Cours polycopié pour le module L1 SFA Mathématiques I Analyse



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i Cours polycopié pour le module L1 SFA Mathématiques I Analyse [60h de cours/td] À propos de ce module Programme prévu : nombres complexes, polynômes, fractions rationnelles, fonctions réelles usuelles et calcule différentiel, équations différentielles linéaires. Pré-requis : programme de terminale S (sans la spécialité mathématique). À propos de ces notes Ces notes sont rédigées pour aider les étudiants et les enseignants à structurer le contenu du cours et pour fournir une référence rapide pour des notions et des résultats du cours (définitions et théorèmes). Pour bien acquérir la matière, il peut s avérer indispensable de prendre ses propres notes et de ne pas hésiter de poser des questions aux enseignants pendant les cours et TDs. Certaines notions, par exemple les notions de voisinage et de point d accumulation, sont introduites pour raisons de commodité ; la connaissance des énoncés exacts de leurs définitions n est pas exigible, mais leurs significations doivent être comprises pour des exemples particuliers. Conventions On emploie le symbole déf = lorsqu une égalité sert à définir le membre gauche à partir du membre droit. Par exemple : On appelle carré du réel x le réel x 2 déf = x x. On peut aussi introduire un terme sans définition complète et sans que sa connaissance soit exigible. Par exemple : On résume les propriétés de l addition dans R en disant que (R, +) est un «groupe commutatif».

ii Table des matières Table des matières 1 Nombres complexes 1 1.1 Introduction à C.......................... 1 1.1.1 Définition des nombres complexes............. 1 1.1.2 Plan complexe d Argand-Cauchy............. 2 1.2 Calcul dans C............................ 3 1.2.1 Le corps C.......................... 3 1.2.2 Conjugaison......................... 4 1.2.3 Module........................... 4 1.2.4 Racines carrées....................... 6 1.2.5 Cercle unité......................... 9 1.2.6 Argument.......................... 10 1.2.7 Exponentielle et logarithme complexes.......... 12 1.2.8 Racines de l unité...................... 13 1.2.9 Applications à la trigonométrie.............. 14 1.3 Applications géométriques..................... 16 1.3.1 Similitudes directes..................... 17 1.3.2 Coordonnées polaires.................... 18 1.4 Exercices............................... 19 2 Polynômes 25 2.1 Définition des polynômes et règles de calcul........... 25 2.1.1 Définition de K[X] et ses opérations........... 25 2.1.2 Propriétés du degré par rapport aux opérations..... 30 2.1.3 Divisibilité dans K[X], division euclidienne........ 31 2.1.4 L évaluation, fonctions polynomiales, racines....... 37 2.2 Dérivation des polynômes..................... 37 2.2.1 Polynôme dérivé...................... 37 2.2.2 Dérivées itérées....................... 38 2.3 Racines d un polynôme....................... 40 2.3.1 Définition et propriétés................... 40 2.3.2 Racines multiples...................... 42 2.3.3 Lien avec la factorisation.................. 43 2.4 Fonctions polynomiales....................... 45 2.4.1 Propriétés des fonctions polynomiales........... 45 2.4.2 Rapport entre fonctions et polynômes........... 45 2.5 Propriétés dépendant du corps de base.............. 46 2.5.1 Propriétés de C[X]..................... 46 2.5.2 Propriétés de R[X]..................... 47

Table des matières iii 2.6 Fractions et fonctions rationnelles................. 49 2.6.1 Définition de K(X) et ses opérations........... 49 2.6.2 Fonctions rationnelles.................... 54 2.6.3 Décomposition en éléments simples............ 54 2.7 Exercices............................... 60 3 Étude de fonctions réelles 65 3.1 Rappel sur fonctions........................ 65 3.1.1 L opération de composition, la fonction Id E....... 65 3.1.2 Injections, surjections, bijections.............. 65 3.1.3 La fonction réciproque (ou inverse)............ 66 3.2 Limites................................ 66 3.2.1 Définition des limites.................... 66 3.2.2 Propriétés des limites.................... 70 3.2.3 Bornes inférieure et supérieure............... 74 3.2.4 Sur l existence des limites................. 75 3.3 Continuité.............................. 76 3.3.1 Définition et propriétés de fonctions continues...... 76 3.3.2 Théorème des bornes.................... 78 3.3.3 Théorème des valeurs intermédiaires........... 78 3.3.4 Prolongement par continuité................ 79 3.3.5 Continuité de la fonction réciproque............ 80 3.4 Dérivabilité............................. 80 3.4.1 Définition de la fonction dérivée.............. 80 3.4.2 Propriétés arithmétiques de la dérivée........... 81 3.4.3 Dérivée de la fonction composée.............. 82 3.4.4 Dérivée de la fonction réciproque............. 83 3.4.5 Dérivée et variations d une fonction............ 83 3.5 Fonctions usuelles.......................... 86 3.5.1 Fonctions polynomiales et rationnelles.......... 86 3.5.2 Fonctions exponentielle et logarithme........... 86 3.5.3 Fonctions puissance et racine............... 89 3.5.4 Fonctions trigonométriques................. 90 3.5.5 Fonctions trigonométriques inverses............ 94 3.5.6 Fonctions hyperboliques.................. 95 3.5.7 Fonctions hyperboliques inverses.............. 96 3.6 Étude de fonction.......................... 96 3.6.1 Asymptotes, branches paraboliques............ 96 3.6.2 Position par rapport à une tangente ou une asymptote. 97 3.6.3 Plan d étude......................... 97 3.7 Courbes paramétrées en coordonnées cartésiennes dans le plan. 97 3.7.1 Paramétrage d un ellipse et d une hyperbole....... 98 3.7.2 Courbes diverses...................... 99 3.8 Exercices............................... 101

iv Table des matières 4 Équations différentielles linéaires 107 4.1 Fonctions complexes d une variable réelle............. 107 4.2 Équations différentielles linéaires générales............ 108 4.2.1 Méthode de variation de la constante........... 110 4.2.2 Équations d ordre 1..................... 111 4.3 Équations différentielles linéaires à coefficients constants.... 113 4.3.1 Polynôme caractéristique.................. 113 4.3.2 Équations homogènes.................... 114 4.3.3 Équations avec second membre de forme spécial..... 116 4.4 Exercices............................... 118

1 1 Nombres complexes 1.1 Introduction à C 1.1.1 Définition des nombres complexes Les nombres complexes sont les «nombres» de la forme a + bi, où a, b R, et i est l unité imaginaire. Les opérations d addition et de multiplication sont définies de manière naturelle, compte tenu de la relation i 2 = 1. L ensemble des nombres complexes est noté C. On admet que les lois associative, commutative, et distributive de l arithmétique réelle sont satisfaites pour les nombres complexes. Par exemple : xy = yx, x(y + z) = xy + xz pour tous x, y, z C. On admet aussi que pour tous a, b, c, d R, si a + bi = c + di, alors a = c et b = d. Ainsi tout nombre complexe x s écrit d une façon unique comme x = a + bi avec a et b réels. On appelle a la partie réelle et b la partie imaginaire de a + bi (a, b R). (Attention : la partie imaginaire est réelle.) On note la partie réelle de x C par Re x, et la partie imaginaire par Im x. Ainsi, pour tout x C, x = Re x + i Im x. On admet que 0i = 0, et ainsi on voit l ensemble R des nombres réels comme une partie de l ensemble C des nombres complexes. Cette «définition» des nombres complexes et des opérations sur eux n est pas précise, mais elle suffit pour des applications. Définitions précises. Deux façons de définir les nombres complexes en fournissant un modèle concret de C nécessitent un peu de la théorie des polynômes ou de l algèbre linéaire. Par exemple, on peut définir les nombres complexes comme les polynômes réels de la forme a + bx, a, b R, et définir les résultats d additions et de multiplications comme les restes de la division euclidienne par 1 + X 2 des résultats des opérations respectives sur les polynômes. On dit que la partie réelle de a + bx est a, et la partie imaginaire est b. Dans ce cas, l unité imaginaire est le polynôme X.

2 1 Nombres complexes On peut aussi définir les nombres complexes comme les matrices de la forme ( ) a b, a, b R, b a et définir l addition et la multiplication comme les opérations respectives sur ces matrices. En tout cas on devrait vérifier certains propriétés algébriques. 1.1.2 Plan complexe d Argand-Cauchy L application (x, y) x + yi, R 2 C, est une bijection entre R 2 et C. Ainsi dès qu on a un plan P avec un repère (O, u, v ), on peut associer à tout point M de P de coordonnées (x, y) le nombre complexe x + yi, qui s appelle l affixe de M et est noté Aff(M). Par exemple, Aff(O) = 0. Réciproquement, tout nombre complexe sera ainsi representé par un unique point de P. Un plan P avec une telle bijection entre ses points et les nombres complexes, où de plus le repère (O, u, v ) est exigé d être orthonormé direct, s appelle un plan d Argand-Cauchy. On va noter [z] le point d affixe z C. Comme les points d un plan d Argand-Cauchy sont en bijection avec les nombres complexes, la difference entre ce plan et le corps C est plutôt linguistique que mathématique. (On peut parler de «points» ou de «nombres».) On définit l affixe d un vecteur M 1 M 2, noté Aff( M 1 M 2 ), par la relation : Aff( M 1 M 2 ) = Aff(M 2 ) Aff(M 1 ). Cela ne depend pas du choix de M 1 et M 2 : si M 1 M 2 = M 1M 2, alors Aff(M 2 ) Aff(M 1 ) = Aff(M 2) Aff(M 1). Si (O, u, v ) est le repère de référence du plan d Argand-Cauchy, alors Aff( u ) = 1, Aff( v ) = i. On va noter [z] le vecteur d affixe z C. Observons la relation suivante entre les opérations vectorielles dans un plan d Argand-Cauchy et les opérations du corps C : pour tous points M 1, M 2, M 3 du plan, si et seulement si OM 1 + OM 2 = OM 3 Aff(M 1 ) + Aff(M 2 ) = Aff(M 3 ). Ainsi l addition complexe correspond à l addition vectorielle. Si M 1, M 2 sont de points du plan, et a est un réel, alors a OM 1 = OM 2 si et seulement si a Aff(M 1 ) = Aff(M 2 ). La signification géométrique de la multiplication complexe sera expliquée plus loin.

1.2 Calcul dans C 3 1.2 Calcul dans C 1.2.1 Le corps C La structure (C, +,, 0, 1, i) satisfait les propriétés suivantes : 1. pour tous x, y, z C, 2. pour tous x, y C, 3. pour tout x C, (x + y) + z = x + (y + z), x + y = y + x, x + 0 = 0 + x = x, 4. pour tout x C, il existe y C tel que x + y = y + x = 0, 5. pour tous x, y, z C, 6. pour tous x, y C, 7. pour tout x C, (xy)z = x(yz), xy = yx, x 1 = 1 x = x, 8. pour tout x C \ {0}, il existe y C tel que xy = yx = 1, 9. pour tous x, y, z C, 10. 1 0, 11. 1 + i 2 = 0. (x + y)z = xz + yz, x(y + z) = xy + xz, Pour vérifier la propriété (8) l existence de l inverse multiplicatif observons que si a + bi 0 où a, b R, alors ( ) a (a + bi) a 2 + b b 2 a 2 + b i = 1. 2 On peut résumer les propriétés (1 10) en disant que (C, +, ) est un «corps commutatif». Pour obtenir une définition axiomatique de C, il suffit de rajouter aux propriétés (1 11) que : 12. (R, +, ) «fait partie» de (C, +, ), 13. tout z C s écrit comme z = x + yi avec x, y R. À noter : on assume dans la suite qu en plus des opérations arithmétiques + et, et de l unité imaginaire i, C est muni des opérations «la partie réelle» Re: C R et «la partie imaginaire» Im: C R telles que z = Re z + i Im z pour tout z C.

4 1 Nombres complexes Exercice. Montrer que les «nombres» de la forme a + eb où a, b R et où l on exige que e 2 = 1 et définit les opérations d addition et de multiplication de façon naturel compte tenu de cette relation, ne forment pas un «corps commutatif». (Indication : montrer que le produit de deux tels «nombres» non nuls peut être nul.) 1.2.2 Conjugaison Pour tout z = x + yi, x, y R, on définit le conjugué de z : On a les propriétés suivantes : 1. pour tous z 1, z 2 C, z = x + yi déf = x yi = Re z (Im z)i. z 1 + z 2 = z 1 + z 2, 2. pour tous z 1, z 2 C, 3. pour tout z C, 4. pour tout z C, 5. pour tout z C, 6. pour tout z C, z 1 z 2 = z 1 z 2, z = z, z + z = 2 Re(z) R, z z = 2i Im(z) ir, z z = Re(z) 2 + Im(z) 2 R +. Dans un plan d Argand-Cauchy de repère de référence (O, u, v ), l opération de conjugaison corresponde à la réflexion orthogonale par rapport à l axe de repère (O, u ). 1.2.3 Module Pour tout z = x+yi, x, y R, on définit le module (ou la valeur absolue) de z : z = x + yi déf = x 2 + y 2 = (Re z) 2 + (Im z) 2 = z z R +. Si z est réel, alors le module de z coïncide avec la valeurs absolue habituelle de z. On a les propriétés suivantes : 1. pour tout z C, z = z,

1.2 Calcul dans C 5 2. pour tout z C, z z = z 2, et ainsi, pour tout z C = C \ {0}, 3. pour tous z 1, z 2 C, z 1 = z z 2, z 1 z 2 = z 1 z 2 (indication : cela résulte de l identité z 2 = z z). Dans un plan d Argand-Cauchy, la distance entre deux points M 1 et M 2 des affixes z 1 et z 2 est z 1 z 2 : d(m 1, M 2 ) = Aff( M 1 M 2 ) = Aff(M2 ) Aff(M 1 ). Lemme (Inégalité de Cauchy-Schwarz). Pour tous z 1, z 2 C, on a : Re( z 1 z 2 ) z 1 z 2. De plus, pour que l égalité ait lieu, il faut et il suffit que l un des nombres z 1 et z 2 soit multiple de l autre par un réel. Esquisse d une démonstration. Soit w = z 1 z 2. Alors Re( z 1 z 2 ) = Re(w) = Re(w) 2 Re(w) 2 + Im(w) 2 = w = z 1 z 2. En particulier, Re( z 1 z 2 ) = z 1 z 2 si et seulement si w R. Il reste à vérifier que z 1 z 2 R si et seulement si l un des nombres z 1 et z 2 est multiple de l autre par un réel. Théorème (Première inégalité triangulaire). Pour tous z 1, z 2 C, on a : z 1 + z 2 z 1 + z 2. De plus, pour que l égalité ait lieu, il faut, et il suffit, que z 1 et z 2 soient positivement liés. Démonstration. Il s agit d une inégalité entre réels positifs, elle est donc équivalente à l inégalité entre leurs carrés. On calcule : ( z 1 + z 2 ) 2 z 1 + z 2 2 = z 1 2 + z 2 2 + 2 z 1 z 2 z 1 + z 2 2 d après l inégalité de Cauchy-Schwarz. = 2 z 1 z 2 2 Re( z 1 z 2 ) 0 Pour comprendre le nom du théorème, il suffit de l appliquer à la situation suivante : on fixe trois points A, B, C du plan et l on pose z 1 = Aff(B) Aff(A) et z 2 = Aff(C) Aff(B). Alors z 1 + z 2 = Aff(C) Aff(A), et le théorème dit que : d(a, C) d(a, B) + d(b, C), l égalité ayant lieu si, et seulement si, A, B, C sont alignés et dans cet ordre.

6 1 Nombres complexes Corollaire (Deuxième inégalité triangulaire). Pour tous z 1, z 2 C, on a : z 1 z 2 z 1 z 2. Par identification entre l ensemble C et un plan d Argand-Cauchy, on peut transmettre à C des notions géométriques. Définition. Soient z 0 C et r > 0. Le disque ouvert de centre z 0 et de rayon r est l ensemble D(z 0, r) déf = { z C z z 0 < r }. Le disque fermé de centre z 0 et de rayon r est l ensemble D(z 0, r) déf = { z C z z 0 r }. Le cercle de centre z 0 et de rayon r est l ensemble 1.2.4 Racines carrées D(z 0, r) déf = { z C z z 0 = r }. Rappelons d abord que la notation z n a de sens que lorsque z est un réel positif (ou nul). Même en utilisant les nombre complexes, il n est pas possible de donner un sens logique à z lorsque z n est pas un réel positif. Par exemple, on ne peut pas définir la signification de «1» car il y a deux racines carrées de 1 : i et i. Il y a bien sûr aussi deux racines carrées de 1 : 1 et 1, mais là pour définir 1 on peut décider à toujours choisir la racine positive. Mais il n y a aucune façon mathématiquement raisonnable de choisir entre i et i. Définition. On appelle une racine carrée de z C tout u C tel que u 2 = z. On appelle une racine n-ième de z C, pour n N = N \ {0}, tout u C tel que u n = z. On va chercher maintenant des formules pour toutes les racines carrées d un nombre complexe Z = X + iy, X, Y R, en termes de sa partie réelle X et sa partie imaginaire Y. Commençons par le cas le plus simple : Z = 0. Soit z une racine carrée de Z = 0. Supposons que z 0, alors on sait (voir la section 1.2.1) que z possède un inverse multiplicatif z 1, et ainsi z = z 1 = z(zz 1 ) = z 2 z 1 = Zz 1 = 0 z 1 = 0, qui est l absurde, car on a supposé que z 0. (Par le même raisonnement, si z 1, z 2 C et z 1 z 2 = 0, alors z 1 = 0 ou z 2 = 0.) Donc z = 0, et c est la seule racine carrée de Z = 0. Observons maintenant que si z est une racine carrée de Z C, alors z l est aussi. En effet : ( z) 2 = (( 1)z) 2 = ( 1) 2 z 2 = z 2 = Z.

1.2 Calcul dans C 7 Montrerons maintenant que si un nombre Z C admet une racine carrée z, alors il n a pas d autres racines carrées que z et z. Supposons que z 1 et z 2 sont deux racines carrées de Z C, alors : z 2 1 = Z = z 2 2 z 2 1 z 2 2 = 0 (z 1 z 2 )(z 1 + z 2 ) = 0 z 1 z 2 = 0 ou z 1 + z 2 = 0 z 1 = ±z 2 (on a utilisé la propriété que si un produit dans un corps est zéro, alors au moins un des facteurs est zéro). Ainsi, si Z 0 admet une racine carrée, il en admet exactement deux, opposées l une de l autre. Pour savoir s il existe des racines carrées, on se donne Z = X + iy C et l on cherche z = x + iy C tel que z 2 = Z. Cela équivaut au système d équations suivant : x 2 y 2 = X, 2xy = Y. Commençons par un cas facile, celui où Z est réel, c est-à-dire Y = 0 et Z = X. Si X = 0, la seule racine carrée est z = 0. Si X > 0, les racines carrées sont ± X, où X désigne celle qui est positive (comme d habitude). Si X < 0, les racines carrées sont ±i X = ±i X. Il y en a bien deux opposées, mais aucune des deux ne bénéficie d une notation particulière. Passons au cas Y 0. Pour simplifier la résolution du système, on remarque que z 2 = z 2 = Z. On a donc une nouvelle équation : x 2 + y 2 = X 2 + Y 2. En la combinant avec la première, on trouve : x 2 X2 + Y = 2 + X X2 + Y x = ± 2 + X 2, 2 y 2 X2 + Y = 2 X X2 + Y 2 y = ± 2 X 2. (On a le droit, car les quantités mises sous racine sont bien des réels positifs.) On se retrouve donc avec deux valeurs distinctes possibles pour x et deux valeurs distinctes possibles pour y, donc, a priori, quatre valeurs distinctes possibles pour z = x + iy, ce qui en fait trop. Cependant, l équation 2xy = Y impose une liaison de plus entre x et y. Premier cas : Y > 0. Alors x et y sont de même signe, et l on trouve les deux racines carrées : X2 + Y ± 2 + X X2 + Y + i 2 X. 2 2

8 1 Nombres complexes Deuxième cas : Y < 0. Alors x et y sont de signe contraire, et l on trouve les deux racines carrées : X2 + Y ± 2 + X X2 + Y i 2 X. 2 2 Pour vérifier que ces valeurs de z = x + iy sont en effet des racines carrées de Z = X + iy, on vérifie que x 2 y 2 = X et 2xy = Y (cela résulte aussi de la façon comment on a trouvé ces valeurs). On peut remarquer de plus que les formules pour les racines carrées dans les cas Y > 0 et Y < 0 s appliquent aussi au cas Y = 0. Équation du second degré dans C L équation du second degré az 2 + bz + c = 0, avec a, b, c C et a 0, se résout à l aide de la forme canonique du trinôme du second degré : ( az 2 + bz + c = a z + b 2a où est le discriminant du trinôme, défini par : déf = b 2 4ac. ) 2, 4a 2 Si = 0, alors az 2 + bz + c = a ( ) 2, z + b 2a et l équation admet une seule solution, la racine double z = b 2a. Si 0, alors soit δ une racine carrée de : = δ 2 (donc l autre racine carrée de est δ). L équation admet dans ce cas exactement deux solutions (racines) : z 1 = b + δ et z 2 = b δ. 2a 2a On a, comme pour le cas des coefficients réels, la factorisation du trinôme : az 2 + bz + c = a(z z 1 )(z z 2 ). On a aussi les relations entre coefficients et racines : z 1 + z 2 = b a et z 1 z 2 = c a. Toutes ces formules sont encore valables lorsque = 0, en prenant δ = 0. Exercice. Calculer les racines carrées de ±i, les racines cubiques de 1.

1.2 Calcul dans C 9 1.2.5 Cercle unité Figure 1.1 Cercle unité. Le cercle de centre 0 et de rayon 1 a une importance particulière, il s appelle le cercle unité et sera noté U : U déf = { z C z = 1 }. Le cercle unité U est stable par multiplication, par conjugaison, et par inversion : si z 1, z 2 U, alors z 1 z 2 U (car z 1 z 2 = z 1 z 2 ), et si z U, alors z, z 1 U. Tout complexe z 0 s écrit d une façon unique comme En effet, la seule possibilité est z = ru avec r R +, u U. r = z, u = z z. Cette écriture «z = ru» s appelle la décomposition polaire de z, r ici est positif et u est unitaire (de module 1). Les ensembles R + et U sont stables par multiplication et inversion. Ainsi, si z 1 z 2 = z 3 0, z 1 = r 1 u 1, z 2 = r 2 u 2, z 3 = r 3 u 3, r 1, r 2, r 3 R +, u 1, u 2, u 3 U, alors r 3 = r 1 r 2 et u 3 = u 1 u 2. Cette écriture de nombres complexes non nuls pourra être appliquée au calcul des produits si on aura une forme convenable pour les éléments du cercle unité U et une façon simple pour les multiplier. On peut utiliser la forme trigonométrique pour écrire les éléments de U. On sait (d après les propriétés des fonctions trigonométriques) que l application t (cos t, sin t) est une surjection de R sur le cercle unité dans le plan R 2. Par identification de R 2 avec C, on conclut que l application t cos t + i sin t

10 1 Nombres complexes est une surjection de R sur U. Ainsi tout u U s écrit (de façon non-unique) comme u = cos t + i sin t avec t R. Cette écriture s appelle la forme trigonométrique de u U. En utilisant les formules d addition pour sin et cos, on trouve que, pour tous s, t R, 1.2.6 Argument (cos s + i sin s)(cos t + i sin t) = cos(s + t) + i sin(s + t). En général, la forme trigonométrique de z C est la form d écriture de z comme : z = r(cos t + i sin t) avec r > 0, t R. D après ce qu on a vu, cette forme existe pour tout z C, et r = z est le module de z. Tout t qui peut apparaître dans cette formule pour z s appelle un argument de z. Théorème. Tout z C = C \ {0} a une infinité des arguments. Si θ est un argument de z C, alors l ensemble de tous les arguments est { θ + 2πk k Z }. On note arg(z) l ensemble des arguments de z. (D après le théorème, on peut dire que arg(z) est une «classe d équivalence modulo 2π».) L unique argument de z qui appartient à ] π, π] s appelle l argument principal de z et est noté Arg(z). La fonction Arg: C ] π, π] est appelée la détermination principale de l argument. On a les propriétés suivantes. 1. Pour tous z 1, z 2 C, arg z 1 z 2 = arg z 1 +arg z 2 et Arg z 1 z 2 = Arg z 1 +Arg z 2 (mod 2π). 2. Pour tout z C, arg z 1 = arg z = arg z. 3. Pour tout z C \ R, Arg z 1 = Arg z = Arg z. 4. Pour tout z C, arg z = 0 (mod 2π) si et seulement si z R +.

1.2 Calcul dans C 11 Dans la relation arg z 1 z 2 = arg z 1 +arg z 2, on n additionne pas de véritables réels, mais des «réels modulo 2π», il faut donc préciser ce que peut bien signifier une telle relation. On choisit un argument θ 1 de z 1 et un argument θ 2 de z 2 et on les additionne : on trouve que θ 1 + θ 2 est un argument de z 1 z 2. Si l on choisissait un autre argument θ 1 = θ 1 + 2πk de z 1 (avec k Z) et un autre argument θ 2 = θ 2 + 2πl de z 2 (avec l Z), on obtiendrait θ 1 + θ 2 = θ 1 + θ 2 + 2π(k + l), qui est bien un autre argument de z 1 z 2. La morale de cette histoire, c est que l on peut additionner des «réels modulo 2π». Pour des raisons analogues, on peut également calculer l opposé d un «réel modulo 2π», et l on a la relation arg z 1 = arg z. Exercice. Quels sont les arguments des réels, des imaginaires purs, des réels positifs? Interprétation géométrique de l argument Soient u 1, u 2 deux vecteurs non nuls, d affixes respectives z 1, z 2 (qui sont donc des complexes non nuls). Alors l angle orienté de u 1 à u 2 est égal à l argument de z 2 /z 1 : ( u 1, u 2 ) = arg ( ) Aff( u2 ). Aff( u 1 ) (On peut prendre cette formule pour une définition de l angle orienté, ou on peut définir l angle orienté autrement et démontrer cette égalité après.) Noter que l on a employé la notation arg qui désigne un réel modulo 2π. Ainsi, l angle orienté de deux vecteurs n est connu que modulo 2π. Par exemple, si (O, u, v) est le repère de référence du plan, alors ( u, v) = arg Aff( v) Aff( u) = arg i = π 2 (mod 2π). On connaît la relation de Chasles pour les angles : ( u 1, u 2 ) + ( u 2, u 3 ) = ( u 1, u 3 ). Si l on pose z 1 = Aff( u 1 ), z 2 = Aff( u 2 ) et z 3 = Aff( u 3 ), cela s écrit : arg z 2 z 1 + arg z 3 z 2 = arg z 3 z 1. Posons w 1 = z 2 z 1 et w 2 = z 3 z 2 ; la relation devient : L on déduit aussi la relation : arg w 1 + arg w 2 = arg(w 1 w 2 ). ( u 2, u 1 ) = ( u 1, u 2 ).

12 1 Nombres complexes 1.2.7 Exponentielle et logarithme complexes L exponentielle complexe Si x R, on définit exp(ix) par la formule exp(ix) déf = cos x + i sin x. Par exemple, exp(iπ) = 1. En général, pour z = x + iy C, x, y C, on définit exp z = exp(x + iy) déf = exp(x) exp(iy) = e x (cos y + i sin y). La propriété fondamentale suivante résulte des propriétés de l exponentielle réelle et des formules d addition pour sinus et cosinus : exp(z 1 + z 2 ) = exp z 1 exp z 2 pour tous z 1, z 2 C. On va aussi écrire e z au lieu de exp(z). 1 Théorème. L application exp: C C est une surjection de C sur C. Esquisse d une démonstration. Soit z C. Écrivons z sous la forme trigonométrique : z = ru = r(cos θ + i sin θ), r > 0, u U, θ R. (Rappelons nous que r est le module de z, et θ est un argument.) Posons λ = ln r = ln z. Posons w = λ + iθ. Alors e w = e λ (cos θ + i sin θ) = z. Théorème. Pour z 1, z 2 C, on a e z 1 = e z 2 si et seulement si z 1 z 2 2πiZ. Esquisse d une démonstration. Résulte des faits que ez 1 e z 2 = ez 1 z 2 et que cos t + i sin t = 1 cos t = 1 et sin t = 0 t 2πZ. L approche de l exponentielle complexe présentée ici repose sur l étude en terminale de l exponentielle réelle, qui est fondée sur de l analyse et peut aisément être rendue rigoureuse ; et sur celle des fonctions trigonométriques, qui est largement basée sur des dessins liés au cercle unité et sur des interprétations heuristiques. De plus, dans cette approche, la formule d Euler e iπ = 1 est une tautologie, qui ne fait que traduire les égalités cos π = 1 et sin π = 0. 1. On n utilise la notation «a b» pour les complexes que dans le cas où a est un réel positif. Si a > 0, on définit a b déf = exp(b ln(a)). En revanche, on ne peut pas définir, par exemple, i i comme un nombre complexe unique d une façon raisonnable.

1.2 Calcul dans C 13 La «vraie» définition de l exponentielle complexe (due à Euler) repose sur la formule suivante : exp(z) déf z n = n! = 1 + z + z2 2 + z3 6 + z4 24 + z5 120 + z6 720 +. n=0 Bien entendu, il faut donner un sens à la «somme infinie», ce qui revient à définir le passage à la limite dans C à partir des sommes finies. Cela repose sur la notion de «série». On devrait ensuite prouver, à partir de cette définition, diverses propriétés de l exponentielle complexe. En utilisant l exponentielle complexe, on pourrait définir l exponentielle réelle et les fonctions trigonométriques de variable réelle et même complexe. Exercice. À quelle condition a-t-on re iθ = r e iθ avec r, r R et θ, θ R? Le logarithme complexe Définition. Soit z C. Tout complexe w C tel que e w = z s appelle un logarithme de z. D après un calcul effectué plus haut, les logarithmes de z sont les complexes ln z + iθ, où θ arg z. Si l on prend θ = Arg z (l argument principal de z), on obtient le seul logarithme de z dont la partie imaginaire est dans ] π, π] : c est la détermination principale du logarithme, parfois notée log z. On a donc la formule : log z = ln z + i Arg z. Exercice. Calculer les logarithmes de ±1 ± i. Exercice. Calculer (avec discussion) log z 1. 1.2.8 Racines de l unité Soit n N un entier naturel non nul. On appelle racine n e de l unité une racine n e de 1. Les racines n es de l unité forment l ensemble : On a les implications : µ n déf = { z C z n = 1 }. z µ n z n = 1 z n = 1 z = 1 z U, d où l inclusion µ n U. Pour déterminer les racines n es de l unité, on les cherche donc sous la forme e iθ. On a les équivalences : (e iθ ) n = 1 e inθ = 1 nθ 0 (mod 2πZ) k Z : nθ = 2kπ, d où µ n = { e 2kiπ/n k Z }. D autre part, si k k (mod n), i.e. si k k est un multiple de n, alors on écrit k = k + mn avec m Z, d où : e 2k iπ/n = e 2kiπ/n+2miπ = e 2kiπ/n e 2miπ = e 2kiπ/n.

14 1 Nombres complexes On peut donc choisir k {0, 1,..., n 1} car les autres valeurs de k ne fourniront pas de nouvelles valeurs de e 2kiπ/n. On trouve donc en fin de compte : µ n = { e 2kiπ/n 0 k n 1 }. De plus, ces n valeurs e 2kiπ/n sont deux à deux distinctes, car : e 2kiπ/n = e 2k iπ/n 2kπ/n 2k π/n (mod 2π) k k (mod n). En effet, 2kπ/n 2k π/n = m(2π) k k = mn. Proposition. Pour tout n N, l ensemble des racines n es est stable par conjugaison, par multiplication, et par inversion. L étude des racines de l unité est applée «cyclotomie» à cause de leur très belle propriété géométrique : les racines n es sont les affixes des sommets d un polygone régulier. Ce polygone est invariant par la rotation de centre O et d angle 2π/n (et par chacune de ses «itérées», les rotations de centre O et d angle 2kπ/n). Exercice. Calculer «à la main» µ 1, µ 2, µ 3, µ 4, µ 5. Dessiner les polygones réguliers correspondants. 1.2.9 Applications à la trigonométrie Elles reposent essentiellement sur les formules d Euler : cos x = eix + e ix 2 et sur la formule de Moivre : et sin x = eix e ix, 2i Signalons également la formule utile : (cos x + i sin x) n = cos nx + i sin nx. e ix 1 = e ix/2 (2i sin x/2). Exercice. Donner une formule analogue pour e ix + 1. La formule du binôme Pour appliquer la formule de Moivre, on aura souvent besoin de la formule du binôme (valable pour n N) : ( ) n n (a + b) n = a k b n k. k Rappelons que les coefficients binomiaux sont définis par la formule : ( ) n déf n! n(n 1) (n k + 1) = =, k k!(n k)! k! k=0

1.2 Calcul dans C 15 où les factorielles sont elles-mêmes définies par : n! déf = 1 2 n. Par exemple, 0! = 1, 1! = 1, 2! = 2, 3! = 6, 4! = 24, etc. On a toujours ( ) ( ) n n = = 1, 0 n ( ) ( ) n n = = n si n 1, 1 n 1 ( ) ( ) n n n(n 1) = = si n 2, 2 n 2 2 etc. Pour calculer les coefficients binomiaux en pratique, on utilise souvent le triangle de Pascal : ( 0 0) 1 ( ) ( 1 1 0 1) 1 1 ( ) ( ) ( 2 2 2 0 1 2) = 1 2 1 ( ) ( ) ( ) ( 3 3 3 3 0 1 2 3) 1 3 3 1 ( ) ( ) ( ) ( ) ( 4 4 4 4 4 0 1 2 3 4) 1 4 6 4 1 La formule du binôme se prouve par récurrence sur n en utilisant les relations de Pascal : ( ) ( ) ( ) n + 1 n n = +. k + 1 k k + 1 Expression explicite pour cos nx et sin nx Ecrivons que cos nx et sin nx sont respectivement la partie réelle et la partie imaginaire de (cos x + i sin x) n, que l on développe avec la formule du binôme. On prend en compte le fait que i k est réel si k est pair, et imaginaire pur si k est impair : i 2l = ( 1) l et i 2l+1 = ( 1) l i. On trouve : cos nx = sin nx = n/2 l=0 ( ) n ( 1) l (cos x) n 2l (sin x) 2l, 2l ( ) n 2l + 1 (n 1)/2 l=0 ( 1) l (cos x) n 2l 1 (sin x) 2l+1. On a noté a la partie entière de a. Si l on remplace partout sin 2 x par 1 cos 2 x, on constate que cos nx s exprime comme un polynôme en cos x seul, et que sin nx s exprime comme le produit de sin x par un polynôme en cos x seul. Il existe des formules très générales, mais il est aussi simple de savoir les retrouver au coup par coup.

16 1 Nombres complexes Linéarisation d une expression trigonométrique Des formules d Euler, on déduit que les puissances de cosinus et de sinus et leurs produits peuvent s exprimer comme des combinaisons linéaires d exponentielles. Voici un exemple de formule générale : cos n x = ( e ix + e ix ) n n = 2 n 2 k=0 ( ) n (e ) ix k ( e ix) n k = 2 n k n k=0 ( ) n e i(2k n)x. k Comme on sait d avance que le résultat est réel, on peut remplacer chaque terme du membre droit par sa partie réelle : cos n x = 2 n Un exercice célèbre n k=0 ( ) n Re ( e i(2k n)x) = 2 n k n k=0 ( ) n cos(2k n)x. k Il s agit du calcul de n cos kx et de n sin kx. Notons respectivement C(x) k=0 k=0 et S(x) ces deux expressions. Alors posons n n W (x) = C(x) + is(x) = (cos kx + i sin kx) = w k, k=0 k=0 où w = cos x + i sin x = e ix. Si w = 1, c est-à-dire si x 0 (mod 2π), la somme vaut n+1 et l on en déduit C(x) = n + 1 et S(x) = 0. Sinon, on reconnaît la somme partielle d une série géométrique : W (x) = wn+1 1 w 1 = ei(n+1)x 1. e ix 1 Grâce à la «formule utile» rappelée plus haut, on en déduit : W (x) = ei(n+1)x 1 e ix 1 Finalement : = ei(n+1)x/2 e ix/2 2i sin(n + 1)x/2 2i sin x/2 inx/2 sin(n + 1)x/2 = e. sin x/2 n cos kx = k=0 n sin kx = k=0 cos nx/2 sin(n + 1)x/2, sin x/2 sin nx/2 sin(n + 1)x/2. sin x/2 1.3 Applications géométriques Dans cette section, on regarde les nombres complexes du point de vue géométrique. On se place donc dans un plan d Argand-Cauchy.

1.3 Applications géométriques 17 1.3.1 Similitudes directes Géométriquement, la similitude directe de centre M 0, de rapport r > 0 et d angle θ est la transformation du plan qui transforme M 0 en lui-même et tout point M M 0 en l unique point M M 0 tel que : M 0 M = r M 0 M et ( M 0 M, M 0 M ) = θ (mod 2π). En plus, toute translation est une similitude sans centre. Notons z 0 = Aff(M 0 ), z = Aff(M), z = Aff(M ). Les relations ci-dessus sont équivalentes à : z z 0 = a(z z 0 ), où a = re iθ. On peut encore écrire z = az + b, où a est un complexe non nul, et où b = (1 a)z 0. Quelques cas particuliers importants sont à signaler. 1. Si le rapport est 1, la similitude est une rotation ; dans ce cas, a U. 2. Si θ 0 (mod 2π), la similitude est une homothétie de rapport positif, et a R +. 3. Si θ π (mod 2π), la similitude est une homothétie de rapport négatif, et a R. Réciproquement, pour étudier la transformation géométrique qui s écrit (en termes d affixes) z z = az + b, avec a C et b C, on doit distinguer trois cas : 1. Si a = 1 et b = 0, alors z = z, c est la transformation identique du plan. C est la similitude directe de rapport 1 et d angle 0 (mod 2π), et tout point du plan en est le centre. 2. Si a = 1 et b 0, alors z = z + b n a aucun point fixe (i.e. transformé en lui-même) et ne peut donc être une similitude. Bien entendu, on sait que c est la translation de vecteur [b]. 3. Si a 1, on cherche d abord un point fixe. Son affixe z 0 doit vérifier z 0 = az 0 + b, et la seule possibilité est z 0 = b 1 a (par hypothèse, 1 a 0). Alors z z 0 = a(z z 0 ) et l on reconnaît la similitude de centre [z 0 ], de rapport a et d angle arg a. Exercice. Quelle similitude directe amène [1] sur [i] et [1 + i] sur [1]? On la calculera algébriquement (forme z az + b) et géométriquement (centre, rapport réel, angle).

18 1 Nombres complexes 1.3.2 Coordonnées polaires Coordonnées polaires (r, θ), r, θ R, d un point M de coordonnées cartésiennes (x, y) dans un plan sont définies à l aide des équations : x = r cos θ, y = r sin θ. Pour tous x, y R, de solutions (r, θ) existent, et de plus, on peut toujours choisir r 0. Dans ce cas r est défini uniquement par la formule r = x 2 + y 2, et θ est défini uniquement modulo 2π, sauf si r = 0. Le point correspondant à r = 0, de coordonnées cartésiennes (0, 0), s appelle le pôle. Si on se place dans un plan complexe d Argand-Cauchy, alors l affixe du point de coordonnées polaires (r, θ) est re iθ. Donc pour un point d affixe z 0, on peut prendre ( z, Arg z) pour ses coordonnées polaires. Exemples élémentaires de courbes en polaires L équation définit le cercle unité. L équation r = r = 1 1 1 ε cos θ définit une hyperbole si ε > 1, une parabole si ε = 1, et une ellipse si ε < 1 (un cercle si ε = 0). Il faut noter que la position de ses courbes est différente que dans le cas des équations standards en coordonnées cartésiennes. Ici un de foyers de la courbe est confondu avec le pôle. On peut décrire l ensemble correspondant dans C (les affixes) comme suit : L équation { e iθ 1 ε cos θ r 2 = 2 cos 2θ } θ R. définit la lemniscate de Bernoulli. L ensemble des affixes est dans ce cas { ± 2 cos 2θ e iθ π 4 θ π }. 4 Exercice. Tracer les (1 + i) n pour n Z. Quelles courbes d équation polaire r = f(θ) les relient?

1.4 Exercices 19 1.4 Exercices Exercice 1 En utilisant seulement la définition des nombres complexes et de leurs opérations, trouver toutes les racines carrées de i. Exercice 2 1. Pour z 0, exprimer 1 en utilisant z et z. z 2. Calculer l inverse de z = 2 i et faire la division de z = 5 + 2i par z. Exercice 3 Écrire sous la forme a + ib les nombres complexes suivants : 1. le nombre de module 2 et d argument π/3, 2. le nombre de module 3 et d argument π/4. Exercice 4 À quelle condition D(z 0, r) et D(z 0, r ) se rencontrent-ils? Indication : commencer par un dessin. Exercice 5 Déterminer le module et l argument des nombres complexes e eiα et e iθ +e 2iθ. Exercice 6 1. Calculer le module de e ix + 1 pour x R. 2. Calculer l argument de e ix + 1 pour x ] π, π[. Exercice 7 1. Déterminer le module, un argument, les parties réelles et imaginaires de : e (2+3i), e i(2+3i), et e 1 2+3i. 2. Mêmes questions pour e z, e iz, e z, et e 1 z, en fonction z = x + iy. 3. Résoudre e z = 2. Exercice 8 Soit z un nombre complexe de module ρ, d argument θ et soit z son conjugué. Calculer (z + z)(z 2 + z 2 ) (z n + z n ) en fonction de ρ et θ.

20 1 Nombres complexes Exercice 9 Calculer (1 + i) n et préciser sa position dans le plan, c est-à-dire les signes de ses parties réelle et imaginaire. Exercice 10 Résoudre dans C : 1. z 3 = 1, 2. z 3 = 1, 3. z 6 = 1, 4. z 6 = 1, 5. z 7 = 1 (sous la forme trigonométrique). Exercice 11 1. Calculer les racines carrées de i et de i. 2. Calculer les racines carrées de e it pour t dans R. Exercice 12 1. Calculer les racines carrées de 2i. 2. Résoudre dans C l équation 3. Résoudre dans C l équation z 2 + (1 + i)z + i = 0. z 2 + z(1 5i) 6 2i = 0. Exercice 13 Résoudre dans C : z 2 + iz 2 i = 0. Exercice 14 1. Calculer les racines carrées du nombre complexes 3 4i. 2. Résoudre dans C, l équation z 2 z(1 + 4i) 3 + 3i = 0. On note z 1 et z 2 les solutions trouvées. 3. Existe-t-il une rotation envoyant z 1 sur z 2? 4. Écrire les nombres complexes suivants sous forme trigonométrique : z 3 = 1 2 + i 1 2, z 4 = 3 i 1, et z 2 2 5 = i.

1.4 Exercices 21 5. Représenter graphiquement les points d affixes z 1, z 2, z 3, z 4, et z 5 dans le plan complexe. 6. Déterminer une similitude directe f telle que f(z 3 ) = e i 7π 12 et f(z 5 ) = z 4. Donner le centre, le rapport et l angle de cette similitude. 7. Pour chacun des nombres complexes z 1, z 2, z 3, z 4 et z 5, dire si c est une racine n-ième de l unité. Si c est le cas, préciser pour quelle valeur de n. Dans tous les cas justifiez votre réponse. Exercice 15 Les nombres complexes suivants sont ils des racines n-ième de l unité? Si oui, précisez pour quelle valeur de n. Si non, expliquez pourquoi. 2 + 3 2 3 z 1 = + i, z 2 = 4 i 2 2 1 + 2i, z 3 = e i 2, z4 = e i 5π 15, z5 = 3 1 + i 3. i Exercice 16 1. Linéariser sin 5 x et sin 4 x cos x. 2. Exprimer cos(4x) et sin(5x) sin(x) comme polynômes en sin x et cos x. 3. Exprimer ces mêmes expressions comme polynômes en sin x lorsque c est possible. 4. Exprimer ces mêmes expressions comme polynômes en cos x lorsque c est possible. Exercice 17 1. Représenter graphiquement les points M 1 et M 2 d affixes 7+i et 3+4i. Déterminer les affixes des points de la droite (M 1 M 2 ). 2. Déterminer l affixe du barycentre des points (M 1, 1 3 ) et (M 2, 2 3 ). 3. Déterminer les affixes des points de la droite passant par M 1 et orthogonale à la droite (M 1 M 2 ). 4. Reprenez toutes ces question avec 2 points quelconques. Exercice 18 1. Montrez que deux vecteurs z et z du plan complexe sont orthogonaux si et seulement si z z + zz = 0. 2. On rappelle que le cercle de centre z 0 et de rayon a est l ensemble des points z tels que z z 0 2 = r 2. Montrez que le cercle de centre z 0 et de rayon r est le lieu des points tels z que z z z z 0 z 0 z = r 2 z 0 z 0.

22 1 Nombres complexes 3. Soient z 1 et z 2 deux points du plan complexe. Montrez que z est sur le cercle dont l un des diamètres est le segment [z 1, z 2 ] si et seulement si z z 1 est orthogonal à z z 2. Exercice 19 Dans cet exercice, on admet les résultats de l exercice 18. 1. Soit C un cercle de centre z 0 et de rayon r, qui ne passe pas par 0. Montrez que l image de C par l application z 1/z est encore un cercle. Précisez son centre et son rayon. 2. Montrez que si le cercle C passe par 0, l image de C \ {0} est une droite orthogonale à z 0. 3. Montrez que l image d une droite qui ne passe pas par 0 est un cercle passant par 0. 4. Montrez que l image d une droite passant par 0 est une droite passant par 0. Exercice 20 On appelle D l ensemble des nombres complexes tels que z < 1 (le disque unité). 1. Soit a un réel tel que a > 1, et φ a (z) = az+1. Montrez que l image de D a+z par φ a est inclus dans D. 2. Montrez que φ a (z) = z 1 si et seulement si φ a (z 1 ) = z. 3. En déduire que φ a est une bijection de D sur D. 4. Montrez (sans refaire de calculs) qu il en est de même lorsque a est un nombre complexe tel que a > 1 et que φ a (z) = az+1 ā+z. Exercice 21 Montrez que l application φ(z) = 1 z est une bijection entre le disque unité 1+z D = { z z < 1 } et le demi-plan positif C + = { z Re(z) > 0 }. Quelle est l application réciproque? Exercice 22 En utilisant les résultats de l exercice 21, trouvez une fraction rationnelle F (z) = P (z) telle que l image par F du quart de plan Q(z) soit le disque unité { z z < 1 }. { z = x + iy x > 0, y > 0 }

1.4 Exercices 23 Exercice 23 Soient M = (a, b, c, d) quatre réels tels que ad bc = 1. On note φ M (z) = az+b cz+d, et C + le demi-plan { z Im(z) > 0 }. 1. Montrez que l image de C + par φ M est incluse dans C +. 2. Pour M et M différents, montrez que la composée φ M φ M est encore de la forme φ N, pour une valeur de N qu on calculera en fonction de M et M. 3. Pour M = (a, b, c, d) donné tel que ad bc = 1, trouver M tel que Φ M Φ M (z) = z. 4. En déduire que Φ M est une bijection de C + sur C +. Exercice 24 1. Quelle est l image du demi plan C + par l application z exp(z)? 2. Quelle sont les images des ensembles et E 1 = { z = x + iy x 0 }, E 2 = { z = x + iy x 0, 0 y < 2π } par l application z exp(z)? Est-ce que cette application est une bijection entre E 1 ou E 2 et leur image? Si oui, sa fonction réciproque est-elle continue? Exercice 25 On admettra dans cet exercice le fait que l image d un cercle ne passant pas par 0 par l application z 1/z est un cercle, et une droite si le cercle passe par 0 (on convient qu alors l image de 0 n est pas définie) (cf. l exercice 19). 1. Montrez que pour tout a C, l image d un cercle par l application z a + z est un cercle. 2. Montrez que pour tout b C, l image d un cercle par l application z bz est un cercle. 3. En déduire que pour tous (a, b, c, d) C 4, avec cd 0, l image d un cercle par l application z az+b est soit un cercle, soit une droite. Dans cz+d quel cas est-ce une droite? Exercice 26 On appelle φ a,b l application définie pour z i par φ a,b (z) = a + b. z+i 1. Cherchez deux complexes a et b tels que φ a,b ( i) = i, φ a,b (1) = 2 i, φ a,b ( 1) = 2 i.

24 1 Nombres complexes 2. En déduire que pour ces valeurs de a et b, l image d un point z du cercle { z z 2 = 1 } par φ a,b est l intersection de la droite passant par z et i avec la droite { z Im(z) = 0 } (c est à dire la tangente au cercle au point i). Indication : on pourra utiliser les résultats de l exercice 25. Exercice 27 Soit n 3. On note z k = e 2kiπ/n et M k le point du cercle unité d affixe z k. Les points M 0, M 1,..., M n 1 sont les sommets d un polygone régulier. 1. Calculer le périmètre de ce polygone. 2. Calculer l aire de ce polygone. 3. Calculer les limites de ces nombres lorsque n +. Exercice 28 1. Soit x un nombre complexe tel que x i. Démontrer géométriquement que 1+ix = 1 si, et seulement si, x est réel. 1 ix 2. Soit a un réel. Démontrer que les racines de l équation : ( ) n 1 + ix = 1 + ia 1 ix 1 ia sont les x k = tan α+kπ, k = 0, 1,..., n 1. n Indication : mettre a sous la forme tan α pour un α dans ] π/2, π/2[. On discutera la possibilité que l un des x k ne soit pas défini. Exercice 29 On note z 1 = 2i et z 2 = 1 + 3i. 1. Trouver une similitude f 1 de centre z 0 = 1+5i 2 telle que f 1 (z 1 ) = z 2. Quels sont son rapport et son angle? 2. Existe-t-il une similitude f 2 de centre z 3 = 1+7i 3 et de rapport 2 telle que f 2 (z 1 ) = z 2? Si oui quel est son angle?

25 2 Polynômes Les «corps commutatifs» On va, où c est possible, traiter indifféremment le cas des polynômes à coefficients réels, complexes, et rationnels. Ce qui nous permettra faire ainsi, c est que R, C, et Q sont des «corps», autrement dit, que l on y dispose d une addition et d une multiplication avec les règles usuelles. On peut étudier les polynômes sur n importe quel corps. Exemple (Le corps Z/(2Z)). Ceux qui s intéressent à l arithmétique «interne» des ordinateurs, connaissent le corps Z/(2Z) : celui qui n a que deux éléments, les «bits» 0 et 1. Voici ces règles de calcul : addition : { 0 + 0 = 1 + 1 = 0, 0 + 1 = 1 + 0 = 1, multiplication : { 0 0 = 0 1 = 1 0 = 0, 1 1 = 1. Dans ce chapitre, K dénote un des trois corps : Q (les rationnels), R (les réels), ou C (les complexes). Ainsi on étudie simultanément les polynômes à coefficients dans Q, R, et C. La plupart des résultats restent vrais pour tout autre corps, ou au moins pour tout corps contenant Q. 2.1 Définition des polynômes et règles de calcul 2.1.1 Définition de K[X] et ses opérations Définition et opérations Tout polynôme en une indéterminée X à coefficients dans un corps K (on dit aussi : un polynôme sur K) s écrit comme une «expression formelle» de la forme : a 0 + a 1 X + a 2 X 2 + + a n X n, avec n N, a 0,..., a n K. Le symbole X s appelle une indéterminée. Les polynômes constants de la forme a 0, avec a 0 K, sont autorisés, et on les identifie d habitude avec les éléments de K. Parmi eux, il y a un polynôme special : le polynôme nul 0. On admet que X 0 = 1 et que 0X n = 0 pour tout n N. Ainsi deux autres façons d écrire un polynôme à coefficients a 0,..., a n sont les suivantes : n a 0 + a 1 X + a 2 X 2 + + a n X n = a k X k = a k X k. k=0 k=0 Dans la dernière écriture, on a posé a n+1 = a n+2 = = 0.

26 2 Polynômes La representation d un polynôme par une «expression formelle» n est pas tout-à-fait unique. Par exemple : 1 + 1X = 1 + 1X + 0X 2 + 0X 3. On se permet aussi d écrire X n au lieu de 1X n, d écrire les termes d un polynôme dans un ordre quelconque, et de ne pas écrire les termes nuls : 1 + 0X + 1X 2 + 0X 3 = 1 + X 2 = X 2 + 1. Plus précisément, deux polynômes en l indéterminée X, chacun écrit sous une forme standard, sont égaux si et seulement si leurs coefficients auprès des mêmes puissances de l indéterminée sont égaux. (Si X k n intervient pas dans une écriture, cela veut dire que le coefficient auprès de X k est 0.) L ensemble de tous les polynômes en X sur K est noté K[X]. Tout polynôme de la forme a n X n, avec a n K = K \ {0} et n N, s appelle un monôme de degré n. Ainsi, les monômes de degré 0 sont les polynômes constants non nuls. (Le cas du polynôme nul est à part.) Les trois opérations algébriques principales définies dans K[X] sont les suivantes : 1. addition, 2. multiplication par un élément de K (cette opération peut être vue aussi comme un cas particulier de multiplication de deux polynômes), 3. multiplication. Ces opérations sont définies des façons naturelles. Pour la multiplication, on utilise la règle : X m X n = X m+n pour tous m, n N. Nous admettons ici sans démonstration que ces opérations sont bien définies, c est-à-dire que le résultat ne dépends pas du choix d écriture de chaque argument, ni de l ordre dans lequel on applique des règles différents pour développer et après simplifier le résultat. (Une démonstration de ce fait nécessiterait de donner d abord des définitions précises.) Définitions précises Une façon de construire un modèle de K[X] et ainsi de le définir précisément est la suivante. On dit que K[X] est l ensemble de toutes les suites infinies (a n ) n N des éléments de K avec la propriété qu il existe N N tel que pour tout n > N, a n = 0. Après on définit les opérations d addition de deux éléments de K[X] et de multiplication d un élément de K[x] par un élément de K naturellement : pour (a n ) n N, (b n ) n N K[X] et c K, on pose (a n ) n N + (b n ) n N déf = (a n + b n ) n N, c(a n ) n N déf = (ca n ) n N. Pour définir la multiplication, on utilise une opération sur les suites qui s appelle «produit de convolution» : pour (a n ) n N, (b n ) n N K[X], on pose (a n ) n N (b n ) n N déf = (a 0 b n + a 1 b n 1 + + a n b 0 ) n N. Pour justifier le choix de «X» dans «K[X]», on pose X déf = (0, 1, 0, 0, 0, 0,... ),

2.1 Définition des polynômes et règles de calcul 27 c est-à-dire X est la suite (a n ) n N avec a 0 = 0, a 1 = 1, et a 2 = a 3 = = 0. Les monômes sont les suites avec exactement un terme non nul. Les polynômes constants sont les suite de la forme (a 0, 0, 0, 0,... ), et on identifie (a 0, 0, 0, 0,... ) K[X] avec a 0 K. Le polynôme nul est (0, 0, 0,... ). Ce que on a fait ici pour définir K[X] formellement, c est de representer tout polynôme par la suite de ses coefficients, et de définir les opérations algébriques directement sur ces suites. On peut vérifier maintenant que tout P K[X] s écrit comme P = a 0 + a 1 X + a 2 X 2 + + a n X n, où n N, a 0,..., a n K. En effet, il suffit d écrire d abord P = (a 0,..., a n, 0, 0, 0,... ). On vérifie également que les opérations d addition et de multiplication qu on a définies dans K[X] satisfont des propriétés usuelles : associativité, commutativité, distributivité, etc. Le monôme de degré n et le coefficient de degré n du polynôme P = k N a k X k sont respectivement le terme a n X n et son coefficient a n. Le monôme de degré 0 est donc a 0 X 0, que l on identifie au coefficient de degré 0, i.e. à a 0 K, et que l on nomme au choix terme constant ou coefficient constant de P. Nous le noterons tc(p ). Si tous ses coefficients sont nuls, le polynôme est le polynôme nul. Dans le cas contraire, soit n N le plus grand indice d un coefficient non nul (il y a bien un tel plus grand indice). On a donc : n P = a i X i = a 0 + + a n X n avec a n 0. i=0 L entier n est alors appelé le degré de P et noté deg P. Par convention, deg 0 = (l avantage est que cela donne des règles de calcul simples et valables dans tous les cas sans exception). Le monôme de degré deg P, c est-à-dire ici a n X n, est appelé le terme dominant de P et noté td(p ). Son coefficient a n est appelé le coefficient dominant et noté cd(p ). Un polynôme de degré 0 a la forme suivante : son coefficient constant a 0 est non nul, et tous ses autres coefficients sont nuls. C est donc un polynôme constant non nul. Le polynôme nul est aussi constant, mais son degré par définition est. Propriétés algébriques Les opérations d addition et de multiplication dans K[X] satisfont les propriétés suivantes : 1. pour tous P, Q, R K[X], (P + Q) + R = P + (Q + R),