Le 14 décembre 2010 Energie et envirnnement : l Amérique latine est elle entrée dans un cercle vertueux? Jean Pierre HAUET KB Intelligence Puzzle énergétique, mdèle envirnnemental : deux qualificatifs que l n purrait appliquer à l Eurpe des 27, parce que les situatins énergétiques y snt très variables d un pays à l autre et parce que l Eurpe entend, avec plus u mins de légitimité et de succès, se faire recnnaître cmme une référence internatinale dans le dmaine de l envirnnement. Qu en est il de l Amérique latine? celles de ntre partenaire nigérien, mais n en truve aussi en Argentine, Un puzzle énergétique riche en ressurces A cup sûr l Amérique latine peut également être qualifiée de puzzle énergétique car n rencntre des situatins snt très diverses au sein des 18 pays qui la cmpsent. Mais il y a une différence essentielle par rapprt au puzzle eurpéen : le blc latin américain pssède des ressurces énergétiques sans cmmune mesure avec les ressurces eurpéennes et la plupart des pays en pssède un quta respectable. Le Venezuela, le Mexique, à présent le Brésil, snt de grands pays prducteurs de pétrle, sans ublier l Equateur revenu dans l OPEP en 2007, Le Venezuela, l Argentine, Trinidad et Tbag, la Blivie, le Brésil, la Clmbie nt des prductins de gaz significatives, La Clmbie est un grs prducteur de charbn, devançant le Brésil qui pssède cependant des réserves supérieures, Le Brésil dispse de plus de 6% des réserves mndiales d uranium, cinq fis Le Brésil dispse de ressurces hydrélectriques cnsidérables, qui lui permettent de prduire actuellement plus de 400 TWh d électricité, sit à peu près l équivalent de la prductin ttale d électricité de la France. Ces ressurces snt également abndantes en Amérique centrale, Enfin ajutns à cela les réserves de matières premières qui vnt juer un rôle crucial dans les dmaines nuveaux de l énergie, en particulier le lithium, nécessaire aux batteries des véhicules électriques et que l n truve en abndance dans les salars du Chili u de Blivie. 1
La plupart des grands pays snt ainsi plus qu autsuffisants en ressurces énergétiques et le taux d autnmie énergétique pur l ensemble de l Amérique latine est de l rdre de 125%. Il dépasse 150% dans le cas du pétrle et même 230% dans le cas, écnmiquement plus marginal, du charbn. Une première questin est évidemment de savir cmment évluent ces ressurces et, sur ce pint, une différence de situatin majeure est à suligner entre le Mexique et les pays des Amériques centrale et du Sud. Le Mexique a vu ses réserves pruvées en pétrle fndre de 75% en 20 ans, au pint de ne plus dispser en 2009 que de 11 années de prductin. Le bm du pétrle au Mexique remnte maintenant à une centaine d années et la Pemex y a été natinalisée dès 1938. A cntrari, les Amériques centrales et du Sud nt augmenté leurs réserves pruvées en pétrle de 186% entre 1989 à 2009 et peuvent faire face à présent à 80 années de prductin au rythme actuel, cntre 60 20 ans plus tôt. On cnnaît bien sûr l imprtance du Venezuela qui détient 13% des réserves mndiales de pétrle (hrs pétrle lurd de la ceinture de l Orénque) mais le Brésil a émergé récemment cmme l un des grands pays pétrliers de la planète avec de très grandes décuvertes ff shre, ntamment celle en 2007 du champ géant de Tupi, à 2200 mètres de prfndeur d eau dans le bassin de Sants. En gaz, les réserves nt augmenté de 68% en 20 ans et cuvrent à présent 53 ans de cnsmmatin (base 2009), avec ntamment la décuverte du gisement majeur Jupiter au Brésil. Le charbn, finalement assez peu utilisé, crrespnd à plus de 180 ans de réserves, et les ressurces hydrélectriques, cnsidérables au Brésil, n y snt explitées qu à hauteur d envirn 1/3 de leur ptentiel écnmiquement valrisable. Ce panrama rapide dit être cmplété par une mentin des ressurces de la bimasse et de la prductin d éthanl ntamment. Avec 13 Mtep prduites en 2009, le Brésil jue à jeu à peu près égal avec les USA mais avec l avantage d utiliser essentiellement les ressurces de la canne à sucre, valrisant ainsi la bagasse cmme cmbustible pur la distillatin et ffrant un bilan écnmique et éclgique à peu près satisfaisant. D autres pays s inspirent de cet exemple, ntamment le Salvadr et Belize. La situatin n est cependant pas aussi brillante qu il y parait Tut semble ainsi aller pur le mieux et ses ressurces naturelles semblent permettre à l Amérique latine de faire face aisément aux besins induits par sa crissance. Cette crissance est frte depuis plus de 20 ans : 65% envirn de 1990 à 2006 et plus de 15% de 2003 à 2006, alrs que l écnmie eurpéenne n a prgressé dans les mêmes pérides que de respectivement 40 et 6%. Purtant tut n est pas aussi simple : On a vu que la Mexique, qui tire encre plus de 35% de ses ressurces budgétaires de sn activité pétrlière, a laissé fndre ses réserves aussi bien en pétrle qu en gaz de façn très préccupante. Par ailleurs, certains pays divent imprter tut u partie de leur pétrle et de leur gaz : le Chili, l Uruguay, le Paraguay et la plupart des pays d Amérique centrale : le Guatemala, le Panama, le Csta Rica, le Nicaragua pur n en citer que quelques uns. Enfin la plupart des pays n nt pas une gestin «ménagère» de leurs ressurces et ne préparent pas suffisamment l avenir. Nus ne discuterns pas dans cet article du prblème de l affectatin générale des ressurces tirées de la rente minière. On sait qu il y a des pays plus u mins vertueux : la Nrvège s est cnstituée un fnds de retraite public de l rdre de 300 milliards d eurs qui permettra 2
aux génératins futures de faire face au prblème des retraites pendant 50 ans au mins. A cntrari, bn nmbre de pays prducteurs se snt installés dans un rythme de dépenses publiques qui n est sutenable que dans la duble hypthèse d un maintien de leurs prductins et d une stabilisatin des prix du pétrle à un niveau assez élevé, disns 80 $/bbl. Nus nus limiterns ici à quelques remarques liées à l énergie et à l envirnnement. L Amérique latine suffre encre plus que l Eurpe de l absence de plitique énergétique Il ne suffit pas d avir des ressurces, il faut savir les mbiliser et dnc investir. Pur cela tris cnditins snt nécessaires : - Avir des ressurces financières, dnc ne pas gaspiller l argent, - Juir d une stabilité plitique suffisante, - Mener au niveau des états une plitique qui sit suffisamment sécurisante pur les investisseurs. Ces cnditins ne snt pas en règle générale remplies. Il est clair que la natinalisatin des ressurces en Blivie et la plitique «ppuliste» menée depuis les années 1990 en Blivie, au Venezuela, en Equateur est venue décurager les investissements et rendre la cpératin entre pays plus difficile. La natinalisatin du gaz en Blivie en 2006 a cnduit le Brésil a vulir s émanciper d un furnisseur jugé peu sûr. La prductin et les réserves se snt mis à stagner vire à régresser. En fait, l une des grsses faiblesses du puzzle latin américain est, encre plus qu en Eurpe, si c est pssible, l absence d une plitique cmmune de l énergie. On cnnait la méfiance qui enture traditinnellement les relatins entre certains pays visins tels que le Chili et l Argentine u le Venezuela et la Clmbie. Mais un grs prblème est l absence d harmnisatin dans le régime des prix intérieurs et des subventins. L Argentine a eu une plitique de prix dmestiques, y cmpris pur l électricité, décurageant les investissements, ntamment dans le dmaine du gaz, et la frçant en 2004 puis en 2006 à un nn respect de ses cntrats signés en 1995 avec le Chili, lequel s est turné vers d autres surces d apprvisinnement. Cette insuffisance d investissements dans la filière énergétique se répercute sur l aval : centrales électriques, pipelines, gazducs, stckages, sans ublier la maintenance des installatins trp suvent négligée. Il s ensuit des alertes parfis sérieuses : des cupures d électricité snt intervenues à plusieurs reprises en Argentine, au Brésil, au Chili pur ne citer que les plus grands pays car la situatin reste difficile dans plusieurs pays d Amérique centrale. Il est clair que certains pays savent mieux que d autres tirer parti de leurs ressurces naturelles. On vit émerger des plitiques de cpératin plus uvertes au Brésil, en Clmbie, au Péru, au Chili, dans les pays d Amérique centrale et même au Mexique alrs que la situatin reste fermée au Venezuela, en Equateur, en Blivie, et même en Argentine. Prbablement, les chses évluernt et il y a beaucup à gagner à ce qu il en aille ainsi dans deux directins : - Le renfrcement de la cncertatin et de la cpératin réginale, en termes de furniture de prduits énergétiques mais aussi d intercnnexin des réseaux électriques. Bien entendu cela implique une plitique d uverture des marchés, de libéralisatin des prix et sur ce pint 3
l exemple du puzzle eurpéen peut être pertinent, - L uverture au mnde extérieur pur attirer de nuveaux investisseurs et simultanément s insérer davantage dans les flux cmmerciaux internatinaux, audelà de ce que permet aujurd hui le canal de Panama. L Amérique latine : un des grands pôles d émissin de gaz à effet de serre Si n se fcalise sur les prblèmes assciés à l énergie, c est bien entendu en pririté vers la questin du climat et des émissins de gaz à effet de serre que les regards se turnent. La cnférence de Cancun nus y invite d ailleurs. L Amérique latine et surtut l Amérique du sud cnstituent des cas très particuliers : En vlume d émissins, le blc latin américain représente, hrs effet du changement d affectatin des sls, envirn 3.6 Mds de t d émissin de CO 2 e sit 9.6% des émissins mndiales. Mais si l n intègre, l effet changement d affectatin des sls, en particulier l impact de la défrestatin, le chiffre passe à 6,2 Mds de t de CO 2 e sit 14.2% des émissins mndiales, plus que l Eurpe et à peu près à égalité avec les USA et la Chine. La prise en cmpte de la défrestatin suffit à faire passer le Brésil du 8 ème rang mndial des émetteurs au 4 ème rang. On cnsidère que dans ce pays, entre 1970 et 2009, 17.5% de la frêt amaznienne a été détruite sit quelque 700 000 km2 (dnc plus que la surface de la France) de frêts détruites. Mais le Brésil n est pas le seul pays ù la questin se pse. Le prblème de la défrestatin est d une grande cmplexité. Il résulte suvent d une explitatin sauvage, frauduleuse, vire maffieuse des ressurces naturelles. Mais la défrestatin est parfis nécessaire pur permettre aux ppulatins lcales de survivre et de dévelpper leur agriculture. Enfin la défrestatin peut être une cnséquence indirecte et malencntreuse d évlutins de la structure des apprvisinnements énergétiques que l n suhaite par ailleurs encurager : barrages hydrélectriques et cultures énergétiques ntamment. La lutte cntre la défrestatin dans le cadre des mécanismes internatinaux est extrêmement cmplexe. On verra ce qu il advient des réslutins prises à Cancun. Mais chacun prte sa part de respnsabilité : l Eurpe imprte par exemple des quantités imprtantes de turteaux de sja qui cnduisent à substituer à la frêt des cultures de sja et à relâcher dans l atmsphère des quantités imprtantes de CO 2. Une autre spécificité imprtante des émissins en Amérique latine réside dans l imprtance du secteur agricle et partant dans le pids que revêt le méthane et subsidiairement les xydes d azte relâchés dans l atmsphère. On est très lin de la prprtin de 75% généralement cnstatée quant la respnsabilité du CO 2 au sein des émissins de GHG et plus prche de 50% pur l ensemble de l Amérique latine vire 40% si l n exclut le Mexique. Le méthane à lui seul pèse pur 35% des émissins. C est dire que les précnisatins que l n peut faire en Eurpe pur réduire les émissins de GES ne peuvent pas être transcrites sans précautins au cas de l Amérique latine. L Amérique latine est elle entrée dans un cercle vertueux? Ayant rappelé ces spécificités, peut n cnsidérer que l Amérique latine fait partie 4
des bns élèves en matière de lutte cntre le changement climatique? En valeur abslue, les émissins de CO 2 du Brésil et dnc par effet d entraînement celles de l Amérique du Sud, snt très prches que celles de la France rapprtées à l unité de PIB (envirn 210 t de CO 2 e par millins d $ ppt). L hydraulique jue au Brésil un rôle similaire à celui du nucléaire en France. Par cntre l évlutin des ces intensités énergétiques ne fait pas apparaitre de signaux encurageants : Les émissins de CO 2 de l Amérique du Sud nt cru de 1990 à 2006 de 65% alrs que l écnmie crissait de 58%. Le prgrès en termes d intensité énergétique est dnc faible. Dans le même temps, les émissins de GES de l Eurpe des 27 nt diminué de 5% alrs que la crissance était de l rdre de 35%. Alrs le mdèle envirnnemental serait il celui de l Eurpe, cmme les thuriféraires de la plitique eurpéenne se plaisent à l affirmer? Pas si sûr. Une étude très récente du think tank anglais «Plicy exchange» intitulée «Carbn missins», fndée sur les émissins de carbne au niveau de la cnsmmatin et nn de la prductin, tend à mntrer que l Eurpe des 6 transfère aujurd hui 1/3 de ses émissins réelles de CO 2 sur ses imprtatins nettes de prduits industriels u agricles, cntre 3% en 1990. Les échanges de CO 2 enfui dans des prduits cmmerciaux nt d une façn générale cnsidérablement augmenté depuis 1990. Les exprtatins nettes de la Chine expliqueraient à présent 27% de ses émissins. La France serait particulièrement mal placée dans ce décmpte cependant que le Brésil et le Mexique auraient cnservé une balance cmmerciale du carbne à peu près équilibrée. Si l n admet ses cnclusins, n vit que l Eurpe et l Amérique latine nt suivi des trajectires très semblables mais encre très élignées de celles menant à une écnmie faiblement carbnée. Le champ à parcurir reste cnsidérable. Face au prblème du climat, le puzzle latinaméricain est encre plus désrdnné que sn hmlgue eurpéen. On se suvient qu à Cpenhague, les pays d Amérique latine ne snt même pas parvenus à cnserver une unité de façade. La Blivie, le Venezuela et le Nicaragua nt pris immédiatement une psitin hstile au texte mis au pint en tute dernière minute en présence du Brésil, mais négcié sans eux, cmme sans l Eurpe d ailleurs. Depuis lrs le Brésil a précisé ses intentins, qui snt ambitieuses : réduire ses émissins d un 1/3 d ici 2020 grâce à une défrestatin maîtrisée, dnt il entend faire sn affaire, le dévelppement de l hydr électricité, des bicarburants et de la cnservatin de l énergie. Peut il y parvenir? On peut en duter. L hydr électricité sulève de plus en plus de cntestatins envirnnementales et le feu vert dnné en février 2010 au barrage de Bel Mnte qui sera par sa puissance électrique installée le trisième au mnde, sulève une levée de bucliers. Les énergies éliennes et slaires ne snt quant à elles que très faiblement représentées dans l ensemble des pays de l Amérique latine, ù les cnditins seraient purtant prpices à leur dévelppement. On le vit la situatin n est pas simple. Le Brésil, qui dispse déjà de deux réacteurs de puissance, snge à présent au lancement d un prgramme nucléaire de 4 réacteurs de 1000MW. La France est sur les rangs et un accrd préliminaire a été signé en 2009 au niveau guvernemental. L Argentine, le 5
Mexique, qui eux aussi nt déjà des réacteurs en service, fnt de même et discute avec différents partenaires. Le Chili et le Venezuela snt suvent mentinnés dans les listes de prim accédants ptentiels. Au final, n peut se demander si un suscntinent aussi richement dté en ressurces naturelles que ne l est l Amérique latine peut se passer, cmpte tenu des cntraintes qui pèsent aujurd hui sur chacune des énergies, de l énergie d rigine nucléaire. La répnse est prbablement nn, même si d aucuns rêvent tujurs d un avenir plus vert. 6