Syndrome de Renutrition Inapproprié (SRI)

Documents pareils
Titre : «CYCLISME ET DIABETE DE TYPE 1» Auteur(s) : Docteur Karim BELAID. Catégorie : Médecine du Sport - Diaporama, 20 vues.

COMMISSION DE LA TRANSPARENCE AVIS. 19 octobre 2011

L APS ET LE DIABETE. Le diabète se caractérise par un taux de glucose ( sucre ) trop élevé dans le sang : c est l hyperglycémie.

PRISE EN CHARGE DES PRE ECLAMPSIES. Jérôme KOUTSOULIS. IADE DAR CHU Kremlin-Bicêtre. 94 Gérard CORSIA. PH DAR CHU Pitié-Salpétrière.

Tableau récapitulatif : composition nutritionnelle de la spiruline

Chapitre II La régulation de la glycémie

Les Jeudis de l'europe

L obésité et le diabète de type 2 en France : un défi pour la prochaine décennie. DANIEL RIGAUD CHU de Dijon

INSUFFISANCE CARDIAQUE «AU FIL DES ANNEES»

Le traitement du paludisme d importation de l enfant est une urgence

Déficit neurologique récent. Dr N. Landragin CCA Neuro

DIABETE ET SPORT. Dominique HUET Hopital Saint Joseph PARIS

En savoir plus sur le diabète

Diabète et risque cardiovasculaire: Le syndrome métabolique en question

Diabète Type 2. Épidémiologie Aspects physiques Aspects physiologiques

epm > nutrition Formation & Conseil

Besoins Nutritionnel. Besoins. ANC / Besoin. 3 niveaux : Faculté de Médecine Montpellier-Nîmes

ÉVALUATION DE LA PERSONNE ATTEINTE D HYPERTENSION ARTÉRIELLE

HTA et grossesse. Dr M. Saidi-Oliver chef de clinique-assistant CHU de Nice

Gestion de l insuline iv. : version pour les Soins continus de médecine

CLINIMIX AVIS DE LA COMMISSION DE LA TRANSPARENCE

Thérapeutique anti-vhc et travail maritime. O. Farret HIA Bégin

ACTUALITES THERAPEUTIQUES. Dr Sophie PITTION (CHU Nancy) Metz, le 2 Juin 2012

L influence du sport sur le traitement du diabète de type 1

Le traitement pharmacologique du diabète de type 2 : que devez-vous savoir?

INSULINOTHERAPIE FONCTIONNELLE

TRAITEMENTS MEDICAMENTEUX DU DIABETE DE TYPE 2 (Hors Insuline) MAREDIA Dr Marc DURAND

epm > nutrition Formation & Conseil

LES ACCIDENTS DUS A L ELECTRICITE. Comité pédagogique SAP SDIS 43

Prise en charge de l embolie pulmonaire

HEPATITES VIRALES 22/09/09. Infectieux. Mme Daumas

La gestion du diabète lors des sports : apports des nouvelles technologies

Un diabète de type 2. Vers un programme Sport Santé pour les personnes vivant avec. Atelier animé par :

Fiche de synthèse. Learn. Les points essentiels pour l accompagnement d un patient diabétique. Parcours : Prise en charge du diabète à l officine

LE POINT TOX. N 7 - Juillet Bulletin du réseau de toxicovigilance de La Réunion L ÉVOLUTION TEMPORELLE DU NOMBRE D INTOXICATIONS

Observation. Merci à l équipe de pharmaciens FormUtip iatro pour ce cas

Session Diagnostic. organisme gestionnaire du développement professionnel continu.

Migraine et céphalées de tension: diagnostic différentiel et enjeux thérapeutiques

DENUTRITION : UN RISQUE MAJEUR EN INSTITUTION. Un exemple de prise en charge réussie sur 2009 au sein d un EHPAD de 63 lits

Dr Laurence FAYARD- JACQUIN Cœurs du Forez Mise à jour

I - CLASSIFICATION DU DIABETE SUCRE

Diabète et exercice physique

LE GRAND LIVRE Du. Pr Jean-Jacques Altman Dr Roxane Ducloux Dr Laurence Lévy-Dutel. Prévenir les complications. et surveiller la maladie

Utilisation des substrats énergétiques

Ac#vité Physique et Diabète

B06 - CAT devant une ischémie aiguë des membres inférieurs

GUIDE D INFORMATIONS A LA PREVENTION DE L INSUFFISANCE RENALE

DIABÈTE DE TYPE 1. Physiopathologie Carence absolue en insuline par destruction AI des ilôts β pancréatiques

Questionnaire Médical

Activité 38 : Découvrir comment certains déchets issus de fonctionnement des organes sont éliminés de l organisme

«Peut-on jeûner sans risque pour la santé?»

Cas clinique n 1. Y-a-t-il plusieurs diagnostics possibles? Son HTA a t elle favorisé ce problème?

Atelier N 2. Consultation de patientes porteuses d une maladie générale

Dextro Energy gel Liquid Apple

Dossier d information sur les bêtabloquants

THEME 2 : CORPS HUMAIN ET SANTE : L EXERCICE PHYSIQUE

MIEUX COMPRENDRE CE QU EST UN ACCIDENT VASCULAIRE CÉRÉBRAL AVC

Tâche : Comparer l étiquette de produits alimentaires afin de connaître leur valeur nutritive.

Bienvenue aux Soins Intensifs Pédiatriques

Diabetes Service. Diabète et exercice physique

Fibrillation atriale chez le sujet âgé

La migraine. Foramen ovale perméable. Infarctus cérébral (surtout chez la femme)

Comment la proposer et la réaliser?

SP. 3. Concentration molaire exercices. Savoir son cours. Concentrations : Classement. Concentration encore. Dilution :

e-santé du transplanté rénal : la télémédecine au service du greffé

L ajustement de l insuline au quotidien

EXEMPLE DE METHODOLOGIE POUR L ELABORATION D UN PROTOCOLE DOULEUR Marie AUBRY Infirmière référente douleur Hôpital TENON AP-HP Paris XX e SOMMAIRE

Diabète de type 1: Informations destinées aux enseignants

Fiches techniques Alimentation par sonde Nutrison

Quoi manger et boire avant, pendant et après l activité physique

Séquence maladie: insuffisance cardiaque. Mieux connaître l insuffisance cardiaque Vivre avec un DAI

REPOUSSER LES LIMITES DE LA CHIRURGIE BARIATRIQUE DANS LES OBESITES MASSIVES AVEC COMORBIDITES

Le traitement en effet est, au début, une épreuve pour tout le monde : la malade d abord, les parents ensuite et même les thérapeutes.

Programme de prise en charge et de suivi en anticoagulothérapie

Intoxications au Monoxyde de Carbone (CO)

L équilibre alimentaire.

FORMULAIRE DE DECLARATION DU RISQUE PERTE DE PROFESSION INSTRUMENTISTE ARTISTE LYRIQUE LUTHIER

La gestion des hypoglycémies au cours du sport : insuline ou diététique?

NOTICE: INFORMATION DE L UTILISATEUR. Dulcolax bisacodyl 5 mg comprimés enrobés (bisacodyl)

PLAN ENTRAINEMENT TRAIL LONG (>60 KM) FORTE DÉNIVÉLATION (>2 KM D+)

Maternité et activités sportives

Carnet de suivi Lithium

Le Test d effort. A partir d un certain âge il est conseillé de faire un test tous les 3 ou quatre ans.

Leucémies de l enfant et de l adolescent

INTERET PRATIQUE DU MDRD AU CHU DE RENNES

PRINTEMPS MEDICAL DE BOURGOGNE ASSOCIATIONS ANTIAGREGANTS ET ANTICOAGULANTS : INDICATIONS ET CONTRE INDICATIONS

«Je suis diabétique» Informations sur la prise en charge d enfants diabétiques à l école. Pour les parents et les enseignants

Le diabète en pédiatrie

TITRE : «Information et consentement du patient en réadaptation cardiovasculaire»


Le VIH et votre cœur

J aimerais garder les hypoglycémies sous contrôle - Que puis-je faire?

Marseille 25 octobre 2012 Accompagnement du traitement chez les co-infectés VHC-VIH en pratique

Anémie et maladie rénale chronique. Phases 1-4

BASES DE L ENTRAINEMENT PHYSIQUE EN PLONGEE

Télé-expertise et surveillance médicale à domicile au service de la médecine générale :

Cas clinique 2. Florence JOLY, Caen François IBORRA, Montpellier

TVP fémorale. Systématisation. La TVP : écho-doppler JP Laroche Unité de Médecine Vasculaire CHU Montpellier. Thrombus mobile

Proposition de la Commission sur les allégations nutritionnelles et de santé en vue de mieux informer les consommateurs et d'harmoniser le marché

Nous avons tous un don qui peut sauver une vie. D e v e n i r. donneur de moelle. osseuse

Transcription:

Syndrome de Renutrition Inapproprié (SRI) Atelier 11 ème journée interclan du Limousin Dr Jésus Pierre MCU-PH Unité de Nutrition, CHU Limoges

QCM Depuis quand le syndrome de renutrition inapproprié est-il décrit? A : les années 1910 B : les années 1940 C : les années 1970 D : les années 2000

QCM Depuis quand le syndrome de renutrition inapproprié est-il décrit? A : les années 1910 B : les années 1940 C : les années 1970 D : les années 2000

Historique Après 1 er guerre mondiale: décès suite arrivée de vivres en abondance Après la 2 ème guerre mondiale Fin du siège de Leningrad 1942: sujets dénutris après hospi Insuf card, HTA Prisonniers de guerre japonais après leur libération et réalimentation Oedemes périph Victimes de guerre après réalimentation Complication neuro, coma, crise convulsives

Historique 1945 Key et al. : seule expérience «Minnesota experiment» scientifiquement conduite d un semijeûne de six mois chez des jeunes volontaires sains: Renutrition tableau d insuf card avec oedèmes périph Le terme de Refeeding Syndrome apparaît dans la littérature dans les années 70, avec les débuts de la nutrition parentérale.

Question Le syndrome de renutrition inapproprié est-il peu fréquent?

Réponse Le syndrome de renutrition inapproprié est-il peu fréquent? NON, mais fréquence difficile à estimer Fréquence : 0,43 à 34% Probablement sous estimé

Question Le syndrome de renutrition inapproprié est-il dangereux pour le patient?

Réponse Le syndrome de renutrition inapproprié est-il dangereux pour le patient? OUI, nombreuses complications, cardio-respiratoires, neurologiques Mortalité : 17 à 38%

Question Le syndrome de renutrition inapproprié est-il lié uniquement à la dénutrition?

Réponse Le syndrome de renutrition inapproprié est-il lié uniquement à la dénutrition? NON Dénutrition et jeûne prolongé

Définition «Survenue de troubles graves de l hydratation et des électrolytes sanguins ainsi que de complications associées, lors de la renutrition de patients dénutris ou ayant subi un jeûne prolongé».

Question Le syndrome de renutrition inapproprié est-il uniquement lié à la réalimentation par voie parentérale?

Réponse Le syndrome de renutrition inapproprié est-il uniquement lié à la réalimentation parentérale? Peut apparaître quel que soit le type d alimentation (orale, NE, NP) Orale : 13% Entérale : 21% Prentérale : 36%

Question Le syndrome de renutrition inapproprié est-il lié à une diminution du taux de phosphore sanguin?

Réponse Le syndrome de renutrition inapproprié est-il lié à une diminution du taux de phosphore sanguin? OUI, Hypophosphorémie mais pas que Hypomagnésémie Hypokaliémie Hypocalcémie Carence en vitamine B1

Cas cliniques Mlle M. 20 ans Anorexie mentale IMC : 15 Décide de remanger normalement Consomme des produits gras et sucrés+++ sur 2 j Crise d épilepsie

Cas cliniques Mme D. 38 ans Anorexie mentale IMC : 12,5 Réalimentation per os en hospitalisation Apparition oedèmes membres inférieurs

Cas cliniques Mme B. 42 ans Anorexie mentale IMC : 13 Réalimentation entérale par SNG Hypomagnésémie +++

Cas cliniques Mlle T. 18 ans Anorexie mentale IMC : 9,5 Hospitalisation en réanimation Réalimentation entérale par SNG Hypophosphorémie +++ Tétraparésie, troubles respiratoires

Cas cliniques Mr R. 60 ans Séquelles neurologiques Jeûne pendant 10 j Nutrition parentérale apports importants et rapide Détresse respiratoire Décès

Terrain Renutrition trop rapide Quantités trop importantes

Terrain

Physiopathologie Phosphore Magnésium Potassium

Physiopathologie Période de jeûne : lipolyse et protéolyse pour alimenté la néoglucogénèse fonte musculaire perte d eau perte de minéraux Pendant la renutrition : Apports glucidiques élevés de la sécrétion d insuline flux massif de glucose, P, K, Mg et d eau en intracellulaire

Physiopathologie

Physiopathologie

Hypophosphorémie Période de jeûne : Déplétion IC en P Pendant la renutrition Entrée de P en IC déplétion EC Parallèlement filtration glomérulaire de P L hypophosphorémie est corrélée à l effondrement des composés phosphorés riches en énergie induit un déficit énergétique cellulaire majeur

Hypokaliémie et hypomagnésémie Période de jeûne : déplétion IC en K et Mg Pendant la renutrition Entrée de K et Mg en IC déplétion EC

Carences vitaminiques Vitamine B1 (thiamine) +++ Indispensable au métabolisme des glucides Carence précipité par des besoins pendant la renutrition Vitamine B9, PP

Rétention hydrosodée Renutrition = «charge importante en hydrates de carbone» s accompagnant d une diminution de l excrétion hydrosodée Hyperaldostéronisme Rétention d eau EC insuffisance cardiaque

Hyper et hypoglycémie Hyperglycémie : hyperosmolarité excrétion rénale de Na et d eau production CO 2 Hypoglycémie : Par épuisement des réserves glycogénique Hypersensibilité à l insuline

Signes cliniques Insuf Card HTA Tr rythme Insuff resp Asthénie Aréflexie Somnolence, coma Convulsions Crampes, paresthésies Paralysies Neuropathies sensitives

Signes biologiques HYPO : - P - Mg - K - vit (B1,B9) - Hyperglycémie - Hypoglycémie -Anémie hémolytique -Thrombopénie Insuf hépatique

Prise en charge BILAN INITIAL : Iono, P, Mg, Ca, NFS APPORTS GLUCIDIQUES PROGRESSIFS J1-J3: 1,5-2 g/kg/j J7: 4 g/kg/j APPORTS ENERGETIQUES PROGRESSIFS J1-J3 : 10-15 kcal/kg/j sans dépasser 500 kcal J4-J5 : 20 kcal/kg/j J6 : 25 kcal/kg/j J7 : 30 kcal/kg/j Après : jusqu à 40 kcal/kg/j APPORTS HYDRIQUES PROGRESSIFS J1 : 20-25 ml/kg/j J4 : 30 ml/kg/j

Prise en charge : hypophosphorémie Phosphorémie entre 0,32 et 0,8 mmol/l 0,08 mmol/kg de P IV en 6h Phosphorémie < 0,32 mmol/l 0,16 mmol/kg de P IV en 6h Si phosphorémie < 0,6 mmol/l : arrêt alimentation

Prévention +++ AJOUT SYSTEMATIQUE durant 7 j Vitamines : CERNEVIT Vitamine B1 : BENERVA 250mg/j (min 100mg/j) OE : TRACUTIL P : PHOCYTAN, PHOSPHONEUROS Mg : SULFATE DE MAGNESIUM, MAG2 K : CHLORURE DE POTASSIUM, DIFFUK Puis diminuer pendant 7 j puis arrêt SURVEILLANCE CV : TA, pouls, signes IC gauche Examen clinique, ECG quotidien Bio : NFS, IUC, Phosphorémie, Mg, au moins 5 j de suite

Conclusion Syndrome pouvant être létal Attention à l hypophosphorémie Prise en charge : prévention +++ Apports progressifs et supplémentations Vit et OE

Merci de votre attention et place aux questions