1. Clemens LAMMERSKITTEN, Allemagne (R, PPE/CCE) Madame la Secrétaire d Etat, Le rapport de monitoring sur la France a mis en évidence l importance d avoir un système de péréquation fiscale entre les différents niveaux de gouvernement qui soit juste et transparent, et ce pour la bonne santé des autorités locales et régionales. Ces entités doivent être dotées de solides bases financières pour remplir pleinement les responsabilités et pouvoirs qui leur sont transférés par d autres niveaux de gouvernement. Vous avez la responsabilité de réaliser ces tâches au sein de votre ministère et de votre gouvernement. Le Congrès serait heureux de voir la France présenter dans un futur proche un nouveau régime de stabilisation financière et ainsi inspirer d autres Etats membres du Conseil de l Europe par son système. Pourriez-vous s il vous plaît nous donner plus de détails sur les solutions possibles pour stabiliser les budgets locaux? Quels pourraient être les éléments clefs de la réforme structurelle financière des collectivités locales que vous comptez présenter l année prochaine? Que pourraient faire les collectivités locales elles-mêmes pour augmenter entre autres le rendement de leurs taxes locales?
Réponse : L autonomie financière des collectivités territoriales est une condition fondamentale à la décentralisation telle que nous la concevons en France. Il faut donner aux collectivités les moyens de mener les politiques publiques qui leur sont dévolues. Cette autonomie passe par une fiscalité dynamique adaptée à leurs compétences (1), ainsi que des dotations qui, à mon sens, doivent permettre de rééquilibrer les écarts de richesse entre territoires, et doter les collectivités du niveau de ressources suffisant pour offrir des services de qualité et développer les infrastructures (2). (1)Les collectivités territoriales françaises disposent d une fiscalité locale directe et indirecte produisant 119 Md de recettes, soit 55% de leurs recettes totales, une part supérieur à la moyenne européenne. En cohérence avec l exercice de la clause de compétence générale, le bloc communal dispose d une fiscalité diversifiée avec des impôts assis sur les ménages ainsi que sur les entreprises, avec une part majoritaire d impôts dont les communes et leurs groupements peuvent fixer le taux.
Les départements, dont la compétence est resserrée par la réforme territoriale autour de la matière sociale et de la solidarité territoriale, disposent d un socle d impôts fonciers dynamique, avec un pouvoir de taux important, qui a été en partie renforcé dans le cadre du Pacte de confiance et de solidarité, conclu avec le Gouvernement en juillet 2013. Par ce pacte les départements ont été autorisés à relever le taux de droits de mutation à titre onéreux, mesure aujourd hui pérennisée. Les conseils départementaux disposent par ailleurs d une part de fiscalité économique aujourd hui élevée, mais qui a vocation à diminuer au bénéfice des Régions en cohérence avec la clarification des compétences recherchée par la réforme territoriale, qui fait des Régions des moteurs du développement économique. Leur compétence en matière de transport s accompagne d un transfert de fiscalité directe économique, la Cotisation sur la Valeur Ajoutée des entreprises (au total, les Régions percevront 50% de la CVAE soit plus de 8 Md contre 25% actuellement). C est une nécessité pour ce niveau de collectivité dont les ressources fiscales étaient faibles. Une réflexion plus large a lieu avec le Gouvernement sur la demande des régions d un renforcement de la part des ressources fiscales dans leur panier de ressources.
Le Gouvernement a engagé un grand chantier d actualisation des valeurs qui servent de base aux principales impositions directes locales, aujourd hui obsolètes. C est une question d équité vis-à-vis de nos concitoyens, et cela permettra de moderniser significativement les finances locales. (2) Vous évoquez ensuite la question des dotations de l Etat aux collectivités et de la réforme que ce Gouvernement a engagée, et dont les grandes lignes ont été votés dans le cadre du projet de loi de finances 2016. Une mission parlementaire initiée par le Gouvernement en 2015 a démontré que la DGF des communes et intercommunalités aggrave les écarts de richesse au lieu de les réduire. Dans le contexte de raréfaction de l argent public, il est primordial de le répartir dans la justice, pour donner à chaque collectivité les moyens d agir. Ainsi, les objectifs de la réforme ambitieuse de la DGF sont simples : plus de justice dans son attribution, une meilleure lisibilité sur une architecture simplifiée, la prise en compte des réalités de la gestion locale et notamment de l intégration intercommunale. C est pourquoi le Gouvernement a souhaité, à la demande du Parlement et du Comité des finances locales, présenter dans le Projet de loi de finances les
principes et l architecture de a réforme, et disposer d un an avant sa mise en œuvre. La réforme pourra ainsi être directement adaptée à la nouvelle carte intercommunale, qui peut changer la donne dans beaucoup de territoires : les dotations de centralité des villes centres seront différentes, les dotations des EPCI également et il faut garder de la lisibilité pour préparer les budgets, ne pas tout changer entre 2016 et 2017 avec la nouvelle carte. Le Parlement a donc voté les grands principes de la réforme dans la loi de finances 2016 avec une entrée en vigueur de la réforme au 1er janvier 2017. Le travail a repris, dès janvier, avec le Parlement, le CFL et les associations d élus. Le Gouvernement remettra au Parlement un rapport à l issue de la concertation et les ajustements nécessaires seront votés au PLF 2017 pour une application au 1er janvier suivant.