L évolution actuelle du crédit à l habitat en France est-elle soutenable?



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L évoluion acuelle du crédi à l habia en rance es-elle souenable? rédéric WILHELM Direcion des Éudes e Saisiques monéaires Service des Analyses e Saisiques monéaires Le dynamisme acuel du crédi à l habia prolonge une phase de croissance en ermes réels d une durée sans précéden dans l hisoire récene puisque son origine remone à 1996, soi il y a près d une décennie. De plus, les ryhmes de progression du crédi immobilier on rerouvé, en 2004, des niveaux qui n avaien plus éé observés depuis les années soixane-dix. Ce essor des fi nancemens de l habia, en l absence de ensions infl aionnises e d évoluions majeures aux plans réglemenaire e fi nancier, n es pas propre à la rance. Elle concerne égalemen plusieurs aures pays européens, au poin que le crédi à l habia es devenu la composane la plus dynamique du crédi au seceur privé dans l ensemble de la zone euro. Ce phénomène perdure, alors que les condiions qui l avaien enclenché (noammen prix de l immobilier relaivemen bas e endeemen des ménages revenu à un niveau modéré) ne son plus de mise aujourd hui (excepion faie du bas niveau des aux débieurs) : la siuaion conjoncurelle, en pariculier celle de l emploi, ne paraî guère favorable e plusieurs indicaeurs suggèren une endance à la dégradaion de la solvabilié des ménages à un momen où les prix des logemens progressen encore à un ryhme souenu. La fore croissance du crédi sur la période récene a accompagné celle des ransacions sur des logemens anciens, le fi nancemen par emprun de logemens neufs ne jouan qu un rôle secondaire. En oure, après avoir éé alimenée par des faceurs de demande, elle a éé largemen simulée par le dynamisme de l offre bancaire. En effe, si la fragilisaion progressive de la solvabilié des ménages a probablemen pesé sur cerains comparimens de la demande, les banques on neemen assoupli leur poliique d offre de crédi à l habia, réduisan leurs exigences en maière d appor personnel, allongean la durée des fi nancemens e développan les conras à aux variable. Pour auan, le caracère esseniellemen fi nancier de la dynamique acuellemen à l œuvre e les perspecives d essouffl emen de la demande ne permeen pas de abler sur une poursuie à moyen erme de cee phase ascendane du cycle. Dans ce conexe, un «aerrissage en douceur», sous la forme d un ralenissemen graduel du crédi e des prix, serai bien évidemmen préférable à une correcion plus bruale du phénomène. Mos-clés : crédis nouveaux, immobilier, ménages, habia, prix, aux d inérê, prês immobiliers, mises en force, neuf, ancien, apparemens, maisons individuelles, prês du seceur libre, prês réglemenés, crédis aidés, fi nancemen du logemen, prês à aux zéro Bullein de la Banque de rance N 140 Aoû 2005 37

En rance, la croissance nominale annuelle des crédis à l habia des ménages n a cessé de s accélérer depuis le milieu des années quare-ving-dix, d environ 1 % à son plus bas niveau observé en 1994 à 12 % en décembre 2004. Ce dynamisme es d auan plus frappan qu il s inscri dans un environnemen exemp de ensions inflaionnises e sable sur le plan financier e réglemenaire, alors que les phases comparables d expansion accélérée, en pariculier dans les années soixane-dix, faisaien suie à des chocs majeurs à ce égard. Ainsi, les ryhmes de progression récemmen aeins en ermes réels représenen des niveaux inédis depuis le débu de la décennie quare-ving. Au oal, le ryhme de croissance du crédi à l habia en rance dépasse celui de l ensemble de la zone euro depuis le quarième rimesre 2002 (aujourd hui environ 12 %, au lieu de 10 % dans la zone euro) e le crédi immobilier consiue, de loin, la composane la plus vigoureuse du crédi au seceur privé. De surcroî, le développemen du crédi à l habia a coïncidé avec une hausse pariculièremen souenue des prix immobiliers, ce qui condui à s inerroger sur la souenabilié d une elle configuraion 1. La présene éude vise, d une par, à faire ressorir les caracérisiques du cycle acuel du crédi à l habia e, d aure par, à s inerroger sur sa souenabilié du poin de vue de l offre comme de la demande. 1 Un cycle de croissance du crédi à l habia de caracère excepionnel L analyse de l évoluion des crédis à l habia sur les rene dernières années suggère l exisence de périodes à régimes de croissance différenciés. Ces «cycles», e plus pariculièremen leurs poins de reournemen, apparaissen assez bien en phase avec les évoluions macroéconomiques. Crédis à l habia des ménages (en %) 25 20 15 10 5 0-5 - 2 197019721974197619781980198219841986198819901992199419961998200020022004 Taux de croissance annuel déflaé par l IPC Taux d'inérê immobilier déflaé par l IPC (échelle de droie) Sources : BRI, Banque de rance (données esimées pour la croissance des crédis sur la période 1970-1978, cf. annexe 1) 1 1 La croissance réelle des crédis à l habia aein acuellemen des niveaux sans précéden depuis les années soixane-dix Sur longue période (décembre 1970-décembre 2004), le aux de croissance annuel du crédi à l habia a subi d imporanes flucuaions 2. En ermes réels c es-à-dire déflaé de l indice des prix à la consommaion, l encours des crédis à l habia a ainsi connu des phases de fore croissance alernan avec des épisodes de sagnaion, voire de conracion. La phase ascendane qui s es ouvere en 1996 e s es poursuivie jusqu à aujourd hui se disingue par sa durée. Le aux de croissance réel aein en décembre 2004, en l espèce 9,9 %, correspond à un niveau record, si l on excepe les pics observés au cours des années soixane-dix, ce qui soulève la quesion du caracère souenable d une elle évoluion. Sur la période décembre 1970-décembre 2004, le aux de croissance moyen des crédis à l habia aein en ermes réels 5,4 %. Par rappor à ce ryhme moyen, les évoluions annuelles laissen ransparaîre des cycles bien différenciés. 10 8 6 4 2 0 1 Pour une analyse approfondie de la quesion de l évoluion des prix de l immobilier en rance, cf. Moëc (2004) 2 Cf. l annexe 1 sur la consrucion de séries longues de crédis à l habia e de aux d inérê sur ce ype de fi nancemen 38 Bullein de la Banque de rance N 140 Aoû 2005

Duran les années soixane-dix, le crédi à l habia raverse deux phases de fore hausse, en 1972-1973 e en 1975-1977 Ces deux cycles d ampliude imporane on éé liés à la baisse des aux d inérê réels, dans un conexe de monée de l inflaion e de reard dans l ajusemen des aux d inérê nominaux. Cependan, la fin des années soixane-dix, marquée par le second choc pérolier, se caracérise par une bruale décéléraion des crédis en ermes réels. Duran la période 1980-1995, une reprise limiée du crédi à l habia, suivie d une phase de ralenissemen Au débu de la décennie quare-ving, dans un conexe d inflaion élevée, la croissance du crédi immobilier demeure limiée, pour plafonner à un ryhme inférieur à 4 % en glissemen annuel réel à la fin de 1985 (soi en deçà de sa moyenne de long erme). Différens faceurs on conribué à cee relaive modéraion : recul de la BC logemen des ménages en volume ou au long de la période, monée du chômage, baisse de l indice de confiance des ménages e renchérissemen régulier des aux réels avec le processus de désinflaion. Après une coure période de relaif dynamisme en ermes réels enre 1986 e 1988, le crédi à l habia a enregisré un ralenissemen graduel, pour rerouver des niveaux de croissance réelle enre 3 % e 4 % à la fin de la décennie. Cee évoluion a probablemen enu, pour une bonne par, à l achèvemen du processus de libéralisaion du crédi bancaire qui s es noammen radui par une fore décéléraion de l encours des prês bonifiés : c es ainsi que le aux de croissance annuel des prês aidés à l accession à la propriéé (PAP), rès dynamiques duran la première moiié de la décennie, es passé de 16,5 % en décembre 1986 à 0,5 % en décembre 1990. Sous l effe noammen de la diminuion des disposiifs d aide publique au financemen de logemens neufs e à l accession à la propriéé, le rappor conras nouveaux desinés au financemen d un logemen neuf/bc logemen en valeur a foremen baissé, passan de près de 40 % en 1984 à environ 21 % en 1993. Ce faceur a ainsi conribué à peser sur l évoluion de l encours global des crédis à l habia. De surcroî, il es vraisemblable que la loi Neierz (1991), par ses disposiions proecrices pour les agens surendeés, ai incié les banques à une poliique plus sélecive en maière d offre de crédi. L épisode de bulle spéculaive de la fin des années quare-ving sur l immobilier de bureau, qui a, dans une moindre mesure, concerné le seceur du logemen (cf. annexe 2), n a pas eu d effe haussier sur le crédi à l habia. Au conraire, enre 1988 e 1990, la disribuion de concours aux ménages desinés à l acha de logemen a eu endance à se asser. L acivié a ensuie éé pariculièremen aone enre 1993 e 1996, le repli prononcé des prix des logemens enraînan une désaffecion pour les placemens immobiliers. Celle-ci a pu êre égalemen aggravée par la concurrence de placemens monéaires, compe enu Raio conras nouveaux/encours de crédis (en %) 28 26 24 22 20 18 16 14 12 10 1983 1985 1987 1989 1991 1993 1995 1997 1999 2001 2003 Raio conras nouveaux (neuf)/bc logemen (en %) 55 50 45 40 35 30 25 20 1983 1985 1987 1989 1991 1993 1995 1997 1999 2001 2003 Sources : Banque de rance, INSEE Bullein de la Banque de rance N 140 Aoû 2005 39

du mainien des aux à cour erme à des niveaux rès élevés an en ermes nominaux que réels. L encours des crédis à l habia des ménages s es ainsi conracé en ermes réels enre 1993 e 1996. La reprise de l immobilier amorcée en 1996 présene des rais pariculiers À parir de 1996, la disribuion des crédis à l habia s es progressivemen inensifiée dans un environnemen réglemenaire sabilisé e en l absence de pressions inflaionnises. Après 2001, cee dynamique s es poursuivie, alors même que l acivié économique enrai dans une phase de ralenissemen. La baisse prononcée des aux des prês immobiliers, à l œuvre depuis 1991, a sans doue joué un rôle clé dans cee évoluion : les aux débieurs réels son ainsi passés d environ 7,5 % en décembre 1990 à 4 % en fin 2000, pour omber à 1,6 % en décembre 2004 3. Tan l ampliude de ce mouvemen de réducion des aux que sa durée son sans équivalen dans l hisoire récene. Parallèlemen, on éé inroduis les disposiifs Besson, puis Périssol (2000), d inciaion fiscale à l acha de biens immobiliers. De surcroî, les prix de l habia, après la correcion inervenue enre 1991 e 1996 (6 % enre sepembre 1991 e décembre 1996 en ermes réels), son redevenus un emps aracifs. D aures faceurs on pu jouer, au moins au débu de cee période de reprise durable : l amélioraion de la solvabilié des ménages, don le aux d endeemen es ombé de plus de 50,5 % en fin 1994 à 48,8 à la mi-1996. Dans une ceraine mesure, des capaciés d empruns inemployées son donc réapparues ; le rebond de l acivié, e donc de l emploi, qui s es accompagné à parir de 1997 d un mouvemen de remonée de l indice de confiance des ménages. Depuis 2001, l accéléraion du crédi à l habia se poursui, sur fond de ensions de plus en plus vives des prix de l immobilier Après un assemen passager au débu de 2001, le aux de croissance annuel du crédi à l habia s es coninûmen renforcé : enre décembre 2000 e 3 Il s agi du aux débieur minimum sur les crédis immobiliers (cf. annexe 1). décembre 2004, il es ainsi passé, en ermes réels, de 5,4 % à 9,7 %. Ce dynamisme persisan es allé de pair avec deux évoluions majeures : une fore hausse des prix de l immobilier (neuf e ancien confondus) : en décembre 2004, ceux-ci éaien ainsi supérieurs de plus de 38 % en ermes réels e de 72 % en ermes nominaux à leurs niveaux de la mi-1991 (les plus haus de la période die de bulle spéculaive selon l indice synhéique présené en annexe 2) ; le aux d endeemen des ménages résidens (dee/revenu disponible bru) a aein un niveau record de 60,3 % à fin décembre 2004. 1 2 Un phénomène égalemen à l œuvre dans d aures pays de la zone euro Cee «exubérance» du crédi à l habia n es pas, loin s en fau, un phénomène limié à la rance. Elle se manifese, parfois dans des proporions sensiblemen plus imporanes, dans plusieurs grands pays de la zone euro. Au oal, pour l ensemble de l Union monéaire, les prês immobiliers consiuen acuellemen la composane la plus dynamique du crédi aux ménages e, plus généralemen, au seceur privé : leur croissance s es ainsi renforcée coninûmen depuis décembre 2001, passan de 7,0 % à 10,0 % en décembre 2004. Le ableau ci-dessous illusre la siuaion de deux grands pays de la zone, l Espagne e l Ialie, qui enregisren dans ce domaine les chiffres les plus élevés. Croissance annuelle du crédi à l habia Zone euro rance Espagne Ialie 2001 7,0 6,3 16,4 6,2 2002 7,8 8,2 14,2 23,4 2003 8,1 10,1 17,3 22,1 2004 10,0 12,0 21,8 19,8 Sources : BCE, Banque d Ialie, Banque d Espagne, Banque de rance Dans les pays de la zone euro où le crédi à l habia es pariculièremen dynamique, on observe généralemen, à l insar de la rance (cf. annexe 2), une fore progression des prix de l immobilier. Ainsi, en Espagne, le prix de l habia neuf ou ancien progresse acuellemen à un ryhme annuel de l ordre de 17 %. 40 Bullein de la Banque de rance N 140 Aoû 2005

Cee siuaion peu s expliquer, en première analyse, par quare séries de faceurs : une moindre airance pour les placemens en acions, après l éclaemen de la bulle en 2000 e le marasme boursier qui l a suivi. Cela a pu conduire bon nombre d invesisseurs à privilégier des placemens perçus comme moins risqués, els la pierre, valeur refuge radiionnelle ; la faiblesse de la rémunéraion de l épargne financière radiionnelle à cour comme à moyen ou long ermes (liquidiés e placemens obligaaires) a favorisé la recherche de rendemens plus élevés, en pariculier sur le marché immobilier ; le renchérissemen coninu des loyers e la monée des craines sur l avenir des régimes de reraies on pu égalemen incier les ménages à privilégier l acquisiion de leur logemen ; enfin, e surou, le niveau hisoriquemen bas des aux débieurs, en ermes nominaux e réels, a sans doue foremen encouragé les ménages à recourir à l endeemen pour financer leurs acquisiions immobilières. 1 3 Les conséquences des évoluions acuelles Une ineracion de plus en plus fore enre la hausse des prix des logemens, noammen anciens, e la progression des crédis nouveaux à l habia semble désormais à l œuvre. L encadré 1 appore un éclairage sur les différens faceurs affecan la producion de financemens nouveaux. Le consa global qui en découle es que la siuaion acuelle se caracérise par une prédominance des faceurs financiers sur les faceurs réels dans l explicaion de l expansion des crédis au logemen 4. S agissan de la composane réelle, l évoluion des crédis à l habia n es pas oujours sricemen corrélée à celle de l invesissemen en logemen, même si el es normalemen le cas en longue période, comme le monre le graphique ci-après. Sur les années récenes noammen, cee composane n explique qu une fracion résiduelle de la dynamique du crédi. D une par, l esseniel des crédis nouveaux (environ les deux iers acuellemen, proporion qui a foremen varié au cours des deux dernières décennies, cf. annexe 2) financen des ransacions poran sur des logemens anciens (non inclus dans la BC logemen qui ne BC logemen des ménages e encours du crédi à l habia (en volume) (aux de croissance en %) 15 10 5 0-5 - 10 1979 1981 1983 1985 1987 1989 1991 1993 1995 1997 1999 2001 2003 BC en volume Sources : Banque de rance, INSEE Crédi à l habia déflaé de l'ipc Croissance des conras nouveaux déflaés par l indice synhéique des prix du logemen (aux de croissance en %) 40 30 20 10 0-10 - 20 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 Sources : Banque de rance, INSEE 4 Cee observaion générale rejoin celle de Leca e Mésonnier (2005) concernan la dynamique des prix des logemens. Bullein de la Banque de rance N 140 Aoû 2005 41

ENCADRÉ 1 aceurs d évoluion de la producion de nouveaux crédis au logemen Le monan des fi nancemens nouveaux ocroyés au cours d une période donnée peu se décomposer selon la naure des besoins de fi nancemen couvers comme sui : = α BC im + β T pa pa aa + θ T aa avec : = monan des fi nancemens nouveaux ocroyés au cours de la période ; (1) α, im BC, désignan, respecivemen, la par des acquisiions de logemen neuf fi nancée par emprun e le monan en valeur de la BC logemen des ménages : il peu s agir aussi bien de primo-accédans que de propriéaires d un bien ;, T pa pa β désignan, respecivemen, la par des opéraions des primo-accédans dans l ancien fi nancée par emprun (ou évenuellemen des propriéaires non vendeurs qui rachèen un bien supplémenaire, une résidence secondaire par exemple) e le monan des ransacions impliquan des primo-accédans dans l ancien ; aa aa θ, T, désignan, respecivemen, la par fi nancée par l emprun des ransacions sur l ancien enre propriéaires vendeurs e acquéreurs e le monan des ransacions correspondanes. La formule (1) peu encore s écrire : α BC = im pa β T + 1 1 1 pa + aa aa θ T 1 (2) ou encore 1 = α 1BC 1 im 1 α BC im + β T pa pa 1 1 1 β T pa pa + aa aa θ 1 T 1 1 aa θ T aa (3) Les doubles barres indiquen qu il s agi du rappor des grandeurs considérées sur deux périodes successives. Au oal, la dynamique des crédis nouveaux à l habia paraî commandée par deux faceurs : d une par, une composane réelle liée aux évoluions de l invesissemen logemen des ménages e, d aure par, une composane fi nancière, dans laquelle la croissance des prix de l ancien e celle des fi nancemens s alimenen muuellemen. Les limies à ce processus auo-alimené iennen principalemen, si les prix coninuen d accélérer, à la raréfacion des primo-accédans. En oure, l accroissemen de l offre de logemens neufs devrai conribuer à assagir les prix de l ancien. Ces mécanismes correceurs peuven cependan ne jouer que progressivemen, en raison noammen des conraines echniques e réglemenaires pesan sur l offre de logemens neufs. concerne que le neuf). D aure par, le monan relaif de l appor personnel a pu baisser. Bien que la BC logemen des ménages enregisre une reprise depuis le dernier rimesre 2003, son effe sur la croissance des conras nouveaux rese limiée : sur les 21,5 % de croissance des conras nouveaux en 2004 par rappor à l année précédene, la conribuion des conras pour le logemen neuf représene seulemen 8,5 poins de pourcenage 5. Enfin, il convien de souligner que cee conribuion ien, pour une bonne par, au dynamisme des prix du logemen neuf, l indice du coû de la consrucion (calculé par l INSEE e déflaeur de la BC logemen) ayan progressé de 4,5 % en 2004. L esseniel de la dynamique acuelle des conras nouveaux ien donc aux ransacions sur l ancien e semble principalemen liée à la croissance des prix : 5 (Poids des conras nouveaux pour le logemen neuf en 2003) x (aux de croissance des conras nouveaux fi nançan l acquisiion de logemens neufs en 2004), soi 0,28 x 30,2 % 42 Bullein de la Banque de rance N 140 Aoû 2005

selon les derniers chiffres de l INSEE, les prix des logemens anciens on augmené de 16 % en 2004. L annexe 2 monre que la par des logemens neufs dans les conras nouveaux a coninûmen baissé depuis plus de ving ans : les crédis affecés à la BC logemen représenaien près du double de ceux desinés à l acha d un bien ancien en 1982, cee siuaion s es oalemen inversée aujourd hui. Depuis 2000, la progression réelle des flux de crédis nouveaux (c es-à-dire déflaée par l indice synhéique des prix des logemens, neufs e anciens confondus, cf. annexe 2) rese, en moyenne, légèremen inférieure à celle observée sur l ensemble de la période. À plusieurs reprises, dans un passé plus loinain, les conras nouveaux on progressé sensiblemen plus vie que les prix du logemen. Depuis 2000, le aux de progression moyen du crédi nouveau à l habia déflaé es légèremen négaif (de l ordre de 0,8 %), alors qu il s éabli sur l ensemble de la période débuan en 1984 à + 3,8 %. En d aures ermes, la croissance des crédis nouveaux sui à un ryhme assez proche, quoique légèremen inférieur, celle des prix immobiliers (ancien e neuf confondus). Compe enu des élémens précédens, c es une illusraion supplémenaire de l ineracion observée acuellemen enre la dynamique des prix immobiliers, singulièremen ceux du logemen ancien, e celle du crédi à l habia. 2 La dynamique acuelle du crédi à l habia es-elle souenable? Si l on suppose que les cycles du crédi son corrélés aux évoluions macroéconomiques, la quesion de la souenabilié du mouvemen acuel renvoie à l éude des mécanismes e des canaux de ransmission enre la sphère réelle e la sphère financière. Touefois, l appréciaion que l on peu porer sur la souenabilié du phénomène dépend foremen du déerminan principal, demande ou offre, qu on lui reconnaî. 2 1 Le dynamisme de la demande finira par se heurer aux conraines de solvabilié des empruneurs Les faceurs démographiques pourraien encore souenir un emps la demande de crédi La populaion acive a progressé de manière assez dynamique au cours de ces dernières années : enre 1998 e 2002, elle a crû à un ryhme annuel moyen de 0,7 %, alors que son aux de croissance moyen sur longue période (depuis 1968) es de 0,6 %. Cee évoluion pourrai s êre raduie par une augmenaion du nombre des primo-accédans sur le marché immobilier. Cependan, un assemen s es opéré depuis 2003 e devrai déboucher sur une conracion de la populaion acive à comper de 2008. En d aures ermes, ce faceur ne peu pas avoir d effes rès durables. Un accroissemen du nombre de ménages résulan d unions plus ardives e plus fragiles (familles recomposées, par exemple) devrai, selon Jacquo (2002), augmener le nombre de logemens à consruire de 290 000 par an enre 2000 e 2005, conre 270 000 au cours de la décennie quare-ving-dix. Il convien cependan, là aussi, de nuancer l impac de ces projecions en ermes de demande de crédis nouveaux, dans la mesure où la hausse du nombre de ménages observée dans les années quare-ving-dix a principalemen enu au vieillissemen de la populaion. En se référan à une approche de ype «cycle de vie», cee endance démographique lourde ne va pas dans le sens d une croissance du crédi à l habia 6. La monée de la charge du service de la dee devrai peser ô ou ard sur la demande de crédi L accroissemen du aux d endeemen des ménages n implique pas nécessairemen que la charge de remboursemen des crédis à l habia ai suivi la 6 Selon l analyse d Ando e Modigliani (1963), les agens adapen la srucure emporelle de leurs ressources à celle de leurs besoins en s endean ou en épargnan. Bullein de la Banque de rance N 140 Aoû 2005 43

même endance. En effe, l accroissemen du poids des remboursemens e des inérês par rappor au revenu es rès inférieur à celui du aux d endeemen. Cela résule de l allongemen de la durée des empruns e de la rès fore réducion des aux débieurs observée au cours de la décennie quare-ving-dix. Les banques on ainsi de plus en plus fréquemmen conseni des concours de durées longues, proposan des échéances inédies (ving ans, voire plus) au regard des praiques habiuelles en rance. Touefois, en s en enan, d une par, aux données issues du compe de résula des éablissemens de crédi 7 e, d aure par, aux remboursemens du capial 8, on observe une augmenaion marquée du raio charges de remboursemen (inérês +capial)/rdb, qui es passé de 6,9 % en 2000 à un niveau record de 8,5 % en 2004. En revanche, le raio charges d inérê/rdb, a coninûmen baissé, passan de 4,9 % en 1983 à 2,0 % en 2004, sous l effe de la décrue des aux d inérê. Ainsi, l accéléraion des prix de l immobilier depuis 1997 a souven condui à ce que l alourdissemen de la charge de remboursemen du capial l empore sur l effe favorable de la baisse des aux, conribuan ainsi à une fore hausse du service de la dee en pourcenage du RDB au ire des crédis à l habia. La hausse coninue des raios dee/rdb e service de la dee immobilière/rdb de ces dernières années peu s expliquer par deux ypes de comporemens : d une par, l élévaion du aux d effor par ménage e, d aure par, une plus large diffusion de l endeemen dans la populaion. Sur un plan microéconomique, il semble que les aux d effor acuels soien pariculièremen élevés comme le souligne Blanqué (2005), même si cee quesion rese conroversée, en raison des difficulés d esimaion de ces aux d effor. Raios de remboursemen du crédi à l habia (en %) 8 7 6 5 4 3 2 1 0 1983 1985 1987 1989 1991 1993 1995 1997 1999 2001 2003 Charges d'inérê Charges de capial Charges oales de remboursemen (échelle de droie) Ceraines caracérisiques du marché du logemen peuven ouefois aénuer les effes de cee «désolvabilisaion» des ménages Le ryhme de hausse des loyers es en moyenne voisin de celui des charges de remboursemen, si l on excepe les années les plus récenes 9. De surcroî, les garanies rès éendues demandées par les bailleurs, ou au moins dans les grandes villes, e l engorgemen du marché locaif peuven conribuer à souenir la demande des primo-accédans à la propriéé 10. Par ailleurs, les inceriudes sur l avenir des reraies pourraien égalemen incier les ménages supporan des loyers considérés comme rès élevés à se fixer l acquisiion d un logemen comme un objecif parimonial prioriaire, quie à affecer une par élevée de leur revenu au remboursemen des empruns. 9,0 8,5 8,0 7,5 7,0 6,5 6,0 5,5 5,0 7 Ces données n éan disponibles qu à parir de 1993, pour la période anérieure elles on éé esimées à parir de l encours de crédi à l habia ne des remboursemens en capial e d un aux d inérê dédui à parir du aux de l emprun phare à dix ans auquel a éé appliquée une prime. 8 Les données de remboursemen du capial son obenues à parir des informaions de la direcion de la Conjoncure de la Banque de rance relaives aux fl ux brus de crédis à l habia. On dédui le remboursemen du capial en considéran qu il es égal à la différence enre le fl ux bru de crédis nouveaux e la variaion d encours de crédi à l habia. Le solde inclu donc, oure l amorissemen des principaux, les sories prémaurées liées aux déclassemens des créances impayées en créances doueuses, mais aussi les remboursemens anicipés. On esime généralemen que ceux-ci prennen de l ampleur lorsque l écar enre le aux des conras exisans e celui des conras nouveaux excèden 200 poins de base. En données annuelles, ils se raduisen par l appariion de pics affecan l esimaion du monan des charges de remboursemens, caracérisiques au milieu des années quare-ving e quare-ving-dix. 9 Les loyers auraien progressé en 2004 de 4,5 %, après 5,6 % en 2003 e 8,8 % en 2002, selon la NAIM, andis que les charges de remboursemen se son accrues au cours des mêmes années de, respecivemen, 13,0 %, 12,9 % e 8,4 %. En moyenne depuis 1998, la progression des loyers a éé de 4,2 %, andis que les charges de remboursemen on augmené en moyenne de 4,4 %. 44 Bullein de la Banque de rance N 140 Aoû 2005

Un cerain nombre d indicaions fon égalemen éa d une endance à l élargissemen de la populaion des propriéaires. Ainsi, Cordier e Rougerie (2004) rappellen que, en 2004, 56 % des ménages possèden leur résidence principale, conre 54 % en 2000, ce qui confirme la endance à la hausse observée depuis une quinzaine d années. Par ailleurs, ils meen en évidence le développemen de l épargne salariale, poré par des mesures fiscales inciaives. Cee évoluion consiue, selon eux, égalemen un élémen de souien de la demande de logemens e, paran, de la demande de crédis. Au oal, en dépi des faceurs de souien encore à l œuvre (l évoluion démographique, d une par, le bas niveau des aux débieurs e la poursuie de leur assouplissemen, d aure par), la déérioraion progressive de la solvabilié des ménages es sans doue appelée à peser de manière croissane sur le dynamisme de la demande de crédis à l habia. 2 2 La souenabilié du poin de vue de l offre de crédi à l habia La srucure de l offre a connu des évoluions imporanes La répariion de l offre de crédis à l habia enre les réseaux disribueurs s es neemen modifiée au cours des années quare-ving-dix, dénoan une inensificaion de la concurrence sur ce marché. En effe, la modernisaion e la consolidaion du seceur bancaire on décloisonné les circuis de financemen, fai disparaîre les renes de siuaions e favorisé l émergence de grands groupes bancaires universels, en concurrence sur l ensemble des services d inermédiaion. En pariculier, le marché des crédis à l habia, pariculièremen concurreniel, a connu un rééquilibrage enre ces grands groupes, comme l on monré Diesch e Goliin-Boubakari (2002). Pour auan, la par du crédi à l habia dans le oal de bilan des éablissemens de crédi a peu varié. À la mi-2004, elle s éablissai au voisinage de 10 %, soi un niveau analogue à celui observé dix ans auparavan. Mais cee sabilié globale recouvre en fai un mouvemen de «va e vien», avec un Poids du crédi à l habia (en %) 39 37 35 33 31 29 27 7,5 Avril Avril Avril Avril Avril Avril Avril Avril Avril Avril Avril Avril 1993 1994 1995 1996 19971998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 Poids du crédi dans le crédi oal aux AN Poids du crédi dans le oal de bilan des éablissemens de crédi (échelle de droie) fléchissemen jusqu au débu 1999, dae à laquelle cee par éai ombée à moins de 8 %, puis une remonée quasimen symérique. S agissan du poids des crédis à l habia dans le oal des concours consenis par les éablissemens de crédi aux agens non financiers, un accroissemen coninu s es opéré ou au long de la décennie, avec une accéléraion de ce processus à parir de la fin 2001. Les ménages consiuen une clienèle peu risquée e rès renable 10,5 10,0 La proporion croissane des concours à l habia des ménages dans le oal des crédis peu s expliquer noammen par le niveau de risque, faible e en diminuion, lié à ce ype d opéraion. Ainsi, le poids des créances doueuses e des passages en pere dans le oal des crédis aux ménages a éé divisé par deux enre débu 1993 e fin 2004. Par ailleurs, au plan inernaional, le niveau de risque sur le crédi à l habia es en moyenne de l ordre de 0,5 %, les banques françaises se siuan pluô en deçà 11. En conséquence, comme l on mis en évidence Bouillier e alii (2005), les spreads enre les aux des crédis immobiliers aux ménages e les aux de ires d Éa de durée équivalene on eu endance à se resserrer au cours des dix dernières années, pour omber à des niveaux hisoriquemen rès bas. 9,5 9,0 8,5 8,0 10 Selon la NAIM, une cauion es demandée à près de 50 % des locaaires conre un quar il y a dix ans. 11 Cf. BRI, Basel Commiee on Banking Supervision (2003) Bullein de la Banque de rance N 140 Aoû 2005 45

Par des crédis à aux variable (périodes de fixaion iniiale < 1 an) dans le oal des conras nouveaux (en %) 40 35 30 25 20 15 év. Avril Juin AoûOc. év. Avril Juin Aoû Oc. év. Avril 2003 2004 2005 La poliique d offre des banques encourage l endeemen à long erme e à aux variable Les banques enden à consenir, de plus en plus fréquemmen, des concours de durées de plus en plus longues (ving ans, voire plus). Elles auraien aussi endance à réduire leurs exigences quan à la par de l appor iniial des cliens. La durée des crédis au logemen s es rallongée sensiblemen depuis le débu des années quare-ving-dix : s agissan des empruns à aux variable, la durée moyenne des opéraions es passée de 10,5 ans débu 1991 à 14 ans en fin 2003 ; dans le même emps, la durée moyenne des prês à plus de 10 ans es passée de 15 ans à 17 ans. Une éude récene corrobore ces résulas : elle indique que la durée moyenne de l ensemble des prês à l habia serai passée de 12 ans environ en 1989 à près de 17 ans à la fin 2004 (cf. Mouillar, 2005) Dans le même emps, alors qu ils éaien encore rès peu répandus il y a quelques années, les crédis à l habia à aux variable on connu un développemen rès imporan depuis 2002. Cee évoluion émoigne de la confiance des empruneurs dans la sabilié de l environnemen financier. Touefois, son caracère récen e sa rapidié enden à indiquer qu elle reflèe plus un comporemen d offre que de demande. Les conras à aux variable, qui permeen dans le conexe acuel d afficher des condiions pariculièremen aracives, consiuen en quelque sore des «produis d appel» pour l offre de conras de prês immobiliers. Alors qu elles représenaien moins de 10 % des crédis nouveaux avan 2002 e environ 20 % au débu de 2003, les opéraions à aux variable pèsen désormais pour environ 35 % du volume oal des conras nouveaux. Cee évoluion rapproche quelque peu la rance de la moyenne de l ensemble de la zone euro, légèremen inférieure à 60 %. L endeemen à long erme e à aux variable expose les ménages à un risque de aux renforcé, suscepible de se ransformer en risque de crédi pour les banques Le développemen des conras à aux variable enraîne une exposiion accrue au risque de aux pour la clienèle. Si une grande parie des conras son aujourd hui assoris d une garanie de aux plafond («cap»), ils laissen néanmoins subsiser une exposiion nee résiduelle imporane pour des ménages, don la solvabilié apparaî aujourd hui moins assurée (cf. supra). En conséquence, dans l hypohèse d une fore remonée des aux à cour erme, la proporion d empruneurs défaillans augmenerai rès cerainemen e le risque de crédi des banques s accroîrai en conséquence. Ce scénario n a rien de héorique puisqu il s es déjà produi, par exemple, pour les ménages anglais, radiionnellemen endeés à aux variable e à long erme, qui se son rerouvés massivemen insolvables avec l envolée des aux d inérê à la fin de la décennie quare-ving. L allongemen de la durée des crédis à l habia conribue à une plus fore ransformaion des banques En même emps que la durée des prês s allongeai, le poids des ressources à plus de deux ans (dépôs à erme e ires de dee) dans le oal du passif des banques a eu endance à s amenuiser au cours des années récenes. Il es ainsi passé de 20,6 % à fin 1998 à 17 % en décembre 2004. L allongemen de la durée des emplois e le raccourcissemen de celle des ressources a ainsi conribué à un accroissemen de la ransformaion, confirmé par de nombreuses éudes (cf., noammen, Oung (2004)) e, paran, une exposiion plus fore au risque de aux. Touefois, la gesion acif-passif des banques se révèle généralemen 46 Bullein de la Banque de rance N 140 Aoû 2005

ENCADRÉ 2 Évoluions récenes du crédi à l habia e des prix du logemen Les données concernan le premier semesre 2005 émoignen d une robusesse persisane de l acivié de disribuion de crédis à l habia. En aux de croissance annuel défl aé des prix à la consommaion, l encours des crédis immobiliers a progressé de 10,9 % en juin 2005, soi un plus hau hisorique. On observe égalemen un dynamisme des conras nouveaux : en cumul sur douze mois, leur monan éai passé de 83,2 milliards en décembre 2003 à 99,5 milliards en aoû 2004 ; après un léger assemen duran le second semesre 2004, il s es de nouveau inscri en hausse au cours du premier semesre 2005 pour s éablir en juin 2005 à 109,4 milliards. En revanche, l évoluion des prix de l immobilier semble marquer une ceraine modéraion : à s en enir à l ancien, selon la NAIM, leur ryhme de progression s es éabli au premier semesre 2005 à 13,5 % en aux annualisé, conre 15,5 % pour l année 2004. efficace pour amenuiser le risque de ransformaion même si elle compore un coû, noammen pour ce qui concerne le porefeuille des crédis aux ménages. D après les enquêes menées auprès des banques, la poliique d offre devrai reser accommodane la solvabilié des ménages e de la hausse oujours souenue du prix des logemens. Depuis le milieu des années quare-ving-dix, la vigueur de la croissance du crédi à l habia a largemen enu au dynamisme de la demande, dans un conexe de baisse rapide e de grande ampleur des aux nominaux e réels. La demande des ménages pourrai cependan s affaiblir à plus ou moins brève échéance, en raison de l alourdissemen de la conraine de solvabilié. La dynamique du crédi au logemen n en rese pas moins souenue par une offre rès accommodane. Celle-ci consiue probablemen désormais le moeur de l expansion du financemen du logemen, en élargissan la gamme de conras proposés (durées rès longues, appors personnels faibles, aux variables). Pour auan, la poursuie de cee dynamique semble peu probable e même peu souhaiable, dans la mesure où elle semble obéir désormais principalemen à des faceurs financiers. Le processus acuellemen à l œuvre d auo-enreien de la croissance des prix immobiliers e du crédi à l habia aeindra ô ou ard ses limies, en raison de l alourdissemen de la conraine de solvabilié des empruneurs e de la poursuie de la monée des prix. Dans ce conexe, un «aerrissage en douceur» sous la forme d un ralenissemen graduel du crédi e des prix serai bien évidemmen préférable à une correcion plus bruale du phénomène. Les récenes livraisons de l enquêe rimesrielle sur la disribuion du crédi effecuée par la Banque de rance dans le cadre du Bank Lending Survey mené par la BCE pour l ensemble de la zone euro monren que les banques françaises n on pas subsaniellemen modifié leur poliique d offre de crédi à l habia, qui demeure pluô accommodane sous l effe, principalemen, du renforcemen de la concurrence enre les éablissemens prêeurs. Ceres, les banques prévoyaien, depuis plusieurs rimesres, de procéder à un durcissemen, mais celui-ci ne s es pas maérialisé jusqu à présen. On consae de fai une poursuie de la baisse des aux débieurs au débu de l année 2005 : pour les crédis nouveaux à l habia, oues caégories confondues, le aux moyen pondéré es passé de 4,24 % en décembre 2003 à 3,87 % en décembre 2004, pour finir par s éablir en mai 2005 à 3,75 %. Cela éan, on ne peu exclure un comporemen d offre plus resricif à l avenir, du fai noammen de la déérioraion de Bullein de la Banque de rance N 140 Aoû 2005 47

ANNEXE 1 Consrucion de séries longues sur le crédi à l habia e les aux débieurs immobiliers depuis décembre 1970 La consrucion d une série longue de aux de croissance annuel sur le crédi à l habia des ménages a nécessié divers calculs, dans la mesure où il n exise pas de série venilée par agens avan 1978 : pour les données anérieures à 1978, l encours de crédis à l habia aux ménages a éé reconsiué à parir de séries longues de crédis invesisseurs ; pour les données comprises enre mars 1978 e mars 1994, les aux de croissance on éé calculés selon la formule du glissemen annuel sandard à parir d une série de crédis à l habia rimesrielle ; après mars 1994, des données de flux de crédi éan disponibles en plus des données d encours, les aux de croissance annuels on éé calculés selon la méhode d indices chaînés appliquée par la BCE pour l ensemble de ses saisiques monéaires e financières à parir d une série mensuelle rimesrialisée. S agissan de la série de aux d inérê réel immobilier, il s agi du raccordemen : pour les données anérieures à avril 1991, d une série de la BRI de aux minimal de crédi immobilier aux ménages ; pour les données enre avril 1991 e décembre 2002, d une série réropolée par la Banque de rance ; pour les données posérieures à décembre 2002, de la série issue de la collece européenne harmonisée des saisiques de aux d inérê. Dans la mesure où c es le aux minimum qui es reenu ici, il s agi du aux moyen des conras nouveaux à aux variable. 48 Bullein de la Banque de rance N 140 Aoû 2005

ANNEXE 2 Consrucion d un déflaeur des crédis nouveaux à l habia Ce indice repose sur différenes données héérogènes e des hypohèses simples, ce qui le rend quelque peu fragile. Ce faisan, il n a pas éé possible de rouver d aures sources suffisammen longues pour le logemen ancien (ainsi, la série calculée par l INSEE pour les prix de l immobilier ne remone qu en 1994). Ce indice repose donc sur les données suivanes : l indice des prix du logemen neuf sur l ensemble de la rance es l indice du coû à la consrucion (ICC) publié rimesriellemen par l INSEE depuis 1953. Il es éabli en collaboraion avec le minisère de l Équipemen e des Transpors, du Logemen e de la Mer. En compabilié naionale, l ICC es uilisé comme déflaeur de la producion des logemens neufs. Il consiue l indice de référence pour la révision des loyers d habiaion, en veru des lois n 89-462 du 6 juille 1989 e n 94-624 du 21 juille 1998. Enfin, il ser de déflaeur à la BC logemen ; l indice des prix du logemen ancien a éé consrui à parir de sources diverses rassemblées e reravaillées (indice des prix du logemen ancien de l INSEE, données de la NAIM). L indice composie calculé à parir de ces deux séries s appuie sur les données d opéraions nouvelles issues d une collece de la Banque de rance. Elles monren que, au cours de cee période, la par des nouveaux crédis à l habia affecée à l acha de logemens anciens e celle dédiée à l acquisiion de logemens neufs on considérablemen varié : pour résumer, le poids du neuf, prépondéran en débu de période, es devenu minoriaire en fin de période comme le monre le ableau ci-dessous. L indice a éé consrui en reprenan, année après année, les poids respecifs du neuf e de l ancien dans les crédis nouveaux à l habia. Ces proporions ne concernen, par définiion, que les opéraions d acha de logemens adossées à un endeemen. On peu cependan considérer ce indicaeur synhéique non seulemen comme un déflaeur des crédis nouveaux (pour l acquisiion de biens immobiliers neufs e anciens), mais aussi comme une mesure approximaive des prix de l immobilier (neuf e ancien confondus). Ceci implique de faire l hypohèse que le comporemen d endeemen des ménages es idenique pour les achas de logemens neufs e anciens. Année 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 Raio crédis affecés au neuf/crédis affecés à l ancien 1,9 1,9 1,8 1,5 1,2 1,0 0,9 0,8 0,7 0,6 0,6 0,5 0,5 0,5 0,4 0,5 0,5 0,5 0,5 0,4 0,5 0,4 0,5 Bullein de la Banque de rance N 140 Aoû 2005 49

Il es donc calculé comme sui : Indicaeur synhéique = (indicaeurs du prix des logemens anciens + poids du neuf/poids de l ancien x ICC)/(1 + poids du neuf/poids de l ancien), l indice éan en base 100 pour le quarième rimesre 1981. Évoluion de l indice synhéique depuis le débu des années quare-ving Au cours de cee période, l indice synhéique a enregisré d amples flucuaions. Il rerace noammen la période de la bulle immobilière de la fin des années quare-ving e rend compe du ryhme élevé de progression des prix depuis la fin de la décennie quare-ving-dix. Prix de l immobilier : neuf e ancien (indice synhéique) (en %) 20 15 10 5 0-5 - 10 81 83 99 85 87 89 91 93 95 97 Taux de croissance annuel nominal Taux de croissance annuel déflaé de l IPC Source : INSEE chambre des noaires, réropolaion Banque de rance 01 03 50 Bullein de la Banque de rance N 140 Aoû 2005

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