point P donné et un cercle k. Appelons A et B les deux points d intersection de k avec une droite g quelconque passant par P. On appelle puissance de P par rapport à k le produit P A P B. Ce produit est indépendant du choix de g. Preuve. Considérons la figure 1. Soit AB et A B deux droites arbitraires passant par P qui se trouve en dehors du cercle. Les triangles P AA et P B B sont semblables, puisque B BA = 180 B A A = P A A. Il s ensuit que P A = P B P A P B CQFD. Le cas avec P à l intérieur du cercle se démontre de façon analogue. Les points sur le cercle ont tous une puissance de 0. Très souvent on applique le théorème de la puissance avec la tangente au cercle passant par P. Soit T le point où la tangente touche le cercle. On a alors P A P B = P T. 5

B A α α C A B P α E P A S k B Figure 1 Le théorème de la puissance Figure Solution de l exemple 4 Exemple 4. Soient P A et P B les deux droites tangentes partant d un point arbitraire P à l extérieur du cercle k, où A et B sont les points de tangence. Soit C le point d intersection de la droite parallèle à P B passant par A avec k. Appelons E le deuxième point d intersection de P C avec k. Montrer que AE coupe le segment P B en deux. Solution. (Fig. ) Nous allons montrer que SB = SP. Pour cela nous allons considérer la puissance de S à k. D après le théorème de la puissance, Pour terminer il nous suffit de montrer que SB = SE SA. SP = SE SA SP SE = SA SP. C est le cas si P SE ASP, donc si SP E = P AS. Pour prouver ceci, on pose α. = SP E. Comme P B et AC sont parallèles, on a ACP = α et d après le théorème de l angle tangent, on a P AS = α. Comme pour le premier théorème de Thalès, on a une réciproque utile pour le théorème de la puissance. Considérons qu on a de nouveau affaire à des distances orientées (cf. chapitre 1). Par conséquent, la puissance d un point à l intérieur du cercle est négative. Théorème 3. (Réciproque du théorème de la puissance). Si les droites AB et A B se coupent en P et P A P B = P A P B (vues comme distances orientées), alors les points A, B, A, B se trouvent sur le même cercle. 4 La ligne de puissance Soient k 1, k deux cercles autour de M 1, M avec un rayon de r 1, r respectivement. En général la puissance d un point par rapport à l un des deux cercles est différente de la 6

puissance par rapport à l autre cercle. Quel est le lieu géométrique des points possédant la même puissance par rapport aux deux cercles? La réponse est la ligne de puissance qui est perpendiculaire à M 1 M. Si les cercles se coupent en deux points, elle passe par ces deux points d intersection. X M 1 r 1 S P S 1 r M k k 1 Figure 3 La ligne de puissance Preuve. Soient S 1 et S les points d intersection de k 1, respectivement de k avec la droite M 1 M (Fig. 3). Par la continuité de la puissance on trouve un point P sur la droite S 1 S, qui a la même puissance par rapport aux deux cercles. Or on démontre que tous les points X, situés sur la perpendiculaire M 1 M passant par P, ont la même puissance par rapport aux deux cercles. La puissance de P par rapport aux deux cercles vaut (P M 1 r 1 )(P M 1 + r 1 ) = (P M r )(P M + r ) P M 1 r 1 = P M r P M 1 r 1 + P X = P M r + P X XM 1 r 1 = XM r (XM 1 r 1 )(XM 1 + r 1 ) = (XM r )(XM + r ) Dans la deuxième ligne on a additionné P X aux deux côtés et dans la troisième ligne on a appliqué le théorème de Pythagore aux triangles rectangles P XM 1 et P XM. Dans la dernière ligne on retrouve la puissance des points X par rapport aux deux cercles. Notre intuition nous dit qu il n y a pas d autres points avec cette propriété. C est le cas et, exceptionnellement, on l accepte sans preuve. Si les cercles ne se coupent pas, on construit la ligne de puissance en dessinant l une des quatre tangentes communes. La ligne de puissance passe alors par le milieu du segment qui a comme extrémités les deux points de tangence. Exemple 5 (Tour final 009, 7). Les points A, M 1, M et C se trouvent dans cet ordre-là sur une droite. Soit k 1 le cercle de centre M 1 passant par A et k le cercle de centre M 7

passant par C. Les deux cercles se coupent aux points E et F. Une tangente commune de k 1 et k est tangente à k 1 en B et à k en D. Montrer que les droites AB, CD et EF se coupent en un seul point (Fig. 4). Démonstration. Nous remarquons en premier lieu que EF est la ligne de puissance des deux cercles. Il suffit donc de montrer que le point d intersection S des droites AB et CD a la même puissance par rapport aux deux cercles, donc que SA SB = SC SD. D après le théorème de la puissance ceci est équivalent au fait que ACDB est un quadrilatère inscrit. Nous allons donc prouver cette dernière affirmation par une chasse aux angles. Par le théorème de l angle au centre, nous avons CM 1 B = CAB. Comme les rayons M 1 B et M D sont tous les deux perpendiculaires à la tangente BD, ils sont donc parallèles et nous avons donc CM D = CM 1 B = CAB. Le triangle M CD est isocèle, ce qui induit : BDC = 90 + M DC = 90 + 1 (180 CM D) = 180 CAB. L affirmation est donc démontrée. E y P C y x D x A F B Figure 4 Exemple 5 Figure 5 La droite de Simson 5 La droite de Simson Dans certains exercices la clé de la solution est de considérer des projections de points sur des droites. La projection Q d un point P sur la droite g est le point sur g pour lequel on a P Q g. Le théorème suivant nous dit sous quelles conditions les projections d un point sur les côtés (prolongés si nécessaire) d un triangle sont colinéaires. Théorème 5.1 (Théorème de Simson). Soit un triangle quelconque ABC et un point P. On appelle D, E et F les projections de P sur les droites BC, CA, AB respectivement. 8

Les points D, E, F se trouvent sur une même droite si et seulement si P est sur le cercle circonscrit de ABC. Preuve. On considère ici le cas de la Fig. 5. Pour tous les autres cas on procède de manière analogue. Voici d abord les définitions : α = BAC, x = F DB et y = EDC. On a alors F DE = BDC + y x = 180 + y x Pour que F DE soit 180, il faut y = x. A cause des angles droits, DF et CDP E sont des quadrilatères inscrits, ce qui implique F P B = x et EP C = y. En outre AF P E est également un quadrilatère inscrit et on a F P E = 180 α. Il s ensuit que P se trouve sur le cercle circonscrit de ABC si et seulement si on a C = 180 α, c est-à-dire x = y. 6 Céva et Ménélaüs Dans tous les exemples traités jusqu ici les angles jouaient un rôle central. Dans ce chapitre nous allons parler de deux théorèmes qui ne contiennent que des rapports de longueurs et qui n énoncent rien à propos des angles. C est un grand avantage quand il n y a pas de rapport linéaire entre les angles. Pour illustrer ce phénomène, voici un exemple "simple". Soit ABC un triangle et M le centre de AB. Soit ɛ = BCM et soient α, β, γ comme d habitude les angles intérieurs de ABC. Il est clair qu on peut calculer ɛ à partir de deux angles intérieurs, mais comment? Comme il n y a pas de rapport linéaire entre les angles, on doit chercher une relation trigonométrique (la chasse aux angles ne fonctionne pas). A l aide du théorème du sinus on peut trouver une formule qu on peut ensuite péniblement transformer grâce aux règles d addition sin(α + γ ɛ) sin(ɛ) sin(ɛ) = = sin(α) sin(γ) sin(γ) sin(α + γ) ( sin(α) + cos(α + γ)) + sin(γ) sin(α + γ). Je ne recommande à personne de se torturer avec des formules pareilles. C est beaucoup plus simple ici de déterminer la position du point M par un rapport de longueurs ( AM = MB 1). Ce n est pas toujours évident de décider si on a meilleur temps de résoudre un exercice à l aide des angles ou bien avec des rapports de segments. Très souvent on a besoin des deux méthodes (par exemple dans le cadre des triangles semblables). Une règle qui fonctionne assez souvent (mais pas toujours) est de se dire que la chasse aux angles fonctionne quand on a affaire à des intersections sur des cercles, tandis qu il est en général plus payant d appliquer les théorèmes de Céva et de Ménélaüs quand il s agit d intersections de droites. 9

6.1 Céva L ingénieur et mathématicien italien Giovanni Céva a publié ce beau théorème en 1678. Théorème de Céva. Soit ABC un triangle quelconque et P, Q, R des points sur les points BC, CA respectivement AB. Les droites AP, BQ, CR se coupent en un seul point si et seulement si QA AR = 1. (1) RB Preuve. Supposons d abord que les trois droites se coupent en un point T. Soient U et V les projections de B resp. de C sur AP. D après le théorème de Thalès, puis en développant la fraction on trouve P C = BU V C = 1 AT BU 1 AT V C = [AT B] [CT A], où le dernier rapport est négatif si AT B et CT A sont orientés dans deux sens différents. Si on procède de manière analogue, tout se simplifie QA AR RB [AT B] [BT C] [CT A] = [CT A] [AT B] [BT C] = 1. Pour montrer la réciproque, on fait un raisonnement typique du Working Backward. On suppose qu on ait (1) et on appelle T l intersection de AP et BQ. La droite CT coupe AB en un point R. Si on arrive à montrer que R = R, la preuve est finie. Comme on a déjà démontré l autre implication du théorème et comme les droites AP, BQ, CR se coupent en un unique point par construction, on sait que QA AR R B = 1 = QA AR RB, la deuxième égalité est une conséquence du (1). Après simplification on obtient AR R B = AR RB AR R B + 1 = AR RB + 1 AR + R B AR + RB = R B RB AB R B = AB RB R B = RB R = R 10

Dans le cas du théorème de Céva, il est utile de se souvenir de la preuve, les raisonnements de ce type apparaissent souvent dans les exercices. En guise d application nous allons démontrer l existence du point de gravité et de l orthocentre. Exemple 6. Les médianes d un triangle se coupent en un seul point, appelé centre de gravité. Les hauteurs se coupent en un point unique, l orthocentre. Solution. Soient AP, BQ, CR les médianes du triangle ABC. On a QA AR RB = 1 1 1 = 1. Ainsi, par le théorème de Céva, les médianes se coupent en un seul point. Le cas de l orthocentre est un peu moins évident. Soient P, Q, R les projections de A, B resp. C sur BC, CA resp. AB. Discutons d abord le signe de QA AR RB. Le premier terme est négatif si et seulement si P se trouve à l extérieur du segment BC, ce qui n est le cas que si ABC ou BCA est plus grand que 90. Comme au plus un des angles peut être obtus, on distingue deux cas. Si le triangle est aigu, alors tous les trois termes sont plus grands que 0, sinon exactement deux termes sont négatifs. Le produit est donc dans tous les cas positif. On n a donc plus à se préoccuper des signes et pour le reste de la preuve on peut travailler avec des rapports non orientés. Les triangles A et CBR sont rectangles et ont encore un angle en commun, ils sont donc semblables. Par conséquent BA = BR BC Avec des raisonnements analogues on obtient BR = BA BC. QA AR RB = BR CQ CP AR AQ = BA BC CB CA AC AB = 1. D après le théorème de Céva les hauteurs se coupent ainsi en un seul point. 6. Ménélaüs Ce théorème a été trouvé par le grec Ménélaüs et il est beaucoup plus ancien que le théorème de Céva. Théorème 6.1 (Théorème de Ménélaüs). Soit ABC un triangle quelconque et soient P, Q, R des points sur BC, CA resp. AB. P, Q, R sont alignés si et seulement si QA AR RB 11 = 1. ()

Preuve. Supposons que P, Q, R sont alignés. Soient a, b, c les distances orientées de A, B resp. C à la droite P QR. D après le théorème de Thalès /P C = b/c et par conséquent QA AR ( RB = b ) ( c ) ( a ) = 1. c a b Le même argument que dans la preuve de Céva montre la réciproque. Comme utilisation de Ménélaüs nous allons encore faire l exemple suivant. Exemple 7 (Tour final 013, 7). Soit O le centre du cercle circonscrit du triangle ABC avec AB AC. De plus, soient S et T des points sur les demi-droites AB, respectivement AC tels que ASO = ACO et AT O = ABO et tels que S et T soient plus proches de B, resp. C que de A. Montrer que ST coupe le segment BC en deux parties égales. (Fig. 6). Démonstration. Soit M le point d intersection de ST et BC. Vu la configuration de cet exercice, c est vraisemblablement une bonne idée d utiliser Ménélaüs. Non seulement les points S, M et T appartiennent aux côtés du triangle ABC, mais en plus nous cherchons le rapport BM/MC. Nous avons : AS SB BM MC CT T A = 1. Nous aimerions démontrer que BM/M C = 1, donc il suffit de démontrer l équation suivante : AS SB CT T A = 1. Puisque O est le centre du cercle circonscrit, nous en déduisons les relations suivantes : BAO = OBA = AT O, OAC = ACO = OSA. De plus, le théorème de l angle extérieur appliqué aux triangles SBO et COT donne SOB = OSA OBA = ACO AT O = T OC. Nous constatons que les deux triangles ASO et T AO sont semblables, et de même pour les deux triangles SBO und COT. On en déduit que : AS T A = SO AO, CT SB = CO SO. En multipliant les deux relations ensemble, on obtient (sans faire attention au signe pour le moment) : AS SB CT T A = AS T A CT SB = SO AO CO SO = CO AO = 1. 1

En réfléchissant rapidement, on remarque que en faisant attention au signe on obtient en fait 1. Par définition des points S et T et par la condition AB AC, deux cas sont possibles : Soit S est à l intérieur du segment AB et T appartient au prolongement du côté AC, soit S appartient au prolongement du côté AB et T est à l intérieur du segment AC. Dans les deux cas un des deux rapports AS/SB, CT/T A est positif et l autre négatif, donc le produit est toujours 1. Figure 6 Exemple 7 7 Points spéciaux du triangle 7.1 Le centre de gravité La médiane relie le centre d un côté avec le sommet opposé. On appelle centre de gravité le point d intersection des trois médianes. Celui-ci coupe les médianes en un rapport de : 1. Preuve. Dans l exemple 6 on a montré l existence du centre de gravité grâce au théorème de Céva, mais on peut également le faire par des moyens plus directs. Soient D et E les milieux des côtés BC et CA respectivement. Selon la réciproque du premier théorème de Thalès, DE est parallèle à AB et de longueur 1/AB. On applique alors le deuxième théorème de Thalès en S SD SA = DE AB = 1. 13

7. Le centre du cercle inscrit La bissectrice d un angle α est l ensemble des points qui sont à la même distance des deux côtés de cet angle. Les trois bissectrices d un triangle se coupent au centre du cercle inscrit. C est facile à voir en considérant le point d intersection de deux bissectrices. Ce point est à la même distance de tous les côtés et doit donc également se trouver sur la troisième bissectrice. En relation avec le centre du cercle inscrit, il faut connaître les trois propriétés suivantes : i. Soit I le centre du cercle inscrit et P le point d intersection de AI avec le cercle circonscrit de ABC. Alors P se trouve sur la médiatrice de BC. Nous avons démontré cette affirmation dans l exemple ii. Puisque les côtés sont tangents au cercle inscrit, leurs longueurs peuvent se diviser naturellement (cf. Fig. 7). On a AB = x + y, BC = y + z et CA = z + x. La moitié de la circonférence d un triangle se dénote souvent par s = BC+CA+AB = x + y + z. Pour la distance de A au point où le cercle inscrit touche le côté, on trouve x = x + (y + z) (y + z) = s a. iii. Soit I le centre du cercle inscrit et D le point d intersection de AI avec la côté BC. On a alors AB AC = BD DC. Preuve. On utilise le point (i). Soit alors P le point d intersection de AI avec le cercle circonscrit de ABC. En appliquant plusieurs fois le théorème des angles inscrits dans le cercle circonscrit, on trouve deux paires de triangles semblables : ABD CP D ACD D ce qui fournit les deux relations Avec = CP il s ensuit que AB AD = CP CD AB AC AC AD = BD. = CP AD BD CD AD = BD DC. 7.3 Les centres des cercles exinscrits Tout triangle admet trois cercles exinscrits, un à l extérieur de chaque côté. Considérons la figure 8 : il est intéressant de regarder la distance des points de tangence aux sommets. La distance de A aux points de tangence avec AB et AC vaut dans les deux cas x+y+z = s. L image du point de tangence sur BC par une symétrie par rapport au milieu de ce côté nous donne le point de tangence du cercle inscrit. Dans le chapitre 8 nous allons en voir une application. 14

C z z C y x I x + z y I a y z A x y B A x + y B z Figure 7 Le centre du cercle inscrit Figure 8 I a, centre d un des cercles exinscrits 7.4 Le centre du cercle circonscrit et l orthocentre Chaque point de la médiatrice du côté AB est à la même distance de A et de B. Par un argument analogue à celui qu on a utilisé pour le centre du cercle inscrit, les trois médiatrices doivent se couper en un point. L existence de l orthocentre a été montré grâce au théorème de Céva, dans l exemple 6. Les propriétés intéressantes de ces points seront traitées uniquement dans les exercices. 8 Quadrilatères circonscrits De manière similaire aux quadrilatères inscrits, il existe un critère simple qui caractérise entièrement les quadrilatères qui ont un cercle inscrit. Si le quadrilatère convexe admet un cercle inscrit, alors on voit vite que AB + CD = BC + DA (la distance d un sommet aux deux points de tangence se trouvant sur les côtés adjacents est la même). Il est beaucoup plus surprenant que la réciproque soit également vraie. Exemple 8. Le quadrilatère convexe ABCD admet un cercle inscrit si et seulement si AB + CD = BC + DA. Solution. Supposons AB + CD = BC + DA. Si le quadrilatère est un parallélogramme, alors par hypothèse c est un losange et il a donc un cercle inscrit (son centre est l intersection des diagonales). Sinon il existe deux côtés opposés qui se coupent en un point. Sans perte de généralité soit P l intersection de AB avec CD, tel que A se trouve entre B et P. On peut remarquer que ABCD a un cercle inscrit si et seulement si le cercle inscrit de P BC et le cercle exinscrit de P AD se confondent. Comme les deux cercles sont tangents à P B et P C, c est le cas seulement s ils touchent P B au même point. 15

Soit X le point de tangence du cercle inscrit de P BC sur P B. On a alors P X = 1 (P B +BC +CP ) BC = 1 (P B BC +CP ) = 1 (P A+AB BC +P D +DC). Par hypothèse cette expression vaut 1 (P A + P D + AD). Soit Y le point de tangence du cercle exinscrit de P AD opposé à P sur P B. Dans ce cas, P Y = P A + 1 (P A + AD + DP ) P A = 1 (P A + AD + DP ). Autrement dit P X = P Y et par conséquent X = Y. 16