Selon CGA-Canada, les améliorations apportées au Canada ne sont pas suffisantes



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Transcription:

Rétablissement de la profession comptable à la suite de l affaire Enron Par JEFF BUCKSTEIN, CGA Le présent article est le dernier d une série de trois sur le rétablissement de la profession comptable à la suite de l affaire Enron que M. Buckstein signe dans le Reper. Troisième partie Mesures prises par la profession comptable en réaction à l affaire Enron Surveillance accrue de la profession Selon CGA-Canada, les améliorations apportées au Canada ne sont pas suffisantes Comités de vérification et indépendance des vérificateurs Améliorations des normes d information financière Des normes comptables internationales? La promotion de la déontologie et du maintien de liens étroits avec les clients Les sondages indiquent que la profession semble se rétablir Les CGA des artisans du processus de réforme Troisième partie Mesures prises par la profession comptable en réaction à l affaire Enron L effondrement d Enron et la série d événements qui l a entouré, ainsi que les faillites d autres entreprises en vue telles que WorldCom Inc., ont eu une incidence sur la profession comptable à l échelle du globe. Le résultat a été une analyse sans précédent de la situation actuelle de la profession et de son orientation future. Plusieurs changements importants ont déjà été mis en œuvre au Canada et aux États-Unis à la suite d initiatives de la profession, des autorités de réglementation et des législateurs. Les années 2002-2003 ont probablement été le théâtre des changements les plus radicaux pour la profession comptable depuis qu une loi a été adoptée il y a 70 ans aux États-Unis en vue de prévenir les excès qui ont mené à la Grande dépression. Dans la foulée de l affaire Enron, les comptables et leurs associations ont remis à l ordre du jour des thèmes traditionnels tels que l intégrité, la reddition de comptes, l indépendance et l objectivité pour convaincre le public que la profession reste digne de confiance et déterminée à empêcher d autres faillites d entreprises découlant de mauvaises pratiques en comptabilité ou en vérification. Surveillance accrue de la profession La Loi Sarbanes-Oxley de 2002, qui a été adoptée le 30 juillet 2002, a été la principale initiative législative aux États-Unis et a eu des effets multiples sur la profession comptable. Un des plus visibles a été l établissement du Public Company Accounting Oversight Board (PCAOB), organisation sans but lucratif du secteur privé qui se consacre à la surveillance des vérificateurs des sociétés ouvertes. Lorsque le Congrès américain a créé le PCAOB, il lui a confié le mandat de protéger l intérêt du public et lui a conféré de réels pouvoirs d établissement et de mise en application de normes de vérification. Par exemple, le PCAOB publie des normes liées aux vérifications des sociétés ouvertes dans des domaines tels que le contrôle de la qualité, la déontologie et l indépendance, et d autres normes nécessaires pour protéger l intérêt du public.

En vue d assurer l indépendance du PCAOB, ses cinq administrateurs doivent être compétents sur le plan financier et trois d entre eux ne détiennent pas le titre de Certified Public Accountants (CPA). Au Canada, l une des premières organisations à avoir fait son apparition à l ère post-enron a été le Conseil canadien sur la reddition de comptes (CCRC). Le CCRC a été créé en juillet 2002 par l Institut Canadien des Comptables Agréés (ICCA), de concert avec les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) et le Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF). En octobre 2002, l ICCA a créé le Conseil de surveillance de la normalisation en vérification et certification (CSNVC) qui a pour mandat de superviser les activités du Conseil des normes de vérification et de certification (CNVC) et de contribuer à l établissement de normes de vérification et de certification au Canada. Selon CGA-Canada, les améliorations apportées au Canada ne sont pas suffisantes Tout en notant avec satisfaction que des réformes ont été entreprises chez nos voisins du Sud, CGA-Canada estime que le processus d établissement des normes comptables au Canada n est pas encore devenu suffisamment indépendant. CGA-Canada fait observer également que le CCRC présente des défaillances fondamentales en comparaison du PCAOB. Comme le fait remarquer Barbara Cameron, vice-présidente, Affaires publiques, le PCAOB bénéficie d un degré d indépendance beaucoup plus grand, son financement provenant de cotisations obligatoires des sociétés ouvertes, plutôt que des vérificateurs. Le CCRC, en revanche, a pour principale source de financement les cabinets dont il doit assurer la surveillance. De plus, le PCAOB est pleinement redevable auprès du public et son conseil d administration doit tenir au moins une réunion publique par mois. Les réunions du CCRC se tiennent à huit clos et les CA occupent 15 des 26 postes de membres créés par le règlement intérieur du CCRC (la majorité des membres de son conseil d administration sont toutefois indépendants). CGA-Canada a insisté notamment sur la nécessité de mettre en place un régime d établissement des normes comptables au Canada entièrement indépendant qui ne soit pas lié aussi étroitement à l ICCA. L Association s est également attachée à évoquer les préoccupations ayant trait à la structure du CCRC et a souligné la nécessité que celui-ci soit plus ouvert, plus transparent et entièrement indépendant de la profession. «Dans le contexte de la réforme des entreprises qui fait suite à l affaire Enron, explique M me Cameron, nous devons avoir l assurance que nos processus d établissement des normes comptables et nos mécanismes de surveillance de la vérification sont entièrement indépendants et irréprochables». Al Rosen, FCA, FCMA, CPA, directeur du cabinet de juricomptabilité Rosen & Associates Limited, à Toronto, juge sévèrement ce qu il considère être une absence d indépendance au Canada. «Le Canada, affirme-t-il, est le seul grand pays industrialisé du monde à laisser les vérificateurs établir les règles en matière de comptabilité et de vérification. Les États-Unis ont pris conscience il y a longtemps que cela donnait matière à des conflits d intérêts et ont créé divers organismes pour que l établissement des règles comptables ne soit pas la prérogative des vérificateurs. Et l année dernière, les États-Unis ont conclu finalement que les règles en matière de vérification étaient trop timides.» Rétablissement de la profession comptable à la suite de l affaire Enron Troisième partie 2

Comités de vérification et indépendance des vérificateurs Un des principaux enjeux sur lesquels la profession et les autorités de réglementation se sont penchées est l indépendance des vérificateurs, une grave question de gouvernance d entreprise soulevée par l affaire Enron; certains membres de la haute direction de cette entreprise siégeaient en effet au comité de vérification. En l absence d un organisme de réglementation national, la plus importante commission des valeurs mobilières au Canada, la Commission des valeurs mobilières de l Ontario (CVMO), a été à l origine d une série de règlements qui ont été acceptés par la plupart des provinces et les ACVM. Ces règlements sont entrés en vigueur dans la majeure partie du Canada le 30 mars 2004. Le Règlement 52-110 des ACVM, notamment, précise que les comités de vérification doivent se composer d au moins trois membres, dont chacun doit être indépendant (il n a pas de relation importante, directe ou indirecte avec l émetteur) et posséder des compétences financières (il a la capacité de lire et de comprendre un jeu d états financiers qui présentent des questions comptables d une ampleur et d un degré de complexité comparables). Les vérificateurs externes doivent faire rapport directement à ce comité, qui a aussi la responsabilité d examiner les états financiers, les rapports de gestion et les communiqués avant leur publication. Aux États-Unis, la Loi Sarbanes-Oxley établit également de nouvelles règles relatives à l indépendance du comité de vérification : l indépendance du membre est définie par le fait qu il ne reçoit de l émetteur aucun honoraire autre que pour ses états de service au conseil et qu il n est affilié avec personne dans l entreprise. En décembre 2003, l ICCA a adopté de nouvelles normes sur l indépendance des vérificateurs qui exigeront, notamment, que les vérificateurs ne fournissent aucune assurance sur le travail qu effectue leur cabinet. Les vérificateurs sont assujettis à des règles spécifiques qui leur interdisent d exécuter certains services autres que la vérification pour le même client, par exemple la tenue de livres, les évaluations, le travail actuariel, l impartition de la vérification interne, la conception ou la mise en œuvre de systèmes de TI et les activités de financement de l entreprise. La norme sur l indépendance vise également à interdire aux associés d un même bureau agissant comme associé responsable de la mission de détenir une participation financière dans l entreprise cliente. Le comité de vérification doit approuver au préalable tous les services fournis par le vérificateur. Des dispositions sont également prévues pour la rotation des associés en vérification après cinq ans. La question de l indépendance des vérificateurs est cependant très controversée auprès de nombreux praticiens dont la clientèle se compose presque exclusivement de petites et de moyennes entreprises (PME). La séparation des fonctions de consultation et de vérification ne devrait s appliquer qu aux plus grands cabinets et à leurs clients, et non aux PME et aux CGA praticiens, selon Gary Porter, CA, FCGA, cofondateur du cabinet national Porter Hétu. «Les cabinets comme le mien qui font affaire avec les petites et moyennes entreprises, explique-t-il, ont avec les entreprises exploitées par leur propriétaire une relation différente de celles qu ont les vérificateurs avec les sociétés ouvertes.» La Loi Sarbanes-Oxley précise également que certains services autres que la vérification aux États-Unis, dont la tenue de livres ou d autres services liés directement aux documents Rétablissement de la profession comptable à la suite de l affaire Enron Troisième partie 3

comptables ou aux états financiers du client de la vérification, la conception et la mise en œuvre des systèmes d information financière, les vérifications internes, etc. sont expressément interdits. De plus, la Loi exige que les associés effectuant des missions de vérification auprès de sociétés ouvertes soient remplacés tous les cinq ans. La New York Stock Exchange (NYSE) a également publié des principes directeurs sur les meilleures pratiques pour les comités de vérification (Guiding Principles for Audit Committee Best Practices) dans lesquels elle recommande que tous les membres des comités de vérification des sociétés ouvertes aient des connaissances financières suffisantes pour pouvoir confier une mission aux vérificateurs internes et externes. «(Auparavant), les personnes nommées aux comités de vérification avaient, dans bien des cas, une connaissance très limitée de la comptabilité ou des finances. Les choses sont en train de changer; on s efforce de donner un rôle beaucoup plus important au comité de vérification. Et cette tendance vise un objectif très réel», indique Debra Jeter, CPA, professeure associée à la Owen Graduate School of Management de l Université Vanderbilt à Nashville, au Tennessee. Améliorations des normes d information financière Un des legs de l affaire Enron a été une multitude d améliorations aux normes d information financière visant à rendre les opérations financières plus transparentes et à en faciliter la compréhension pour les investisseurs. En décembre 2003, par exemple, le Financial Accounting Standards Board (FASB) s est penché sur la question des entités à détenteurs de droits variables (également appelées entités ad hoc à l époque où elles étaient exclues du bilan d Enron) et a recommandé qu une entreprise aux États-Unis ayant une participation financière majoritaire dans une entité à détenteurs de droits variables inclue l actif, le passif et les résultats d exploitation de cette dernière dans ses états financiers consolidés. À tout le moins, selon le Accounting Research Bulletin No. 51, «la communication de l information sur les entités à détenteurs de droits variables dans lesquelles une entreprise détient un droit variable important mais dont elle ne consolide pas les comptes aidera les utilisateurs des états financiers à apprécier les risques associés à l entreprise.» [TRADUCTION] L ICCA recommande également que les entités à détenteurs de droits variables soient incluses dans les états financiers. Le Conseil des normes comptables (CNC) ordonne qu à compter de 2004, les sociétés ouvertes canadiennes passent en charges toutes les rémunérations à base d actions (y compris les options sur actions) versées aux salariés, aux cadres dirigeants et aux membres du conseil. La plupart des sociétés fermées devront se conformer à cette exigence en 2005. L International Accounting Standards Board (IASB) a également publié une norme d information qui exigera la passation en charges des options sur actions à compter de 2005. En mars 2004, le FASB a proposé une nouvelle règle, toujours ouverte à la discussion, exigeant que les entreprises passent en charges les options sur actions des salariés, une pratique que plusieurs centaines de sociétés établies aux États-Unis ont déjà adoptée volontairement ou sont disposées à adopter dans un proche avenir. Le rapport de gestion contenu dans le rapport annuel d une entreprise est également amélioré pour donner des renseignements plus détaillés. Rétablissement de la profession comptable à la suite de l affaire Enron Troisième partie 4

En vertu du Règlement 51-102 des ACVM, les états financiers doivent être produits sur demande, avec une copie du rapport de gestion approuvée par tous les membres du conseil, ou par le comité de vérification s il s agit d un rapport de gestion intermédiaire. Le rapport de gestion doit faire état des tendances ainsi que des engagements, des événements, des risques ou des incertitudes qui, selon une estimation raisonnable, auront un effet important sur le rendement futur. En janvier 2003, la Securities and Exchange Commission (SEC) des États-Unis a annoncé que les émetteurs de rapports financiers annuels et trimestriels déposés auprès de la Commission devraient présenter dans le rapport de gestion toutes les opérations importantes hors bilan susceptibles d avoir un effet sur la situation financière actuelle ou future de l entreprise. Le Règlement 52-109 des ACVM exige que les chefs de la direction et les chefs des finances attestent personnellement que les documents annuels et intermédiaires que leur société dépose, y compris les états financiers et le rapport de gestion, ne contiennent pas d information fausse ou trompeuse concernant un fait important, ni n omettent d information concernant un tel fait, et que les états financiers donnent une image fidèle de la situation financière de l émetteur, ainsi que des résultats de son exploitation et de ses flux de trésorerie. Une autre étape prévoit des dispositions selon lesquelles les dirigeants devront attester l efficacité des différents contrôles internes s appliquant à l information financière. Selon l article 302 de la Loi Sarbanes-Oxley, le chef de la direction et le chef des finances doivent attester tous deux que les états financiers et les informations communiquées sont exacts à tous les égards importants. Ils doivent également fournir une évaluation de l efficacité des contrôles internes en place. La Loi prévoit des sanctions pénales aux États-Unis en cas de fraudes intentionnelles. Des normes comptables internationales? Concernant l approche privilégiant les règles plutôt que les principes, un grand nombre de spécialistes de la comptabilité estiment que l affaire Enron devrait déboucher sur la mise en place de normes et de principes de comptabilité à l échelle internationale. Ceux-ci font valoir que ces normes inciteraient différents pays dans le monde à élaborer un jeu universel de normes d information financière de grande qualité donnant l assurance aux investisseurs que l information qu ils consultent est exacte et peut être appliquée partout. C est l un des points que des représentants de CGA-Canada ont soulevés en 2002 et 2003 devant le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, qui a mené une enquête pendant un an après l affaire Enron sur l état des systèmes financiers nationaux et internationaux. L Union européenne a déjà décidé d appliquer les normes comptables internationales à toutes ses sociétés cotées avant 2005, bien que certains détails comme la comptabilisation par les institutions financières de la juste valeur de certains instruments financiers doivent encore être finalisés. «Je pense que le moment est propice, indique M me Jeter. Avant, il y avait toujours des gens aux États-Unis qui disaient qu ils ne suivraient aucune autre norme que les PCGR des États-Unis car ce pays avait les meilleurs principes au monde. Aujourd hui, nous devons à tout le moins envisager sérieusement la possibilité que le comité sur les normes internationales parvienne à une meilleure solution». En décembre 2003, Scott Voynich, président nouvellement nommé de l American Institute of Certified Public Accountants (AICPA), s est exprimé en ces termes lors de la conférence nationale de l Institut sur les récents développements à la SEC : «De toute évidence, la Rétablissement de la profession comptable à la suite de l affaire Enron Troisième partie 5

convergence des normes comptables est une nécessité. Nous croyons en un principe clair : un univers financier, un langage financier. Il est impossible que les PCGR des États-Unis soient imposés au reste du monde ni que les Américains soient obligés d adopter les normes de l IASB. Nous appuyons le FASB et l IASB dans la réalisation d un objectif commun : l adoption des meilleurs principes comptables qui soient.» [TRADUCTION] M. Rosen indique que l obstacle à la mise en place de normes internationales est la liberté trop grande qu a chaque pays de faire comme bon lui semble. «On ne peut pas parler, explique M. Rosen, de principes universels; nous sommes plutôt en présence de compromis fondés sur des partis pris nationaux qui remontent à loin». Il ajoute que les normes internationales recommandées par l International Accounting Standards Committee (IASC) sont tellement vastes qu on s y perd facilement.» Il préconise que les normes internationales visent d abord et avant tout la protection des actionnaires. Selon M. Rosen, ces normes devraient être établies soigneusement par des représentants des différents pays et des modifications tenant compte des lois s appliquant d un pays à l autre devraient être autorisées. La promotion de la déontologie et du maintien de liens étroits avec les clients Du point de vue du marketing, CGA-Canada a décidé de mettre davantage l accent sur la déontologie que par le passé. «Nous sommes conscients, indique M me Cameron, de la nécessité de faire savoir au monde que notre code de déontologie et nos règles de conduite ont toujours fait partie de notre pratique.» Elle signale par exemple un article sur la déontologie professionnelle que CGA-Ontario a inclus dans un supplément publicitaire paru dans le Globe and Mail en novembre 2003. Toujours dans la foulée de l affaire Enron, un examen du Code des principes d éthique et règles de conduite (Code) de CGA-Canada a été entrepris. Nous avons déterminé, explique Rita Marnoch, directrice des Affaires professionnelles à CGA-Canada, que notre code actuel, avec son approche fondée sur les principes, était suffisamment exhaustif et ne nécessitait pas de changements importants. Il nous est apparu toutefois qu une approche plus globale à l égard de l indépendance était justifiée. L Association élabore maintenant cette norme en s inspirant du Code de l International Federation of Accountants (IFAC) comme modèle.» «L environnement a un effet sur nous,» signale Tina Peters, directrice des Services-conseils pour les cabinets privés, CGA-BC. Elle ajoute cependant que comme les problèmes soulevés par l affaire Enron concernaient davantage les plus grandes entreprises, elle n a pas eu d effets négatifs sur la relation qu ont les CGA avec leurs clients des petites et moyennes entreprises. Don DiCarlo, CGA, associé au cabinet Evancic Perrault Robertson (EPR) à London, en Ontario, partage ce point de vue : «Assez étrangement, admet-il, je ne me suis jamais demandé si mes clients mettaient en doute mon intégrité ou la confiance qu ils m accordaient. Je n ai jamais eu l impression que je devais faire quelque chose pour améliorer ou préserver cette perception.» Rétablissement de la profession comptable à la suite de l affaire Enron Troisième partie 6

Les sondages indiquent que la profession semble se rétablir L examen des résultats de différents sondages, même si les méthodes employées peuvent être différentes, est l un des meilleurs moyens de mesurer la perception du public à l égard de la profession comptable tout de suite après l affaire Enron et aujourd hui. Ainsi, un sondage commandé par les Certified Management Accountants of Alberta (CMA Alberta) en avril 2002 a révélé que 25 % des Albertains estimaient que la réputation de la profession comptable avait souffert de l affaire Enron. L ampleur des préoccupations du public a également été démontrée par les résultats d un sondage national commandé et publié par CGA-Canada en 2002. Dans le cadre de ce sondage réalisé par Pollara Inc., près de 75 % des répondants au courant de l effondrement d Enron estimaient qu un scandale financier comparable pourrait très bien éclater au Canada. Les sondages plus récents, cependant, semblent indiquer que le public a repris un peu confiance dans les comptables au Canada et aux États-Unis, peut-être en partie grâce aux efforts des membres de la profession, des autorités de réglementation et des gouvernements des deux côtés de la frontière. En janvier 2003, un sondage Reader s Digest réalisé par Ipsos-Reid, importante société canadienne d études de marché et de sondages, indiquait que la profession résiste bien, et fait certainement mieux que la plupart des autres professions. À peine un peu plus de la moitié des répondants, soit 52 %, jugeaient les comptables dignes de confiance. Bien que ce résultat puisse sembler médiocre, il faut préciser que la profession se classait huitième sur 26 professions et organisations participantes et devançait largement l appareil judiciaire, les conseillers financiers, les institutions religieuses, les avocats et les chefs de direction, parmi d autres. Au Canada, au moins, il semble que les administrateurs et les chefs de direction sont les premiers visés par les préoccupations du public à la suite de l affaire Enron, selon John Wright, vice-président directeur des Affaires publiques pour Ipsos-Reid, à Toronto, qui indique qu on pointait la haute direction de l entreprise plutôt que les agents de la comptabilité. Chez nos voisins du Sud, un sondage Gallup réalisé à l été 2003 sur la perception du public à l égard de diverses professions a révélé un important rétablissement de l image de la profession comptable. Se chiffrant à 31 % en 2002, la cote positive des comptables a bondi à 45 % en 2003, soit seulement deux points de moins qu en 2001, avant l effondrement d Enron. Parallèlement, la cote négative est passée de 31 % en 2002 à 14 %. Les CGA des artisans du processus de réforme CGA-Canada a été un ardent défenseur d une réforme au sein de la profession comptable à l ère post-enron. Que ce soit auprès du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce à Ottawa et du Conseil de surveillance de la normalisation comptable (CSNC) à Toronto, ses représentants n ont cessé de mettre de l avant des mesures qu ils estiment nécessaires pour prévenir d autres cas de pratiques abusives des entreprises. CGA-Canada applaudit aux initiatives déjà enclenchées, mais soutient que d autres actions doivent être entreprises pour que la profession serve mieux les intérêts du public. Par conséquent, les CGA ont préconisé à plusieurs reprises différentes mesures, dont l adoption de normes comptables internationales pour que les investisseurs sachent que des normes Rétablissement de la profession comptable à la suite de l affaire Enron Troisième partie 7

mondiales s appliquent à l interprétation des résultats financiers, ainsi que la fin de la domination des CA au Canada, en particulier dans de nouveaux organismes régissant les entreprises comme le CCRC. L Association fait valoir que le CCRC doit tirer pleinement parti du savoir-faire des CGA et entendre les autres voix de la profession. Le public canadien bénéficierait ainsi d un processus de prise de décisions et de surveillance de la vérification plus indépendant, plus ouvert et transparent. CGA-Canada et ses affiliés sont prêts, comme ils l ont toujours été, à jouer un rôle clé dans ce processus. La prise de conscience des problèmes soulevés par l affaire Enron et du fait que le Canada n est pas immunisé peut contribuer à dissiper les nuages qui ont pesé sur la profession comptable en ce début de siècle. Jeff Buckstein, CGA, est rédacteur pigiste; il vit à Ottawa. Il s agit du dernier article de la série sur le rétablissement de la profession comptable à la suite de l affaire Enron que M. Buckstein signe dans le Reper. Rétablissement de la profession comptable à la suite de l affaire Enron Troisième partie 8