Les surfaces Intuitivement, une surface de l espace est une figure géométrique ayant deux dimensions : un plan, un cône, un cylindre, une sphère sont par exemple des surfaces (on ne s intéresse pas pour le moment au volume éventuellement délimité par celles-ci). 1 Représentations des surfaces Mathématiquement, on pourra utiliser deux méthodes pour représenter une surface : soit un paramétrage, soit une équation, ces deux représentations étant équivalentes, sous certaines conditions de régularité que nous allons voir. Paramétrage Paramétrer une surface, c est la décrire au moyen d un point mobile (qui est en fait une fonction) M de l espace. Comme nous l avons déjà vu pour les courbes, c est cette fonction même que l on appelle surface paramétrée. On ajoute aussi une condition de régularité : Définition 1 Une surface paramétrée S de l espace est une fonction : M : R 2 R 3 (u, v) M(u, v) de classe C 1 sur une partie ouverte Ω de R 2. REMARQUE 1 Cette définition fait intervenir deux paramètres indépendants u et v. Autrement dit, le point M a deux degrés de liberté. REMARQUE 2 On peut remplacer M par un vecteur OM, O étant un point fixe. Utilisation de coordonnées En pratique, le point M sera décrit par ses coordonnées cartésiennes x, y, z dans un repère (O, i, j, k ), sous forme d un système : x = f(u, v) y = g(u, v) u, v R z = h(u, v) Cours de Mathématiques, Spé PT Lycée R. Schuman, Le Havre [Raphaël Dieu - 03/2006] page 1
f, g et h sont alors des fonctions de R 2 dans R. On retrouve le point M par la relation : M = O + x i + y j + z k EXEMPLE 1 On sait déjà paramétrer un plan P = A + u, v : x = x A + λα + µα y = y A + λβ + µβ avec λ, µ R z = z A + λγ + µγ Voici le paramétrage de la sphère de centre O et de rayon R : x = R cos θ cos φ [ y = R sin θ cos φ avec θ [0, 2π] et φ π 2, π ] 2 z = R sin φ REMARQUE 3 On utilisera aussi les coordonnées cylindriques ρ, θ, z de M qui s obtient alors par la relation : M = O + ρ u θ + z k où u θ = cos θ i + sin θ j est le vecteur polaire habituel. Lignes de coordonnées et coordonnées locales U 0 V 0 M 0 En fixant l un des deux paramètres, par exemple u = u 0 ou v = v 0 dans le paramétrage M(u, v) d une surface S, on définit des courbes U 0 et V 0 qui sont tracées sur S et se coupent en M 0 (u 0, v 0 ). Le couple (u 0, v 0 ) permet donc de repérer le point M 0 sur S. Nous dirons que ce sont ses coordonnées locales sur S. Évidemment, ces coordonnées n ont aucun sens en dehors de S. On trouve les coordonnées réelles de M 0 en appliquant la fonction M au couple (u 0, v 0 ). v z m u x M y Par extension, les courbes U 0 et V 0 s appelleront lignes de coordonnées. En prenant diverses valeurs de u 0 et v 0, on fabrique une grille tracée sur S et qui permet de la visualiser. Cours de Mathématiques, Spé PT Lycée R. Schuman, Le Havre [Raphaël Dieu - 03/2006] page 2
Les figures suivantes illustrent ceci sur une sphère (parallèles et méridiens dans ce cas), puis sur une autre surface : EXERCICE 1 Reconnaitre la surface paramétrée : x = a cos u y = 2v z = a sin u + v avec (u, v) R 2 En identifiant ses lignes de coordonnées. Courbes tracées sur une surface Plus généralement, en paramétrant une courbe (plane) : m : R R 2 t m(t) dans le plan (u, v), on définit une courbe (gauche) tracée sur S. Le point courant M de cette courbe s obtiennant alors par composition : M(t) = M m(t) = M(u, v). v m(t) O u M(t) v u Par abus de notation et pour simplifier, on notera toujours M au lieu de M m. Cours de Mathématiques, Spé PT Lycée R. Schuman, Le Havre [Raphaël Dieu - 03/2006] page 3
Équation cartésienne Lorsque l on met en équation une condition géométrique, on aboutit à une équation de la forme : F (M) = F (x, y, z) = 0 où F est une fonction de R 3 dans R. En général (mais pas toujours), une telle équation définit une surface S que l on qualifiera d implicite (par opposition à paramétrée) car l équation n est pas résolue. EXEMPLE 2 La sphère S de centre A et de rayon R est définie par la condition : M S AM = R En repère orthonormé, on aboutit à la forme usuelle (x x A ) 2 + (y y A ) 2 + (z z A ) 2 = R 2. EXERCICE 2 Déterminer l équation d un cône, puis d un cylindre (de révolution tous deux), en précisant leurs éléments géométriques. Il est important de remarquer qu une équation ne définit pas toujours une surface : l équation 0 = 0 définit tout l espace tandis que 0 = 1 est vide. Pour éviter ce genre de situation, on ajoutera la condition sur la fonction F qu elle dépende d au moins l une des trois variables et qu elle soit régulière : Propriété 2 Si F est une fonction de classe C 1 sur une partie ouverte Ω de R 3 à valeurs dans R avec gradf (M) 0, alors l équation F (M) = F (x, y, z) = 0 définit une surface. PREUVE (principe) On a gradf = ( F x, F y, ) F z (0, 0, 0), donc si par exemple on a F z 0, alors F dépend de z et on peut résoudre l équation F (x, y, z) = 0 par rapport à z, sous la forme : x = x y = y z = h(x, y) avec x, y R d où un paramétrage. REMARQUE 1 L écriture z = h(x, y) où les paramètres sont des coordonnées (ici x et y) est appelée paramétrage cartésien. C est évidemment le cas le plus simple à résoudre. Inversement, par élimination des paramètres, on peut trouver une équation d une surface paramétrée. Cours de Mathématiques, Spé PT Lycée R. Schuman, Le Havre [Raphaël Dieu - 03/2006] page 4
EXEMPLE 3 Trouver une équation de la surface S : x = u + v y = u 2 + v 2 avec x, y R z = u 3 + v 3 On ne résout pas complètement : ici, on voit que xy = u 3 +uv 2 +u 2 v+v 3 et d autre part x 3 = u 3 +3uv 2 +3u 2 v+v 3, donc x 3 3xy = 2z : c est une condition nécessaire pour qu un point soit sur S car on n a pas établi de réciproque. Autrement dit S est incluse dans la surface d équation x 3 3xy + 2z = 0. 2 Le plan tangent C est l outil principal pour le travail sur les surfaces. Tangentes aux courbes tracées sur une surface Considérons une surface paramétrée S définie par (u, v) M(u, v), ainsi qu une courbe C tracée sur S. Comme on l a déjà vu, le courbe C est définie par un paramétrage dans le plan (u, v) : t m(t) = (u, v). M est alors fonction de t par l intermédiaire de m : t m(t) M ( m(t) ) On trouve alors la tangente à C en M par dérivation par rapport à t. Et d après la règle de dérivation composée, on a : dm dt M du M = u dt + dv v dt Ce vecteur appartient donc à l espace engendré par les vecteurs est un plan lorsqu ils sont linéairement indépendants. M u M et v qui Définition 3 Un point M de la surface S est dit régulier lorsque les vecteurs M M u et sont linéairement indépendants. v M M Dans ce cas, le plan M + u, s appelle le plan tangent à S en M. v On a donc montré que le plan tangent en M à S contient les tangentes à toutes les courbes tracées sur S et passant par M. Cours de Mathématiques, Spé PT Lycée R. Schuman, Le Havre [Raphaël Dieu - 03/2006] page 5
Un point M non régulier de S est dit stationnaire. En un point stationnaire, le plan tangent à S n est pas défini. EXEMPLE 1 La figure ci-contre montre un astroïde : cette surface présente des arêtes et des pointes qui sont des points stationnaires. Cette surface est par ailleurs de classe C, son paramétrage étant : x = (cos 2u cos v) 3 y = (sin 2u cos v) 3 z = sin 3 v avec u, v R Un astroïde Obtention pratique du plan tangent Lorsque la surface S est paramétrée, le calcul du plan tangent est facile car on en ( M M ) connait un point M et une base u,. En particulier, on a : v Propriété 4 En un point régulier M, le vecteur n = à la surface S en M. M M u v est normal EXERCICE 3 Trouver les points stationnaires de la surface paramétrée S : x = u + v y = u 2 + v 2 où u, v R z = u 3 + v 3 Écrire l équation du plan tangent en un point régulier de S. Cas des surfaces implicites Considérons maintenant une surface S définie par une équation F (x, y, z) = 0 et supposons qu on l ait résolue (paramétrée) par exemple sous la forme : x = x y = y où x, y R z = h(x, y) avec F z 0. On est alors ramené au cas précédent. On a un vecteur normal : n = 1 0 h x (x, y) h y 0 1 = (x, y) h x h y (x, y) (x, y) 1 Cours de Mathématiques, Spé PT Lycée R. Schuman, Le Havre [Raphaël Dieu - 03/2006] page 6
(jamais nul), d où l équation du plan tangent en un point M 0 x 0 y 0 z 0 h x (x 0, y 0 )(x x 0 ) h y (x 0, y 0 )(y y 0 ) + (z z 0 ) = 0 de S : En général, le calcul de h est difficile. Par contre celui de ses dérivées partielles est très simple. En effet, on a, par dérivation composée : F ( ) F F x, y, h(x, y) = 0 = (x, y, z) + } {{ } x z z donc, on peut calculer : (x, y, z) h(x, y) = 0 x F F h x (x, y) = x (x, y, z) h et de même (x, y, z) y (x, y) = y (x, y, z) (x, y, z) F z En reportant ceci dans l équation du plan tangent, il vient : F x (x 0, y 0, z 0 )(x x 0 ) + F y (x 0, y 0, z 0 )(y y 0 ) + F z (x 0, y 0, z 0 )(z z 0 ) = 0 dont on retiendra : Propriété 5 Le vecteur grad F (M) est normal à la surface S d équation F (M) = F (x, y, z) = 0. F z REMARQUE 1 Les vecteurs gradf (M) (équation) et n = M M u v (paramétrage) sont donc tous deux normaux à S : ils sont donc colinéaires. Par contre ils n ont aucune raison d être égaux en général. Le vecteur gradf (M) est dirigé vers les valeurs croissantes de F, tandis que le sens de n est défini par l orientation de la surface S. Intersection de deux surfaces On considère deux surfaces S 1 et S 2 se coupant en un point M. On suppose également que S 1 et S 2 ont des vecteurs normaux n 1 et n 2 en M, donc également des plans tangents P 1 et P 2. On a alors deux situations possibles : Si P 1 = P 2, alors S 1 et S 2 sont tangentes en M. Ceci se produit donc lorsque les vecteurs normaux n 1 et n 2 sont colinéaires, soit n 1 n 2 = 0. Cours de Mathématiques, Spé PT Lycée R. Schuman, Le Havre [Raphaël Dieu - 03/2006] page 7
Sinon, P 1 et P 2 se coupent selon une droite D. L intersection de S 1 et S 2 est (au voisinage de M) une courbe C dont la tangente en M est la droite D. Le vecteur directeur de D est alors u = n 1 n 2. Naturellement, ces propriétés sont locales car rien n empêche les deux surfaces d être tangentes en un point donné et sécantes en un autre... Aire d un morceau de surface On procède par rectification, comme on l a déjà fait pour calculer la longeur d une courbe. Soit S une surface paramétrée par (u, v) M(u, v). On délimite une partie S D de S par un domaine D dans le plan (u, v). On découpe alors S D en éléments plans s appuyant M M sur les vecteurs tangents u et v L aire ds de ces parallélogrammes élémentaires est donnée par un produit vectoriel : M M ds = u dudv v L aire de S D s obtient enfin par sommation de ces éléments : aire(s D ) = D M M u dudv v 3 Le contour apparent Intuitivement, le contour apparent d une surface S vue par un observateur O est le lieu des points de S vus tangentiellement depuis O. Cela revient exactement à dire que O est situé sur un plan tangent à S. Pour simplifier l aspect mathématique, on supposera que S est transparente c est à dire que l on ne fait pas ici de calcul de parties cachées. Cours de Mathématiques, Spé PT Lycée R. Schuman, Le Havre [Raphaël Dieu - 03/2006] page 8
Contour apparent cylindrique On envisage d abord le cas où l observateur est à l infini et regarde S dans une direction donnée u (penser par exemple au soleil éclairant un objet). La figure ci-contre montre un calcul d ombre à l aide d un coutour apparent cylindrique. Définition 6 Le contour apparent de la surface S dans la direction du vecteur u est l ensemble des points M de S pour lesquels le vecteur normal n est orthogonal à u. La condition s écrit donc : M S et n u = 0. EXERCICE 4 Déterminer le contour apparent cylindrique de la surface S paramétrée : x = u y = v, où u, v R z = u 2 + v 2 selon la direction u 1 1 1 SOLUTION On calcule le vecteur normal n = 1 0 0 1 = 2u 2v 2u 2v 1 La condition définissant le contour apparent est donc : n 1 u = 2u 2v + 1 = 0 v = 2 u En reportant ceci dans les équations paramétriques de S, on obtient le paramétrage d une courbe : x = u y = 1 2 u, où u R z = 2u 2 u + 1 4 qui est le contour cherché (ici, une parabole). Définition 7 Le cylindre s appuyant sur le contour apparent et dirigé par u s appelle le cylindre circonscrit à S selon u. Noter qu en mathématiques, un cylindre est une surface engendrée par des droites parallèles s appuyant sur une courbe quelconque (voir partie 4). Cours de Mathématiques, Spé PT Lycée R. Schuman, Le Havre [Raphaël Dieu - 03/2006] page 9
Contour apparent conique On envisage maintenant le cas où l observateur est à distance finie et regarde S depuis un point A (penser par exemple à une lampe éclairant un objet). La figure ci-contre montre un calcul d ombre à l aide d un coutour apparent conique cette fois. Le sphère et le plan n ont pas bougé, mais la source s est rapprochée. Définition 8 Le contour apparent de la surface S vue depuis le point A est l ensemble des points M de S pour lesquels le vecteur normal n est orthogonal à AM. La condition s écrit donc : M S et n AM = 0. EXERCICE 5 Déterminer le contour apparent de la surface S d équation 2x 2 + y 2 z 3 = 0 vue depuis le point A 0 0 1 SOLUTION Le contour est défini par le système : { 2x 2 + y 2 z 3 = 0 M S (1) 4x 2 + 2y 2 3z 2 (z 1) = 0 AM gradf (M) = 0 (2) Par combinaison (2) 2 (1), il vient alors : z 3 + 3z 2 = 0, soit z = 0 ou z = 3, que l on reporte alors dans (1) : x = y = z = 0 ou z = 3 et 2x 2 + y 2 = 27 Le contour cherché est constitué d un point et d une ellipse. REMARQUE 1 Lorsque S est donnée par une équation comme dans l exemple précédent, il est très important de ne pas oublier la condition M S, sinon on trouve des points extérieurs à la surface dans le contour apparent! Définition 9 Le cône s appuyant sur le contour apparent et de sommet A s appelle le cône circonscrit à S en A. Un cône est constitué de droites concourantes en son sommet et s appuyant sur une courbe quelconque (voir partie 4). Cours de Mathématiques, Spé PT Lycée R. Schuman, Le Havre [Raphaël Dieu - 03/2006] page 10