«Qui donc nous roulera la pierre?» L accompagnement en fin de vie dans la tradition chrétienne

Transcription

1 1

2 UCL Faculté de Santé Publique «Soins palliatifs et qualité de vie» 9 mars «Qui donc nous roulera la pierre?» L accompagnement en fin de vie dans la tradition chrétienne Guibert TERLINDEN Aumônier aux Cliniques universitaires St-Luc 2

3 «Un aumônier? C est du côté de la surprise, de l étonnement» Un stagiaire médecin Idem du spirituel : le relire ensemble. 3

4 4

5 5

6 Religion : double étymologie : religare : être re-lié à une communauté d humains dont nous partageons le même «récit» ; relegere : re-lire notre existence avec les lunettes de ce récit donnant à penser. >>> Reliés pour relire 6

7 «Mais c est mon histoire!» «Seigneur, je suis une merveille!» (Ps 139) Eveillé relevée : «re-suscitée» : don 7

8 «Je ne te connaissais que par ouï-dire, maintenant, je t ai rencontré.» Il y avait donc du «mal-entendu»? Job «Sh ma Israël!» «Ecoute!» 8

9 «L un de vous souffre-t-il? Qu il prie. Est-il joyeux? Qu il chante des cantiques. L un de vous est-il malade? Qu il fasse appeler les anciens de l Eglise et qu ils prient après avoir fait sur lui une onction d huile au nom du Seigneur. La prière de la foi sauvera le patient ; le Seigneur le relèvera et s il a des dettes à son actif, il lui sera pardonné.» Epître de Saint Jacques 5,

10 L intégrité qu elle était venu restaurer était physique mais aussi, de part en part, psychique, familiale, spirituelle. La réconciliation à opérer devait se faire à tous les étages de la maison. 10

11 Le récit chrétien, comme tout récit symbolique fort, a besoin de parole échangée et donc de temps pour s articuler de façon sensée à la vie et à l expérience du malade, et ce, d autant plus que la plupart de nos contemporains en ont, en tout ou en partie, perdu le chemin. >>>> Le plus tôt sera le mieux dans le décours de la maladie. 11

12 12

13 «J attends du prêtre-aumônier Terlinden : - de la présence, - qu il lise avec moi la Parole de Dieu, - qu il prie avec moi, - qu il me fasse découvrir en moi la puissance qui l habite lui.» 13

14 Présence, accueil inconditionnel, conviction qu une puissance l habite, inaltérable, hospitalité, agapè-amour d amitié, bonté, miséricorde, chérissement, divine douceur, attention, compassion, responsabilité, dilection fraternelle, justice, courage 14

15 Paul Ricœur «communauté narrative» : un récit partagé par une communauté. Nancy Huston : «des fictions qui nous sont vitales consubstantielles.» ( langage, rites et symboles, art, façon de penser le monde, la vie, la maladie et la mort, le corps et les relations, la morale et la dignité, les soins, l adieu, l au-delà de la mort, les rituels de deuil, Dieu évidemment (ou pas-de- Dieu)... 15

16 Nous appartenons aujourd hui à plusieurs «communautés narrative» ou «récits», de divers plans : spirituel, culturel, religieux,. appartenances mêlées, juxtaposées, pas toujours avec beaucoup de cohérence 16

17 «J'aimerais parler de Dieu, non aux limites, mais au centre, non dans la faiblesse, mais dans la force, non à propos de la mort et de la faute, mais dans la vie et la bonté de l'homme. Non ce très médiocre discours religieux qui «exploite la faiblesse et les limites des hommes et cherche à écouler chez eux leur marchandise» D. Bonhoeffer (1944) >>> non pas comme une bouée de sauvetage ou un bouche-trou quand l homme serait confronté aux incontournables limites de l'existence et impuissant. 17

18 Noyau de la foi chrétienne : L'expérience pascale vécue par les malades et leurs proches. Un tombeau fracturé, ouvert. La vie plus forte que les ombres. 18

19 Elles se demandaient : «Qui nous roulera la pierre de devant le tombeau?» la tristesse, l'angoisse, la colère, la culpabilité, la perte de sens ou de courage, le sentiment de devenir fou, toutes les forces de mort qui habitent ces instants 19

20 «Jamais, pas un instant, nous n avions osé imaginer que dans un moment d une telle horreur, nous aurions pu connaître une telle paix.» Etonnement. La pierre roulée. 20

21 UCL Faculté de Santé Publique «Soins palliatifs et qualité de vie» 9 mars «Dans les situations extrêmes : responsabilité humaine et un dieu qui fait alliance» Guibert TERLINDEN Aumônier aux Cliniques universitaires St-Luc 21

22 Comment les soignants font-ils pour donner sens à leur engagement et pour y demeurer humains pendant plus de 40 ans? Comment ne pas devenir des pourris graves : tu fais ton taf et tu t en fous, t écoute plus»? Qu est-ce qui va mettre du jus dans not boulot? J ai pas envie de devenir horrible!» (stagiaire ISEI 3 ème ) 22

23 Les soignants ont souvent à marcher devant, à devenir des initiateurs. Risque de se voir engloutis dans les émotions et la détresse d autrui. 23

24 24

25 25

26 Dés-arroi Comme un vieux mur affouillé Sens de la vie, de la mort, Douleur d autrui impuissance Sentiment d injustice, d incompréhension. Dés-illusion. 26

27 27

28 Respecter autrui? Hôpital buissonnière Qu est-ce que soigner, qu être responsable?... 28

29 Retourner à vos compétences Revisiter votre éthique personnelle Questionner vos convictions philosophiques et/ou religieuses mieux identifier leurs ressources. Travailler vos représentations vos sources Tant mieux! 29

30 On vous a confrontés, blessés, provoqués Ce fût parfois grande solitude, doute, malêtre, colère, dépression Vous avez changé, muté moi aussi et tant mieux! 30

31 Un long et patient travail d humanisation, Aventure éminemment spirituelle aussi. Nous collaborons à une nouvelle approche intégrant - La grandeur des moyens médicaux - La condition humaine fragile, le sens de la limite, ce qui fait sens dans la vie d un humain. 31

32 «Alliance thérapeutique» «L alliance : un dispositif destiner à soutenir et orienter ce qui fait vivre et permet l épanouissement de l humain. Sa dynamique est l amour mais un amour qui ne peut oublier la loi (un cadre pensé qui donne à penser, des repères professionnels), sans laquelle il risque de se payer de mots en négligeant ce qui la fonde : la justice, le respect de soi et de l autre, l exigence de liberté intérieure». 32

33 Ce qui fait vivre, ou non. Ce qui va permettre l épanouissement de la vie, ou non. Jusqu au bout de la vie. Patient exercice de discernement de la liberté humaine, jamais pleinement accomplie. 33

34 «Seigneur, si je pouvais être vivant quand je mourrai!» Winnicott 34

35 35