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- Albert Chabot
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1 This article appeared in a journal published by Elsevier. The attached copy is furnished to the author for internal non-commercial research and education use, including for instruction at the authors institution and sharing with colleagues. Other uses, including reproduction and distribution, or selling or licensing copies, or posting to personal, institutional or third party websites are prohibited. In most cases authors are permitted to post their version of the article (e.g. in Word or Tex form) to their personal website or institutional repository. Authors requiring further information regarding Elsevier s archiving and manuscript policies are encouraged to visit:
2 Journal des Anti-infectieux (2013) 15, Disponible en ligne sur ScienceDirect ARTICLE ORIGINAL Contribution des modèles mathématiques à la compréhension de la dynamique de diffusion des bactéries multi-résistantes à l hôpital Contributions of mathematical models to the understanding of the dynamics of nosocomial pathogens in hospitals L. Opatowski a, *,b, M. Domenech de Cellès a,b, S. Souissi a,b, L. Kardaś-Słoma c, L. Temime c, D. Guillemot a,b a Unité de pharmaco-épidémiologie et maladies infectieuses (PhEMI), UFR des sciences de la santé Paris-Îlede-France-Ouest, université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines, 2, avenue de la Source de la Bièvre, Montigny-le-Bretonneux, France b Inserm U657, institut Pasteur, 25, rue du Docteur Roux, Paris, France c Laboratoire modélisation et surveillance des risques pour la sécurité sanitaire, conservatoire national des arts et métiers, 292, rue Saint-Martin, Paris cedex 03, France MOTS CLÉS Modélisation mathématique ; Simulation ; Infections nosocomiales ; Résistance aux antibiotiques ; Contrôle Résumé Mieux comprendre et contrôler les infections ayant lieu dans les hôpitaux représente un important enjeu de santé publique. Les unités hospitalières constituent des environnements complexes dans lesquels la dynamique épidémique dépend d une combinaison de facteurs liés aux pathogènes multi-résistants circulant dans ces environnements, aux patients et personnels soignants et aux soins prodigués (incluant l exposition médicamenteuse). La complexité de ces phénomènes a engendré, ces dernières années, un fréquent recours à la modélisation mathématique afin de mieux comprendre les phénomènes en jeu dans les épidémies hospitalières. Les modèles publiés se différentient selon la méthodologie utilisée (ciblant la population ou les individus) et l objectif visé (explicatif versus prédictif). La plupart des modèles développés sont des modèles mathématiques compartimentaux, déterministes ou stochastiques, ou plus récemment des simulations informatiques multi-agents. Les avancées scientifiques qu ils ont engendrées dans le contexte de l hôpital sont remarquables. D une part, la modélisation a permis de quantifier, à partir de données de surveillance hospitalière, des paramètres épidémiologiques essentiels à une meilleure compréhension des épidémies hospitalières. Ceux-ci incluent l épidémicité des souches ou l effet sélectif des antibiotiques. D autre part, elle a permis de prédire et d évaluer l impact de différentes stratégies de * Auteur correspondant. Adresse lulla.opatowski@pasteur.fr (L. Opatowski) /$ see front matter # 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
3 194 L. Opatowski et al. contrôle, selon le pathogène et le contexte, et ainsi de servir de base à la mise en place de politiques de contrôle et d une surveillance optimale à l hôpital. # 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. KEYWORDS Mathematical modeling; Simulation; Nosocomial infections; Antibiotic resistance; Infection control Summary Better understand and control hospital-associated infections is a key public health issue. Hospital wards are complex environments in which multiple factors interact and interfere to influence the spread of pathogens between patients. These factors include specificities related to circulating pathogens, hospitalized patients, healthcare workers, and drug exposure. The high level of complexity has led, in recent years, to an increased use of mathematical modelling to analyse the distinct phenomena underlying hospital epidemics. Published models can be distinguished according to the methodology used (population-based versus individualbased) and to their goal (explicative versus predictive). Most of the developed models are compartmental deterministic or stochastic models, or individual-based computerized simulations. Modelling studies have led to remarkable scientific improvements in the hospital context. On one hand, model building and statistical inference from surveillance data have allowed extrapolating and quantify hidden or unknown essential epidemiological parameters, leading to a better understanding of epidemics in hospitals. These parameters include the definition of strain s epidemicity or the selective effect of antibiotics on multi-resistant organisms. On the other hand, models have provided predictions and assessment regarding the impact of several control strategies (and their combinations), for distinct pathogens and contexts, supplying invaluable support for optimizing control policies and surveillance related to hospital infections. # 2013 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Introduction En raison d une forte proximité entre individus avec des contacts fréquents, de la présence d individus immunocompromis et de l usage important de molécules antibiotiques, l hôpital constitue un environnement privilégié pour la diffusion de pathogènes au sein des patients et des personnels de soin et pour le développement de résistances aux antibiotiques. Les infections liées aux soins représentent un réel enjeu de santé publique, à la fois pour la société (on estime le nombre de victimes de ces infections à par an en Europe selon l ECDC) mais aussi pour les hôpitaux qui doivent prendre des mesures pour limiter leur diffusion. Le coût mondial associé à ces infections est estimé à s1,5 milliards chaque année [1 3]. Certaines bactéries résistantes sont plus fréquemment trouvées à l hôpital, dans lesquelles elles créent des épidémies sporadiques ou des états endémiques. Les pathogènes les plus répandus ont été désignés par l acronyme ESKAPE (E : pour les entérocoques résistants à la vancomycine [VRE], S : Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline [MRSA], K : Escherichia coli bêtalactamases à spectre étendu [BLSE] et Klebsiella, A : Acinetobacter baumannii, P : Pseudomonas aeruginosa, E : Entérobactéries). L une des difficultés majeures pour le contrôle de la diffusion de ces bactéries est leur caractère commensal : bien que dans certains cas, une infection bactérienne puisse se développer, les hôtes se colonisent et se décolonisent le plus souvent de façon asymptomatique. C est donc la connaissance de la prévalence de colonisation d une bactérie multi-résistante (BMR) dans un service qui permet de mesurer l ampleur de l épidémie. Afin de limiter la diffusion des BMR dans les services hospitaliers, de nombreuses mesures de contrôle ont été proposées. Ces mesures incluent l isolement des individus colonisés (cas) ou le regroupement en cohortes de cas potentiels (appelés «contacts», ils représentent les personnes ayant été en contact avec des cas pendant leur durée infectieuse), la mise en place de mesures de barrière telles que le port de masque, de blouse ou une amélioration de l hygiène (utilisation de solution hydro-alcooliques), des stratégies de dépistage systématique à l admission (avec décolonisation ou isolement des cas) ou encore des politiques d usage antibiotique raisonnées. Quantifier l impact de ces mesures (ou combinaisons de mesures) quant à leur efficacité à limiter la transmission des pathogènes dans la population est essentiel dans la perspective du choix de stratégie optimale pour une prise de décision en temps réel mais aussi d un point de vue économique (étude coût-efficacité). Les unités hospitalières constituent un environnement complexe : c est la combinaison d un grand nombre de facteurs qui détermine la dynamique épidémique d une bactérie résistante : facteurs liés au personnel soignant (niveau de conformité avec les mesures barrières, schéma d allocation aux patients, charge de travail), aux patients (sévérité de l état, immunosuppression) et aux soins qu ils reçoivent (dispositifs invasifs, antibiothérapie). Les méthodes classiques d épidémiologie ne prenant pas en compte les aspects dynamiques de la transmission sont limitées pour l analyse de ces phénomènes. La modélisation a été, ces dernières années, de plus en plus utilisée en épidémiologie et en santé publique [4]. Dans le contexte hospitalier, l usage de modèles de transmission des pathogènes présente trois intérêts majeurs. Premièrement, il permet de décrire de façon théorique la dynamique épidémique en intégrant les différents niveaux de complexité : microbiologique, individuel et populationnel. Cette formalisation peut ainsi apporter une meilleure compréhension de la dynamique d émergence, de sélection, et de diffusion des souches résistantes. Deuxièmement, la modélisation fournit, à partir de données recueillies, un moyen d estimer des paramètres clés, cachés ou mal connus voire inconnus. Enfin, c est le seul moyen
4 Modélisation des infections liées au soin 195 dont nous disposons pour anticiper les conséquences de la mise en place de stratégies de traitements/contrôle ou de politiques de santé publique sur la dynamique infectieuse. Les simulations peuvent fournir des prédictions sur les conséquences d une modification des pratiques. Ainsi, ces modèles constituent un outil supplémentaire et unique d aide à la décision pour la lutte contre les infections hospitalières. La contribution des modèles mathématiques à l épidémiologie en milieu hospitalier est relativement récente, les premiers travaux datant des années Plusieurs articles de revue récents [5 9] ont témoigné de l intérêt croissant pour l usage de modèles mathématiques en milieu hospitalier. Dans cet article nous proposons une mise au point sur les travaux de modélisation de la transmission de bactéries à l hôpital et sur leurs contributions à la compréhension des épidémies hospitalières. Dans la première partie nous détaillons les étapes nécessaires à la conception et la mise en place d un modèle. Les différents travaux publiés ensuite sont présentés selon deux axes : les apports des modèles dans un objectif de contrôle des épidémies hospitalières (partie deux) ; et les apports des différents travaux pour la compréhension de la dynamique des BMR (partie trois). Nous proposons ensuite dans une quatrième partie des perspectives de développement. Approches méthodologiques Les étapes présentées dans cette partie sont résumées en Annexe 1. Principe général : construire des modèles spécifiques aux questions posées Un aspect essentiel de la construction d un modèle mathématique réside dans la sélection des caractéristiques du système à prendre en compte (Fig. 1). En effet, la simplification requise pour construire les modèles mathématiques oblige à dégager les aspects essentiels de la dynamique afin de formaliser le système étudié. Cette étape devra être guidée, d une part, par la question que l on souhaite étudier à partir du modèle, et, d autre part, par les données et connaissances à disposition qui permettront d alimenter le modèle. Les analyses épidémiologiques «classiques» sont essentielles pour dégager ces aspects, de sorte que ces deux approches se complètent. Plus le modèle est destiné à reproduire la réalité d un système, plus la complexité est requise. Cependant, chaque nouvelle variable prise en compte introduit une incertitude supplémentaire dans les prédictions. Accroître la complexité de la modélisation n est donc pas toujours satisfaisant. Dans le cas où elle est utilisée dans une perspective explicative, un modèle simple incluant un minimum de variables et d information est recherché. Un tel modèle devra nécessairement être précis dans la description du mécanisme étudié, mais pourra être grossier dans la description des mécanismes annexes. Ce modèle, présentant l avantage d une plus grande transparence, pourra permettre d analyser qualitativement le phénomène et d apporter des éléments de compréhension nouveaux. Figure 1 Schéma indiquant les facteurs à prendre en compte pour le choix du modèle à utiliser. Les flèches indiquent, selon le but associé au travail de modélisation, vers quel modèle le modélisateur tendra à s orienter. Ainsi, la possibilité de disposer de données détaillées rend possible l usage de la modélisation par agents. À l inverse, si les paramètres sont peu connus on tendra à s orienter vers une modélisation plus simple et compartimentale. Les simulations des modèles agents étant très coûteuses d un point de vue computationnel, ces modèles sont privilégiés dans le cas de petites populations pour lesquels les comportements individuels et des aspects liés au hasard sont importants. La simulation de grandes populations pourra se faire à partir de modèles déterministes et compartimentaux. Enfin, le type de modèle dépendra également de l objectif visé : si l on cherche à comprendre les phénomènes sous-jacents et à estimer des paramètres, des modèles simples, compartimentaux seront souvent utilisés. À l inverse, lorsque l on cherche à fournir des prédictions avec le maximum de précision, un modèle agents très détaillé pourra être utilisé. Choix du modèle et construction Différentes approches de modélisation ont été utilisées pour étudier la diffusion de bactéries résistantes à l hôpital et l impact de mesures de contrôle de cette diffusion. Modèles compartimentaux La modélisation dite compartimentale consiste à répartir la population d étude dans des compartiments selon des critères choisis. Ces critères peuvent être de différente nature : sociologique ou démographique (patient/personnel soignant) ; infectieuse (susceptible ou non colonisé/ colonisé/immunisé) ; ou encore médicamenteuse (vacciné/ non vacciné, sous antibiotique ou non). Un diagramme de flux est souvent utilisé pour schématiser les transferts d individus entre les différents compartiments [10]. Un exemple de modèle simple est décrit en Annexe 2. Des exemples de structures de modèles pour différents cas d étude sont proposés dans le Tableau 1. Dans le cas où les aspects aléatoires ne sont pas pris en compte, on parle de modélisation déterministe. Un système d équations différentielles permet de décrire la dynamique des effectifs dans les compartiments du modèle. Lorsque l on prend en compte les aspects aléatoires du système, ce qui est plus réaliste dans le contexte de l hôpital, on parle de modélisation stochastique. L évolution du système peut alors être
5 196 L. Opatowski et al. Tableau 1 Exemple de mesures de contrôle mises en place à l hôpital et de modèle simple associé. Mesure Représentation du modèle Exemple de résultats Référence(s) Isolement/cohorting Mesure de contrôle efficace [13] Lavage de mains Mesure de contrôle la plus efficace [13,28] Dépistage à l entrée Le dépistage réduit le pourcentage de patients infectés, mais uniquement chez les patients sous antibiotiques [62] Exposition antibiotique Réduire l exposition antibiotique en hôpital permettrait de réduire fortement le nombre de colonisations en hôpital [13,35,62] Ville-hôpital L admission en hôpital de souches résistantes communautaires pourra entraîner à long terme l échec des mesures de contrôle mises en place pour empêcher la survenue d épidémies [6,30,40,63] La deuxième colonne du tableau présente un exemple de schéma de modèle compartimental pour des mesures de contrôle classiques (décrites dans la colonne 1). Pour chaque schéma, les rectangles représentent les différents compartiments (ou sous-populations) du modèle. S désigne les individus «susceptibles» ; C les individus «colonisé» [avec (C isolés ) pour «colonisés et isolés», (C S ) pour «colonisés par une souche sensible aux antibiotiques» et (C R ) pour «colonisés par une souche résistante aux antibiotiques»] ; et I les individus «isolés». Les flux entre les compartiments sont représentés par les flèches (les lettres indiquent le taux de passage d un compartiment à l autre). Modèle «isolement/cohorting» : les individus peuvent être non porteurs (S), colonisés (C) ou colonisés et isolés (C isolés ). Les individus S se colonisent par contact avec les individus C avec un taux b (appelé le taux de contact infectant). Les individus C se décolonisent après une durée moyenne (1/g). Les individus C sont isolés avec un taux q. Ils quittent la cellule d isolement lorsqu ils se décolonisent. Modèle «lavage de mains» : les individus S se colonisent par contact avec les colonisés avec un taux (1-c)rb, avec r : l efficacité du lavage de main (r < 1 réduit d autant la transmission) et c le taux de compliance au lavage de main. Ainsi, dans un service dans lequel 90 % du personnel soignant est compliant, et en supposant que le lavage de main réduit la transmission de 60 %, le taux de transmission réel sera (1 0,9) 0,6b. Modèle «Dépistage à l entrée» : les individus sont testés à l entrée dans le service. Les individus colonisés sont directement isolées (I). Modèle «Exposition antibiotique» : la population est répartie selon deux sous-groupes selon leur exposition aux antibiotiques : individus non exposés à gauche du schéma et individus exposés à droite. Les non porteurs (S) peuvent se coloniser soit avec une bactérie sensible (C S ) soit avec une bactérie résistante (C R ). Tout individu, quel que soit son état de portage peut être exposé aux antibiotiques. Il passera alors dans le compartiment correspondant à son état de colonisation de la partie droite du schéma (S a, C S a, C R a ). Après une durée moyenne de traitement, il retournera dans le groupe de compartiments non exposés. Modèle «Ville-Hôpital» : ici la population est divisée selon deux unités géographiques : la ville à gauche et l hôpital à droite. Les individus quittent la ville à leur entrée à l hôpital et retournent en ville après leur durée d hospitalisation. Le taux de transmission de la bactérie est différent en ville (noté b ville ) et à l hôpital (b hôpital ). représentée par une chaîne de Markov [11]. Dans les deux cas, des simulations numériques du modèle peuvent être réalisées. Les services de réanimation sont d importants réservoirs de BMR dans l hôpital. Les particularités de ces services (nombre limité de lits, faible mobilité des patients) font des agents circulants (personnel soignant, kinésithérapeute...) les principaux vecteurs de la transmission des pathogènes. D un point de vue méthodologique, des modèles de type «maladies à vecteurs» ont été proposés pour formaliser la transmission de pathogènes entre les patients, le personnel soignant étant alors vu comme le vecteur de transmission [12,13]. Modèles multi-agents ou individu-centrés Les modèles agents sont de plus en plus utilisés en épidémiologie des maladies infectieuses [14,15]. Ces modèles, qui permettent de simuler directement le devenir de chaque individu au lieu de les regrouper dans des compartiments, présentent deux intérêts majeurs. Tout d abord, ils permettent de prendre en compte les comportements individuels qui peuvent avoir un impact fort sur la transmission des
6 Modélisation des infections liées au soin 197 pathogènes, notamment dans le cadre de petites populations. Ensuite, ils permettent de décrire avec plus de précision les phénomènes considérés, sans être limités par une croissance exponentielle du nombre de compartiments et d équations. Ces modèles s avèrent donc très utiles pour la modélisation de la transmission des pathogènes nosocomiaux [16 19]. Cependant, cette amélioration de la précision s accompagne également d une augmentation conséquente du nombre de variables et donc de la complexité des modèles. De tels modèles n ont d intérêt que dans le cadre d une bonne connaissance des variables utilisées. Ainsi, la complexification des modèles ne peut se faire qu en parallèle d un recueil de données conséquent, dans le cadre d une collaboration entre modélisateurs, médecins et épidémiologistes. Confrontation aux données et estimation des paramètres Les données disponibles en milieu hospitalier sont souvent complexes à analyser : problème de censure (par exemple incertitude sur la date d acquisition d un patient), imperfection du test de dépistage, non-indépendance du risque causée par la transmission entre patients. Concernant l estimation des paramètres inconnus, diverses méthodes ont été appliquées aux modèles hospitaliers : les méthodes d estimation à partir de modèles compartimentaux stochastiques [20], de modèles de Markov caché ajustés sur des données d incidence d infection [21], de modèles de Markov ajustés sur des données de prévalence [11,22] ou de martingales [23]. Plus récemment, les méthodes de filtres particulaires ont également été utilisées [24,25]. Une liste d outils permettant le développement de modèles et l estimation de leurs paramètres est présentée dans le Tableau 2. Apports des modèles pour le contrôle de la diffusion de bactérie multi-résistante (BMR) Du fait de la stochasticité et de la complexité du système hospitalier, l épidémiologie classique ne permet pas d évaluer l effet d interventions sur la maîtrise d une épidémie sur le long terme. Dans certains cas, le succès apparent d une mesure peut être lié au hasard et n est pas facilement extrapolable à d autres contextes. La modélisation, en revanche, permet de formaliser les phénomènes et de fournir des informations qualitatives et quantitatives sur l effet des différentes stratégies de contrôle de la diffusion de BMR. Des structures de modèles simples décrivant l application de différentes mesures sont proposées dans le Tableau 1. Une exemple de comparaison, à partir de simulations, de l effet de différentes mesures, est présenté sur le Fig 2. Nécessité de la stochasticité Une contribution importante des premiers travaux de modélisation a été d appréhender l importance des effets aléatoires dans la dynamique épidémique à l hôpital. À cause de la faible taille de la population étudiée, typiquement patients dans une unité, de larges variations de prévalence sont attendues, qui ne reflètent pas nécessairement une modification de la situation Tableau 2 Outils pour le développement de modèles (non exhaustif). Type d analyse Mode d utilisation Liste d outils Lien, référence Modèle compartimental Interface graphique, clic Berkeley madonna Vensim Modèle compartimental Programmation R, librairie DeSolve Tout langage informatique Exemple en Annexes 2 (description) et 3 (code) Modèle agent Interface graphique Nososim Exemple de simulateur d un pathogène nosocomial dans un service : sites.google.com/site/nososim/ Modèle agent Programmation Netlogo Repast Tout langage informatique Estimation de paramètres Programmation R, librairies Mcmc, pomp Tout langage informatique Exemple de modèle déjà programmé [25] : /13/187/additional Ce tableau présente une liste non exhaustive d outils informatiques qui peuvent être utilisés pour le développement de modèles mathématiques ou de simulations agents. Les outils cités dans la première ligne permettent la conception de modèles compartimentaux sans prérequis de programmation. La deuxième ligne propose des librairies permettant le développement rapide de modèles compartimentaux avec le logiciel R. Nous proposons ensuite un exemple de modèle agent directement utilisable (déjà programmé) simulant la transmission de pathogènes dans un service hospitalier (ligne 3) et des librairies permettant de programmer efficacement des modèles agents (ligne 4). Enfin la ligne 5 présente des librairies pour l estimation des paramètres.
7 198 L. Opatowski et al. majoritairement de l extérieur de l hôpital [28]. À partir d un modèle agent, Temime et al. ont montré qu un bon taux global de compliance global dans le service ne suffisait pas et que dans certains cas, un seul individu non compliant pouvait être à l origine d un phénomène de super-propagation [17], résultats confirmés plus récemment par Hornbeck et al. [29]. Isolement, cohortage Figure 2 Simulation de la prévalence à une bactérie multirésistante (BMR) dans un service selon différentes mesures mises en place. Ce graphique illustre le résultat de simulations d un modèle stochastique (trait fin) et d un modèle déterministe (trait épais) dans un service de 100 patients selon cinq scénarios différents de mise en place de mesures de contrôle le jour j = 200. Dans les quatre cas de mise en place d une mesure, la prévalence est réduite. On voit ici qu aucun des scénarios, mis en place seul, ne parvient à éradiquer l épidémie. La simulation de combinaisons de scénarios devrait permettre d identifier des scénarios menant à l éradication. Le modèle utilisé est décrit en détails dans l Annexe 2, et le code en R est également disponible dans l Annexe 3. épidémiologique. En 1999, Cooper et al. développent un modèle stochastique de transmission et démontrent que plusieurs simulations de ce modèle, avec le même jeu de paramètres (reflétant une situation épidémiologique donnée), peuvent produire des courbes de prévalence très différentes, entièrement du fait du hasard [26]. Les auteurs concluent que les modèles stochastiques sont essentiels à l analyse des données hospitalières. Ils suggèrent que des variations importantes de prévalence, dues au hasard, ont pu conduire à conclure faussement à l efficacité de mesures d isolement, notamment par des effets de régression à la moyenne quand l intervention était déclenchée par une prévalence inhabituellement élevée dans l unité [27]. Hygiène des mains Plusieurs études ont évalué l impact des mesures d hygiène sur la transmission des BMR et suggéré qu un bon taux de conformité du personnel de soin au lavage de mains est la stratégie de contrôle la plus efficace dans la prévention de l infection [13]. L analyse théorique d un modèle hospitalier décrivant les admissions et réadmissions de patients montre que la diminution de la transmission par des mesures d hygiène efficaces aurait un effet important sur les souches résistantes mais peu d effet seulement sur les souches sensibles, qui proviennent Des travaux de modélisation ont mis en évidence l efficacité de l isolement des patients colonisés et de l assignation d un personnel dédié pour réduire la transmission dans un service hospitalier [13,27]. Dans le cas de MRSA, Cooper et al. suggèrent que l introduction d unités d isolement conduit toujours à l éradication [30]. Cependant, d autres travaux suggèrent que l isolement de patients détectés par des cultures cliniques de routine uniquement (plutôt que par une détection systématique) n était pas une stratégie efficace [31]. Plusieurs auteurs ont proposé d étudier l impact des mesures d isolement en spécifiant un modèle d acquisition qui dissocie : un taux de transmission par les patients non isolés ; un taux de transmission par les patients isolés ; un taux d acquisition sporadique. L estimation des paramètres à partir des données de surveillance permet de déterminer le niveau d efficacité de la procédure d isolement, en fonction de la relation d ordre entre ces différentes voies d acquisition [20,32,33]. Dépistage et décolonisation Des travaux de modélisation, basés sur l expérience des pays du nord de l Europe dans lesquels les épidémies de MRSA sont très peu fréquentes, suggèrent que le dépistage systématique à l admission de certains patients «à haut risque» (porteurs de MRSA déjà identifiés auparavant ou patients en provenance de milieux à forte prévalence de colonisation), suivi de leur isolement jusqu à ce qu ils soient décolonisés (stratégies search and destroy) permet de réduire la prévalence de colonisation à MRSA à moins de 1 % [31]. Plus récemment, Worby et al. montrent que ces stratégies sont très fortement associées avec une réduction de la transmission de MRSA [34]. Rôle des antibiotiques Les travaux modélisant réellement le phénomène d émergence et de sélection de la résistance bactérienne dans un contexte hospitalier sont rares. La plupart des modèles étudient l effet de l usage des antibiotiques sur la diffusion des souches résistantes dans un service hospitalier [8,28,35,36]. Plusieurs études ont montré que, à consommation constante d antibiotiques, la distribution des classes d antibiotiques prescrites peut avoir un impact majeur sur la dynamique de diffusion des microorganismes à l hôpital [18]. Différentes stratégies visant à coordonner le traitement antibiotique des individus dans en milieu hospitalier ont été proposées. En particulier, deux stratégies, dont l efficacité
8 Modélisation des infections liées au soin 199 est débattue ont été décrites : elles consistent respectivement à modifier périodiquement l antibiotique prédominant dans une population donnée (cycling ou antibiocycle), ou à assigner des patients consécutifs à différents antibiotiques (mixing ou mélange) [37,38]. Ces stratégies visent à faire varier la pression de sélection, et de créer ainsi une hétérogénéité environnementale inhibant la diffusion d une bactérie résistante. Des arguments écologiques ont suggéré qu une stratégie de mixing est généralement supérieure en milieu hospitalier, car elle génère une hétérogénéité environnementale supérieure à l échelle de la bactérie [39]. L effet de l usage de molécules antibiotiques d un point de vue à la fois quantitatif (quantité prescrite, doses, durées) et qualitatif (classes antibiotiques utilisées) a également été exploré récemment par Kardas-Sloma et al. Leurs travaux suggèrent qu une réduction de la consommation antibiotique à l hôpital peut avoir des conséquences très différentes sur la circulation des S. aureus résistants selon les classes sur lesquelles est exercée cette réduction [18]. Deux travaux récents, proposent un modèle multi-échelle (incluant à la fois la prise en compte de l hôpital et de la ville) pour étudier les conditions qui permettent la diffusion de MRSA communautaire à l hôpital [40,41]. Apports des modèles pour la compréhension : dévoiler l invisible La modélisation est souvent considérée comme un outil à visée prédictive. Ce n est pas son seul objectif. En épidémiologie des maladies infectieuses et en particulier dans le contexte hospitalier, elle permet, à partir de données observées, de reconstruire à posteriori les épidémies et ainsi de mieux comprendre les phénomènes invisibles qui ont pu avoir lieu. Cela passe le plus souvent par une phase d estimation de paramètres inconnus ou non observables. Ceux-ci incluent les caractéristiques de transmission liées au pathogène ou à l hôte. Mesurer la capacité épidémique intrinsèque des souches Les méthodes d épidémiologie classiques ne prenant pas en compte la dynamique temporelle, elles ne permettent donc pas d estimer la capacité de transmission des pathogènes. Les modèles mathématiques, en revanche, le permettent [4,20,21,34,42,43]. Dans un contexte hospitalier, la capacité de transmission d un pathogène (qui est liée au nombre de reproduction) dépendra de la bactérie mais aussi de l environnement (exposition médicamenteuse des hôtes, pathogènes co-circulants, contacts entre les individus etc.). Ainsi, mieux comprendre quelle est la part de cette transmission qui est liée à la bactérie elle-même (ce qu on pourrait appeler capacité épidémique intrinsèque de la souche) est de grande importance. Cette capacité peut dépendre de caractéristiques phénotypiques ou génétiques. Il a par exemple été suggéré que l acquisition de la résistance à un antibiotique pourrait engendrer un coût pour la bactérie se traduisant par une modification de son potentiel épidémique, on parle alors de coût en «fitness» [44,45]. Plusieurs travaux de modélisation récents ont mis en évidence des différences de potentiel épidémiques entre clones au sein d une espèce bactérienne [42,43,46]. Quantifier la part de différentes voies de transmission L acquisition de bactéries résistantes pour un patient à l hôpital peut résulter d une transmission humaine (via un patient ou un personnel soignant), d une contamination environnementale ou encore d un effet sélectif des antibiotiques. Dans un article fondateur de 2002 [11], Pelupessy et al. proposent d opérer une distinction entre les voies d acquisition exogène (correspondant à une transmission effective de patient à patient, généralement par l intermédiaire du personnel soignant) et endogène (résultant de l amplification d une sous-population d organismes résistants à des niveaux initialement indétectables, suite à l antibiothérapie). En pratique, ces différentes voies ont un impact différent sur la dynamique. La voie exogène dépend du nombre antérieur de patients colonisés dans l unité (aussi appelée pression de colonisation [47]) tandis que la route endogène peut raisonnablement être supposée indépendante de ce nombre. Les auteurs traduisent mathématiquement ces hypothèses via une définition de la force d infection afin d estimer la part de transmission via la voie endogène (taux d acquisition sporadique) et la voie exogène. Ils montrent que pour VRE la voie exogène est la plus importante, soulignant l importance des mesures d hygiène et d isolement pour ce pathogène [11]. Une extension de ce modèle, sur la transmission de VRE évalue à 89 % la part d acquisition par transmission croisée et à 11 % l acquisition sporadique [22]. Comme l indiquent van Kleef et al. dans leur récente revue de la littérature, la plupart des modèles hospitaliers publiés portent sur la transmission de MRSA et de VRE [9]. Peu de travaux se sont intéressés à d autres espèces comme les bactéries BLSE [9]. Néanmoins, des travaux récents ont montré, qu à l inverse de VRE et de MRSA, la voie endogène était vraisemblablement prédominante pour les E-BLSE dans un contexte endémique [25]. Les voies d acquisition variant fortement selon les pathogènes et sûrement le contexte, ces études permettent d identifier les voies qu il faudrait préférentiellement cibler dans la perspective de mettre en place des mesures de contrôle [25,48,49]. Mesurer le rôle des contacts humains Dans la petite population que constitue un service hospitalier, les comportements humains peuvent jouer un rôle important dans la diffusion de pathogènes. L utilisation de modèles agents, dans lesquels il est possible de simuler chaque individu de façon autonome, a permis de mettre en évidence l importance des aspects individuels et des réseaux de contacts dans la transmission des BMR. Temime et al. ont montré en modélisant de façon détaillée les réseaux de contact des individus selon leur statut (patient, infirmière, médecin et soignant «nomade» tels que les kinésithérapeutes ou radiologues) que certains individus, s ils n étaient pas totalement compliants au lavage de mains, pouvaient jouer un rôle de super-propagateur (superspreader) dans un service [17]. Dans le but de mieux comprendre la nature et le réseau de transmission des BMR, de nouveaux outils de recueil et d analyse de ces données individuelles ont été développés.
9 200 L. Opatowski et al. À l hôpital, l utilisation des bases de données hospitalières (localisation géographique, personnel, patients à une date donnée) [50] ou l enregistrement des contacts via un personnel dédié (appelé shadow) à suivre les personnels soignants et à rapporter tous leurs contacts [51,52] ont déjà permis de prendre en compte une structure de contacts plus réaliste. Des méthodes d investigations innovantes visant à recueillir des données de contacts à risque ont également commencé à émerger. L équipement par des capteurs (émetteur et récepteur) des patients et du personnel de soin pour la mesure des proximités entre les individus a permis de mesurer le réseau potentiel de transmission au sein de plusieurs services hospitaliers [53,54] (étude européenne MOSAR : Hornbeck et al. ont recueilli des données de contact dans un service de réanimation et construit un modèle agent de transmission à partir de ces données. Leur résultats confirment la présence de personnels soignants pouvant jouer un rôle de super-propagateur [17,29]. Perspectives d usage des modèles Nous détaillons ci-dessous les perspectives d exploitation des résultats issus de la modélisation ainsi que les améliorations nécessaires pour rendre les modèles plus réalistes. Modéliser pour décider Les modèles mathématiques sont de plus en plus utilisés en soutien à la prise de décision en santé publique. Ils ont par exemple été largement utilisés par l Organisation mondiale de la santé (OMS), le Center for Disease Control (CDC) ou encore les autorités françaises pour la gestion de la crise liée à l épidémie de grippe A (H1N1) en 2009 ; ils sont également sans cesse consultés dans le cadre de l épidémie de VIH/sida par l OMS. Concernant le contrôle des épidémies hospitalières, la mise en place de recommandations nationales de bonne pratique pour le contrôle des bactéries résistantes s est également appuyée sur les résultats de modèles, l exemple le plus notoire étant celui de la Grande Bretagne, où la Health Protection Agency est fréquemment consultée par les décideurs [27]. L utilisation des prédictions issues des modèles pour la prise de décision soulève d importantes questions : celle de la qualité du modèle, de la qualité des données utilisables pour la modélisation et enfin de la confiance en les prédictions. La production d intervalles de prédictions réalistes, sur lesquelles des décisions de santé publique peuvent effectivement s appuyer, nécessite une confiance importante en la structure du modèle (une bonne connaissance du processus de transmission dans la population) et les paramètres (une bonne connaissance de l histoire naturelle de la maladie). L amélioration des modèles hospitaliers passera certainement par la collection de nouvelles données individuelles comme la mesure des contacts à risque, la connaissance de la colonisation par plusieurs espèces ou clones, ou encore l exposition médicamenteuse (détaillé plus loin). Il est raisonnable d imaginer qu à moyen terme nous pourrons disposer de modèles spécifiques des services prenant en compte en temps réel la situation épidémique et les clones circulant et qui pourront aider, au sein d un service, à la prise de décision de politiques antibiotiques. Mieux comprendre l effet des antibiotiques Comme nous l avons vu, de nombreux travaux de modélisation ont étudié et permis de mieux comprendre l effet des mesures de contrôle pour limiter l acquisition exogène de bactérie résistantes. Cependant, peu de travaux se sont intéressés à la voie endogène, et en particulier à l effet de la prise d antibiotiques sur l acquisition et la transmission au niveau individuel. Plusieurs études cliniques ont pourtant suggéré qu un traitement antibiotique pourrait entraîner une augmentation du risque relatif de colonisation après un contact [5,55,56]. Ces études suggèrent, d une part, que les antibiotiques pourraient entraîner une forte excrétion de bactéries multi-résistantes et donc une amplification du taux de transmission [55,56]. Et, d autre part, elles suggèrent que le traitement antimicrobien, en éliminant la flore commensale, pourrait entraîner une augmentation du risque d acquisition de nouvelles bactéries [55,57,58]. Dans le futur, le développement de travaux reliant l exposition antibiotique et l émergence, la sélection au sein d un hôte, et la diffusion de bactéries multi-résistantes devrait permettre de mieux comprendre ces phénomènes. Mieux comprendre la transmission : l intégration de nouveaux types de données Nous l avons vu, des équipes ont développé et utilisé ces dernières années des méthodes innovantes permettant la mesure de contacts (ou proximités) entre les individus à partir de capteurs sans fils pour mesurer les contacts dans des services hospitaliers [53,54] (étude européenne MOSAR : L analyse de ces données complexes associées aux données microbiologiques va nécessiter des développements méthodologiques dans les années à venir. Des travaux récents comparent différentes formes d agrégations des données de contacts détaillées pour la compréhension de la transmission des BMR à l hôpital [59]. Ces données, jumelées à la connaissance clinique du portage microbien, devraient dans les prochaines années nous permettre de mieux comprendre la transmission des différents clones dans le contexte hospitalier. De manière générale, ces données de contact apporteront d importants éléments de connaissance sur les voies de transmission de différents pathogènes, en particulier pour les pathogènes à transmission aérienne ou manu portées, pour lesquelles les risques de contact infectieux sont mal quantifiés. Par ailleurs, ces données devraient permettre de quantifier la part de l épidémicité liée au schéma de contacts inter-individuels, et ainsi de s approcher de la mesure de l épidémicité intrinsèque des souches. Modéliser différentes échelles Si l émergence et la sélection des souches résistantes peuvent avoir lieu au sein de l hôte, la sélection et la diffusion des résistances dans la population ont lieu au niveau populationnel. Ainsi, modéliser le phénomène de la résistance bactérienne nécessite de prendre en compte les différents niveaux. Dans la communauté, quelques modèles multiéchelles existent déjà [60,61]. À l hôpital, Temime et al. ont développé un modèle agent prenant en compte des
10 Modélisation des infections liées au soin 201 différents niveaux : individuel et populationnel [16]. D Agata et al. ont également étudié, à l aide d un modèle agent et d un modèle déterministe, l effet de l exposition antibiotique à l hôpital, intégrant les aspects intra-hôtes comme les aspects de transmission interindividuelle [35]. Cependant, jusqu à très récemment, le nombre de modèles décrivant à la fois les aspects intra-hôtes et populationnels était faible. Dans les prochaines années, l utilisation de plus en plus fréquente des algorithmes individu-centrés, dans lesquels les agents peuvent être simulés individuellement avec le niveau de précision souhaité, devrait faciliter la description des deux échelles dans un modèle commun. Modéliser plusieurs espèces ou souches bactériennes Ces dernières années, de plus en plus de travaux suggèrent qu il pourrait y avoir un effet de la flore commensale de l hôte sur l acquisition de nouvelles BMR. L étude de tels phénomènes nécessite de modéliser, simultanément, la colonisation par plusieurs clones d une même espèce ou de pathogènes issus d espèces différentes. L amélioration des modèles dans cette direction nécessite le recueil de données de multi-portage au niveau individuel. L intégration de telles données dans les modèles permettra une meilleure compréhension de la synergie et/ou de la compétition qui existent au sein d une espèce bactérienne et entre les espèces. Des collaborations entre épidémiologistes et biologistes pourraient permettre d approfondir nos connaissances et ainsi d améliorer les modèles actuels. Conclusion La modélisation mathématique est un instrument privilégié pour l étude du phénomène de la résistance bactérienne en milieu hospitalier. Elle a permis de quantifier, à partir de données de surveillances hospitalières, des paramètres épidémiologiques essentiels à une meilleure compréhension des épidémies hospitalières. Elle a aussi permis d évaluer l impact de différentes stratégies de contrôle et ainsi de mettre en place une politique de contrôle et de surveillance de l infection optimale. De nombreuses perspectives sont encore à explorer. Les modèles devraient nous permettre, dans les années à venir, de préciser encore mieux les facteurs à l origine de l émergence et de la diffusion des BMR, incluant les aspects liés à l hôte tels que l exposition antibiotique ou la flore commensale. L étude de la transmission de pathogènes à partir de réseaux de contacts empiriques à l hôpital devrait permettre une amélioration des prédictions des modèles afin d en faire un outil d aide à la prise de décision, en temps réel, sur le terrain pour le contrôle de la diffusion des BMR. Pour y parvenir, le paramétrage des modèles devra être affiné grâce à un recueil de nouvelles données. Nous espérons que cette mise au point ouvrira la voie à de nouvelles collaborations entre médecins, épidémiologistes, biologistes et modélisateurs. Déclaration d intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d intérêts en relation avec cet article. Annexes 1 3. Matériels complémentaires Les matériels complémentaires (Annexes 1 3) accompagnant la version en ligne de cet article sont disponibles sur et org/ /j.antinf Références [1] Kilgore ML, Ghosh K, Beavers CM, Wong DY, Hymel Jr PA, Brossette SE. The costs of nosocomial infections. Med Care 2008;46(1): [2] ECDC. ECDC/EMEA Joint Technical Report The bacterial challenge: time to react. European Centre for Disease Prevention and Control (ECDC) and European Medicines Agency (EMEA); [3] WHO. The evolving threat of antimicrobial resistance: options for action. World Health Organization; [4] Grassly NC, Fraser C. Mathematical models of infectious disease transmission. 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