Au fil de l eau. La Seine sur scène. De Sartrouville à Maisons il suffit de passer le pont

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1 Au fil de l eau La Seine sur scène S ans remonter à la nuit des temps, on peut imaginer les Gaulois circulant sur la Seine dans des radeaux ou des barques à proues relevées. Puis, vinrent les Romains faisant commerce de vins et de céréales ou encore les invasions dont furent témoins les rives du fleuve : Rollon dirigeant quelques vikings sur 700 drakkars en 855, détruisant et pillant sur son passage les villages avoisinants et le monastère d Argenteuil. De Sartrouville à Maisons il suffit de passer le pont P endant des siècles le seul moyen de se rendre de Sartrouville à Maisons fut le bac. La traversée entre les deux rives se fait alors par barques individuelles ou collectives maniées par un passeur. Dès 1656, on trouve trace d une demande au roi de construire sur la Seine des ponts à péage reliant Paris à Maisons (par Sartrouville) et Poissy. Seul celui de Poissy est autorisé. Pour Maisons, une longue route rectiligne traversant Sartrouville est tracée au frais du Trésor Royal dans l axe du château, sans doute à l initiative de Mansart. Jusqu à la construction du pont que nous connaissons aujourd hui, les jardins du château se prolongeaient par une prairie en pente douce jusqu aux berges de Seine. Notre avenue Maurice-Berteaux est donc le prolongement de la perspective du château. Piétons, carrosses, calèches, carrioles venant de Paris et désirant se rendre à Maisons devaient emprunter cette route puis prendre un chemin qui suivait approximativement le tracé de la rue Hortense-Foubert (ancien chemin n 63 de Maisons à Houilles) pour enfin arriver au bac puis à Maisons. Les problèmes de liaison entre Maisons-Laffitte et Sartrouville et au delà avec Paris sont mentionnés plus tard, en 1789, dans les Cahiers de Doléances. Les Mansonniens réclament la construction d un pont «pour l exportation des denrées et l importation des engrais tirés de Paris» Le bac rue Léon-Fontaine vers 1940

2 La «petite» histoire Peut-être devons-nous la construction du pont reliant Sartrouville à Maisons à un rendez- vous qui aurait pu tourner au drame L Empereur se rendait, paraît-il fréquemment chez la Duchesse de Montebello soit par la forêt de Saint-Germain-en-Laye soit par le bac de Sartrouville. Or, lors d une de ces visites, il voulut sauter du bac sur la rive mais tomba dans l eau et eût été emporté par le courant sans l aide d un jardinier qui assistait à la scène. Napoléon aurait déclaré à la Duchesse «je ne reviendrai vous voir que lorsque un pont remplacera le bac». Le lendemain, la construction d un pont était engagée. L anecdote, quoique n étant pas attestée, reste une jolie histoire. Il semble que la construction du pont de Sartrouville soit la suite logique de celle du pont de Bezons en La construction aurait été ordonnée en 1810 par une lettre du comte de Molé sur instruction de l Empereur : «un pont en charpente avec piles et culées en pierre». Pourtant, ce n est qu en mai 1811 que le projet définitif fut validé par Napoléon et en juillet que les travaux commencèrent. Des travaux de remblaiement furent nécessaires pour mettre la route de Bezons (avenue Maurice-Berteaux) au niveau de la première arche (c est pourquoi les maisons du XIX ème comme celle de l Octroi - aujourd hui détruite - ou du Dispensaire semblent être construites dans un trou). Les travaux - interrompus en 1815 par la guerre alors qu un général prussien vient installer son armée de hommes sur les bords de Seine - s achevèrent pour certains en 1817 et pour d autres en Les habitants de Sartrouville et de Maisons furent exemptés de la taxe d octroi du pont. Le premier pont en chiffres : 186 mètres de long 5 arches de 28 mètres d ouverture dont les naissances sont placées au niveau des grandes eaux de 1740, les plus hautes connues 8 mètres de largeur y compris 2 trottoirs d 1 mètre chacun les culées ont une épaisseur de mètres y compris une arche de halage de 4 mètres pour une dépense totale de Francs. Victime de son succès - il y passe prés de 450 colliers (attelages) par 24 heures - l ancien pont est remplacé en 1855 par un «pont construit d une manière très Le pont de chemin de fer en En arrière plan : l ancien pont en démolition élégante, ( ) l un des plus beaux du département». Ce pont est détruit le 9 septembre 1870 afin de stopper l avancée des Prussiens sur ordre du Gouvernement. Sacrifice inutile puisque le pont de chemin de fer est resté intact! En 1872, un troisième pont est construit qui finira lui aussi dynamité le 13 juin C est en 1952, que notre pont définitif, le quatrième, fut ouvert à la circulation. Son appellation «Pont de la 2 ème D.B» fut votée par le conseil municipal du 12 mars 1980 (à noter que le Général Leclerc n est jamais passé par là!). Ce 4 ème pont est très différent de ses prédécesseurs : Droit et sans arches 4 piles posées sur les fondations existantes Tablier métallique de 150 mètres enrobé de béton mètres de longueur 9 mètres de largeur Les 27 et 28 mai 1944, plusieurs vagues de bombardiers américains B-26, type «marauder» furent nécessaires pour endommager le pont, faisant au passage 250 morts et prés de 1000 blessés sous les ruines de plus de 500 maisons et immeubles. Après réparations à grands renforts de prisonniers, les Allemands étaient sur le point d y rétablir la circulation ferroviaire lorsque le 24 juin 1944, le bombardement des alliés le détruisit totalement. Le pont fut reconstruit tout de suite après la libération. Depuis, il a subit de nombreuses modifications et consolidations dont les plus importantes sont l électrification de la ligne en 1966 puis l interconnexion RATP/SNCF en Un long fleuve tranquille? pas sûr! Encore un pont! mais ferré celui-là! Le pont entre Sartrouville et Maisons Laffi te,1908 Le premier pont de chemin de fer fut édifié en Anglais, Irlandais et Français travaillèrent à la construction de cet ouvrage à charpente de bois, remplacée par une charpente en fonte en Il échappa à la destruction en En 1895, le trafic s intensifiant, il fut doublé avant d être détruit d un nouveau pont 20 mètres en amont, avec arcs en maçonnerie. (voir photo ci-dessus) Son doublon fut à son tour détruit en L armée française le fit sauter afin de stopper l armée allemande qui le reconstruisit. Les inondations de janvier 1910 Le lit de la Seine n a pas toujours été tel que nous le connaissons aujourd hui. Il était plus large et de nombreuses îles séparaient

3 le courant en de nombreux bras. Les crues étaient fréquentes. Celle de 1648 est la plus ancienne répertoriée mais c est celle de 1910 qui reste gravée dans les mémoires sans doute à cause des photographies qui nous sont parvenues. Par la suite, l aménagement d une partie des rives, limita les dommages sans toutefois maitriser totalement ce fl e uve qui prouva une fois de plus en 2001, qu il demeurait capricieux. Le débit de notre fleuve est à présent partiellement maîtrisé grâce aux barrages à écluses et bassins de retenue. À contre-courant De nos jours les péniches motorisées et les «pousseurs» naviguent indifféremment vers l amont ou vers l aval mais auparavant, les bateaux qui venaient de Rouen devaient recourir au halage à l aide de chevaux ou de bœufs. En remontant de Conflans (Confl a ns-fin-d Oise) à Montesson, les bateaux faisaient halte à Sartrouville pour changer d attelage à la ferme à l angle de la place de la Fête et du quai : la ferme des «trois sans femme». La ferme des «trois sans femme», relai de chevaux Le halage sur les bords de la Seine disparaît peu à peu et cède la place à la traction mécanique (1856) et à la mise en place d un service de touage (halage mécanique). Pourtant, nous gardons encore le souvenir de notre chemin de halage : Au premier plan : le pont routier et les attelages qui le traversent Après le halage mécanique, viendra le tour des remorqueurs (jusqu en 1965) puis celui des pousseurs et des péniches motorisées. Des bateaux à aubes sur la Seine Avant l apparition du chemin de fer, les voyageurs entre Paris et Rouen disposaient d un moyen assez pittoresque qui perdura une cinquantaine d années : un service régulier de bateaux vapeur à aubes. À partir de 1838, les voyageurs prenaient le train à la gare d Orsay puis le bateau au Pecq. Dès que le chemin de fer de Paris à Saint-Germain-en- Laye fut mis en service, les voyageurs partaient de la gare Saint-Lazare à 7 heures et 35 minutes plus tard, prenaient le bateau au Pecq. Après un premier arrêt à Maisons-Laffitte, au lieu dit «le Petit Havre» et 18 autres arrêts, ils débarquaient à Rouen entre 18 heures et 19 heures. Les cendres de Napoléon furent rapatriées pendant l hiver 1840 jusqu à Rouen via Cherbourg et Le Havre, sur le voilier «la Belle Poule», puis, transbordées sur «la Dorade». Malgré un froid mordant, ce voyage posthume attira les foules qui vinrent rendre un dernier hommage à l Empereur tout le long du fleuve. Après des haltes à Mantes, Poissy puis Maisons- Laffitte, «la Dorade» atteignit Courbevoie. L inhumation eut lieu aux Invalides le 15 décembre Décidemment pas si tranquille! Circulation incessante, activités annexes en tout genre le fleuve était un intense lieu de vie. Il faut imaginer les bateliers se hélant ou chantant, les chevaux hennissant, les bruits des canards, mouettes, goélands ou poules d eau et autres animaux vivant du fl e uve mais aussi les villageois s activant sur les berges! Il y a là le bateau rose de Mme Jeannot et le bateau Blondeau où les femmes coiffées de grands chapeaux de paille arrivent poussant des brouettes débordant de linge. Les lavandières s agenouillent côte à côte sur une planche en bois et savonnent, frappent, rincent et essorent le linge à l aide de cuveaux, tinettes et battoirs dans un joyeux tintamarre de commérages, de rires, de cris, de chansons sans se soucier des voiliers qui régatent à quelques mètres d elles ou de canotiers qui jouent des biceps, rames en mains *. * Extrait des chroniques de «L histoire selon P tit Louis»- Sartrouville, le Journal, n 57, juin À partir de 1820, la réalisation de l écluse de la Monnaie de Paris et en 1840, les barrages à écluse d Andrésy, de Bougival ou encore de Suresnes (1867), en permettant de régulariser l eau du fleuve, transforment la Seine. Les pâturages vers 1900 Un bateau lavoir La navigation de plaisance peut enfin se développer et devient le plaisir populaire par excellence. Maupassant et ses amis en firent leur activité favorite lors d étés passés à Sartrouville. On peut imaginer les guinguettes ou encore les régates sur le fleuve mais aussi les baptêmes de bateaux qui donnaient lieu à de grandes fêtes populaires! Au début du 20 ème siècle, les berges en pente douce accueillent des pâturages (en bas des rues Jean-Nicolle et Henri-Dunant). Bêtes à poils et à plumes peuvent s ébattre en toute quiétude, uniquement perturbées par les coltineurs qui déchargent le charbon des péniches. Plus tard, les usines C.A.M.S puis Thomson s installeront sur un lieu-dit «les pâtures», là où les bestiaux, jadis venaient paître. En 1924, afin de mener à bien les essais de ses hydravions, la CAMS (Chantiers Aéro Maritime de la Seine) choisit le plan d eau de Sartrouville. La réalisation la plus prestigieuse, mais aussi la dernière réalisée avant la seconde guerre, fut le Potez CAMS 161, propulsé par six moteurs Hispano-Suiza de 920 cv. pouvant atteindre 350 km/h, destiné à la traversée régulière de l Atlantique nord. Pendant la seconde guerre mondiale, l usine est réquisitionnée par l occupant. Le groupe CAMS, puis CNCAN deviendra, en 1958, Nord Aviation puis fusionnera avec Sud Aviation en 1970 pour devenir l Aérospatiale.

4 C est aussi sur les berges de la Seine qu une plage est aménagée, quai du Pecq, entre la rue Jean-Nicolle et la rue de la Ferme (aujourd hui Henri-Dunant), grâce à l opiniâtreté d un petit groupe de sartrouvillois mené par M. Bazin qui, en 1932, crée une société de natation : les «Tritons». La plage, longue de 70 mètres, disposait de cabines, d un plongeoir et aussi d un maitre nageur! Cette véritable «station balnéaire» disparaît sous les bombardements le 27 mai Près de la place de la Fête, sont installés les chantiers navals : le chantier Bastard, et le chantier Blondeau. Le chantier naval Deschamps & Blondeau La plage Les «Tritons» en 1942 Charpentier de métier, Antoine Blondeau construit dans un premier temps un bateau lavoir qu il amarre quai du Pecq. Puis, en 1872, un premier hangar est édifié à l angle de la rue Bordin et du chemin de halage. Les premières yoles et les premières barques de pêche sortent du chantier Blondeau. Les berges s animent alors de pécheurs et de canotiers qui viennent gouter les plaisirs du fleuve puis se divertir non loin du chantier dans le petit café-restaurant dirigé par Antoine Blondeau. L engouement pour la voiture automobile ralentit la croissance du chantier jusqu à ce que Antoine Blondeau se lance dans la construction de canots à moteur puis celle de vedettes rapides. En 1905, il s associe aux Etablissements Deschamps puis, en 1920, à Paul Jouët pour créer le «chantier naval de Sartrouville» qui devient l un des plus importants des années 30. Il occupe alors une superficie de m² et emploie plus d une centaine de personnes. En 1927, le chantier adopte l appellation «Jouët et C ie». Le point d orgue de cette entreprise est la construction en 1931 du cotre norvégien, de «l Alain Gerbault» mesurant plus de 10 mètres de long. En 1933, le «Sadi», bolide pouvant aller jusqu à 110 km/ h, est lancé Vous pouvez imaginer l impression que les essais ont du faire sur la Seine! Des bateaux tous plus prestigieux les uns que les autres vont sortir des chantiers Jouët jusqu à la vente en Dix ans plus tard, en 1975 est inauguré le foyerlogement de la Croix-Rouge «résidence Stéphanie» sur le site de l ancien chantier naval. On peut pourtant, avec nostalgie, s imaginer au début du siècle dernier, au milieu des charpentes de coques en construction, au milieu des senteurs de bois, de vernis et de goudron, assistant à un spectacle fabuleux : la mise à l eau d un bateau! Les villageois se regroupent tous pour l occasion et, les yeux rivés sur le canot automobile rutilant qui descend doucement sur le fleuve, assistent au spectacle. Pour la circonstance, la passerelle disparue au début des années 60 qui permet la traversée du chemin de halage, a été relevée. Dès que l esquif touche l eau on applaudit puis, une fois la mise à l eau achevée, tout le monde se rend au café- restaurant Blondeau, petite guinguette, pour fêter l événement. Baptême d un yacht de croisière,15 janvier 1925 La digue aujourd hui : l objet d une attention permanente Les travaux de la digue ont été entrepris il y a un peu plus de quarante ans lorsque la ville de Sartrouville a décidé de dompter les caprices de la Seine. À la suite des crues de 2001, le Syndicat Intercommunal de la Vallée de la Seine (le SIVS) et la commune ont décidé conjointement de procéder à une réfection approfondie de l ensemble de l ouvrage. Le projet qui a été conçu prévoit un aménagement des digues en plusieurs tranches jusqu en Ces phases successives, tout en préservant l éco système, et en privilégiant le développement de la faune et de la flore, permettent de mettre en place une protection moderne. La cloison étanche en palplanches intégrée et invisible permet, sur plus de 2 kms, la stabilisation de la digue. C est désormais une promenade agréable où la végétation a repris ses droits et d où l on peut à nouveau profiter de la beauté des paysages qui n avait pas échappé aux impressionnistes. Les berges de la Seine, témoins de notre passé rural et industriel sont rendues aux promeneurs et à des activités variées telles que la pêche, le canoë, la voile ou encore le fameux Triathlon de Sartrouville. La maison «Coppin & Blondeau» Texte réalisé à partir de l article de Françoise Denais, présidente de l AHSE, publié dans la Gazette Historique.

5 NE PAS JETER SUR LA VOIE PUBLIQUE - SERVICE ARCHIVES MUNICIPALES - SEPTEMBRE 2007 R. Guy de Maupassant du Pecq Rue de la Constituante R.Buffon Av. A. Foulon R. Henri Dunant Quai Quai de Seine des Lilas de Seine Av. Embarcadère : face mairie La-Frette-sur-Seine R te R. de la Frette Quai de Seine Départ : mairie de Sartrouville