Le hasard fait que quelque chose arrive sans cause (Cicéron, Ier siècle avant J.-C.)

Transcription

1 Le hasard fait que quelque chose arrive sans cause (Cicéron, Ier siècle avant J.-C.) La cause est un je ne sais quoi et les effets en sont effroyables (Pascal, vers 1657). Le hasard n'est rien qu'un mot imaginé pour couvrir l'ignorance où l'on est des causes agissantes dans une nature dont la marche est souvent inexplicable (d'holbach 1770). Jouer, c'est expérimenter le hasard. Novalis (environ 1800) Je trouve un mécanisme là où j'aurais dû rencontrer; semble-t-il, une intention : c'est ce que j'exprime en parlant du hasard (Bergson, 1934). Un fou qui dit par hasard le vrai n'a pas la vérité (Propos d'un Normand, citation de Emile-Auguste Chartier, dit Alain, début du XX e ).

2 Le hasard fait que quelque chose arrive sans cause (Cicéron, Ier siècle avant J.-C.) On ne peut pas dire que le hasard produit des phénomènes ; il n'est pas véritablement une cause. Et Cicéron de dire que quelque chose ne peut pas naître de rien. Le hasard est seulement dans la rencontre ; il lie entre eux des phénomènes qui sont, chacun de leur côté, totalement déterminés. "On remarquera le hasard qui a fait périr deux frères le même jour [dans des circonstances rigoureusement indépendantes], et l'on ne remarquera pas, où l'on remarquera moins celui qui les a fait mourir à un mois, à trois mois, à six mois d'intervalle ; quoiqu'il n'y ait toujours aucune solidarité entre les causes qui ont amené tel jour la mort de l'aîné, et celles qui ont amené tel autre jour la mort du cadet, ni entre ces causes et leur qualité de frères" Essai sur les fondements de nos Connaissances et sur les caractères de la Critique Philosophique Cournot ( ), philosophe et mathématicien

3 Le hasard n'est rien qu'un mot imaginé pour couvrir l'ignorance où l'on est des causes agissantes dans une nature dont la marche est souvent inexplicable (d'holbach 1770). En réalité, la citation est : "Le hasard n'est rien, qu'un mot imaginé, ainsi que le mot Dieu, pour couvrir l'ignorance où l'on est des causes agissantes dans une nature dont la marche est souvent inexplicable. Ce n'est point le hasard qui a produit l'univers, il est de lui-même ce qu'il est, il existe nécessairement et de toute éternité." Système de la nature, ou, Des lois du monde physique et du monde moral, Paul Henri Thiry, baron d'holbach ( ) La liberté des métaphysiciens suppose du hasard dans la nature alors que le hasard n'est qu'ignorance des causes. Le libre arbitre n'est que l'hésitation d'un homme dont le cerveau n'a pas assez de raison pour se déterminer. Être libre, c'est agir selon sa nature propre, en connaissance de cause. Quand l'homme se connaît et connaît les causes qui le déterminent, il peut se modifier, se transformer. La nature (c'est-à-dire le mécanisme qui fait la nécessité universelle, le dieu chez Spinoza, la substance) se caractérise par l'absence de finalité mais celle-ci n'est pas le hasard puisque Dieu est tout ce qui est!

4 Je trouve un mécanisme là où j'aurais dû rencontrer; semble-t-il, une intention : c'est ce que j'exprime en parlant du hasard (Bergson, 1934). Citation plus complète : Que le jeu tout mécanique des causes qui arrêtent la roulette sur un numéro me fasse gagner, et par conséquent opère comme eût fait un bon génie soucieux de mes intérêts, que la force toute mécanique du vent arrache du toit une tuile et me la lance sur la tête, c'est-à-dire agisse comme eût fait un mauvais génie conspirant contre ma personne, dans les deux cas je trouve un mécanisme là où j'aurais cherché, là où j'aurais dû rencontrer, semble-t-il, une intention ; c'est ce que j'exprime en parlant de hasard. Henri Bergson s'interroge sur la part qui revient à la subjectivité dans l'attitude qui consiste à mettre au compte du hasard des processus naturels. Sa thèse est énoncée à deux reprises : une première fois lorsqu'il dit qu'"il n'y a de hasard que parce qu'un intérêt humain est engagé" et une seconde fois lorsqu'il écrit que "le hasard est le mécanisme se comportant comme s'il avait une intention". Bergson déploie son explication en partant d'un exemple qu'il analyse et exploite tout au long du texte en opposant deux lectures d'un même événement, une lecture interprétative, conduisant à la notion de hasard, et une lecture explicative, s'en tenant aux données objectives. Les Deux Sources de la Morale et de la Religion, Henri Bergson ( ) est un philosophe français.

5 La cause est un je ne sais quoi et les effets en sont effroyables (Pascal, vers 1657). En réalité la citation est : "Qui voudra connaître à plein la vanité de l'homme n a qu à considérer les causes et les effets de l amour. La cause en est un je ne sais quoi. Corneille. Et les effets en sont effroyables. Ce je ne sais quoi, si peu de chose qu'on ne peut le reconnaître, remue toute la terre, les princes, les armées, le monde entier. Le nez de Cléopâtre, s'il eût été plus court, toute la face de la terre aurait changé." Ce qui rend le plus sensible la vanité de l'homme, c'est la disproportion entre les causes et les effets. Il suffit du bourdonnement d'une mouche pour tenir "sa raison en échec" et troubler "cette puissante intelligence qui gouverne les villes et les royaumes". "Petites causes, grands effets". Même disproportion entre "la cause et les effets de l'amour" ici. Pensées, Blaise Pascal ( ) est un mathématicien et physicien, philosophe, moraliste et théologien.

6 Jouer, c'est expérimenter le hasard. Novalis (environ 1800) de Baron Von Hardenberg, dit Novalis Friedrich Tiré de l'encyclopédie, ouvrage représentatif d'un certain romantisme allemand. En liaison avec des passages de Zarathoustra de Nietzsche, que Deleuze (philosophe français ) expliquait très bien : "Je fais bouillir dans ma marmite tout ce qui est hasard". Selon Deleuze, un coup de dés affirme en une seule fois tout le hasard, même si une seule combinaison doit en sortir. C'est le tragique de Nietzsche, un côté joueur qui le fait danser au bord des abîmes.

7 Un fou qui dit par hasard le vrai n'a pas la vérité (Propos d'un Normand, citation de Emile-Auguste Chartier, dit Alain, début du XX e ). Alain ou Emile-Auguste Chartier ( ) fut professeur au lycée Pierre Corneille de Rouen. On peut retrouver la citation dans les Stoïciens, auxquels il a consacré un ouvrage du temps de sa jeunesse.