6 Rappels d électrostatique

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6.1 La charge électrique La charge électrique est une propriété de la matière qui se manifeste par des phénomènes observables d attraction et de répulsion entre les objets qui en possèdent. On trouvera des discussions concernant la nature des charges électriques et leurs propriétés au niveau microscopique et quantique dans les ouvrages spécialisés de physique. Ici, on rappelera simplement que d un point de vue macroscopique, on peut faire abstraction de sa nature, essentiellement discrète et discontinue (quarks, électrons, protons, ions,...) et en faire une quantité continue. On peut la modéliser alors par des fonctions de densité, comme on le fait aussi couramment pour la masse d un corps. En quelques mots, on remplace «du sable» par «du beurre» et on admet que dans tout point ~r d un corps chargé on peut définir une densité volumique de charge ρ v (~r). Un élément infinitésimal de volume dv centré sur ~r contient alors une quantité de charge dq donnée par : dq = ρ v (~r)dv; [ρ v ]=[C=m 3 ] (6.1.1) dq = ρ v dv ~r FIGURE 6.1: Elément infinitésimal chargé. Note sur les unités : On utilisera toujours le système international d unités (I, MKA ou système Georgi) dont les unités fondamentales sont le mètre [m], le kilogramme [kg], la seconde [s] et l ampère [A]. L unité I pour la mesure de la charge électrique est le coulomb [C]. Il s agit d une unité macroscopique car il en faut 6:25 1 18 électrons pour en faire 1 coulomb. Cependant, compte tenu du fait que 1 coulomb est égal à 1 ampère seconde (1[C] =1[As]), cette quantité de charge est fréquente dans la vie quotidienne. La charge électrique existe en deux variantes : positive et négative, chacune caractérisée mathématiquement par le signe correspondant. Dans un système macroscopique isolé, la charge électrique totale se conserve, c est à dire la somme algébrique des charges positives et négatives demeure constante. i dans un volume donné, on constate par exemple une diminution de la charge totale, ceci indique forcément que de la matière chargée est en train de s échapper de ce volume, donnant lieu à un courant électrique. Cours d Électromagnétisme II EPFL, Juan Mosig, Mars 23 55

On exprimera plus tard cette propriété sous forme mathématique dans l équation de continuité. Dans la vie courante, les densités de masse d une feuille de papier et d un fil à coudre ne sont pas exprimées en rapports masse/volume, mais plutôt en masse/surface pour la feuille et en masse/longueur pour le fil. Il en va de même en électromagnétisme où il est utile de travailler avec des feuilles chargées ayant une épaisseur nulle et des fils chargés ayant un diamètre négligeable. dv d dl h (a) Volume : dq = ρ v dv (b) Feuille : dv = hd, dq = ρ v(h d)=ρ d (c) Fil : dv = dl, dq = ρ v( dl)=ρ l dl FIGURE 6.2: Les trois types de densité de charge. Pour une feuille d épaisseur h, on définit (voir FIGURE 6.2(b)) le différentiel de volume comme dv = hdet la charge contenue est dq =(ρ v h)d. i l on veut admettre des feuilles chargées à épaisseur nulle, on doit accepter que : lim(ρ v h)=ρ 6=; [C=m 2 ] (6.1.2) h! Cette limite définit la densité surfacique de charge ρ. Dans les points d une surface où on définit une densité surfacique non nulle, on est forcé d admettre que la densité volumique est infinie. De la même façon, un fil chargé idéal de section négligeable (voir FIGURE 6.2(c)) a une densité volumique infinie. Le différentiel de volume s exprime ici comme dv = dl, et la densité significative est ici une densité linéique ρ l, définie par : lim (ρ v )=ρ l 6=; [C=m] (6.1.3)! Finalement, le dernier dégré d abstraction est atteint avec l introduction de la charge ponctuelle. Pour accepter l existence d une charge finie q dans un point ~r il faut admettre que la densité volumique associée à une charge ponctuelle serait nulle partout sauf au point occupé par la charge elle même où elle devient infinie. Une telle «fonction» mathématique est décrite dans la théorie des distributions et est largement connue en physique comme «fonction» ou plus précise distribution, Delta de Dirac. Elle est définie par ses 56 Cours d Électromagnétisme II EPFL, Juan Mosig, Mars 23

6.2 La loi de Coulomb propriétés opérationnelles : ( ffi(~r ~r ; ~r 6= ~r )= 1 ; ~r = ~r et D ffi(~r ~r )dv = ( 1 ; ~r 2 D ; ~r =2 D (6.1.4) La densité volumique ρ v d une charge ponctuelle en tout point ~r de l espace s exprime donc comme : ρ v (~r) =qffi(~r ~r ); [C=m 3 ] (6.1.5) 6.2 La loi de Coulomb Toute l électrostatique se trouve contenue dans la fameuse loi de Coulomb (1785), une formule mathématique donnant la force qui s exerce dans le vide entre deux charges ponctuelles q et q placées respectivement en ~r et ~r (voir FIGURE 6.3) : ~f = f ~ = 1 qq 4ß" R 2 ~e R (6.2.1) ~f R ~f ~e R q q FIGURE 6.3: Loi de Coulomb géométrie et forces. Cette loi appelle les commentaires suivants : 1. La force entre deux charges s exerce dans la direction de la ligne droite qui les joint (force centrale). Pour deux charges du même signe il y a répulsion, mais attraction si les charges sont de signe opposé. 2. La loi de Coulomb semble être valable pour une gamme de distances allant des dimensions des molécules aux espaces intergalactiques. Pour les distances à échelle humaine, l exposant 2 correspondant à une interaction qui décroît avec le carré de la distance a été vérifié expérimentalement par de nombreux chercheurs. Les meilleurs résultats montrent que la valeur de l exposant doit bien être 2 avec une erreur absolue inférieure à 1 14. 3. La loi ressemble énormément à celle de la gravitation universelle et établit un parallèle entre forces gravitationnelles et électrostatiques (mais il n y a pas deux types de masse positive et négative, et la gravitation est seulement une force d attraction). Le rôle de la constante de gravitation universelle est joué ici par la constante 1=(4ß" ). " est donc aussi une constante universelle, dite permittivité du vide, ayant la valeur " =8:854 1 12 [A 2 s 2 =J 2 ]=8:854 [pf/m]. Cours d Électromagnétisme II EPFL, Juan Mosig, Mars 23 57

L étude de l électrodynamique montre que la valeur de " est théoriquement liée à celle de la vitesse c de la lumière dans le vide par l équation : " =1=(4ß 1 7 c 2 ). Ceci anticipe la relation intime qui existe entre lumière et électricité. 4. L expression mathématique est l idéalisation d une expérience physique où bien sûr les charges n étaient pas «ponctuelles», mais deux petites sphères en moelle de sureau chargées par frottement et de diamètre négligeable par rapport à la distance les séparant. 5. Aussi, on admet que l interaction entre les charges se fait au sein d un espace vide et infini. L air en est une bonne approximation, mais on verra qu un objet matériel placé au voisinage des charges modifie notablement la force qui s exerce entre elles. Généralisation mathématique : Il est fort utile de généraliser l expression de la loi de Coulomb au cas de deux charges q et q placées en ~r et ~r respectivement. Avec les notations (voir FIGURE 6.4) ~ R := ~r ~r, R := k~r ~r k, ~e R := ~ R=R =(~r ~r )=k~r ~r k on peut alors écrire ~f(~r) = ~ f(~r )= qq ~r ~r 4ß" k~r ~r k 3 = qq ~e R (6.2.2) 4ß" R 2 ~R = ~r ~r q ~e R ~f (~r) q ~r ~e R ~r ~f(~r ) FIGURE 6.4: Loi de Coulomb géométrie et forces. 6.3 Le champ électrique La loi de Coulomb se décrit d un point de vue moderne comme un phénomène en deux étapes : 1. La charge q, placée en ~r, crée en tout point ~r de l espace un «champ électrique» ~E(~r )= 1 q 4ß" R 2 ~e R (6.3.1) 58 Cours d Électromagnétisme II EPFL, Juan Mosig, Mars 23

6.4 Linéarité et superposition 2. Une deuxième charge q, placée en ~r, expérience alors une force proportionnelle au champ ~f(~r )=q ~ E(~r ): (6.3.2) Cette façon de raisonner, introduit un acteur intermédiaire, le champ électrique, et assimile donc l électrostatique à une théorie de type «champ» par opposition aux théories de type «action instantanée à distance». Dans une théorie de type «champ» on accepte que le champ, créé par une source, se propage avec une certaine vitesse autour d elle et finit par atteindre tous les points de l espace. Donc la force, existant sur la charge en ~r, neréagit pas de façon instantanée à un changement de la valeur ou la position de la charge q. Ces distinctions n ont pas d importance pour des phénomènes statiques, mais deviennent critiques pour l étude de charges en mouvement. Que le champ électrique ait une existence réelle ou qu il soit une construction purement mathématique, c est une question qui continue à faire l objet de débats acharnés. A la limite, sa réponse relève de la métaphysique plutôt que de la physique. Elle n a donc pas sa place dans un cours de sciences de l ingénieur. D un point de vue phénoménologique, le champ électrique ~ E(~r ), produit par une charge q dans le point ~r, peut être défini (et mesuré!) à l aide d une charge de test q arbitrairement petite qu on place en ~r. i ~f(~r ) est la force subie par q, on pourra définir le champ électrique comme : ~E(~r )= ~f(~r ) lim q! q (6.3.3) On doit recourir à des charges dont la valeur tend vers zéro car, en général, quand on introduit au voisinage d un corps chargé un deuxième corps, celui-ci est capable d influencer la distribution de charges dans le premier, et donc de modifier sa fonction densité de charge. Dans ce cas-là, on serait en train de calculer ou de mesurer un champ différent de celui qui existait avant l introduction du deuxième corps. Comme toujours en physique, le processus de mesure perturbe la quantité à mesurer! Nous renvoyons à [Gar96] et [RWvD93]. 6.4 Linéarité et superposition Considérons maintenant un domaine (volume dv, surface d ou ligne dl ) chargé. La loi de Coulomb, qui a été formulée en termes de charges ponctuelles, s applique pleinement à un différentiel de charge dq centré sur le point ~r (voir FIGURE 6.5). On peut affirmer que le champ électrique créé en tout point ~r de l espace par cette charge infinitésimale est de(~r ~ )= 1 dq 4ß" R 2 ~e R (6.4.1) Maintenant, un fait expérimental élévé à la catégorie d axiome théorique, est que la relation entre charges et forces (ou champs) est linéaire : «Le champ d un ensemble de charges Cours d Électromagnétisme II EPFL, Juan Mosig, Mars 23 59

D dq ~R = ~r ~r ~E(~r ) ~r ~r FIGURE 6.5: Loi de Coulomb pour un différentiel dq de charge géométrie et champ électrique. est la somme des champs produits par chacune des charges individuelles agissant séparemment». La conséquence mathématique immédiate est qu on peut trouver le champ d une distribution continue quelconque de charges, par superposition de leurs effets, c est à dire par intégration de l expression précédente. On trouve alors le résultat ~E(~r )= 1 dq R 2 ~e R (6.4.2) 4ß" D où la constante 4ß" 1 a été extraite à l extérieur de l intégrale. Le domaine D représente un des domaines volume, surface ou ligne et le différentiel de charge dq s exprime comme ρ v dv, ρ d ou ρ l dl selon le type de distribution de la charge. 6.5 Le théorème de Gauss Une des caractéristiques essentielles du champ électrique d une charge ponctuelle est qu il varie avec l inverse de la distance au carré. Considérons alors une surface sphérique de rayon R centrée sur la charge q (voir FIGURE 6.6(a)). Le flux ψ d un vecteur C ~ (plus précis d une fonction vectorielle) à travers une surface est défini comme ψ := ~C d ~ (6.5.1) Calculons alors le flux électrique ψ E du vecteur " E ~ créé par une charge ponctuelle à travers une surface sphérique de rayon R centrée sur la charge. Le champ est radial et donc E ~ d ~ = k E ~ k kd ~ k dans la surface sphérique. Aussi, par symétrie, k E ~ k est constante dans les points de la surface sphérique et vaut k E ~ k = q=(4ß" R 2 ). Donc ψ E = " ~ E d ~ = " k E ~ k k d ~ q k = " 4ß" R 2 4ßR2 = q (6.5.2) 6 Cours d Électromagnétisme II EPFL, Juan Mosig, Mars 23

6.5 Le théorème de Gauss ~E ~E ~E d ~ d ~ d ~ dω Q q dq R (a) ource ponctuelle. (b) ource quelconque. FIGURE 6.6: Théorème de Gauss des sources différentes. Il est très important de voir que le calcul préalable dépend critiquement du fait que le champ décroît exactement comme 1=R 2 et doit compenser la croissance de la surface d une sphère avec le carré du rayon. Cette relation demeure vraie si la surface sphérique est remplacée par une surface fermée quelconque (voir FIGURE 6.6(b)), car le flux à travers un angle solide dω donné demeure constante " ~ E d ~ = " ~ E d ~ = q dω 4ß (6.5.3) Le champ électrique étant linéaire, la relation reste valable pour une distribution quelconque de charge, car il suffit de la décomposer en éléments infinitésimaux qui se comportent comme des charges ponctuelles et d appliquer la superposition (voir FIGURE 6.6(a)). On arrive ainsi à l expression classique du théorème de Gauss en électrostatique " ~ E d ~ = Q; (6.5.4) où Q est la charge totale enfermée par, et ~ E est le champ créé par cette charge sur la surface. Le théorème de Gauss est seulement une reformulation mathématique de la loi de Coulomb. Cependant, on verra par la suite qu il s adapte très facilement aux situations où des corps matériels sont présents, ce qui n est pas le cas pour la loi de Coulomb. Aussi, on montre en théorie de la relativité que contrairement à la loi de Coulomb il demeure valable pour des charges en mouvement. Toutes ces circonstances justifient qu on considère souvent ce théorème comme la première loi fondamentale de l Electrostatique. Cours d Électromagnétisme II EPFL, Juan Mosig, Mars 23 61

6.6 La circulation du champ électrique Le champ électrostatique d une charge ponctuelle est associé à une force centrale. a circulation le long d un contour fermé est alors nécessairement nulle. Ceci peut être facilement compris si l on approche le contour fermé C par un contour en escalier C Λ formé de tronçons «radiaux» (parallèles au champ) et de tronçons «transverses» (perpendiculaires au champ) : C C Λ C 1 q + ~E C 2 C 3 FIGURE 6.7: Remplacement d un contour arbitraire C par un autre C Λ comportant uniquement des tronçons radiaux et des tronçons transverses. Or, sur les tronçons transverses comme C 2 on a ~ E 2 ~l 2 =, tandis que sur les tronçons radiaux comme C 1 et C 3 on a ~ E 1 ~l 1 = ~ E 3 ~l 3. Donc, à la limite, quand la taille des tronçons tend vers zéro, on a une circulation nulle pour le contour fermé C. Ce résultat est indépendant de la position du contour par rapport à la charge ponctuelle. Aussi, il demeure vrai si le champ est crée par un ensemble arbitraire de charges : il suffit d appliquer la linéarité et la superposition. On arrive donc à la deuxième loi fondamentale de l Electrostatique, valable pour tout champ électrostatique ~ E et pour tout contour fermé C : I C ~E d ~ l = (6.6.1) En prenant deux points quelconques A et B sur le contour C, on le subdivide en C = C 1 Φ C 2 : C 1 B A C 2 FIGURE 6.8: ubdivision du contour C. 62 Cours d Électromagnétisme II EPFL, Juan Mosig, Mars 23

6.7 Le potentiel électrostatique Ça permet d écrire : I I I ~E d ~ l = ~E d ~ l + ~E d ~ l = () I ~E d ~ l = I ~E d ~ l (6.6.2) C C1 C 2 C1 C2 Donc, on peut reformuler la deuxième loi en affirmant que «l intégrale du champ électrique entre deux points est indépendante du chemin choisi». 6.7 Le potentiel électrostatique Compte tenu de la définition du champ électrique (force sur une charge unité), son intégrale entre deux points qui, comme on vient de le dire est indépendante du chemin correspond au travail effectué pour déplacer une charge ponctuelle entre ces deux points. En mécanique classique, le travail effectué par une force conservative est égal à la différence d énergie potentielle entre les deux points. De façon analogue, on introduit en électrostatique le potentiel V comme une grandeur scalaire associée à chaque point. La circulation du champ entre deux points est alors égale à la différence de potentiel entre ces deux points. Plus précisément : B V (B) V (A) = A ~E d ~ l (6.7.1) On remarque que le signe moins, apparaissant devant l intégrale, est une convention qui permet d affirmer que «le champ est dirigé des potentiels forts vers les faibles». Le potentiel est défini à une constante près. On peut toujours fixer arbitrairement sa valeur dans le point A et utiliser l expression ci-dessus pour le calcul du potentiel dans un point arbitraire B. Quand la configuration de charges source du champ le permet, il est traditionnel d associer une valeur nulle du potentiel au point de l infini. On écrit alors : P V (P )= 1 ~E d ~ l (6.7.2) D où la définition classique : «Le potentiel électrostatique d un point B équivaut au travail nécessaire pour amener une charge ponctuelle positive unitaire depuis l infini jusqu à ce point B en luttant contre le champ existant». Comme application directe de ces définitions, on peut calculer le potentiel V d une charge ponctuelle q placée à l origine de coordonnées. A partir de l expression bien connue du champ, on trouve aisément : r V (~r) = 1 q 4ß" r 2 ~e r (~e r dr) = q 4ß" r ; r =k~r k; (6.7.3) où l on a choisi un potentiel nul à l infini. Par superposition (intégration), le potentiel d une Cours d Électromagnétisme II EPFL, Juan Mosig, Mars 23 63

D dq ~R = ~r ~r V (~r) ~r ~r FIGURE 6.9: Potentiel d une distribution quelconque de charges. distribution de charges quelconques sur un domaine D (volume, surface ou ligne) est donné par (voir FIGURE 6.9) V (~r) = 1 dq k~r ~r k ; (6.7.4) 4ß" D où la constante 4ß" a été extraite à l extérieur de l intégrale. Note sur la référence du potentiel : i le domaine D de définition des charges inclut des points à l infini, il n est plus possible de fixer à l infini la valeur de référence zéro pour le potentiel. L expression précédente, obtenue par superposition, peut alors fournir des résultats aberrants. On est forcé alors d obtenir le potentiel par intégration du champ total, en fixant ailleurs la référence où le potentiel est nul. 6.8 Forme différentielle des lois fondamentales La charge Q à l intérieur d une surface fermée, qui apparaît dans le théorème de Gauss, peut toujours s exprimer en termes d une densité volumique ρ v. On a alors I " ~ E d ~ = Q = ρ v dv (6.8.1) v Et en appliquant le théorème de la divergence I r ~Adv = ~Ad ~ (6.8.2) v (v) on trouve, en comparant les intégrands qui doivent être égaux, r (" ~ E)=ρv (6.8.3) Il faut rappeler ici que la densité volumique est infinie dans les points occupés par une charge ponctuelle, par une feuille chargée ou par un fil chargé. On peut donc dire la même chose de la divergence du champ électrique. 64 Cours d Électromagnétisme II EPFL, Juan Mosig, Mars 23

6.9 Les équations de Poisson et de Laplace Quant à la deuxième loi de l électrostatique, le théorème de tokes I r Ad ~ ~ = ~A d ~ l (6.8.4) C() permet de l écrire directement comme (voir aussi eqn. (6.6.1)) r ~ E = (6.8.5) Tout vecteur à rotationnel nul se laisse dériver d une fonction scalaire. On pourra donc écrire ~E = rv (6.8.6) Que cette fonction V est précisement le potentiel électrostatique, est une conclusion évidente qu on peut vérifier directement à partir de la définition même de «différence de potentiel» (voir éqn. (6.7.1)). En effet, entre deux points infiniment proches, cette définition implique que dv = ~ E d ~ l et quand on compare cette expression avec l identité mathématique dv = rv d ~ l correspondant à l éqn. (6.8.6), la déduction est évidente. 6.9 Les équations de Poisson et de Laplace 6.9.1 Dérivation de ces équations On peut combiner l équation fondamentale définissant la divergence d un champ électrique (voir eqn. (6.8.3)) avec le fait qu un champ électrostatique est toujours «moins le gradient du potentiel» (voir éqn. (6.8.6)). On obtient alors l équation de Poisson r (rv )=r 2 V = ρ v " (6.9.1) où on a remplacé l opérateur combiné «r r= div grad» par l opérateur «laplacien» équivalent. Appliquée à une région dépourvue de charges, l équation de Poisson devient celle de Laplace, qu on écrit simplement r (rv )=r 2 V = (6.9.2) Il faut attirer l attention ici sur le fait que dans des points où il existe une densité surfacique ou linéique de charge ou, encore, une charge ponctuelle, les équations de Poisson et de Laplace posent des problèmes mathématiques. Ceci est dû à la présence de la valeur infinie de la densité volumique ρ v, qu on doit alors traiter comme une distribution de Dirac. En général, si un problème inclut une surface chargée, il vaut mieux résoudre les équations en jeu (Poisson ou Laplace) indépendamment des deux cotés de la surface et chercher à raccorder les résultats obtenus par les conditions aux limites. Cours d Électromagnétisme II EPFL, Juan Mosig, Mars 23 65

6.9.2 Le potentiel d une charge ponctuelle en tant que solution de l équation de Laplace Considérons une charge ponctuelle q placée à l origine de coordonnées. D un point de vue mathématique strict, le potentiel d une telle source est solution d une équation de Poisson avec au deuxième membre une «fonction» delta de Dirac. On peut néanmoins accepter que le potentiel est solution de l équation de Laplace sauf dans un point singulier qui est celui occupé par la charge. En écrivant le laplacien en coordonnées sphériques et en imposant la symétrie radiale on obtient alors la solution V (r) = A r + B (6.9.3) où A et B sont des constantes d intégration à trouver. On choisit par convenance une valeur nulle du potentiel à l infini, ce qui donne B =. Pour trouver la constante manquante, notre seul recours est de calculer le champ comme ~E(~r )= rv = A r 2 ~e r (6.9.4) et d appliquer le théorème de Gauss, ce qui donne A =1=(4ß" ). On récupère donc les valeurs du potentiel et du champ électrique prévus par la loi de Coulomb. 66 Cours d Électromagnétisme II EPFL, Juan Mosig, Mars 23