Variétés toriques et polytopes

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Variétés toriques et polytopes S. Timsit - M. Zhykhovich Table des matières 1 Polytopes simpliciaux 2 2 Variétés toriques affines 3 2.1 Cônes polyédraux convexes.................... 3 2.2 Construction de la variété associée à un cône polyédral convexe saillant rationnel......................... 4 3 Variétés toriques générales 9 3.1 Éventails et variétés toriques................... 9 3.2 Lissité des variétés toriques................... 10 3.3 Topologie des variétés toriques.................. 11 3.4 Démonstration des relations de Dehn-Sommerville....... 12 4 Bibliographie 14 1

1 Polytopes simpliciaux Définition 1. Un polytope est l enveloppe convexe dans R n d un ensemble fini qui engendre l espace affine R n. On note f i le nombre de faces de dimension i et f 1 = 1. On a alors l égalité d Euler f 0 f 1 + f 2... + ( 1) n 1 f n 1 + ( 1) n = 1. Un polytope simplicial est un polytope dont les faces de dimension n 1 (les facettes) comportent toutes n sommets. On pose pour 0 k n h k = n ( ) i ( 1) i k f n 1 i. (1) k i=k Le but de cet exposé sera de montrer les relations de Dehn-Sommerville, c est à dire, h k = h n k, pour 0 k n (2) h k 1 h k, pour 0 k n/2. (3) En effet, en observant que h n = 1, on obtient que la relation (2) est une généralisation de l égalité d Euler. Pour cela, nous utiliserons du théorème de dualité de Poincaré et du théorème Lefschetz difficile qui sont des résultats de topologie et géométrie algébrique. 2

2 Variétés toriques affines 2.1 Cônes polyédraux convexes Soit N un groupe abélien libre de type fini de base e 1,..., e n : et M = Ze 1 Ze n son dual. N = Ze 1... Ze n, Définition 2. Un cône σ dans un espace vectoriel réel N R de dimension n est polyédral convexe s il s écrit σ = {λ 1 v 1 +... + λ r v r λ 1,...,λ r 0} avec v 1,...,v r N R. On appelle dimension de σ la dimension de l espace vectoriel σ + ( σ) qu il engendre. Définition 3. On définit le cône dual dans M R par σ = {u M R u,v 0 pour tout υ σ}. Nous présentons maintenant quelques résultats sur les cônes que l on utilisera par la suite. (a) Si υ σ, il existe u σ tel que u,v < 0. On a (σ ) = σ. On appelle face de σ toute intersection σ u, pour u σ (en particulier, σ est une face). Une facette est une face de codimension 1. (b) Toute face est un cône polyédral convexe et il n y a qu un nombre fini de faces. (c) Toute intersection de faces est une face. Toute face d une face est une face. Toute face autre que σ est l intersection des facettes qui la contiennent. (d) Si σ engendre N R, on a σ = {v N R u τ,v 0} τ facette 3

(e) Le cône σ est aussi polyédral convexe. Proposition 4. Les trois conditions suivintes sont équivalentes: (i) {0} est une face de σ; (ii) σ ne contient pas de droite; (iii) σ engendre M R. Démonstration. (i) (ii) il existe u σ tel que {0} = σ u. Si σ contient une droite D, soit x D non nul on a u(x) 0 et u( x) 0 donc u(x) = u( x) = 0. Ainsi x σ u donc x = 0, ce qui est absurde. (ii) (iii) supposons σ n engendre pas M R, il existe v (σ ) non nul. Par conséquent σ contient la droite engendrée par v. (iii) (i) Soit {e 1,..., e n} n éléments de σ qui engendre M R. On pose u = e 1 + +e n. Il est clair que σ u = {0} donc {0} est une face de σ. On demandera ensuite à nos cônes d être saillants, c est- a-dire de vérifier l une de ces conditions. On s intéressera aux cônes polyédraux convexes rationnels, c est-à-dire aux cônes convexes σ de N R engendrés par des vecteurs de N. (h) Si σ est un cône polyédral convexe rationnel, le semi-groupe σ M est de type fini. 2.2 Construction de la variété associée à un cône polyédral convexe saillant rationnel Soit σ N R un cône polyédral convexe saillant rationnel (on dira désormais cône). On considère le semi-groupe σ M auquel nous allons associer l algèbre A σ = C[σ M] construite de la manière suivante: c est un espace vectoriel de base (χ u ) u σ M, la multiplication est définie par χ u χ u = χ u+u. Toute partie génératrice (u i ) 1 i s du semi-groupe σ M détermine une partie génératrice (χ u i ) 1 i s de l algèbre A σ. Comme σ M est de type fini, A σ l est aussi, elle s écrit donc comme quotient d un anneau de polynôme C[Y 1,..., Y s ] par un idéal. Comme C[Y 1,..., Y s ] 4

est noétherien cet idéal est engendré par un nombre fini de polynômes F 1,..., F m. La variété algébrique affine X σ associée au cône σ est par définition le sousensemble de C s défini par les équations F 1 = = F m = 0. Pour un cône σ, on pose U σ = {u : σ M C; u(0) = 1, u(m+m ) = u(m)u(m ), m,m σ M}. On vas maintenent construire une bijection Φ : X σ U σ et on notera ϕ x = Φ(x). Soit A σ un quotient d un anneau de polynôme C[Y 1,..., Y s ] par un idéal. On peut considerer un point (y 1,..., y s ) de X σ comme un idéal maximal (Y 1 y 1,..., Y s y s ) de l algèbre A σ. D après le Nullstellensatz cette correspondance est bijective. Par ailleurs à chaque idéal maximal on peut associer bijectivement un morphisme surjectif ψ de C-algèbres de la manière suivante L application inverse est de la forme I (ψ : A σ A σ /I C). (ψ : A σ C) Kerψ. On a donc associé a chaque point x de X σ un morphisme surjectif de C- algèbre ψ x. On peut alors construire un morphisme de semi-groupes ϕ x U comme composé de l application suivante σ M A σ u χ u et de ψ x. Un point x X σ correspond donc à un morphisme ϕ x de semigroupes σ M (C, ) u χ u ψ x (χ u ) et cette correspondance est bijective. Remarque 5. Soit {u 1,..., u s } une partie génératrice du semi-groupe σ M. Dans ce cas, la variété X σ est un sous-ensemble de C s. D après la preuve de la proposition précédente, pour un point x = (x 1,..., x s ) X σ on a un morphisme Φ(x) = ϕ x de la forme suivante: ϕ x (u i ) = x i, 1 i s. Et pour Φ 1 on a Φ 1 : U σ X σ 5

ϕ (ϕ(u 1 ),..., ϕ(u s )). La variété X σ contient un point distingué, que l on notera x σ. C est le point associé à l application ϕ xσ : σ M (C, ) { 1 si u σ u 0 sinon C est bien un morphisme de semi-groupes, car la somme de deux éléments de σ ne peut être dans σ que s ils y sont tous les deux. On va donner quelques exemples de variétés toriques pour des cônes concrets. On fixe (e 1,..., e n ) une base de N et (e 1,..., e n) la base duale de M R. Exemple 1 Pour le cône σ = {0} on a σ = M R. Le semi-groupe σ M = M est engendré par ±e 1,..., ± e n donc A σ = C[X 1,X 1,..., X n,x n ]/(X 1 X 1 1,..., X n X n 1), où X i = χ e i et X i = χ e i. Dans ce cas la variété Xσ est isomorphe à (C ) n, qui s appelle le tore T n de dimension n. C est un groupe. Le point t = (t 1,..., t n ) de T n correspond au morphisme de semi-groupes M (C, ) (m 1,..., m n ) t m 1 1... t m n n, qui est en fait un morphisme de groupes M C. Cherchons le point distingué x {0}. Comme σ = M, ϕ x{0} (u) = 1 pour tout u M. Ce morphisme correspond au point (1,..., 1) de T n. Donc x {0} = (1,..., 1). Exemple 2 Si le cône σ est R + e 1 + + R + e n, on a σ = R + e 1 + + R + e n. Dans ce cas le semi-groupe σ M est engendré par e 1,..., e n et on obtient A σ = C[X 1,..., X n ]. La variété X σ et C n. Le point distingué x σ est (0,..., 0). 6

Exemple 3 Dans le cas général on considère σ = R + e 1 + + R + e m, où 0 m n. on a alors σ = R + e 1 + + R + e m + Re m+1 + + Re n. Le semi-groupe σ M est engendré par e 1,..., e m, ± e m+1,..., ± e n et on a A σ = C[X 1,..., X m,x m+1,x 1 m+1,..., X n,x 1 n ]. Dans ce cas la variété X σ = C m (C ) n m et le point distingué est x σ = (0,..., 0,1,..., 1). On remarque les choses suivantes que l on utilisera par la suite. (1) Si τ une face de σ, on peut considérer la variété X τ. Que peut-on dire de X τ par rapport à X σ? Par définition il existe u σ M tel que τ = σ u. On a en dualisant τ = σ + R + ( u) donc τ M = (σ M) + N( u) et A τ = A σ [χ u ]/(χ u χ u 1). La variété X τ s identifie donc au complémentaire dans X σ de la sous-varété définie par χ u = 0. En particulier, chaque X σ contient X {0} = T n comme ouvert. On dira que X σ est de dimension (complexe) n. (2) Une propriété importante de variétés toriques est l action du tore T n (T n est un groupe) sur ces variétés. On construit cette action de la manière suivante. Un point x de X σ correspond à un morphisme de semi-groupes ϕ x : σ M C et un point t de T n correspond à un morphisme de groupes ϕ t : M C donc la restriction ϕ t σ M : σ M C est un morphisme de semi-groupes. On definit t.x comme le point de X σ qui correspond au morphisme ϕ t σ M ϕ x. On peut écrire la loi de cette action comme ϕ t.x = ϕ t σ M ϕ x Lorsque σ = {0}, c est la loi de groupe de T n. Si τ est une face de σ, l inclusion X τ X σ définie ci-dessus est équivariante pour l action de T n. En effet avec les notations du point (1) un point x de X σ appartient à X τ si et seulement si lui correspond un morphisme ϕ x : σ M C, tel que ϕ x (u) 0. Si ϕ x (u) 0 alors ϕ t.x (u) = ϕ t σ M(u)ϕ x (u) 0 et donc t.x appartient à X τ. Proposition 6. L action de T n sur X σ a un point fixe si et seulement si σ engendre l espace vectoriel N R. Dans ce cas le point fixe est le point distingué x σ. Démonstration. En effet, si x est un point fixe alors ϕ t.x = ϕ x pour tout t dans T n, c est-à-dire ϕ t (u)ϕ x (u) = ϕ x (u) pour tout t T n et pour tout 7

u σ M. Si u 0 il existe t T n tel que ϕ t (u) 1 donc on a ϕ x (u) = 0 pour tout u 0. Si σ engendre N R alors σ = {0} et donc x est le point distingué x σ. Si σ n engendre pas N R, le cône σ contient une droite donc deux points opposés non nuls u et u, pour lesquels ϕ x (u)ϕ x ( u) = ϕ x (0) = 1, de sorte que x n est pas fixe. Proposition 7. L orbite O σ de x σ sous l action de T n est isomorphe à T n dim(σ). Si on note X σ la variété torique associée au cône σ et au sousréseau N σ de N engendré par σ N, on a une décomposition X σ X σ O σ Démonstration. On peut écrire N = N σ N et donc pour le reseau dual on a M = M M, où M est un réseau dual de N σ et M = σ M. On a donc σ M = (σ M ) M et ainsi une décomposition U σ = U σ, Nσ Hom(M,C ). Pour t T n et u M on a: { ϕ t (u) si u M = σ M ϕ t. xσ (u) = ϕ t σ M(u)ϕ xσ (u) = 0 sinon Donc {ϕ t. xσ, t T n } = {0} Hom(M,C ). Si on pose k = n dim(σ) alors on peut choisir une famille (u 1,...,u s,u 1, u 1,...,u k, u k ) de générateurs du semi-groupe σ M tel que u 1,...,u s engendre σ M tandis que (u 1,..., u k ) est une base de σ M. On a O σ = Φ 1 ({ϕ t. xσ, t T n }) = {(0,...,0,ϕ t (u 1 ),ϕ t (u 1 ) 1,...,ϕ t (u k ),ϕ t (u k ) 1 ); t T n }. Ce dernièr ensemble est evidement isomorphe à T n dim(σ). Ainsi on a X σ = Φ 1 (U σ ) = Φ 1 (U σ, Nσ Hom(M,C )) = {(ϕ 1 (u 1),...,ϕ 1 (u s),ϕ 2 (u 1 ),ϕ 2 (u 1 ) 1,...,ϕ 2 (u k ),ϕ 2 (u k ) 1 ); ϕ 1 U σ, Nσ, ϕ 2 Hom(M,C ))} qui est donc isomorphe à X σ O σ. 8

3 Variétés toriques générales 3.1 Éventails et variétés toriques Définition 8. Un éventail est un ensemble fini de cônes dans N R tel que: toute face d un cône de est dans ; l intersection de deux cônes de est une face de chacun de ces deux cônes À tout éventail, on peut associer une variété torique plus générale X, pour cela, on lui associe l ensemble des variétés affines (X σ ) σ, puis on recolle les variétés le long de leur intersection. En effet, soit σ et τ deux cônes de, on effectue le recollement, en considérant la sous-variété ouverte X σ τ puis l application qui identifie les éléments de X σ aux éléments de X τ sur l ouvert commun X σ τ. Nous verrons l identification plus en détail sur des exemples. Par ailleurs, cette variété est séparée, connexe (deux variétés toriques affines ont toujours un ouvert non vide en commun) et de dimension n et comme T n est contenu dans toutes les variétés toriques affines, il est aussi inclus dans X. Comme le tore T n agit sur chaque X σ, on peut prolonger cette action a X. D après un résultat précédent, les points fixes de cette action sont les x σ lorsque σ apartient á l éventail et engendre N R. Exemple 4 On considére l éventail 1 = {R,{0},R + } dans R. Les variétés X R,X {0} et X R + sont respectivement isomorphes C, C et C. Plus précisément, on écrit X R = {(x,1) tels que x C} et X R + = {(1,y) tels que y C}, on va donc effectuer le recollement sur l ouvert X {0} = C, autrement dit si x C (1,x) on associe (x 1,1) dans un sens et de même dans l autre sens. On obtient ainsi la variété P 1 C. Soit x = (x 1,x 2 ) P 1 C on peut supposer que x 1 0, il est clair que x X R +, donc P 1 C X 1, l autre inclusion étant claire, on l égalité cherchée. Exemple 5 Soit (e 1,..., e n ) une base de N, on pose e 0 = (e 1 +... + e n ) et on considère l éventail n des cônes engendrés par les parties propres de {e 0,e 1,..., e n }. Il y a n + 1 cônes de dimension n, chacun définit une variété affine isomorphe à C n. On peut identifier ces variétés aux cartes affines de P n avec un recollemant identique à celui de P n. La variété X n est donc l espace projectif P n., l action du tore est alors définie par (t 1,..., t n ).[x 0 : x 1 :... : x n ] = [x 0 : t 1 x 1 :... : t n x n ] les point fixes de cette action sont les n + 1 points de coordonnées [1 : 0 :... : 0], [0 : 1 : 0 :... : 0],..., [0 :... : 0 : 1] 9

On admettra le résultat suivant Proposition 9. Une varété X est compacte si et seulement si σ σ = N R. On dit dans ce cas que l éventail est complet. 3.2 Lissité des variétés toriques D après la définition de lissité, la variété algébrique X σ est lisse au point x si et seulement si l idéal maximal m x de A σ correspondant à x vérifie dim C (m x /m 2 x) = n. Proposition 10. Une varété X σ est lisse si et seulement si σ est engendré par une partie d une base de N Démonstration. Soit σ un cône engendré par une partie {e 1,..., e m } d une base {e 1,..., e n }, 0 m n. D après l exemple 2, dans ce cas X σ = C m (C ) n m et donc la variété est lisse. Inversement, soit X σ une variété lisse. Supposons d abord que σ engendre N R. Soit m un idéal maximal de A σ correspondant à x σ. D aprés la preuve de la proposition 5, on a m = Kerψ xσ, où ψ xσ : A σ C est un morphisme surjective de C algèbre qui est définit sur la base (χ u ) u σ M de la manière suivante ψ xσ (χ u ) = ϕ xσ (u). Par définition d un point x σ on a ψ xσ (χ u ) = ϕ xσ (u) = 0, si u 0 et ψ xσ (χ o ) = ψ xσ (1) = 1. Donc m = Kerψ xσ est engendré par les χ u, u σ M, u 0. Ainsi m 2 est engendré par tous les u qui sont somme de deux éléments de σ M. Soit (u 1 ),...,(u s ) les côtes de σ, où u 1,...,u s sont les prémieres points sur ces côtes qui appartiennent à M. On peut verifier qu une famille (χ u i, 1 i s) est linéairement indépendente dans un C-espace vectoriel m/m 2. D après le critère de lissité en x σ on a dim C (m x /m 2 x) = n. Alors s = n et les (χ u i, 1 i s) forment une base d un C-espace vectoriel m/m 2, ainsi u 1,...,u n 1 et u n engendrent σ M. Comme σ M engendre M comme groupe, (u 1,...,u n ) une base de M. Dans le cas générale, d après un proposition 8 on a X σ X σ O σ X σ T n dim(σ) Donc si X σ est lisse, X σ l est aussi et d aprés le cas précédent, σ est engendré par une base de N σ = σ N + ( σ N). Comme X est lisse si et seulement si pour chaque cône σ de la vari té X σ est lisse, on a un proposition suivante. 10

Proposition 11. La variété X est lisse si et seulement si chaque cône de est engendré par une partie d une base de N. Lorsque σ est simplicial, c est-à-dire qu il est engendré par dim(σ) éléments de N, la variété X σ n a que des singularités quotient. Si tous les cônes σ de sont simpliciaux, on dit que est un éventail simplicial, X n admet alors que des singularités quotient. 3.3 Topologie des variétés toriques Lemme 12. Pour tout éventail, on a X = σ O σ, où O σ est l orbite de x σ X σ X sous l action de T n. Démonstration. Pour l orbite O σ X σ, on a Φ(O σ ) = {ϕ U σ tel que ϕ(u) 0, si u σ M et ϕ(u) = 0 sinon}. Soit τ = σ u une face propre de σ et x X τ X. Alors ϕ x (u) 0 et comme u n est pas dans σ M, on a x O σ. Ainsi pour chaque face propre τ de σ l intersection O σ X τ est vide. Cela implique que pour deux cônes différents σ 1 et σ 2 les orbites O σ1 et O σ2 sont aussi différentes (sinon l intersection O σ1 X σ1 σ 2 n est pas vide ). Il reste á montrer que chaque x X appartient à une orbite O σ pour un certain cône σ. On peut choisir un cône σ de dimension minimale, tel que x X σ. On a ϕ x (u) = 0 pour u σ M, u σ M, car sinon x X τ, où τ est une face propre de σ. Donc ϕ x Φ(O σ ) c est-à-dire x O σ. Soit un éventail. On veut maintenant calculer les nombres de Betti de X, définis par b i (X ) = dim(h i (X,R)). On notera d j le nombre de cônes de dimension j dans. Théorème 13. Pour tout éventail simplicial et complet, on a b 2k (X ) = n ( ) i ( 1) i k d n i (4) k i=k les nombres de Betti impairs étant nuls. 11

Démonstration. On admet le fait qu il existe, pour toute variété algébrique complexe X, un polynôme P X qui vérifie: si X est compacte et n a que des singularités quotient, P X (t) = i b i(x)t i ; si Y est une sous-variété fermée de X, on a P X (t) = P Y (t) + P X Y (t); si X et Y sont des varétés, on a P X Y (t) = P X (t)p Y (t). On a P C (t) = P P 1 {0, }(t) = P P 1(t) P {0, } (t) = t 2 + 1 2 = t 2 1 En utilisant le lemme 11, on déduit P X (t) = σ P Oσ (t) = σ P T n dim(σ)(t) = σ (t 2 1) n dim(σ). En comparant les coefficients des polynômes P X et σ (t2 1) n dim(σ) on obtient (4). 3.4 Démonstration des relations de Dehn-Sommerville Soit Q un polytope dans N R. Une face (propre) de Q est un sous-ensemble de Q du type {v Q u,v = c} où u M R et c R sont tel que u,v c sur Q. Tout polytope simplicial dans N R peut être approximé sans changer sa combinatoire par un polytope simplicial Q à sommets dans N Q. On peut supposer que Q contient l origine dans son intérieur (sinon on peut le deplacer). On associe à Q un éventail Q des cônes engendrés par les faces de Q. Exemple Pour un polytope Q (à gauche) on associe l éventail Q (à droite). 0 Q 0 Q 12

Pour l évantail Q on peut considérer la variété torique X Q (on notera plus simplement X Q ) de dimension complexe n. Comme Q est simplicial et complet, la variété X Q est compacte à singularités quotient. Le nombre d i de cônes de dimension i dans est, avec les notations de la section 1, le nombre f i 1 de faces de dimension i 1 de Q (on a défini f 1 = 1). Les nombres de Betti b 2k = dim(h 2k (X Q,R)) sont donc, par le théorème 12, les nombres h k définis en section 1. Pour toute variété complexe compacte X, il existe pour chaque entier i et chaque entier j une opération i,j : H i (X,R) H j (X,R) H i+j (X,R), dite cup-produit. On utilise maintenant deux théorèmes fondamentaux valables lorsque X est à singularités quotient. 1. La dualité de Poincaré dit que si n est la dimension complexe de X, pour tout entier i, 0 i 2n, le cup-produit i,2n i : H i (X,R) H 2n i (X,R) H 2n (X,R) R est une forme bilinéaire non dégénérée. Cela implique que dim(h i (X,R)) = dim(h 2n i (X,R)) et donc b i (X) = b 2n i. En particulier b 2 i(x) = b 2n 2i pour 0 i n. En appliquant ce résultat à la varièté X Q, avec le théorème 12, on obtient les relations de Dehn-Sommerville (2) pour les polytopes simpliciaux. 2. Ensuite, le théorème de Lefschetz difficile dit qu il existe une classe h dans H 2 (X,R) tel que les cup-produits par h i 2,2 h : H i 2 (X,R) H i (X,R), soient injectifs pour 2i n. On en déduit, avec le théorème 12, les relations (3) pour les polytopes simpliciaux. 13

4 Bibliographie [1] Olivier Debarre, Variétés torique et polytopes, note de cours donnée à l École Normale Supérieure en Novembre 2002, http://www-irma.u-strasbg.fr/ debarre/coursens.pdf [2] William Fulton, Introduction to Toric Varieties, Princeton University Press. Nous tenons également à remercier ici David Madore pour ses conseils avisés au sujet de notre mémoire. 14