THÈSE DE DOCTORAT par. Sofia Maria GORONDY NOVAK

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1 Université Pierre et Marie Curie Ecole doctorale : Chimie physique et chimie analytique de Paris Centre Service de Recherches de Métallurgie Physique, CEA Saclay Chimie ParisTech Spécialité : Sciences des Matériaux THÈSE DE DOCTORAT par Sofia Maria GORONDY NOVAK Etude du comportement de l hélium dans les structures cubiques centrées pour les nouvelles générations de réacteurs nucléaires : approche expérimentale dans le cadre de matériaux modèles MEMBRES du JURY : Philippe BARBOUX Professeur, UPMC Président Marie-France BARTHE Directrice de recherche, CNRS Orléans Rapporteur Thierry ANGOT Professeur, Université d Aix Marseille Rapporteur Jean-Philippe COUZINIE Maitre de conférences, IUT-UPEC Examinateur Philippe VERMAUT Maitre de conférences, Chimie ParisTech Examinateur Frédéric PRIMA Professeur, Chimie ParisTech Directeur de thèse Hélène LEFAIX-JEULAND Ingénieur-chercheur, CEA Saclay Encadrante de thèse Aurélien DEBELLE Maitre de conférences, Université Paris Sud Invité 1

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3 RÉSUME La présence de l hélium induite par le fonctionnement des futurs réacteurs à neutrons rapides et à fusion dans les matériaux de cœur peut entrainer une dégradation de leurs propriétés mécaniques (durcissement, gonflement, fragilisation). Pour poursuivre le développement des alliages de structure, il est nécessaire d acquérir une meilleure compréhension de l interaction entre l He et les structures métalliques donc le point en commun est de comporter comme métal de base un élément de cristallographie cubique centrée (CC), notamment le fer et le vanadium. L implantation ionique d ions 4 He a été utilisée pour simuler les effets d endommagement liés à l insertion d He, la création des défauts ponctuels (lacunes, interstitiels) et la formation des amas hélium-lacunes dans les futurs réacteurs. L évolution du comportement de l He dans le fer et le vanadium purs a été mise en évidence tant du point de vue de la nature des sites de piégeage que du point de vue des mécanismes de migration de l He et de germination et croissance de bulles associés, en s'appuyant sur un couplage original de techniques. Les résultats obtenus mettent en avant une différence de comportement entre les deux métaux CC, bien que certains mécanismes impliqués soient similaires. Les défauts microstructuraux, notamment les joints de grains, et la concentration d He implantée (fluence) joueront des rôles clés sur le comportement de l He à haute température. Les données expérimentales acquises couplées avec des méthodes de simulation serviront de point de départ pour développer une approche cinétique et thermodynamique du comportement de l He dans les éléments constitutifs des alliages d intérêt nucléaire. 3

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5 SOMMAIRE INTRODUCTION GÉNÉRALE... 9 I. ÉTUDE BIBLOGRAPHIQUE I.1. CONTEXTE DE L ÉTUDE : DÉVELOPPEMENT DES NOVEAUX MATÉRIAUX POUR LES FUTURS RÉACTEURS NUCLÉAIRES I.1.A. Fonctionnement des réacteurs nucléaires à neutrons rapides et de fusion thermonucléaire I.1.B. La problématique Hélium dans les nouvelles générations de réacteurs I.1.C. Choix des matériaux de structures au cœur des futurs réacteurs I.2. ÉTAT DE L ART : COMPORTEMENT DE L HÉLIUM DANS LES MÉTAUX CC I.2.A. Solubilité et diffusion d hélium dans la matrice métallique I.2.B. Formation des amas d hélium-lacunes HenVm I.2.C. Evolution des bulles d hélium I.2.C.a. Germination des bulles I.2.C.a.i. Influence de la température sur le mécanisme de germination I.2.C.a.ii. Localisation de la germination : germination homogène et germination hétérogène I.2.C.b. Croissance des bulles I.2.C.b.i. Migration-Coalescence I.2.C.b.ii. Murissement d Oswald I.3. ÉTUDES MENÉES SUR LE COMPORTEMENT DE L HÉLIUM I.3.A. Etudes menées sur la nature des amas HenVm (TDS) I.3.B. Etudes menées sur la diffusion de l hélium (IBA et SIMS) I.3.C. Etudes menées sur l évolution des bulles d hélium (MET et EELS) I.4. SYNTHÈSE DE L ÉTUDE BIBLOGRAPHIQUE II. MATÉRIAUX ET MÉTHODES EXPÉRIMENTALES II.1. NATURE DU MATÉRIAU D ÉTUDE ET PRÉPARATION DES ÉCHANTILLONS.. 63 II.2. CONDITIONS EXPÉRIMENTALES II.2.A. Implantation ionique des échantillons II.2.B. Traitement thermique post-implantation II.3. MÉTHODES EXPÉRIMENTALES

6 II.3.A. Méthodes de caractérisation microstructurale II.3.A.a. Microscopie électronique à balayage (MEB) II.3.A.b. Diffraction des rayons X (DRX) II.3.B. Méthodes d analyse des interactions He-matériaux II.3.B.a. Spectrométrie de désorption thermique (TDS) II.3.B.b. Spectrométrie de masse d ions secondaires (SIMS) II.3.B.c. L analyse ERDA ions lourds couplée avec la RBS II.3.B.d. Microscopie électronique en transmission (MET) II.3.B.d.i. Contrastes de bulles II.3.B.d.ii. Mesures d épaisseur III. RÉSULTATS ET DISCUSSION PRÉAMBULE III.1. PARTIE 1 : ÉTUDE DU COMPORTEMENT DE L HÉLIUM À BASSE FLUENCE DANS LE VANADIUM ET LE FER POLYCRISTALLINS III.1.A. Caractérisation des polycristaux implantés (étape a) III.1.A.a. Caractérisation microstructurale après implantation III.1.A.b. Profils d hélium dans les échantillons implantés III.1.A.c. Distribution des bulles d hélium dans les échantillons implantés III.1.B. Comportement de l hélium au cours du traitement thermique in-situ (étape b) III.1.B.a. Etude de la désorption d hélium au cours du traitement thermique in-situ III.1.B.b. Caractérisation microstructurale post-tds III.1.C. Comportement de l hélium après traitement thermique ex-situ (étape c) III.1.C.a. Caractérisation microstructurale après traitement thermique ex-situ..107 III.1.C.b. Diffusion de l hélium dans la matrice métallique III.1.C.c. Evolution des bulles d hélium après recuit ex-situ III.1.D. Discussion sur l étude du comportement de l hélium à basse fluence dans le fer et le vanadium polycristallins III.2. PARTIE 2 : MISE EN EVIDENCE DU RÔLE DE JOINTS DE GRAINS SUR LE COMPORTEMENT DE L HÉLIUM À BASSE FLUENCE DANS LE VANADIUM ET LE FER PURS

7 III.2.A. Caractérisation des monocristaux implantés (étape a) III.2.A.a. Caractérisation microstructurale après implantation III.2.A.b. Profils d hélium dans les échantillons implantés III.2.A.c. Distribution des bulles d hélium dans les échantillons implantés III.2.B. Rôle des joints de grains sur le comportement de l hélium au cours du traitement thermique in-situ (étape b) III.2.B.a. Etude de la désorption d hélium au cours du traitement thermique in-situ III.2.B.b. Caractérisation microstructurale post-tds III.2.C. Rôle des joints de grains sur le comportement de l hélium après traitement thermique ex-situ (étape c) III.2.C.a. Caractérisation microstructurale des monocristaux après traitement thermique ex-situ III.2.C.b. Effet de la microstructure sur la diffusion de l hélium dans la matrice métallique III.2.C.c. Effet de la microstructure sur l évolution des bulles après recuit ex-situ..160 III.2.D. Discussion sur le rôle des joints de grains dans le comportement de l hélium dans le fer et le vanadium pur III.3. PARTIE 3 : ÉTUDE DU COMPORTEMENT DE L HÉLIUM À HAUTE FLUENCE DANS LE VANADIUM ET LE FER POLYCRISTALLINS III.3.A. Caractérisation des polycristaux implantés (étape a) III.3.A.a. Caractérisation microstructurale après implantation III.3.A.b. Profils d hélium dans les échantillons implantés III.3.A.c. Distribution des bulles d hélium dans les échantillons implantés III.3.B. Effet de la fluence sur le comportement de l hélium au cours du traitement thermique in-situ (étape b) III.3.B.a. Etude de la désorption d hélium au cours du traitement thermique in-situ 191 III.3.B.b. Caractérisation microstructurale post-tds III.3.C. Effet de la fluence sur le comportement de l hélium après traitement thermique ex-situ (étape c) III.3.C.a. Caractérisation microstructurale après traitement thermique ex-situ..201 III.3.C.b. Diffusion de l hélium dans la matrice métallique

8 III.3.C.c. Evolution des bulles d hélium dans les échantillons post-recuits III.3.D. Discussion sur l effet de la fluence dans le comportement de l hélium dans le fer et le vanadium polycristallins CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES RÉFÉRENCES

9 INTRODUCTION GÉNÉRALE La demande énergétique mondiale exige une production d électricité toujours plus importante, avec trois contraintes majeures : des sources d énergie decarbonées, un coût modéré pour les consommateurs et des ressources recyclables. De ce fait, de nouveaux systèmes nucléaires ont été développés afin de répondre à ces attentes. Parmi eux, on peut mentionner les réacteurs à neutrons rapides (RNR) permettant de mieux gérer les ressources d uranium en optimisant le rendement de la production électrique fondée sur la fission nucléaire. D autre part, les réacteurs à fusion thermonucléaire s avèrent être une option encore plus intéressante à long terme, puisque les combustibles nucléaires nécessaires sont présents en quantités quasiinépuisables dans la nature. La mise en œuvre de ces nouvelles générations de réacteurs nucléaires nécessite le développement de nouveaux matériaux ayant une capacité accrue de résistance aux conditions extrêmes, notamment à l intense flux neutronique (énergies entre 2 et 14 MeV), couplées avec des températures comprises entre 500 C et 800 C. Parmi les différentes possibilités envisagées, les alliages métalliques de structure cubique centrée (CC) (aciers inoxydables ferrito-martensitiques, alliages de vanadium) sont considérés comme de bons candidats du fait de leur bonne résistance face aux dommages neutroniques [Chen, 2004 ; Smith, 1998, 2000 ; Yvon, 2009 ; Zinkle, 2000, 2004]. Cependant, leur utilisation à hautes températures reste limitée du fait des fortes interactions de l hélium produit à la suite des réactions de fission et fusion (entre 1 et 10 appm He/dpa), avec leur microstructure, notamment avec les défauts lacunaires créés au cours de l'irradiation. Il a ainsi été démontré que l accumulation de ce gaz, insoluble, favorise la formation de bulles susceptibles d induire un durcissement, une fragilisation ou encore un gonflement de ces matériaux au cours du fonctionnement des réacteurs [Dai, 2012 ; Dobmann, 2008 ; Lucas, 1984 ; Ullmaier, 1983, 1984], ce qui met en jeu la durabilité de ces matériaux sur de longues périodes d utilisation. Si quelques études ont été menées sur l'influence de l hélium sur les propriétés mécaniques à l'échelle macroscopique [Dai, 2012 ; Dobmann, 2008 ; Smith, 1995 ; Straalsund, 1982], peu de travaux détaillent les processus de migration et de précipitation de ce gaz dans les alliages. Ainsi, plusieurs études expérimentales et théoriques ont décrit le comportement de l hélium à l échelle atomique dans deux métaux CC, le vanadium et le fer : partant de l étude des petits amas de He nv m (V pour lacunes) jusqu à la caractérisation de grosses bulles d hélium. Des études théoriques ab initio [Fu, 2005 ; Willaime, 2006 ; Zhang, 2011] ont permis le calcul des énergies de formation et de migration de l hélium et des défauts ponctuels (lacunes, autointerstitiels). Ces valeurs permettent de décrire les premières étapes donnant lieu à la formation de précurseurs de bulles d hélium. Des analyses de Spectroscopie de Désorption Thermique (TDS) ont permis de définir la nature des sites de piégeage et les énergies d activation des amas associés en fonction de la température [Cao, 2011 ; Federov, 1996a ; 1996b ; Lefaix-Jeuland, 2013a ; Morishita, 2003a ; Nita, 2007 ; Sugano, 2002 ; van Veen, 1994 ; Xu, 2009]. De plus, certaines de ces études ont mis en évidence l effet de la microstructure (dislocations, joints de grains) dans la dissociation des amas au cours du traitement thermique [Cao, 2011 ; Lefaix-Jeuland, 2013 ; Sugano, 2002 ; Xu, 2009]. La microscopie électronique en transmission (MET) a permis de compléter ces données par la caractérisation des bulles (morphologie, densité, taille) dans différents métaux purs ou alliés, dont le fer et le vanadium. Par ailleurs, des études de cinétique par recuit in-situ MET avec des calculs de dynamique 9

10 d amas sur le fer pur implanté [Moll, 2013], ont mis en évidence différents régimes de croissance des bulles en fonction de la température. Dans toutes les études mentionnées ci-dessous, les expériences et calculs théoriques ont mis en avant le rôle des conditions d implantation, que ce soit l énergie, la température ou la dose et de la microstructure dans la migration de l hélium et la formation des amas et bulles d hélium. Pourtant de nombreuses questions sur la façon dont les matériaux seront capables de retenir les gaz de fission tout en conservant leur intégrité mécanique et physique restent mal comprises : Quelle est la concentration d hélium qui favorise la formation et la stabilisation de cavités associées au processus de gonflement dans un alliage particulaire? Quelles sont les tailles et les densités de bulles qu il faut attendre pour induire la fragilisation inter-granulaire à cause de l accumulation de l hélium? Dans quelles conditions les déformations induites par les bulles vont favoriser l apparition de cloques et/ou de porosités compromettant la tenue en surface des matériaux utilisés dans les réacteurs de fusion? Quels sont les mécanismes impliqués dans ces phénomènes, à quelle vitesse se dérouleront?... L abordage de toutes ces questions par l expérimentation en conditions réelles exige des délais considérables ainsi que des conditions qui n existeront parfois que dans des prototypes en construction ou en projet. Ainsi, pour avancer dans développement de nouveaux matériaux pour constituer les futurs cœurs de réacteurs nucléaires et apporter des réponses plus précises aux ingénieurs en charge des choix stratégiques et de la conception des futurs réacteurs, il apparait ainsi indispensable de développer des modèles capables de prédire au mieux la complexité des matériaux réels ou encore la combinaison des diverses sollicitations. Le cas des réacteurs actuellement utilisés (Générations II et III), dont on cherche à augmenter la durée de vie à 60 voire 80 ans (contre un dimensionnement initialement fixé à 40 ans), est un bon exemple pour mettre en avant la complexité du sujet de ce type de méthodologie : Comment reproduire l ensemble des conditions par de "simples" calculs ou de "simples" expériences? Comment s assurer que le résultat prédit par la simulation numérique et expérimentale est représentatif de la réalité? Pour atteindre ces objectifs, il est absolument nécessaire d acquérir un maximum de données expérimentales, dans des conditions les plus variées et ce pour créer des bases de données dans lesquelles les théoriciens pourront venir puiser afin de valider leurs modèles à différentes échelles (de l ab-initio à la dynamique d amas) en comparant calculs et expériences. De nombreuses conditions ont été analysées par le passé, essentiellement dans le fer et ses alliages, matériaux modèles des systèmes nucléaires. Cependant, peu de données existent sur d autres métaux, tel que le vanadium. De plus, peu de travaux expérimentaux ont comparé de façon précise le comportement de l hélium entre métaux d une même structure, implantés dans des conditions similaires. La thèse ici présentée a donc pour objectif de fournir des données expérimentales dans le cas de deux métaux purs, le fer et le vanadium. Ces données devront être par la suite corrélées avec des modèles théoriques (dynamique des amas) pour d une part améliorer la compréhension des mécanismes thermodynamiques et cinétiques et d autre part permettre le développement de modèles prédictifs fiables. La méthodologie consiste à implémenter une approche qui couple plusieurs techniques expérimentales complémentaires et ce afin de décrire différents aspects de l interaction de l hélium avec les défauts microstructuraux initiaux ou de son évolution au cours de traitements thermiques. Pour favoriser par la suite le couplage entre la théorie et la simulation, et apporter des éléments d intérêt pour le développement des 10

11 matériaux de cœur, deux paramètres ont ainsi été choisis au cours de ce travail : la dose (ou fluence) et la microstructure initiale des matériaux. Ce manuscrit se décompose en trois chapitres : Le premier chapitre est dédié à la bibliographie du sujet de thèse. Il rassemble les données essentielles à la bonne compréhension des travaux réalisés au cours de la thèse. D abord, nous introduirons brièvement le contexte, notamment la problématique de l hélium et le développement de nouveaux matériaux pour les futurs réacteurs nucléaires. Ensuite, nous décrirons l état de l art de notre étude, en rappelant les considérations théoriques sur le comportement de l hélium à l échelle atomique dans les métaux CC d étude et en présentant un résumé des études précédemment obtenues sur le sujet de recherche. Le deuxième chapitre présente les matériaux d étude, les conditions expérimentales et les outils expérimentaux utilisés au cours de nos travaux. D abord, le protocole de préparation ainsi que les caractéristiques des échantillons étudiés y sont rassemblés. Ensuite, les conditions d implantation et de traitements thermiques y sont décrites. Finalement, les équipements employés pour la caractérisation microstructurale et l analyse des interactions d He-matériaux et les méthodologies associées sont présentées. Le troisième chapitre décrit les résultats obtenus et propose une discussion reposant sur notre démarche scientifique. Ces éléments seront exposés dans trois parties distinctes : - Dans la première partie, l étude porte sur le comportement de l He à basse fluence d implantation (10 16 He/cm 2 ) dans les matrices polycristallines Fe et V. L objectif est de mettre en évidence les mécanismes impliqués dans le piégeage de l hélium, la migration de l hélium, la germination et la croissance de bulles dans les deux métaux CC. Pour cela, des échantillons de V et Fe polycristallins ont été implantés à température ambiante et avec des ions 4 He + à une profondeur d implantation constante de 200 nm. Ensuite, la distribution de la concentration et des bulles d hélium dans l état initial implanté a été caractérisée par SIMS et MET. La diffusion de l hélium a ensuite été favorisée par traitement thermique, et suivie d une part par une analyse de thermodésorption et d autre part via des recuits ex-situ sur les échantillons implantés en hélium. L hélium désorbé a été analysé par TDS et l évolution de la concentration et des bulles d hélium par SIMS et MET. - La deuxième partie, se propose d identifier le rôle des joints de grains sur le comportement de l hélium à basse fluence (10 16 He/cm 2 ). Pour cela, nous avons implanté des échantillons monocristallins en utilisant les mêmes conditions d implantation que dans les échantillons polycristallins précédents. La même méthodologie que celle développée au chapitre précédent et le même jeu de paramètres expérimentaux d implantation ont été utilisés dans cette partie du travail dans le but d obtenir des données comparables à celles de la 1 ère partie de ce chapitre. - Dans la troisième partie, nous avons élargi notre analyse expérimentale afin d étudier le comportement de l hélium d autres doses ou fluences, supérieures à 11

12 celle du premier partie (2,5x10 16 et 5x10 16 He/cm 2.). L objectif de cette partie est de mettre en évidence l effet de la fluence sur les interactions He-V et He-Fe, en comparant les résultats obtenus avec le comportement de l hélium dans les échantillons implantés à plus basse fluence. Enfin une conclusion générale permet de dresser une synthèse des principaux résultats obtenus et de dessiner les principales perspectives pour la suite de ce travail de thèse. 12

13 Premier Chapitre I. ÉTUDE BIBLOGRAPHIQUE 13

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15 I. ÉTUDE BIBLIOGRAPHIQUE La première partie de ce chapitre vise à décrire le contexte général de l étude. Nous commencerons par présenter brièvement les systèmes nucléaires envisagés dans les prochaines décennies et les enjeux concernant la conception de tels réacteurs nucléaires, particulièrement la problématique de l accumulation de l hélium sur l endommagement des propriétés mécaniques dans les matériaux de structure. Nous présenterons alors le choix des matériaux de structures de ces futurs réacteurs, en appuyant sur le cas des structures de cristallographie cubique centrée (CC). Dans la deuxième partie de ce chapitre, nous nous focaliserons sur le cœur de cette étude, i.e. l hélium dans les matériaux nucléaires. Nous introduirons les considérations théoriques sur le comportement de cet élément à l échelle atomique dans les métaux CC. Puis, nous présenterons un résumé des études traitant de la physico-chimie relative à l accumulation de l hélium. I.1. CONTEXTE DE L ÉTUDE : DÉVELOPPEMENT DES NOVEAUX MATÉRIAUX POUR LES FUTURS RÉACTEURS NUCLÉAIRES La demande énergétique mondiale exige une production d électricité toujours plus importante, avec trois contraintes majeures : une source d énergie decarbonée, un coût modéré pour les consommateurs et des ressources recyclables. Face à cette problématique, l industrie nucléaire a un véritable défi à relever. Du point de vue de sa production, elle se retrouve face à une situation complexe : d une part, le nucléaire est en plein développement dans les états émergents (Inde, Chine), d autre part les états européens qui font face au vieillissement de leur parc de réacteurs doivent réfléchir au renouvellement des moyens de production électrique. Du point de vue de son acceptation par le grand public et les politiques, l industrie nucléaire doit savoir rassurer et répondre aux exigences environnementales de plus en plus drastiques. De ce fait, de nouveaux systèmes énergétiques ont été développés. Parmi eux, on peut mentionner d une part les réacteurs à neutrons rapides qui permettent de mieux gérer les ressources d uranium et plutonium en optimisant le rendement de la production électrique fondée sur la fission nucléaire. D autre part, les réacteurs à fusion thermonucléaire s avèreraient être une option encore plus intéressante à long terme, puisque les combustibles nucléaires nécessaires (isotopes de l hydrogène) sont présents en quantités quasi-inépuisables dans la nature. Cependant ces nouveaux concepts de réacteurs nucléaires, dont le rendement serait amélioré, mettent également en jeu des conditions de fonctionnement plus drastique que les "classiques" réacteurs nucléaires de générations II et III actuellement en fonctionnement. L énergie et le flux des neutrons ou encore la température sont par exemple plus élevées au cœur de ces nouveaux systèmes. Les matériaux se retrouvent donc soumis à des conditions extrêmes et doivent répondre à de nouvelles exigences. Leur tenue, au cours du temps, détermine la durée de fonctionnement des réacteurs et conditionne leur sûreté et leurs performances. Pour toutes ces raisons, la recherche menée sur les matériaux envisagés pour les futurs cœurs de réacteurs nucléaires est devenue très importante. I.1.A. Fonctionnement des réacteurs nucléaires à neutrons rapides et de fusion thermonucléaire Parmi les réacteurs de 4 ème génération, les réacteurs à neutrons rapides (RNR) sont tous basés sur une technologie qui implique des neutrons ayant une énergie de l ordre 2 MeV (neutrons 15

16 rapides), à l opposé des réacteurs actuellement en service de générations II et III dans lesquels les neutrons issus de la réaction de fission sont ralentis par un modérateur (le plus souvent l eau) pour atteindre des énergies de l ordre de 0,0025 ev (neutrons thermiques). Ainsi, la caractéristique des RNR est qu ils ne comprennent pas de modérateur et que les neutrons issus de la réaction nucléaire sont directement utilisés (Fig. I.1). Initialement, les réacteurs à neutrons rapides ont été conçus pour utiliser le plutonium ( 239 Pu fissile) comme combustible nucléaire, ce qui est un grand avantage par rapport aux réacteurs à eau actuels, à neutrons thermiques, qui ne peuvent pas recycler cette matière fissile en raison de sa dégradation isotopique. D autre part, les réacteurs à neutrons rapides permettent d utiliser l uranium naturel ( 238 U fertile) comme source de plutonium, ce qui est un autre avantage par rapport aux réacteurs actuels qui nécessitent un enrichissement préalable du combustible ( 235 U fissile). Les RNR sont ainsi des surgénérateurs. Ils présentent également l avantage de pouvoir incinérer des déchets de forte activité à vie longue (actinides), ce qui répond aux problématiques environnementales actuelles relatives au retraitement des déchets nucléaires [Clef CEA1]. Fig. I.1- Schéma du principe des filières de réacteurs à neutrons thermiques (RNT) et à neutrons rapides (RNR). Le fluide caloporteur présent au cœur du réacteur peut être un métal liquide, tel le sodium (RNR-Na ou SFR en anglais pour sodium-cooled fast reactor) ou un gaz (RNR-G ou GFR en anglais pour gas-cooled fast reactor) (Fig. I.2). Parmi les différentes configurations envisagées, le prototype le plus avancé en France est le réacteur à sodium liquide déjà expérimenté dans le cas du réacteur expérimental Phénix (250 MWe), du réacteur à visée industrielle, Superphénix (1200 MWe), et envisagé pour le démonstrateur technologique ASTRID dont la mise en service était initialement prévue pour 2025 (600 MWe). Dans le cas du RNR-gaz, le futur prototype européen est ALLEGRO (100 MWe). 16

17 Fig. I.2- Schéma du fonctionnement de réacteurs RNR-Na (à gauche) et RNR-G (à droite) de type intégré [Clef CEA 2]. Dans le RNR-Na (Fig. I.2), le sodium primaire réinjecté dans le cœur par une pompe, est chauffé de 400 C à 550 C par la réaction de fission nucléaire. Cette température est supérieure à celle de l eau primaire dans les réacteurs à eau sous pression (REP) qui est autour de 300 C. La chaleur du circuit primaire est échangée avec le circuit sodium secondaire qui permet, dans le générateur de vapeur, de produire de la vapeur d eau par un nouvel échange de chaleur avec l eau liquide. La vapeur fait ensuite tourner la turbine, qui produit l électricité de la même manière que dans les réacteurs conventionnels. Dans le cas du RNR-G, le fluide caloporteur primaire est l hélium. Celui-ci est chauffé par la réaction de fission (~850 C) et permet ensuite de faire tourner la turbine directement, avant d être refroidi et réinjecté dans le cœur [Renault, 2007]. Les réacteurs de fusion thermonucléaire ont été conçus pour utiliser la réaction thermonucléaire comme source d énergie alternative à celle proposée par les réactions de fission. La réaction thermonucléaire consiste à faire fusionner un noyau de deutérium avec un noyau de tritium (Fig. I.3). Cette réaction se déroule dans un plasma confiné par un champ magnétique ou inertiel, et donne naissance à un noyau d hélium stable et à un neutron en libérant une quantité colossale d énergie de l ordre de 17,6 MeV (14,1 et 3,5 MeV respectivement pour chaque neutron et 4 He produit). Fig. I.3- Schéma de la réaction de fusion thermonucléaire entre le deutérium et le tritium. Les déchets potentiels de ce processus sont uniquement liés à l activation de la structure du réacteur. La fusion thermonucléaire présente en outre un avantage majeur en matière de nonprolifération et constitue un atout en termes de disponibilité des matières premières (le deutérium est abondant dans les océans et le tritium peut être synthétisé). 17

18 Par contre, la réaction de fusion thermonucléaire nécessite le franchissement d une barrière énergétique gigantesque (de l ordre 10 kev à une température de 10 8 K). Plusieurs méthodes de fonctionnement sont envisagées pour confiner le milieu de réaction et ainsi favoriser la fusion des deux noyaux. La figure I.4 présente le schéma de la chambre Tokamak du réacteur ITER. Le dessin adopte une section méridienne en forme de D et intègre trois éléments majeurs : un solénoïde supraconducteur, un divertor, un dispositif de récupération de l énergie et une couverture. Fig. I.4- Chambre Tokamak du réacteur ITER [Bobin, 2011]. Le mélange combustible deutérium-tritium est injecté dans la chambre où, grâce au système de confinement et de chauffage, il passe à l état de plasma et brûle de façon continue. Le plasma produit de l hélium et de l énergie sous forme de rayonnement ou de particules chargées, qui abandonnent leur énergie dans la première paroi, premier élément matériel rencontré au-delà du plasma. L énergie qui apparaît sous forme d énergie cinétique des neutrons est, quant à elle, convertie en chaleur dans la couverture, élément situé après la première paroi, à l intérieur de la chambre à vide. Cette chambre est le composant qui ferme l espace où a lieu la réaction de fusion. Première paroi, couverture et chambre à vide sont refroidies par un système d extraction de la chaleur. Cette chaleur est utilisée pour produire de la vapeur et alimenter un ensemble turbine et alternateur qui génère finalement l électricité. La couverture remplit plusieurs fonctions. Son premier rôle consiste à récupérer l énergie que les neutrons abandonnent en échauffant les matériaux. Un fluide de refroidissement circule dans la structure et évacue la chaleur produite vers les équipements classiques que sont le générateur de vapeur, la turbine et l alternateur. Son deuxième rôle est de régénérer le tritium nécessaire à la réaction de fusion. Enfin, la couverture a un rôle protecteur. Elle doit mettre les bobines supraconductrices, les éléments de structure, les dispositifs de mesure et de contrôle à l abri des émissions de toute nature, neutrons, particules, rayonnements électromagnétiques émanant de l anneau de plasma [Bobin, 2011]. Dans les réacteurs à neutrons rapides et réacteurs de fusion, les matériaux de structure seront soumis à des conditions extrêmes, notamment, une intense irradiation par les neutrons d énergie élevée (respectivement 2 et 14 MeV), couplés avec un fort flux de 18

19 chaleur dans un milieu corrosif comme des métaux liquides, de l eau ou de l hélium [Yvon, 2009 ; Zinkle, 2009, 2013]. Concernant le niveau d endommagement induit par irradiation, les principales différences entre les réacteurs de fission et fusion apparaissent dans l énergie et le flux des neutrons incidents. Les neutrons issus de la réaction de fission ont une énergie de l ordre de 1 à 2 MeV, tandis que ceux provenant de la réaction de fusion ont une énergie autour de 14,1 MeV. Cette importante différence génère un niveau d endommagement 1,5 à 4 fois supérieur dans le cas des réacteurs de fusion par rapport à ceux de fission (Fig. I.5.a). En plus de l important flux neutronique précédemment mentionné, les matériaux de structure du cœur des réacteurs sont également soumis à la présence d une grande quantité d He produite à la suite des réactions de fission et fusion nucléaires. Ce gaz apparait selon les voies suivantes : - Dans les réacteurs de fission, les neutrons peuvent induire dans les matériaux de cœur, des réactions de transmutation nucléaire (réaction (n,α)) d un atome en un autre sous l effet d un neutron incident avec la formation d une particule α ( 4 He). - Dans les réacteurs de fusion, en plus de la réaction de transmutation (n,α) déjà mentionnée dans le cas précédent et de la réaction de désintégration β du tritium qui ont lieu au sein des matériaux, l hélium est produit directement par la réaction de fusion deutérium-tritium (Fig. I.3) et peut s implanter dans la structure de la paroi primaire. Le taux de génération d hélium dans les réacteurs de fusion est plus grand (10 appm He/dpa) par rapport au cas des réacteurs de fission RNR (<1 appm He/dpa). Une comparaison des conditions d irradiation, de température et génération d He dans les diverses systèmes nucléaires peut être observée dans la figure I.5.b. (a) (b) Fig. I.5- (a) Conditions de température de fonctionnement en fonction du niveau d endommagement (dpa) pour les différents types de réacteurs de Génération IV (VHTR: very/high temperature reactor, SCWR: supercritical water reactor, GFR: gas cooled fast reactor, LFR: lead-alloy cooled fast reactor, SFR: sodium cooled fast reactor, MSR: molten salt reactor), les réacteurs de fusion (ITER, Fusion reactor) et les réacteurs de fission actuels (Gen. II) [Yvon, 2009] (b) Comparaison de la production d hélium et du niveau d endommagement (dpa) dans les réacteurs de fusion avec autres systèmes nucléaires [Zinkle, 2004]. 19

20 I.1.B. La problématique Hélium dans les nouvelles générations de réacteurs Il a été fait mention dans le paragraphe précédent de la présence d He dans les matériaux du cœur du réacteur, élément produit de façon directe ou indirecte par la réaction nucléaire. Ces atomes d hélium sont extrêmement peu solubles dans les matériaux métalliques. Ils sont par ailleurs extrêmement mobiles en position interstitielle, même à température ambiante. Par conséquent, ils diffusent facilement dans la matrice métallique jusqu à être piégés par des défauts immobiles comme les lacunes, dislocations, joint de grains, impuretés, etc. Dans les réacteurs de fusion et fission, fonctionnant à des températures élevées (400 C<T<850 C), le piégeage des atomes d He est facilité quand les lacunes deviennent disponibles soit parce qu elles sont produites par dommage d irradiation, soit parce que leur concentration augmente lorsque la température augmente (génération thermique). Cependant, même en absence de dommage ou de tout autre type de défauts préexistants, sous certaines conditions, les atomes d hélium peuvent s agglomérer entre eux en créant des paires de lacunes et interstitiels (paires de Frenkel). Les pièges sont dits "insaturables" car ils continuent d accepter des atomes d hélium par réarrangements successifs des atomes d hélium et des défauts dans les amas existants, pouvant ensuite évoluer en bulles d hélium. Une fois que l amas s approche d une taille critique, un mécanisme de grossissement peut se mettre en place avec ou sans injection d hélium par acquisition de lacunes. Tous ces mécanismes seront détaillés dans l état de l art sur le comportement de l hélium dans les métaux (voir l item I.2 de ce chapitre). La présence d hélium, élément insoluble dans la structure du cœur, pose un problème majeur sur la détérioration des propriétés mécaniques des matériaux métalliques : le durcissement, la déformation du matériau (gonflement), la fragilisation induite par l accumulation d hélium aux joints de grains, l apparition de cloques ou blisters en surface et la sensibilisation accrue au milieu chimique (corrosion sous contrainte assistée par l irradiation) [Dai, 2012 ; Dobmann, 2008 ; Lucas, 1984 ; Ullmaier, 1983, 1984]. Durcissement (<0,4 T F 1 et >0,1 dpa) A basses températures, la formation d hélium dans le matériau induit un durcissement complémentaire au durcissement classiquement observé au cours de l irradiation, i.e. lié aux boucles de dislocation formées dans les cascades. L hélium, au travers des structures qu il forme (amas, petites bulles) modifie le comportement plastique du matériau. [Lucas, 1984 ; Zinkle, 2004, 2009]. Gonflement du matériau (0,3-0,6 T F et >10 dpa) Le gonflement (en anglais swelling) est décrit par l augmentation du volume ΔV /V du métal sous irradiation. Il se traduit par une diminution de la densité, et donc par une augmentation des dimensions des éléments de structure (Fig. I.6.b) [Lucas, 1984]. Avec la fragilisation induite par l accumulation d hélium, le gonflement est considéré comme un des facteurs limitant la durée de vie des matériaux de structure des futurs réacteurs nucléaires. Le gonflement est accompagné d un durcissement, d une perte de ductilité et d une réduction de la ténacité du matériau irradié. Il peut donc conduire à la fissuration des enveloppes métalliques 1 T F : température de fusion du matériau considéré (en K). 20

21 au cœur du réacteur, entrainant un risque de mise en solution rapide de l absorbant dans le caloporteur. La figure I.6.a donne un exemple de gonflement en fonction du dommage d irradiation exprimé en déplacement par atome (dpa) d un acier austénitique 316 recristallisé et écroui [Garner, 1993]. Nous pouvons observer que ce phénomène n apparait qu à partir d une dose intégrée donnée ("phénomène à seuil") et qu il dépend de la température et de la microstructure de l alliage. La figure. I.6.b illustre les conséquences macroscopiques du gonflement dans un acier inoxydable austénitique irradié aux neutrons [Dai, 2012 ; Straalsund, 1982]. Fig. I.6- (a) Cinétique de gonflement (à 650 C) d un acier austénitique 316 en fonction du dommage d irradiation (dpa) et du degré d écrouissage : recristallisé (annealed), écroui 10% (10% CW) et écroui 30% (30% CW) (simulation par irradiation aux ions lourds : Cr +, 1 MeV) [Garner, 1993] (b) Illustration des conséquences macroscopiques du gonflement dans un acier inoxydable austénitique irradié aux neutrons [Dai, 2012 ; Straalsund, 1982]. Une classe d aciers prometteurs vis-à-vis du gonflement rassemble les aciers essentiellement ferritiques, martensitiques et duplex [Little, 1979 ; Dai, 2012 ; Garner, 2000]. Les gonflements observés dans ces aciers restent inférieurs à 1% à plus de 150 dpa. De structure cubique centrée, le vanadium, allié au Cr et Ti, présente également un gonflement très limité sous irradiation, en particulier l alliage V-4Ti-4Cr, composition dont le gonflement sous irradiation est minimal (Fig. I.7) [Smith, 1995]. Fig. I.7- Changement de densité lié au gonflement sous irradiation en fonction du degré d endommagement exprimé en déplacement par atome (dpa) [Smith, 1995]. 21

22 Les mécanismes responsables de gonflement ont fait l objet de nombreuses études. Il apparait que le gonflement est associé au développement, au sein du matériau, de très nombreuses cavités de faible taille, inférieure à 0,1 µm. Ces cavités sont liées à l agglomération de lacunes induites par l irradiation. En effet, lors de l irradiation, les atomes interstitiels s éliminent préférentiellement sur les dislocations. Il peut alors en résulter un flux de lacunes importantes sur les petits amas lacunaires. Si ces derniers sont tridimensionnels, le gonflement devient effectif [Lemaignan, 2004 ; Lucas, 1984]. Plusieurs études ont montré que les conditions d injection de l hélium sont susceptibles d affecter de façon significative le gonflement du matériau sous irradiation [Dai, 2012]. L hélium favorise la formation de cavités en les stabilisants (germination) : leur densité y est donc plus élevée qu en absence d He (Fig. I.8). Si la germination des cavités est favorisée, leur croissance, à des teneurs d hélium élevées, est ensuite limitée ce qui finalement induit un gonflement plus faible. Fig. I.8- Effet des conditions d implantation d hélium sur la formation et microstructure de cavités dans un acier inoxydable austénitique irradié en mode bi-faisceau jusqu à 70 dpa et 625 C, où le gonflement (a) n est pas observé sans présence d hélium (0 appm/dpa), (b) est plus grand à 0,2 appm/dpa (3,5%) et (c) est plus faible à 20 appm/dpa [Dai, 2012]. Dans la figure I.9, nous pouvons également observer l effet de différentes conditions d injection de 1400 appm He couplé avec l irradiation des ions Ni à une énergie de 4 MeV dans un acier inoxydable austénitique jusqu à 70 dpa à 625 C [Packan, 1979]. Dans ce cas, le gonflement est plus grand (18% relié aux cavités) sans implantation d hélium et plus petit avec préimplantation d hélium à température ambiante (1% relié aux petites bulles). Par ailleurs, ces résultats ont montré que les cavités peuvent se former à haut dommage d irradiation sans présence d hélium, probablement assisté par la présence d impuretés comme l oxygène ou l hydrogène. 22

23 Fig. I.9- Effet des conditions d implantation d hélium dans la microstructure de cavités d un acier inoxydable austénitique Fe-Ni-Cr irradié avec des ions 4 MeV Ni (70 dpa) et 625 C, où le gonflement est observé : (a) sans implantation d He (18%), (b) avec coimplantation de 1400 appm He (11%), (c) avec pre-injection à 627 C de 1400 appm He (4%), (d) avec pre-injection à 20 C de 1400 appm He (1%) [Packan, 1979]. Fragilisation induite par l accumulation d hélium aux joints de grains (>O,5 TF et >10 dpa) La présence d hélium peut diminuer, dans certains cas de manière catastrophique, la ductilité des métaux. Aucune contrainte mécanique directe n est appliquée aux matériaux de structures pendant leur fonctionnement. Cependant il est nécessaire de prévoir des valeurs de limite mécanique élevées pour anticiper les situations d arrêt ou accidentelles. A titre d illustration, la figure I.10 montre les courbes de fluage obtenues pour l acier inoxydable AISI 316 sans irradiation et avec pré-irradiation d hélium [Lucas, 1984]. La réduction des valeurs de déformation et de temps de rupture pour les échantillons pré-irradiés analysés est attribuée à la fragilisation induite par l accumulation d hélium à haute température (en anglais "high temperature helium embrittlement"). Au cours de l irradiation neutronique, des paires d interstitiels et de lacunes sont créées par les cascades de déplacement de plusieurs dpa, simultanément une grande quantité d hélium est injectée. A haut dommage d irradiation et à haute température, les amas hélium-lacunes mobiles s agglomèrent en formant des bulles, préférentiellement dans les joints de grain, tandis que les atomes interstitiels restant après recombinaison sont piégés par les dislocations. La présence de bulles d hélium affaiblit les joints de grains et provoque une fracture intergranulaire pour des élongations plus petites et temps plus courts que dans l acier sans irradiation. 23

24 Fig. I.10- Courbes de fluage (à T=760 C et σ=69 MPa) des échantillons d acier inoxydable 316 sans irradiation ("un-irradiated") et pré-irradiés avec d ions hélium ("preirradiated") 14 dpa et 8,9 appm He à 717 C et 4,5 dpa et 3 appm He à 712 C [Lucas, 1984]. L apparition de cloques et/ou éclatements en surface A hautes doses d irradiation, des nouveaux défauts étendus se développent au voisinage de la surface bombardée : des cloques circulaires apparaissent en dessous d une dose d irradiation critique variant entre He/cm 2 dépendant de l énergie et de la température d irradiation [Das, 1973 ; Kalleta, 1976 ; Lucas, 1984] (Fig. I.11). La raison pour laquelle ces cloques se forment est un problème d intérêt pour la technologie de la fusion : sous irradiation continue, les cloques vont s écailler, en contribuant à l érosion des parois et, dans les réacteurs magnétiques de fusion, à la contamination du plasma. Dans des cas extrêmes, la surface peut même devenir une structure spongieuse. Fig. I.11- Présence de cloques et écaillage de la surface observés dans des échantillons de V, V-3Ti et V-20Ti implantés à 210 kev He + avec une dose de 8x10 17 He/cm 2 et à 700 C [Kalleta, 1976]. I.1.C. Choix des matériaux de structures au cœur des futurs réacteurs Au regard des conditions de fonctionnement sévères, les matériaux de structure des réacteurs de génération IV et fusion doivent satisfaire de nombreuses exigences : une stabilité dimensionnelle sous irradiation (fluage, gonflement), une transparence aux neutrons rapides, une bonne conductivité thermique, une conservation des propriétés thermomécaniques (ductilité, ténacité, résilience, résistance au fluage thermique et à la traction) et une compatibilité chimique avec l environnement [Bobin, 2011 ; Murty, 2008 ; Yvon, 2009 ; Zinkle, 2009]. 24

25 D autres critères s avèrent également importants comme la faisabilité et le coût de fabrication, ou encore la faible activation des matériaux de structures reliée aux exigences de sécurité et environnementales. Actuellement, il existe de nombreuses gammes de matériaux de structure, allant des alliages de zirconium pour le gainage de combustible des réacteurs de Génération II et III, aux aciers austénitiques pour les structures internes des réacteurs. En raison des nouvelles exigences, décrites précédemment, ces matériaux ne sont pas appropriés pour les systèmes nucléaires du futur. Ainsi, les aciers austénitiques (type 316) avaient d abord été envisagés pour les réacteurs à neutrons rapides de première génération, en raison notamment de leurs bonnes propriétés de fluage à haute température et de leur bonne résistance à la corrosion. Cependant, ces aciers, contenant une structure cubique à faces centrées (CFC), présentent au-delà de 50 dpa un gonflement excessif. Des aciers austénitiques 15/15Ti optimisés ont été proposés comme solution de référence pour les gaines des réacteurs RNR. Les études se sont donc tournées vers les aciers inoxydables ferrito-martensitiques (aciers F/M) qui présentent, par leur structure CC, une très bonne résistance au gonflement pour des doses allant jusqu à 150 dpa (aciers de type HT-9, T-91, NF12) (Fig. I.12). Les aciers F/M sont particulièrement étudiés pour les gaines RNR-Na, comme matériau de cuve de RNR-G et de structure de réacteurs de fusion [Bobin, 2011 ; Yvon, 2009 ; Zinkle, 2004]. Ils ont aussi été largement développés avec l apparition de nuances à activation réduite (RAFM en anglais Reduced Activation Ferritic Martensitic). Cependant, ces matériaux possèdent des propriétés mécaniques à haute température nettement moins bonnes que celles des matériaux austénitiques. Ils sont limités du fait d une faible résistance au fluage thermique pour des utilisations à des températures inférieures à 650 C. C est dans ce contexte qu ont été développés les aciers F/M renforcés par dispersion d oxydes nanométriques, plus communément appelés aciers ODS pour Oxide Dispersion Strenghened en anglais. Ces nano-oxydes, particulièrement stables en température, serviraient d obstacles au mouvement des dislocations, améliorant ainsi les propriétés mécaniques des aciers [Zinkle, 2013]. Fig. I.12- Mise en évidence de la meilleure résistance au gonflement des aciers ferritiques (conventionnels et avancés) à très forte dose d endommagement [Yvon, 2009]. 25

26 Dans les RNR-G, où la corrosion et l oxydation des alliages métalliques sont inévitables aux températures de fonctionnement (T~850 C), les matériaux céramiques sont envisagés [Yvon, 2009 ; Zinkle, 2004, 2013] pour les gaines de combustibles. Par ailleurs, des céramiques composites SiC/SiC ont été largement étudiées pour des applications dans les réacteurs de fusion, ainsi que d autres carbures (TiC, ZrC) et nitrures (TiN, ZrN, etc.). Parmi les limitations de l utilisation de ces matériaux composites dans les systèmes futurs, la dégradation associée au dommage neutronique est un des problèmes plus importants. Les métaux réfractaires et leurs alliages (V, W, Ta) sont reconnus comme des candidats prometteurs pour les systèmes nucléaires du futur, à la fois comme matériau de gainage pour le combustible des RNR que comme matériau de couverture de la chambre à vide dans les réacteurs à fusion. Les alliages de vanadium présentent également des propriétés intéressantes dans le contexte de ces nouveaux réacteurs : ils sont semi-réfractaires, transparents aux neutrons rapides et résistants sous irradiation. Ils sont reconnus pour leurs bonnes propriétés thermomécaniques, particulièrement l alliage V-4Ti-4Cr, ce qui en fait des matériaux attractifs pour les couvertures des réacteurs de fusion [Bloom, 1998 ; Chen, 2004 ; Smith, 1998, 2000]. Cet alliage possède aussi des propriétés mécaniques stables jusqu à 800 C, contrairement aux autres matériaux envisagés dans le cadre des réacteurs à fusion, comme les alliages base Cu, Mo, W ou les aciers F/M [Zinkle, 2000]. Néanmoins, la résistance thermique limitée à haute température (fluage et fragilisation par l'accumulation d'hélium) et la forte sensibilité aux impuretés (N, O, C) pendant le processus de fabrication, constituent leurs points faibles [Kurtz, 2004a ; Muroga, 2002]. Enfin dernier matériau particulièrement regardé pour les réacteurs de fusion : le tungstène et certains de ces composés (W-K, W-La 2O 3), et ce en raison de leurs propriétés intrinsèques telles qu un haut point de fusion, une grande conductivité thermique ou encore une résistance ç l érosion induite par les particules énergétiques. Ces matériaux sont essentiellement envisagés pour les cibles du divertor, composant essentiel du réacteur dont la fonction est d'éliminer les particules d'hélium, les impuretés et les cendres [Linke, 2006]. Cependant, le tungstène est particulièrement sensible du point de vue de sa tenue mécanique en présence d'hélium dans sa structure. Dans la liste des matériaux mentionnés ci-dessus, une très grande partie contient des alliages de structure du type cubique centrée (CC), comme les aciers F-M et les alliages de V. Dû à la complexité de l étude de ces matériaux métalliques sous sollicitations multiples, il est donc nécessaire d acquérir une meilleure compréhension des phénomènes d endommagement associés à la présence de l hélium, dans de matériaux-modèles de structure et de composition simple, notamment dans de métaux purs de cristallographie CC constitutifs des alliages envisagés. 26

27 I.2. ÉTAT DE L ART : COMPORTEMENT DE L HÉLIUM DANS LES MÉTAUX CC Les conséquences macroscopiques de la présence d hélium, issue d une transmutation ou de l implantation directe au sein d un matériau, ont précédemment été décrites. Ces phénomènes sont générés par l interaction de l hélium avec la structure du matériau métallique. Le devenir de l hélium dans les métaux CC est gouverné par différentes propriétés de transport telles que sa solubilité, sa diffusivité et des propriétés thermodynamiques et cinétiques qui régissent notamment son piégeage et ses interactions avec les autres défauts présents dans la matrice. Ainsi, il est important de savoir comment l hélium se positionne dans la maille cristalline pour pouvoir pleinement comprendre son processus de diffusion ou encore la façon dont il interagit avec les défauts. L état de l art sur ce point particulier permettra de donner les éléments bibliographiques essentiels à la compréhension et à l analyse des travaux réalisés au cours de la thèse. La première partie concerne les aspects théoriques du comportement de l hélium dans les métaux CC. Nous allons donc nous intéresser à la solubilité et la diffusion de l'hélium dans les métaux puis à la première phase de formation d amas He nv m 2. Après, nous introduirons les processus de nucléation, croissance et coalescence de bulles d'hélium. La seconde partie sera consacrée aux études menées sur le comportement de l hélium. Nous présenterons les approches expérimentales adoptées par les différentes équipes de recherche, variant largement en termes de gammes de températures explorées, de teneurs en hélium introduit, de compositions chimiques ou encore de microstructures du matériau. I.2.A. Solubilité et diffusion d hélium dans la matrice métallique Le comportement de l hélium dans les solides est gouverné par ses propriétés atomiques (solubilité et diffusion) et les propriétés énergétiques qui régissent le piégeage des atomes. La solubilité de l hélium est définie comme la concentration d hélium en équilibre C He eq dans le solide qui est en équilibre thermodynamiquement avec le gaz alentour à une pression P He eq et à une température T déterminées. Cette solubilité thermique est atteinte si le potentiel chimique de l atome d hélium dans le gaz µ g est égal à celui dans le métal µ M [Ullmaier, 1991]. Cette concentration d équilibre va dépendre du type de site dans lequel l atome de l hélium va s incorporer. Ces emplacements peuvent évoluer en fonction de la température, tant du point de vue de leur nature que de leur localisation. Dans les matériaux métalliques, la diffusion de l hélium est un processus complexe en raison de sa très faible solubilité (E S 3eV), mais aussi de sa capacité à interagir avec les défauts ponctuels (impuretés, lacunes et interstitiels) ou microstructuraux du matériau (joints de grain, dislocations). Plusieurs paramètres gouvernent la solubilité et la diffusivité dans les matériaux métalliques : l énergie de formation de l hélium interstitiel (E I S), l énergie d activation pour la migration d un hélium interstitiel (E I M), l énergie de formation de l hélium substitutionnel (E S F), l énergie de liaison He-lacune (E V B) et l énergie de dissociation d un hélium et d une lacune (E V D= E V B + E I M) (Fig. I.13). E S F prend en compte l énergie de formation d une lacune E V F. 2 He nv m : notation pour les amas de n atomes d hélium avec m lacunes V. Dans tout ce manuscrit, la lacune sera notée V pour ne pas confondre avec le symbole du vanadium V. 27

28 Fig. I.13- Paramètres énergétiques de l hélium dans un métal [Lucas, 1984]. La mesure expérimentale de la solubilité de l hélium reste assez compliquée en raison de la complexité des interactions de l hélium avec les défauts ponctuels dans les matériaux réels. Cependant, des méthodes théoriques de structure électronique ab initio permettent de décrire les paramètres énergétiques de l hélium dans un métal modèle à 0 K, à partir de la résolution des équations de la mécanique quantique. Parmi les méthodes ab initio, la théorie de la fonctionnelle de la densité (DFT) est une méthode appropriée à la modélisation des solides, de par la simplification drastique qu elle apporte aux équations de la mécanique quantique. D autres méthodes moins précises, notamment celles qui mettent en œuvre des potentiels empiriques (EP pour empirical potential), ont aussi été utilisées pour calculer les énergies de formation et migration de l hélium. Le tableau I.1 résume les énergies calculées par les méthodes ab initio dans le cas des matériaux CC considérés dans cette étude. La connaissance de ces valeurs permet d établir les conditions d équilibre entre l hélium dans l amas hélium-lacunes et les atomes d hélium dissous dans le métal. Fe V E S I (tetrah.) 5,34-4,39-4,38 3,14 E S I (octah.) 5,25-4,57-4,58 3,40 E S F 3,25-4,22-4,34 4,81 Tableau I.1- Energies associées à différentes configurations d un atome d hélium dans les matrices CC [Morishita, 2001a ; Fu, 2005 ; Willaime, 2006]. Les premiers calculs basés sur un modèle d EP dans le fer pur [Morishita, 2001a, 2003a] ont montré que l hélium aura une propension plus importante à s insérer en site substitutionnel qu en site interstitiel. La configuration octaédrique est plus stable que la position tétraédrique d un facteur de 0,1 ev. D autre part, CC. Fu et Willaime ont étudié la solubilité et migration de l hélium dans le fer pur par des calculs ab initio DFT-GGA avec le code SIESTA [Fu, 2005]. D après ces calculs, les configurations substitutionnel et interstitiel ont des stabilités similaires. Par contre, la configuration tétraédrique est plus stable que la position octaédrique d un facteur de 0,2 ev. Récemment, Willaime et al. [Willaime, 2006] ont montré par des calculs ab initio DFT-GGA avec le code d ondes planes PWSF qu un auto-interstitiel est en revanche un site stable pour un atome d hélium dans le vanadium. Le fer est un cas intermédiaire où les énergies de formation de l hélium interstitiel et de l hélium substitutionnel sont assez proches. La configuration tétraédrique est plus stable que la position octaédrique, quel que soit le métal. 28

29 Par ailleurs, l énergie de migration d un l hélium dans les métaux est très faible, i.e. de l ordre de 0,06 ev pour l hélium tétraédrique interstitiel dans le Fe et le V [Fu, 2005 ; Zhang, 2011], ce qui favorise le mécanisme de migration interstitielle à basse température, jusqu à ce que ces atomes d hélium soient piégé pour former un site stable. La cinétique de formation des amas hélium-lacunes va dépendre de la capacité de l'hélium à diffuser dans la matrice qui dépend à son tour des conditions d'implantation (énergie, température, taux d'hélium injecté, taux de création de défauts). L'hélium diffuse par des sauts aléatoires d'un site métastable du réseau à un autre. Trois mécanismes de diffusion hors irradiation ont été identifiés (Fig. I.14) [Trinkaus, 2003, Ullmaier, 1983, 1984, 1991]. a. La diffusion via les sites interstitiels: l'hélium diffuse par sauts aléatoires d'un site interstitiel du réseau à un autre. La forte énergie de liaison entre un atome d'hélium et un défaut (lacune, impureté, joint de grains, dislocation) rend ce mécanisme possible uniquement dans les zones exemptes de défauts. Il est appréciable même au-dessous de la température ambiante (T<0,5T F). b. La diffusion par lacunes : l'hélium interstitiel initialement piégé par une lacune peut sauter vers une lacune voisine. Ce type de mécanisme implique qu'un complexe hélium lacune (HeV) se retrouve à proximité d'une lacune libre V. Un complexe (HeV 2) va temporairement se former dans lequel l'atome d hélium est au centre des deux lacunes. Il se crée ainsi un site (HeV 2) métastable où l'he est en position interstitielle. Le mécanisme de diffusion par les lacunes est gouverné par la migration du complexe (HeV 2). Ce mécanisme est donc dominant lorsqu'on est en sursaturation de lacunes libres (T>0,5T F). c. La diffusion par dissociation d amas hélium-lacune puis par migration interstitielle : ce mécanisme de diffusion est généralement moins probable, l'énergie de dissociation d'un complexe HeV étant dans la majorité des cas supérieure à celle requise pour une liaison HeV. En effet la diffusion par dissociation s'opère quand la barrière énergétique de la dissociation de l amas (HeV) peut être franchie par activation thermique. L'atome d'hélium remis en solution selon la transformation HeV He +V, migre rapidement jusqu à être à nouveau piégé par une autre lacune et le processus se répète. Ce mécanisme est prédominant seulement lorsque la concentration en lacunes libres est relativement faible. Les mécanismes (b) et (c) sont coopératifs, c'est-à-dire que le mécanisme le plus rapide est le mécanisme dominant. Il convient d ajouter que les dislocations et les joints grains représentent généralement des court-circuits pour la diffusion de l hélium. Au cours de l irradiation, les défauts introduits (cascades de déplacements, lacunes, atomes auto-interstitiels) vont jouer un rôle important sur la diffusion de l hélium et d autres mécanismes vont alors pouvoir intervenir dans sa diffusion. [Trinkaus, 1983a, 2003]: d. Le déplacement athermal par collision d un atome d hélium : ce mécanisme est dominant quand les lacunes deviennent immobiles à T<0.2T F. e. La recombinaison (ou "kick out") d un auto-interstitiel et d une lacune avec l émission d un atome d hélium dans une position interstitielle. Ce mécanisme est dominant entre 0,2 T F et 0,5T F. 29

30 f. La diffusion d un hélium par voie lacunaire avec un saut d une lacune à une lacune voisine (formalisé de façon suivante : HeV + V HeV + V). L atome d hélium en substitution change de place avec ses voisins immédiats. Ce mécanisme est courant lorsque l hélium est implanté dans les métaux. En effet, lors de l implantation, de nombreuses paires de Frenkel sont créées. Ce mécanisme domine le processus de recombinaison à T~0,5T F. Les mécanismes (d) et (f) sont coopératifs, c'est-à-dire que le mécanisme le plus rapide est le mécanisme dominant. Les mécanismes qui contrôlent la diffusion de l hélium ont été identifiés expérimentalement par spectrométrie de thermodésorption uniquement à hautes températures et avec un dégât d irradiation négligeable. Ils ne sont valides que pour certains métaux. Fig. I.14- Mécanismes de diffusion de l hélium hors et avec irradiation à l intérieur du matériau métallique [Trinkaus, 2003]. I.2.B. Formation des amas d hélium-lacunes HenVm Comme les interactions entre atomes d hélium interstitiels sont attractives (faible solubilité de l élément dans la matrice métallique), les atomes d hélium se regroupent pour former des amas interstitiels He n (mécanisme par "auto-piégeage"). A partir d une certaine taille, ces amas expulsent des auto-interstitiels pour former des amas lacune-hélium. Ce mécanisme permet la relaxation de la pression de l amas et offre une possibilité pour la formation d amas He nv m et donc de bulles à basse température [Fu, 2005]. En présence de lacunes, l hélium initialement interstitiel sera piégé par la première lacune rencontrée. Une mono-lacune est capable, à température ambiante, de piéger entre 4 et 6 atomes d hélium avec des énergies de liaison supérieures à 2 ev [Lucas, 1984]. Au-delà de 6 à 10 atomes d hélium piégés par une seule lacune, l amas He nv va muter en un autre type d amas. L amas He nv peut ainsi être considéré comme un piège insaturable, capable de piéger de nouveaux atomes d He. C est ainsi que dans le processus de création de défauts par implantation et traitement thermique post-implantation, deux mécanismes en compétition entrent en jeu pour stabiliser ces amas He nv m (n>>m, surpressurisés en hélium): Croissance de l amas : émission d auto-interstitiel (He nv m He nv m+1 +SIA). Ce mécanisme peut prendre des formes diverses : au lieu d un auto-interstitiel (SIA en anglais Self Interstitial Atom), une boucle de dislocation d interstitiels peut être émise et ainsi stabiliser 30

31 considérablement l amas [Lucas, 1984]. Ces mécanismes concerneraient plutôt l étape de germination, la croissance étant assurée par une forme de mûrissement d Ostwald ou la coalescence des amas, ou encore des complexes bulle-boucle de dislocation [Trinkaus, 2003], mécanismes que nous décrirons plus loin dans ce chapitre. Diminution de la quantité d hélium : dissociation d He (He nv m He n-1v m+he). L atome d hélium interstitiel dissocié de l amas migre jusqu à être piégé dans un autre amas plus stable ou bien jusqu à se désorber. Ces deux mécanismes de stabilisation de l amas traduisent la compétition entre respectivement la croissance des amas (jusqu à former des bulles macroscopiques) et la désorption d hélium que le second mécanisme peut générer. La stabilité de ces amas est reliée au ratio n/m [Morishita, 2003a]. C est ainsi que les quantités d hélium et de lacunes initialement présentes impactent fortement le comportement d He dans le matériau et favorisent l un ou l autre des mécanismes. Le comportement diffère aussi selon les températures atteintes. Dans la figure I.15, nous pouvons observer des énergies de dissociation de la lacune, de l hélium et de l auto-interstitiel pour un amas He nv m en fonction du ratio n/m (n, m>0), issu des calculs ab-initio et potentiels empiriques dans le fer pur. L intersection entre la courbe de dissociation d hélium et la courbe de dissociation de lacunes donne le ratio théorique n/m et l énergie de dissociation des amas plus stables. Fig. I.15- Energies de dissociation de la lacune, de l hélium et de l auto-interstitiel (SIA) dans un amas He nv m (n,m>0) calculées par (a) des calculs ab initio [Fu, 2008] et (b) des potentiels empiriques [Morishita, 2003a]. D après les calculs ab initio [Fu, 2005, 2008], le ratio théorique est proche à 1,3 avec une énergie de dissociation de l ordre de 2,6 ev. Ces résultats sont différents de ceux obtenus plus tôt par Morishita et al. via l utilisation de potentiels empiriques [Morishita, 2003a] : le ratio théorique n/m de stabilité d un amas et l énergie de dissociation seraient tout deux supérieurs aux valeurs précédemment mentionnées, s élevant respectivement à ~1,8 et 3,6 ev. Ces différences entre les énergies de dissociation calculées par ab initio et par EP pourraient avoir un impact direct sur l interprétation des pics observés à certaines températures pendant les analyses de thermodésorption. Fu et al. [Fu, 2008] ont suggéré que les amas de basse pression (petits ratios n/m) auraient plutôt tendance à émettre des lacunes, et que les amas à forte pression (ratios n/m élevés) 31

32 préféreraient l émission d atomes d hélium plutôt que d auto-interstitiels. Cependant, Morishita et al. [Morishita, 2003a] ont avancé que l émission spontanée des amas d interstitiels, le "loop punching" était énergétiquement plus favorable dans le fer pur pour les ratios n/m élevés. Dans le vanadium, le seul calcul ab initio DFT-GGA recensé dans la littérature a donné un ratio théorique plus petit que celui obtenu dans le fer (n/m 0,9) et une énergie de dissociation de l ordre de 1,68 ev pour les amas plus stables (Fig. I.16) [Zhang, 2011]. Fig. I.16- Energies de dissociation d un amas He nv m pour un atome d hélium et pour une lacune en fonction du ratio n/m (n,m>0) dans le vanadium [Zhang, 2011]. A notre connaissance, seulement des études sur le tungstène ont été menées dans le cas des autres métaux CC afin de pouvoir comme pour fer et vanadium exprimer la stabilité des amas He nv m de façon théorique [Becquart, 2009]. I.2.C. Evolution des bulles d hélium Tout d abord, nous distinguerons bulles et cavités. Les cavités sont des amas purement lacunaires ou ayant une faible densité en hélium. Ces amas croissent essentiellement par absorption des lacunes en saturation. Les bulles sont des amas composés de lacunes et d un nombre significatif d atomes d hélium. Les bulles dont le rayon est supérieur au rayon critique de stabilité peuvent, par croissance, se transformer en cavités. Les conditions d implantation, déterminantes pour la précipitation de l hélium sous forme de bulle, sont l énergie, la fluence et la température d implantation. De l énergie va dépendre la profondeur d implantation dans la matrice métallique. Ce paramètre est clé dans la compétition entre la formation de bulles et la désorption de l hélium. Plus la profondeur d implantation est importante, plus la formation de bulles d hélium sera favorisée par rapport à sa désorption en surface. D autre part, il existe également une dose minimale d hélium nécessaire à l observation de bulles en fonction de l énergie d implantation, dose qu il est difficile de définir à l avance. En dessous de cette dose, aucune bulle n est visible par microscopie électronique en transmission après implantation, du fait de la résolution. Trinkaus et al. [Trinkaus, 2003] résume de manière simplifiée les différentes phases d évolution des bulles d hélium durant l implantation et le traitement thermique. Dans la figure I.17, nous pouvons observer une représentation graphique (en échelle logarithmique) de l évolution temporelle de la concentration en hélium, aux différents stades d évolution impliqués. 32

33 Fig. I.17- Représentation schématique de l évolution temporelle des grandeurs caractéristiques (c He la concentration d atomes d hélium en solution, n He,V la densité des amas ou des bulles d hélium, dn He,V/dt le taux de nucléation des bulles et r le rayon moyen de bulles durant l implantation/irradiation et le recuit). On y distingue principalement quatre étapes : l incubation, la nucléation, la croissance sous irradiation (growth) et la croissance sous recuit (coarsening) [Trinkaus, 2003]. Dans cette représentation, l évolution au cours du temps des différentes grandeurs dans lesquelles l He joue un rôle débute par l implantation d He dans la matrice (où les atomes seront dissous avec une concentration c He i). Le graphique de concentration c He correspondant à l évolution de la concentration en hélium dissous, tandis que le graphique n He,V à la densité d amas hélium- lacunes. Nous pouvons distinguer trois phases de formation des bulles sous implantation et une phase de croissance sous recuit. Pendant l implantation, il existe d abord une phase d incubation pendant laquelle la concentration d hélium dissous c He dans la matrice va augmenter jusqu à atteindre une limite de saturation en hélium. Ensuite, une phase de germination commence lorsqu on s approche de la saturation. Elle correspond à la génération de germes précurseurs pour la formation de bulles. Ces germes sont créés par la combinaison hélium/lacunes. Le taux de germination dn He,V/dt augmente jusqu à attendre la saturation des germes pour un temps t*. Enfin, pendant la croissance sous recuit, la densité de bulles n He,V, qui était en augmentation pendant l implantation, diminue et le rayon moyenne des bulles augmente. I.2.C.a. Germination des bulles I.2.C.a.i. Influence de la température sur le mécanisme de germination Si on considère la température à laquelle s observe la dissociation thermique de l hélium d un site de piégeage (température de dissociation d un atome d hélium d une mono-lacune 0,3 T F), il existe deux domaines en températures [Lucas, 1984 ; Trinkaus, 2003 ; Ullmaier, 1983, 1984, 1991]: 33

34 A basses températures (T 0,3T F) et taux de production d hélium élevé Si la concentration de lacunes est plus petite que la concentration d hélium et les dommages induit par implantation sont négligeables (implantation au-dessous de l énergie de seuil), les bulles se forment par un processus athermique. Un mécanisme par "autopiégeage" se met en route : deux atomes d hélium interstitiels peuvent se rencontrer et leur faible énergie de liaison peut ralentir suffisamment la diffusion pour qu un troisième atome interstitiel soit à son tour piégé. Au-delà d un certain nombre d atomes d hélium dans l amas, il se forme spontanément une paire de Frenkel. La lacune se retrouve ainsi occupée par les atomes d hélium et un atome métallique est éjecté en position auto-interstitielle selon la réaction He n-1v + He He nv +SIA. En augmentant la concentration d hélium, ces amas peuvent muter en un autre type d amas. Pour des amas plus grands, l éjection d amas d auto-interstitiels (ou "loop punching") devient plus favorable énergétiquement que l éjection d un seul atome auto-interstitiel. Il a été montré que les petits amas auto-interstitiels ont tendance à prendre des structures tridimensionnelles, tandis que les amas plus grands prennent des structures bi-dimensionnelles (plaquettes) qui évoluent en boucles de dislocations de taille croissante. L éjection de ces boucles de dislocations (Fig. I.18) a été prédite par des calculs théoriques depuis quelques années et confirmée par des études MET. Fig. I.18- Germination des bulles par éjection de boucles de dislocations ("loop punching") [Lucas, 1984]. La morphologie des bulles surpressurisées formées par ce processus athermique varie entre des plaquettes et des formes sphériques. A haute concentration d hélium, des configurations périodiques de bulles (réseau de bulles) sont observées. A hautes températures (T 0,2T F à l intérieur des grains et T 0,3T F dans les joints de grains) et taux de production d hélium faible A haute température où la concentration de lacunes thermiques devient plus importante, les bulles se forment par un processus thermique impliquant à la fois He et V. La germination des bulles est alors contrôlée par une barrière thermodynamique. Les germes des bulles de petite taille ne sont pas thermodynamiquement stables à hautes températures, du fait de la dissociation thermique. Leur stabilisation requiert qu ils atteignent une taille critique. Cette étape s effectue par absorption des atomes d hélium présents autour du germe afin de satisfaire l équilibre en termes de concentration en hélium. La concentration critique c* est la concentration d hélium dissous en équilibre thermodynamique avec des germes dont la taille est très légèrement supérieure à la taille critique. Lorsque la concentration 34

35 d équilibre d hélium dissous est proche de la concentration critique, le taux de germination devient important. La bulle croît par l apport d atomes d hélium. Cependant une fraction de l hélium reste en solution solide. I.2.C.a.ii. Localisation de la germination : germination homogène et germination hétérogène Il existe deux types de germination, la germination homogène qui est reliée à la formation de bulles à l intérieur des grains cristallins et la germination hétérogène qui a lieu aux joints de grain ou aux autres interfaces (dislocations, précipités). Le type de germination prédominant dépend, comme pour le mécanisme, de la température. Des observations par MET in-situ et post-irradiation ont mis en évidence que la germination des bulles se fait d abord au niveau des défauts microstructuraux (joint des grains, précipités et dislocations). Les défauts jouent un rôle important sur l état thermodynamique des germes des bulles. Ces éléments agissent comme centres de piégeage des atomes d hélium et influencent leur mobilité. A basse température, où la dissociation thermique des atomes d hélium depuis leurs pièges est négligeable, le mécanisme de germination dominant, homogène ou hétérogène, est déterminé par la relation entre la "force de puits" des germes créés par germination homogène et celle des défauts ponctuels déjà existants. Cette force dépend de la densité et taille de chacun de ces puits. A haute température, les germes ne sont thermodynamiquement pas stables du fait de la dissociation thermique. Ces germes deviendront stables que pour une taille critique qui correspond à un équilibre thermodynamique antre l absorption des atomes d hélium au voisinage de la bulle et la diffusion des atomes d hélium de la bulle vers l extérieur. Ce taux de germination ne devient plus important que lorsque la concentration d équilibre d hélium dissous est proche de la concentration critique c*. La présence d interfaces aux sites de germination (notamment de joints de grain) aura une influence dans l équilibre thermodynamique des germes de bulles (Fig. I.19). 35

36 Fig. I.19- Germination homogène vs. germination hétérogène : schémas de l effet d un joint de grain et d un précipité sur la forme et le rayon du germe de bulle (a) bulle sphérique dans la matrice, (b) bulle ellipsoïde sur un joint de grain, (c) bulle attachée à un précipité. Dans les figures : p est la pression interne de la bulle selon la relation de Laplace 3 et c* la concentration d hélium dissous dans la matrice en équilibre thermodynamique avec la bulle, qui varie dans le même sens que p [Trinkaus, 2003]. Les germes des bulles formés à une interface ont un rayon de courbure plus grand que les bulles sphériques formées par germination homogène. La pression dans une bulle sur un joint de grain va dépendre du rayon de courbure selon la relation de Laplace3. Cette pression est donc plus faible que celle dans une bulle de même volume située, elle, dans un grain. De plus, la germination des bulles aux joints de grains (germination hétérogène) induit un appauvrissement local en hélium dissous qui empêche la formation de bulles dans la zone du grain localisée près des joints. I.2.C.b. Croissance des bulles Lors des traitements thermiques post-implantation, les bulles déjà formées ont tendance à grossir en taille et diminuer en densité. Les principaux paramètres qui gouvernent cette phase de croissance sont la température et le temps de traitement thermique (tout en tenant compte des conditions initiales d implantation). La présence d hélium en forte concentration va limiter la recombinaison des lacunes et des interstitiels et favoriser le piégeage des lacunes dans des complexes He nv m, laissant ainsi les interstitiels diffuser vers la surface ou former des défauts microstructuraux. La croissance des bulles sous traitement thermique (hors irradiation) se fait sans injection supplémentaire d hélium, soit par des mécanismes de migration et coalescence, soit par le mécanisme de murissement d Ostwald (Fig. I.20). 3 La relation de Laplace exprime l équilibre entre la force liée à la pression interne p de la bulle et sa tension de surface : p = 2γ/r avec r rayon de la bulle et γ la tension de surface. Donc plus le rayon augmente, plus la pression diminue. 36

37 I.2.C.b.i. Migration-Coalescence Le centre de gravité de la bulle se déplace par diffusion des atomes métalliques d un côté à l autre de la bulle. Les atomes d hélium et les autres bulles situées sur la trajectoire de la bulle principale seront absorbés. Ce mécanisme n est possible que si la longueur de diffusion des bulles est supérieure à la distance qui les sépare. Le taux de coalescence dépend du coefficient de diffusion des bulles, qui, à son tour, dépend du rayon de la bulle et de sa pression interne [Trinkaus, 1989]. I.2.C.b.ii. Murissement d Oswald La théorie du murissement d Ostwald est fondée sur la relation de Gibbs-Thomson. Les plus grosses bulles croissent aux dépens des plus petites à cause du gradient de concentration entre bulles de différentes tailles. Au voisinage d une petite bulle à forte pression, la concentration en hélium dissous est plus importante qu au voisinage d une grosse bulle (le champ de contraintes est plus fort) et la diffusion le long du gradient de concentration va dans le sens d une expansion des plus grosses bulles. Fig. I.20- Illustrations des principaux mécanismes de croissance de bulles d hélium : (a) migration et coalescence par diffusion surfacique et (b) murissement d Ostwald induit par le gradient de concentration entre bulles de différentes tailles [Trinkaus 2003]. Schroeder et al. [Schroeder, 1991] ont montré que les mécanismes de croissance par migration et coalescence et par murissement d Oswald présentent des invariants qui permettent de les différencier (Fig. I.21). Dans le cas de la migration-coalescence, pour une température de recuit donnée, le rayon moyen des cavités ne change pas si le produit de la concentration d hélium implanté C He par le temps de recuit t a reste constant. Le mécanisme de migration coalescence conduit à une augmentation du rayon avec la concentration d hélium implanté C He. Dans les cas de croissance par murissement d Oswald, pour un temps et température de recuit donné, le rayon moyen des cavités ne dépend pas de C He. 37

38 Fig. I.21- Représentations des invariances du rayon moyen des cavités en fonction de la concentration d hélium implanté pour les différents de mécanismes de croissance ( MC : migration-coalescence et OR : murissement d Ostwald) (a) pour un valeur t a constante, si le rayon moyen des cavités reste indépendant de C He, la croissance est contrôlée par murissement d Oswald, (b) pour une valeur C He*t a constante, si le rayon moyen des cavités reste indépendant de C He, la croissance est contrôlée par migration-coalescence [Schroeder, 1991]. 38

39 I.3. ÉTUDES MENÉES SUR LE COMPORTEMENT DE L HÉLIUM Les procédures expérimentales appliquées dans l étude du comportement de l hélium à proximité de la surface des solides suivent généralement les étapes suivantes : une première étape d incorporation de l hélium dans la matrice, une deuxième étape de traitement thermique dans des conditions contrôlées et une troisième étape de mesure de l hélium. L incorporation de l hélium dans le matériau peut être effectuée par différences voies [Trocellier, 2014a ; Dai, 2012]. Une des techniques d incorporation de l hélium les plus utilisées dans les études expérimentales est l implantation directe d ions hélium ( 3 He ou 4 He) proches de la surface ou dans la matrice. L'avantage de cette implantation ionique réside dans sa polyvalence (température, énergie, dose). Elle permet de moduler la profondeur d'implantation, soit directement en proche surface (quelques centaines de nanomètres) ou plus loin dans la matrice (quelques micromètres), en faisant simplement varier l'énergie. De plus, il est possible de moduler la dose d'ions implantés, par exemple dans une gamme allant de 1x10 12 à 1x10 19 ions/cm 2. Néanmoins, le principal inconvénient de l'implantation ionique provient des défauts introduits au cours de l implantation dans l'échantillon qui peuvent modifier la mesure finale de l'hélium en agissant comme des sites de piégeage pour les atomes d hélium implantés [Trocellier, 2014a ; Dai, 2012]. Afin de séparer les effets de piégeage liés aux défauts créés par implantation de l effet lié aux défauts préexistants dans le métal, les implantations peuvent être réalisées avec des énergies très faibles (< 1keV), i.e. au-dessous de l énergie seuil de déplacement (en anglais "subthreshold He implantation"). Les traitements thermiques post-implantation sont réalisés de manière ex-situ (avant la mesure de l hélium) ou in-situ (pendant la mesure de l hélium). C est ce dernier scénario qui est mis en œuvre dans le cas de la spectrométrie de thermodésorption et de certaines observations par microscopie électronique en transmission (MET in-situ). La mesure de l hélium est l étape cruciale au cours de laquelle l hélium va être caractérisé dans ces différentes formes, c est-à-dire depuis l état d atomes ou de petits amas d He jusqu aux grosses bulles. Nombreuses techniques sont disponibles pour caractériser le comportement de l hélium à différentes échelles (Tableau I.2). Leur efficacité dépend du type d hélium étudié, de sa concentration et de sa taille ainsi que des conditions d implantation. Les configurations expérimentales adoptées par les différentes équipes de recherche varient largement en termes de gammes de températures explorées, teneurs en hélium introduite, compositions chimiques et microstructures du matériau, etc. 39

40 Tableau I.2- Méthodes théoriques et expérimentales utilisées pour étudier le comportement de l hélium à différentes échelles : TDS (spectrométrie de désorption thermique), PAS (spectroscopie d annihilation des positrons), MET (microscopie électronique en transmission), MEB (microscopie électronique à balayage), EELS (spectrométrie de perte d'énergie des électrons), IBA (analyse par faisceau d ions) et SIMS (spectrométrie de masse d ions secondaires) [Ullmaier, 1984]. I.3.A. Etudes menées sur la nature des amas HenVm (TDS) À l'exception de l'annihilation de positron, il n'y a aucune méthode expérimentale qui donne une information directe sur la nature des espèces d hélium dans les solides. Cependant, soutenue par des calculs théoriques, la spectrométrie de désorption thermique (TDS ou THDS en anglais thermal desorption spectrometry) est une technique très utile pour extraire des informations sur les propriétés atomiques de l'hélium dans les métaux. En choisissant les différents paramètres d'implantation de l'hélium (implantation au-dessus ou au-dessous du seuil de dommage, températures basses ou élevées, des matériaux avec différentes microstructures), il est possible d'attribuer les pics de désorption à certains processus (piégeage, migration) et de déterminer les énergies d'activation correspondantes. Cette technique mesure l hélium désorbé en fonction de la température pendant un traitement thermique isochrone ou en fonction du temps pendant un traitement thermique isotherme. Les cinétiques de désorption température-temps donnent une information indirecte sur le transport de l hélium et processus de piégeage/dépiégeage. De nombreuses études TDS ont été menées sur les métaux CC : Fe et ses alliages [Cao, 2011; Kimura, 2005 ; Lefaix-Jeuland 2012, 2013a ; Morishita, 2001b, 2003a, 2003b ; Ono, 2004, 2007, 2011 ; Sugano, 2002, 2003, 2004 ; Tokitani, 40

41 2004 ; Vassen, 1991 ; Xu, 2009, 2010] ou encore V et ses alliages [Federov, 1996a, 1996b, 1998; Hirohata, 2006a, 2006b ; Kalashnikov, 2002 ; Liu, 2004, 2006 ; Nita, 2007 ; Oku, 2007 ; van Veen, 1994, 1998 ; Vassen, 1991, Yamauchi, 2011]. Dans la figure I.22, nous pouvons observer les différentes conditions d implantation dans les études TDS menées sur le fer et vanadium, purs ou alliés. 41

42 Fig. I.22- Conditions d implantation (en échelle logarithmique) utilisées dans différentes études TDS sur (a) le fer pur (losanges), les alliages Fe-Cr (cercles), l alliage Fe-Cr-W (carrés) et les aciers (triangles) ; (b) le vanadium pur (losanges), les alliages V-Ti /V-3Ti-Si/V-5Ti- 5Cr (cercles) et les alliages V-4Cr-4Ti (triangles). 42

43 Dans le cas du fer et de ses alliages, la plupart des études TDS ont été réalisées sur des échantillons implantés entre 5 et 10 kev avec des fluences qui varient entre 2x10 13 et 2x10 17 He/cm 2 (Groupe II dans la Fig. I.22) [Cao, 2011 ; Lefaix-Jeuland 2012, 2013a ; Morishita, 2003a, 2003b ; Ono, 2004, 2007, 2011 ; Sugano, 2002, 2003, 2004 ; Tokitani, 2004 ; Xu, 2009, 2010]. D après ces études TDS, les résultats marquants sont les suivants : La plupart des publications [Morishita, 2003a, 2003b ; Ono, 2004 ; Sugano, 2002, 2003, 2004] ont identifié cinq pics de désorption principaux (Fig. I.23): un pic étroit à 177 C (pic I) correspondant aux atomes d hélium désorbés de mono-lacunes HeV situées proche de la surface (avec une énergie d activation E D de 1,6 ev), un pic large entre C (pic II) associé aux atomes d hélium désorbés des petits amas He nv avec 2 n 6 (E D=2,7 ev), un pic large entre C (pic III) observé à haute dose d implantation (>5x10 13 He/m 2 ) et attribué aux atomes d hélium désorbés des amas He nv m (E D entre 2,2 et 3 ev), un pic étroit à 827 C (pic IV) correspondant à la désorption de l hélium des mono-lacunes HeV (E D=3,8 ev) ou à l influence de la transformation de phase α-γ du fer pur (~910 C) et des pics situés au-delà de 977 C (pic V) attribués à la désorption d hélium depuis les bulles. Toutes ces observations ont été justifiées par des calculs de dynamique des amas et des méthodes de Monte-Carlo cinétique. Fig. I.23- Spectres expérimentaux TDS obtenus par Morishita et al. pour le fer α pur implanté 8 kev avec des doses entre 2x10 13 et 2x10 16 He/cm 2 à température ambiante [Morishita, 2003a]. Lefaix-Jeuland et al. [Lefaix-Jeuland, 2012] ont décrit la désorption des échantillons de fer pur de deux puretés différentes (99.95% et 99.5%). Cette étude a montré qu une augmentation du taux de carbone provoque un déplacement des pics vers les plus hautes températures. Les résultats obtenus ne sont pas en accord avec des calculs ab initio qui montrent que le carbone limiterait la migration des lacunes par la formation de VC et VC 2 et favoriserait donc la désorption d'he [Ortiz, 2009]. D autres études ont mis en évidence l effet de la microstructure dans les interactions He/Fe [Lefaix-Jeuland, 2013a ; Ono, 2007 ; Sugano, 2002 ; Xu, 2009]. Par exemple, Lefaix- Jeuland et al. [Lefaix-Jeuland, 2013a] ont comparé la thermodésorption d échantillons comportant différentes tailles de grain (i.e. 2μm, 40μm et 100μm). Ils ont remarqué que pour un même groupe de pics, la désorption s est déroulée à plus basse température 43

44 dans le cas d'une microstructure présentant de petites tailles de grain (2 μm) (Fig. I.24). Des simulations par dynamique moléculaire ont confirmé ces mesures expérimentales et ont mis en évidence l'effet de la densité des joints de grain sur la répartition d He et sa propension à être piégé dans les court-circuits de diffusion. D autre part, Sugano et al. [Sugano, 2002] ont étudié la thermodésorption d échantillons laminés à froid et d échantillons après recuit. Ils ont observé un pic autour de 527 C attribué à la désorption d amas d hélium piégés par les défauts introduits au cours de la déformation plastique et les traitements thermiques suivants (dislocations et joints de grains). L intensité du pic augmente avec la dose d implantation et diminue avec l énergie d implantation. Fig. I.24- Spectres de thermodésorption (10 C/min) obtenus par Lefaix-Jeuland et al. pour trois tailles de grain dans le cas d échantillons Fe implantés 8 kev à 1x10 16 He/cm 2 : (a) 100 µm, (b) 40 µm, (b) 2 µm. [Lefaix-Jeuland, 2013a]. Dans le cas du vanadium et de ses alliages, nous pouvons distinguer deux groupes de recherche : un groupe qui décrit la thermodésorption de l hélium dans le cas d échantillons implantés à très basses énergies ( 1 kev) avec des fluences comprises entre 5x10 11 et 1x10 15 He/cm 2 (Groupe I dans la Fig. I.22) [van Veen, 1994, 1998 ; Federov 1996a, 1996b, 1998; Nita, 2007] et un deuxième groupe qui étudie le même processus de thermodésorption (60 C/min) pour des échantillons implantés à 5 kev avec des fluences plus élevées (>5x10 16 He/cm 2 ) (Groupe II dans la Fig. I.22) [Hirohata, 2006a, 2006b ; Liu, 2004, 2006 ; Oku, 2007 ; Yamauchi, 2011]. Contrairement au cas du fer, peu d articles ont été consacrés à l étude expérimentale de la thermodésorption dans le métal pur. D après ces études TDS, les résultats marquants sont les suivants : Pour les fluences d implantation basses (<10 14 He/cm 2 ), l hélium est piégé dans des amas He nv mx (avec X=C, N, O et n>1) et sa dissociation est attribuée à plusieurs pics entre 297 et 657 C (avec E D qui varie entre 1,5 ev pour He nvx et 2,48 ev pour He nv 6X). En augmentant la fluence d implantation, la contribution de ces amas He nv mx devient plus importante. Des amas et He nv 5 et He nv m>5x plus stables se dissocient à 723 C et à partir de 817 C, respectivement (avec E D de 2,6 ev pour He nv 5 et >2,48 ev pour He nv 6X). D autre part, d autres pics sont observés à partir de 927 et 1127 C attribués à la désorption de petites bulles formées sur les pièges préexistants dans la matrice métallique. Dans ce cas, les concentrations d hélium implanté et la concentration de sites 44

45 de piégeage créés après implantation d ions sont très faibles donc l interaction entre eux peut être négligée. Par conséquent, le piégeage de l hélium dans les défauts préexistants, comme des précipités de petite taille (par exemple des précipités du type Ti-(O, C, N) dans les alliages V-4Ti-4Cr), est plus importante. Cela explique que les conditions de traitement pré-implantation, liés à nature et la taille de ces précipités, ont un effet sur les spectres de désorption de l hélium (Fig. I.25). Fig. I.25- Spectres de thermodésorption (10 C/min) obtenus par Federov et al. pour le vanadium pur monocristallin (110), l alliage V-5Ti-5Cr, l alliage V-3Ti-Si et l alliage V-5Ti implantés 1 kev avec une fluence de 1x10 14 He/cm 2 [Federov, 1996a]. A haute fluence (>5x10 16 He/cm 2 ), la grande quantité d hélium implantée et des amas de lacunes induits favorisent la formation de cloques ou blisters à la surface (~0,1 µm). Par conséquence, des pics à hautes températures (>927 C) attribués à la rupture et désorption depuis ces blisters et bulles d hélium apparaissent dans les spectres de thermodésorption. Ces pics sont d autant plus intenses pour des fluences inférieures à He/cm 2. En augmentant la dose, la dissociation de l hélium piégé par des amas He nvx devient importante et la désorption se décale vers les basses températures (~227 C). Par ailleurs, la quantité totale d hélium retenu est saturée à 2,5x10 17 He/cm 2 pour des fluences entre 3x10 17 et 5x10 17 He/cm 2. Dans ce cas, comme la concentration locale de défauts induits par l implantation d ions est plus grande que ceux des défauts inhérents dans la matrice métallique, le piégeage de l hélium dans des amas héliumlacune joue un rôle dominant et la contribution de défauts préexistants peut être négligée (Fig. I.26). 45

46 Fig. I.26- Spectres de thermodésorption (1 C/s) obtenus par Hirohata et al. pour l alliage V-4Ti-4Cr implanté 5 kev avec des fluences entre 5x10 16 et 1x10 18 He/cm 2 [Hirohata, 2006b]. I.3.B. Etudes menées sur la diffusion de l hélium (IBA et SIMS) La diffusion de l hélium est caractérisée par deux paramètres principaux : le coefficient de diffusion et l énergie d activation. Le coefficient de diffusion quantifie la migration d une espèce chimique dans un milieu. Sous l effet de l agitation thermique, on observe un déplacement des atomes dans ce milieu. Le coefficient de diffusion dépend de la température pour laquelle il est calculé. L énergie d activation est la quantité d énergie nécessaire pour lancer un processus chimique. Pour arriver à calculer ces paramètres essentiels, il faut avoir accès à des profils de concentration d hélium en fonction de la profondeur à l état initial (ou implanté) et après traitement thermique. De nombreuses méthodes d analyses sont utilisées pour mesurer ces profils d hélium. Parmi celles-ci, les analyses par faisceau d ions (IBA en anglais ion beam analysis) telles que l analyse par réaction nucléaire (NRA en anglais nuclear reaction analysis) ou encore l analyse par détection des atomes de recul induits par des ions lourds (HI-ERDA en anglais heavy ion-induced elastic recoil detection analysis) ont pris un essor important [Trocellier, 2014b, 2015] L analyse par réaction nucléaire (NRA) utilise une réaction nucléaire induite par l interaction de 3 He avec le deuton incident qui engendre la formation d une particule α ( 4 He) et d un proton (réaction 3 He (d,p) 4 He ou 3 He(d, 4 He)p). L énergie mesurée de la particule α ou du proton dépend de la profondeur d implantation de 3 He. Ainsi, on peut déterminer un profil de concentration de l hélium dans le matériau. L analyse par Détection des Atomes de Recul induits par des Ions Lourds (ERDA Ions Lourds ou ERDA-IL) a très peu été expérimentée dans le cadre de l hélium. L ERDA ions lourds réalisée avec un projectile plus lourd que l hélium, comme le 12 C ou 16 O, permet la quantification des deux isotopes ( 3 He et 4 He). La résolution en profondeur et la profondeur analysable par cette méthode sont de l ordre de 50 nm et 500 nm, respectivement. Ces études ont été appliquées dans une large gamme de matériaux métalliques et non métalliques. Nous pouvons observer dans le tableau I.3, l application de méthodes précédemment mentionnées dans quelques métaux CC d intérêt pour le nucléaire. 46

47 Méthode IBA NRA ERDA Métaux CC Fe [Lefaix-Jeuland, 2012; Lewis, 1986; Trocellier, 2014b, 2015], V [Bøttiger, 1978; Lewis, 1988], Nb [Behrish, 1975; Lewis, 1988; Roth, 1976], Ta [Zielinski, 2003], W [Debelle, 2007, 2010; Lhuillier, 2011]. Fe [Loussouarn, 2015 ; Trocellier, 2014b, 2015], Nb [Haussalo, 1994, 1996 ; Nagata, 1998 ; Saint-Jacques, 1980], Ta [Haussalo, 1994, 1996], W [Haussalo, 1996 ; Markina, 2011]. Tableau I.3.-Exemple d études IBA dans le cas de métaux CC d intérêt pour le nucléaire. Dans la figure I.27, nous pouvons observer plus particulièrement les différentes conditions d implantation dans les études menées dans le cas du fer et du vanadium. 47

48 Fig. I.27- Conditions d implantation (en échelle logarithmique) dans différentes études IBA sur (a) le fer pur et (b) le vanadium pur. 48

49 Dans le cas du fer pur, plusieurs études ont caractérisé la diffusion de l hélium après traitement thermique (entre 400 C et 1250 C pendant 1 ou 2 heures) dans des échantillons implantés avec des fluences comprises entre 1x10 16 et 1x10 17 He/cm 2 et deux conditions d énergie : i) 40 et 60 kev 4 He [Loussouarn, 2015, Trocellier, 2014b, 2015] ii) 3 MeV 3 He [Lefaix-Jeuland, 2012, Trocellier, 2014b, 2015]. Loussouarn et al. [Loussouarn, 2015] ont étudié les profils de concentration d hélium à l état implanté et après traitement thermique des échantillons implantés à 40 kev et une fluence de 1x10 16 He/cm 2 par ERDA-IL. Après implantation, ils ont observé un bon accord entre le profil expérimental et le profil simulé par SRIM. Par ailleurs, une baisse importante de la teneur en hélium des échantillons recuits à partir de 700 C a été mis en évidence, parallèlement avec une croissance de bulles d hélium observée par MET. Lefaix-Jeuland et al. [Lefaix-Jeuland, 2012] ont observé une diminution de la concentration d hélium à partir de 1013 C dans des échantillons implantés à 3 MeV et une fluence de 2,5x10 16 He/cm 2. De plus, ils ont calculé des constantes de diffusion de 3 He variant entre 1,58x10-15 cm 2 s -1 (à T=1013 C) et 3,4x10-15 cm 2 s -1 (à T=1120 C) (Fig. I.28). En appliquant la loi d Arrhenius et en tenant en compte du facteur de correction isotopique 4/3 entre les proprie te s de diffusion des isotopes 4 He et 3 He, les auteurs ont déduit les valeurs de D 0=4,9x10-11 cm 2 s -1 et E D=1,13 ev. (a) Fig. I.28- (a) Profils d hélium en profondeur HI-ERDA obtenus par Loussouarn et al. [Loussaouarn, 2015] pour le fer pur implanté 40 kev- 1x10 16 He/cm 2 avant (asimplanted) et après traitement thermiques entre 400 C et 1000 C pendant 1 h (b) Courbes d excitation expérimentales et simulées NRA (avec le code AGEING) obtenues par Lefaix-Jeuland et al. [Lefaix-Jeuland, 2012] pour le fer pur implanté 3 MeV- 2,5x10 16 He/cm 2 avant (implanted) et après traitement thermique entre 827 C et 1250 C pendant 1 ou 2 heures. Lewis et al. [Lewis, 1986] ont étudié des échantillons de fer pur implantés avec des ions 3 He à 200 et 300 kev, avec une dose d implantation de 1,1x10 16 ions/cm 2, à température ambiante et au-delà de 700 C. La désorption d hélium est observée entre 500 et 625 C avec des constantes de diffusion effectives de 4 He de l ordre de 5x10-18 cm 2 s -1 et 5x10-17 cm 2 s -1, respectivement. Ces constantes sont très basses par rapport aux constantes de diffusion par dissociation et plus proches de celles requises pour des mécanismes de diffusion substitutionnelle. Dans le cas du vanadium pur, nous pouvons trouver deux études sur l évolution de profils d hélium en fonction de la température [Blewer, 1976 ; Lewis, 1988], le reste décrivant seulement les profils à l état implanté [Blewer, 1974 ; Bøttinger, 1978]. D une part, Blewer et al. (b) 49

50 [Blewer, 1976] ont étudié les profils en profondeur et le comportement des ions 4 He via l analyse de proton rétrodiffusé (réaction 4 He (p, p) 4 He) dans des échantillons laminés à froid sans et avec polissage mécanique. Après traitement thermique à 750 C et 850 C, des échantillons implantés à 80 kev-5x10 17 He/cm 2 à 100 C, les distributions en profondeur présentaient deux pics : un pic majoritaire proche de la surface (0,75R p) et autre pic minoritaire plus loin en profondeur (1,25R p) (Fig. I.29). Cette distribution bimodale de la concentration en fonction de la profondeur était justifiée par la présence de gros amas aux profondeurs d implantation plus élevées qui piégeaient moins fort l hélium à haute température, comparés aux petits amas proches de la surface. Fig. I.29- Profils d hélium (ratio du rendement de protons rétrodiffusés par l hélium et par le vanadium dans la cible) en profondeur (normalisé avec le R p=0,3 µm) obtenus par Blewer et al. pour le vanadium pur après implantation à 80 kev-5x10 17 He/cm 2 (à 100 C) et post-recuit à750 C et 850 C. La distribution du rayon et de la densité de bulles sont illustrés pour l échantillon post-recuit à 750 C (carrés avec de lignes pointillée et discontinue) [Blewer, 1976]. D autre part, Lewis [Lewis, 1988] a étudié l évolution de profils de 3 He par NRA, des échantillons de vanadium pur implantés avec des ions 3 He à 200 kev, avec une dose d implantation de 1x10 16 ions/cm 2, à température ambiante et au-delà de 791 C. Une diminution de la concentration d He est observée à 607 C et 791 C, à des températures plus élevées que dans le cas du fer (~500 C) [Lewis, 1986]. Ces pics ont présenté un léger élargissement vers la surface lié aux impuretés (C, O, H) qui piègent l hélium. Parmi les mécanismes étudiés, i.e. diffusions substitutionnelle et dissociative, les résultats obtenus suggèrent le mécanisme dissociatif comme dominant. Comme nous pouvons déjà constater dans les études sur les métaux CC décrites précédemment, toutes ces méthodes d analyse par faisceau d ions non destructives permettent de mesurer des profils d hélium en profondeur sur une large gamme d énergies (1keV jusqu à 4MeV) et de doses d implantation (entre 5x10 15 et 7x10 18 He/cm 2 ). Cependant, ces techniques mettent en jeu des faisceaux d'ions très énergétiques et nécessitent un traitement mathématique des résultats expérimentaux obtenus. De plus, la NRA fonctionne seulement avec l isotope 3 He. Une récente étude a permis d obtenir par Spectrométrie de Masse d Ions Secondaires (SIMS) des profils d He en profondeur, dans des échantillons de fer pur implantés 60 kev avec des fluences 1x10 16 et 1x10 17 He/cm 2. Cette méthode implique la détection des ions moléculaires 50

51 133Cs4He +, permettant ainsi de dépasser le problème de la difficile ionisation de l hélium (~25 ev), sans sacrifier la sensibilité [Lefaix, 2013b]. La technique SIMS avait déjà été utilisée dans des travaux antérieurs afin de mesurer le profil d hélium dans des couches de silicium amorphe [Gnaser, 1991] et des alliages Al-Mg [Tyagi, 1993] avec des limites de détection de l ordre atomes/cm 3 (100 ppm) et des vitesses d abrasion entre 0,5 et 1 nm/s. Mais peu de travaux avaient prolongé ces études. I.3.C. Etudes menées sur l évolution des bulles d hélium (MET et EELS) Les études expérimentales menées sur les bulles et cavités obtenues par implantation de gaz inertes dans les métaux datent du début des années 80 [Ullmaier 1983, Thomas 1983]. Les premières études consistaient à caractériser la morphologie, la taille et la densité des bulles essentiellement par MET, MEB ou microscope électronique à balayage par transmission (MEBT ou STEM). Actuellement, le MET, avec une limite de résolution autour de 1 nm, est la principale méthode de caractérisation de bulles d hélium. Les bulles et les cavités sont observées en champ clair (BF bright field) sous- ou sur-focalisation dans les régions minces des échantillons. Le contraste de franges de Fresnel change de blanc (sous) à noir (sur) en fonction des conditions de focalisation. Plusieurs expériences MET montrent que les caractéristiques des bulles (taille, forme et densité) dépendent essentiellement du matériau d étude et des paramètres d irradiation tels que la dose de gaz accumulée dans la matrice irradiée, le taux d endommagement en dpa, la température d irradiation. A la différence des méthodes décrits précédemment (TDS, IBA, SIMS), la dispersion des conditions expérimentales obtenues par MET dans la littérature est très large. Il existe un grand nombre d études sur l évolution de bulles d hélium dans le fer et ses alliages, certaines d entre elles décrivent des expériences d implantation en mono-faisceau (implantation d He) (Fe pur : Arakawa, 2001 ; Moll, 2013 ; Ono, 2002, alliages austénitiques : Ono, 2000, alliages ferritiques nanostructurés : Edmondson, 2013 ; Li, 2014, aciers austénitiques : Kerternich, 1983 ; Lane, 1983 ; Zhang, 1997, 1998, 2000, aciers martensitiques : Coppola, 2004 ; Fréchard, 2009 ; Henry, 2003, 2006) et d autres en mode bi-faisceau ou tri-faisceau (avec coimplantation de un ou deux faisceaux d ions en parallèle avec les ions d He) (Fe pur : Brimbal, 2011, alliages Fe-Cr : Bhattacharya, 2014, aciers ferritiques-martensitiques : Wakai, 2002). Dans le fer pur, des bulles ont été observées par MET lors d implantations d ions He pour des températures allant de la température ambiante à 600 C. Par exemple, Ono et al. [Ono, 2002] ont étudié l évolution de bulles d hélium dans des échantillons implantés 10 kev He + avec des fluences entre 9x10 15 et 1x10 17 He/cm 2. A 200 C, une grande densité de bulles d hélium sphériques (~1,7x10 17 m -2 ) se forme autour du pic d implantation (entre 20 et 70 nm). Leur diamètre augmente de 1,1 à 2 nm. A 600 C, les bulles deviennent facettées et leur densité diminue considérablement à m -2. D autre part, Arakawa et al. [Arakawa, 2001] ont décrit les bulles d hélium dans le fer pur après une implantation d ions He + à 5 kev (Fig. I.30). Ils ont observé une densité de bulles supérieure à 8x10 16 m -2 distribuées uniformément à température ambiante pour une fluence de 3x10 16 ions/cm 2. A partir de 497 C, une densité de bulles inférieure (2x10 14 m -2 ) se forme préférentiellement le long des boucles de dislocations pour une fluence de 1,4x10 16 ions/cm 2. 51

52 Fig. I.30- Formation de bulles d hélium dans le fer pur implanté 5 kev He + à 27 C (3x10 16 He/cm 2 ), à 297 C (4,5x10 15 He/cm 2 ), et à 497 C (1,4x10 16 He/cm 2 ) [Arakawa, 2001]. Concernant la localisation du processus de germination des bulles, des observations MET entreprises par Lane et al. [Lane, 1983] concluent que toutes les interfaces, sauf les macles cohérentes, sont des sites de germination préférentielle, et que la densité numérique des bulles est plus grande sur les interfaces contenant des dislocations et des joints de grains. La présence de bulles d hélium dans ces interfaces a été mise en évidence dans plusieurs études expérimentales [Brimbal, 2011 ; Henry, 2003 ; Edmondson, 2013 ; Kerternich, 1983 ; Li, 2014 ; Zhang, 2000]. Par exemple, Henry et al. [Henry, 2003] ont observé des bulles d hélium sphériques et facettées (avec un diamètre ~ 2,5 nm) autour des dislocations, des sous-joints de grains et des carbures dans des aciers martensitiques 9%Cr implanté à 23 MeV avec une teneur en hélium de 5000 ppm et à 550 C. D autres études MET ont été consacrées à la caractérisation de l évolution des bulles d hélium au cours de recuits post-implantation. Par exemple, Moll et al. [Moll, 2013] ont corrélé des études de cinétique de croissance de bulles par recuit isochrone in-situ MET (3 C/min) avec des calculs de dynamique d amas dans le fer pur implanté à 60keV et He/cm 2. Après implantation, ces résultats indiquent une répartition homogène des bulles et des amas de type interstitiel dans les échantillons. Après traitement thermique, deux régimes de croissance des bulles sont observés (Fig. I.31). Aux températures inférieures à 700 C, la croissance de bulles est lente et parallèle à la croissance des boucles de dislocations. Deux mécanismes pourraient être impliqués dans l évolution de tels amas. Le premier se traduit par l émission de lacunes à partir de boucles de dislocations plus grosses (mécanisme de Murissement d Oswald). Ces derniers, contribueraient à faire d une part croitre les bulles et d autre part décroitre les petites boucles de dislocations. A ce mécanisme s ajoute la dissociation d amas He nv m. Ainsi, des échanges d espèces s opèrent entre différentes populations et contribuent à leur croissance respective. A des températures supérieures à 700 C, la mobilité des bulles à haute température induit un mécanisme de coalescence qui accélère leur croissance : des bulles de petite taille migrent et coalescent entre elles ou peuvent être piégées par de plus grosses bulles immobiles. 52

53 Fig. I.31- Evolution de la taille moyenne des bulles d hélium et des boucles de dislocations pendant un recuit in situ au MET dans le fer pur implanté à 60keV et He/cm 2 (3 C/min) [Moll, 2013]. Pour le vanadium pur, quelques études ont été menées sur l évolution de bulles d hélium dans des échantillons implantés avec des énergies d implantation intermédiaires (entre 40 et 200 kev) [Chernov, 2011 ; Kalashnikov, 2002 ; Tyler, 1980] et élevées (> 200 kev) [Heerschap, 1973 ; Kalleta, 1976, 1978 ; Smidt, 1974]. Juste après implantation, nous retiendrons 3 études dont les résultats montrent la diversité des états observées en fonction des conditions d implantation (énergie, dose, température). Ainsi, Heerschap et al. [Heerschap, 1973] ont étudié la distribution de bulles d hélium des échantillons de vanadium implantés à une énergie élevée dans le cadre de cette étude, i.e. 3 MeV avec une teneur d hélium de 1000 ppm dans trois cas différents : (1) après implantation à 750 C, (2) après implantation à température ambiante et recuit postérieur à 750 C et (3) après implantation à 400 C (Fig. I.32). Dans le premier cas, les bulles sont distribuées de façon hétérogène, préférentiellement dans les joints de grains et dislocations. Elles ont une taille moyenne de l ordre de 6 nm et une morphologie cubique avec des facettes du type {100}. Quelques-unes sont aussi allongées le long de la direction <100> ou autour des joints de grains. Dans le deuxième cas, la distribution des bulles est homogène, sans germination préférentielle de bulles dans les joints de grains. Par contre, quelques bulles sont observées autour des dislocations. Elles ont une taille moyenne, plus petite que dans le premier cas, de l ordre de 3 nm. Dans le troisième cas, des bulles apparaissent autour des boucles de dislocations interstitielles du type {111}. 53

54 Fig. I.32- Images MET obtenues pour le vanadium implanté 3 MeV He et 1000 ppm d hélium dans : (1) le cas après implantation à 750 C: (1.a) germination préférentielle dans les joints de grain, (1.b) bulles à l intérieur de grains avec de facettes {100}, (1.c) bulles allongés à l intérieur de grains, (1.d) germination préférentielle dans les dislocations, (2) le cas après implantation à TA et recuit à 750 C : distribution homogène de bulles (3) le cas après implantation à 400 C : bulles dans de boucles interstitielles {111} [Heerschap, 1973]. Dans une gamme d énergie encore plus grande, 70 MeV, Smidt et al. [Smidt, 1974] ont caractérisé la microstructure de bulles après traitement thermique à hautes températures (>1200 C) d échantillons implantés à 200 C avec une teneur d hélium entre 52 et 64 ppm. A l état implanté, aucune bulle n est observée dans les échantillons. Au-dessous de 1400 C, les bulles cubiques sont distribuées de façon homogène dans la matrice et les joints de grains, avec une taille entre 7,6 et 13 nm et une densité entre 2,2x1014 et 6,6x1013 cm-3. A 1550 C, les bulles devient plus grosses (~ nm) et se trouvent seulement dans les joints de grains, à l exception de quelques-unes observées autour de dislocations et sous-joints de grains. A plus basse énergie, dans une gamme comprise entre 210 et 2000 kev, Kaletta et al. [Kalleta, 1976, 1978] ont observé des bulles cubiques après implantation d ions hélium à des fluences comprises entre 2x1016 et 2x1017 He/cm2 et pour une température de 625 C (Fig. I.33). Pour les échantillons implantés à 210 kev et 625 C [Kalleta, 1978], la taille des bulles augmente de 9 jusqu à 20 nm avec la fluence d implantation. Par ailleurs, ces auteurs ont constaté une fonction de distribution bimodale de la population de bulles après traitement thermique postérieur à l implantation. Cette distribution présente un pic important correspondant aux petits diamètres de bulles induits par la croissance d amas He-V provenant des lacunes qui deviennent disponibles au cours du recuit. 54

55 Fig. I.33- Image MET et cliché de diffraction d un échantillon de vanadium implanté 2000 kev He avec une dose de 2x10 17 ions/cm 2 à 700 C [Kalleta, 1976]. Enfin, une étude a retenu notre attention dans le cas du suivi de l évolution des bulles au cours de traitement thermique. Ainsi, Tyler et al. [Tyler, 1980] ont réalisé des expériences de recuit insitu isothermes à 950 C (~0,5 T F) dans des échantillons de vanadium implantés à température ambiante avec une dose de 1x10 16 He/cm 2 pour des énergies d implantation comprises entre 50 et 200 kev. Pendant le traitement thermique, le diamètre des bulles varie entre 2 et 5 nm, observation similaire à la croissance des bulles dans le fer pur pour une fluence et température d implantation similaires [Moll, 2013]. La densité des bulles diminue avec le temps de recuit. De plus, les observations MET mettent en évidence un mouvement brownien des bulles d hélium, conduisant à leur coalescence à haute température, phénomène également observé dans le cadre de l étude précédemment mentionnée [Moll, 2013]. Bien qu étant la technique privilégiée dans la caractérisation des bulles d hélium, la MET classique reste limitée par : i) la contamination des échantillons, introduite pendant leur préparation, ii) la résolution spatiale pour l estimation de la taille et l identification de la morphologie réelle de petites bulles de diamètres inférieure à 2 nm [Stevens, 1997 ; Yao, 2012], iii) l étude des matrices composées de fer en raison de possibles problèmes de magnétisme. De plus l imagerie MET seule ne permet pas de distinguer clairement bulles et cavités. Pour répondre à la dernière limite évoquée précédemment, la mesure de la densité atomique dans les bulles peut se faire grâce à la spectrométrie de pertes d énergie des électrons (EELS). Cette méthode permet en effet de mesurer l énergie correspondant à la transition 1s 2p qui se produit à une énergie de 21,218 ev pour l hélium à l état atomique. Par exemple, les travaux de Fréchard et al. [Fréchard, 2009] ont estimé par EELS la densité atomique et la pression interne de bulles sur des échantillons d acier martensitique 9Cr-1Mo irradié 0,5 at% He (~5000 appm He) à 550 C. Ces autours ont pu réaliser des images STEM en champ sombre annulaire à grand angle (HAADF en anglais High Angle Annular Dark Field) parallèlement aux spectres EELS qui permettent de localiser et caractériser les bulles contenues dans l acier martensitique. Les densités atomiques dans les bulles ont été estimées individuellement en extrayant le signal du pic 1s 2p de l hélium du signal de la matrice par de méthodes de modélisation du signal par des gaussiennes (i.e. décalage en énergie de la position du pic d hélium E) (Fig. I.34). 55

56 Fig. I.34- Caractérisation par STEM-EELS de bulles obtenues par implantation d un acier martensitique 9Cr10Mo irradié 0,5at.% à 550 C : (a) image HAADF avec indication des bulles sélectionnées pour la quantification (cercles 2, 3 et 4) et d une zone hors bulles (cercle 1) et (b) spectres correspondants à ces bulles et à la zone hors bulles (signal de matrice) [Fréchard, 2009]. D après cette étude, une relation entre les tailles des bulles et leurs densités atomiques a été quantitativement mise en évidence : les petites bulles présentant une densité atomique en hélium plus importante que les grosses (Fig. I.35). Les pressions à l intérieur des bulles ont été déduites à partir de valeurs de la densité à l aide d une équation d état (EOS de l anglais "equation of state"). Les densités trouvées au cours de cette étude étaient très élevées, de sorte que la loi de gaz parfaits n était plus applicable. Parmi les diverses EOS développées dans la littérature, celle proposée par Trinkaus a été utilisé car elle correspond le mieux à la gamme de densité en question [Trinkaus, 1983b]. Une relation linéaire entre la pression et l inverse du rayon de bulle a aussi pu être observée. 56

57 Fig. I.35- Densité atomique en hélium et pression interne de bulles en fonction des valeurs inverse de leurs rayons obtenue par EELS dans des échantillons d acier martensitique 9Cr10Mo irradié 0,5at.% à 550 C [Fréchard, 2009]. La mise en place de cette technique reste toutefois limite par la complexité des méthodes d extraction du signal d hélium (le signal en question se trouve superposé à celui du pic "plasmon" caractéristique de l élément composant l échantillon), les incertitudes expérimentales dans l estimation des tailles de bulles (plus marqués pour de petites bulles) et l utilisation de géométries d analyse en transmission avec des échantillons très fins [Attauchi, 2014]. 57

58 I.4. SYNTHÈSE DE L ÉTUDE BIBLOGRAPHIQUE Que ce soit dans le cadre des réacteurs à neutrons rapides ou des réacteurs de fusion thermonucléaire, la mise en œuvre des nouvelles générations de réacteurs nucléaires nécessite le développement de nouveaux matériaux avec une capacité accrue de résistance aux dommages d'irradiation provoqués par les neutrons issus des réactions nucléaires. L'interaction de ces particules de fortes énergies (de 1 à 14 MeV) avec les matériaux de structure génère d'importantes cascades de déplacements conduisant à la création de défauts ponctuels comme des lacunes (V) et des auto-interstitiels (SIA), ainsi qu à la création de défauts étendus (amas). De l'hélium est introduit dans ces mêmes matériaux de cœur soit directement par transmutation via les réactions nucléaires (n,α) et (n,p) soit par bombardement des ions issus du plasma (fusion). La présence de ce gaz impacte fortement les propriétés mécaniques des matériaux de structure en raison de ses fortes interactions avec la microstructure, notamment avec les défauts lacunaires créés au cours de l'irradiation. Il a ainsi été démontré que l accumulation d'hélium, insoluble dans les alliages, favorise la formation de bulles susceptibles d induire un durcissement, une fragilisation ou encore un gonflement du matériau. Les études réalisées pour le développement des futurs cœurs de réacteur (structure, gaines combustibles, divertor) ont fait émerger un certain nombre de matériaux métalliques tels que les aciers renforcés par dispersion d'oxydes (ODS), le tungstène, les alliages de vanadium ou encore des métaux réfractaires (Mo, Ta, Nb). Pour poursuivre le développement de ces réacteurs nucléaires et assurer leur pérennité, il est donc nécessaire d'acquérir une meilleure compréhension de l'interaction entre He et les structures métalliques dont le point commun est de comporter comme métal de base un élément de cristallographie cubique centrée (CC). Le devenir de l'hélium dans les métaux CC, et donc son effet sur la structure, est gouverné par différentes propriétés de transport telles que sa diffusivité, sa solubilité, et de propriétés thermodynamiques qui régissent son piégeage et ses interactions avec les autres entités ou les défauts ponctuels dans les matériaux. Ces mécanismes peuvent être affectés par un grand nombre de facteurs physiques et chimiques comme la teneur en hélium, la température, les conditions de traitement thermique (rampe de température), la nature et quantité des impuretés, l orientation cristalline, la présence de défauts natifs ou produits au cours de l implantation, etc. Les principales techniques pour caractériser le comportement de l hélium et des bulles d hélium dans les matériaux solides, incluent TDS, IBA, SIMS, MET et EELS. Au-delà du cas des interactions entre l'hélium et le fer, métal cubique centré largement utilisé comme matériau modèle, de nombreux travaux se sont également intéressés aux autres métaux purs CC, notamment aux cas du vanadium. Dans toutes les études menées sur le comportement de l hélium et mentionnées précédemment, les expériences ont mis en avant le rôle de la microstructure dans les interactions He/matériaux (joints de grain, dislocations), le rôle des conditions d'implantation (énergie, fluence, température) dans la formation des bulles et dans le cloquage (blistering) associé. Cependant, les mécanismes impliqués dans la diffusion de l hélium et la formation de bulles sont encore à ce jour mal compris, bien que certaines conditions aient été identifiées comme favorables à leur apparition dans les structures CC. De plus, peu de travaux ont 58

59 comparé de façon précise le comportement de l'hélium entre métaux d'une même structure, implantés dans des conditions similaires. A ce stade des connaissances, plusieurs questions restent en suspens tant sur le comportement de l'hélium que sur l'évolution des défauts structuraux en présence de ce gaz. Il apparaît donc nécessaire de poursuivre l'analyse du comportement de l hélium dans les métaux CC et d'envisager cette étude dans diverses conditions d'implantation (énergie, fluence, température) et avec une combinaison de techniques expérimentales complémentaires afin de collecter des données expérimentales relatives aux mécanismes thermodynamiques et cinétiques de l hélium en vue d'un couplage avec la simulation. 59

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61 Deuxième Chapitre II. MATÉRIAUX ET MÉTHODES EXPÉRIMENTALES 61

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63 II. MATÉRIAUX ET MÉTHODES EXPÉRIMENTALES Ce chapitre présente les matériaux d étude et les outils expérimentaux utilisés pour ce travail. Les matériaux et les étapes de leur préparation seront d abord présentés, puis les conditions d implantation et traitement thermique post-implantation appliquées seront détaillées. Enfin nous présenterons l ensemble des techniques expérimentales utilisées, d une part pour caractériser l évolution de la microstructure des échantillons (MEB, DRX) et d autre part pour décrire les interactions He-matériaux à l état implanté initial et après traitement thermique (TDS, SIMS, HI-ERDA et MET). II.1. NATURE DU MATÉRIAU D ÉTUDE ET PRÉPARATION DES ÉCHANTILLONS Le vanadium et le fer polycristallins sont fournis par Goodfellow sous forme de barreaux d un diamètre de 12,7 mm et d une longueur de 200 mm. La liste des principales impuretés fournies par le fabricant est résumée dans le tableau II.1 suivant: Elément (%) Impuretés (ppm) Ag Al Ca Co Cr Cu Fe Mg Mn Ni Si V 99,8 1 2 < <1 70 < Fe 99, Tableau II.1- Composition chimique massique du vanadium 99.8 % et fer 99,95% Goodfellow. Les barreaux sont laminés et découpés pour obtenir des cercles de diamètre 20 mm ou des carrés de (0,5x0,5) cm 2. Les échantillons sont d abord polis sous eau en utilisant des tapis abrasifs SiC de granulométrie décroissante entre 25 µm (SiC 800) et 5 µm (SiC 4000) à l aide d une polisseuse automatique Saphir 520 (MetPrep Ltd). Le polissage miroir final consiste en un polissage diamant (3 et 1 µm) sous éthanol. Après ce polissage mécanique, les échantillons sont nettoyés aux ultra-sons dans un mélange acétone/éthanol puis éthanol. L épaisseur finale après polissage est de l ordre de 1 ± 0,1 mm. Un traitement thermique est ensuite réalisé sur les échantillons polis pour diminuer l écrouissage lié au laminage et polissage, ainsi que pour recristalliser la structure. Il a consisté en un recuit dans un four tubulaire (tube en quartz) à 1000 C pendant 2 heures sous vide secondaire (10-7 mbar) pour V et 1000 C pendant 2 heures sous Ar pour Fe. Le vanadium et fer monocristallins (100) utilisés dans le cadre de cette étude ont été mis en forme (cercle de diamètre 10 mm et d épaisseur 1 mm) et polis à l état miroir par le fournisseur (Neyco ). Les échantillons de MET sont des coupes transverses préparées par sonde ionique focalisée (FIB) avec un appareil de type FIB-FEI Helios NanoLab 650 à partir des échantillons monocristallins et polycristallins massifs. II.2. II.2.A. CONDITIONS EXPÉRIMENTALES Implantation ionique des échantillons L utilisation d accélérateurs de particules pour implanter de l hélium permet de simuler la création des défauts et d amas hélium-lacunes lors du fonctionnement d un réacteur. Ces 63

64 équipements nous offrent la possibilité d effectuer une étude de l évolution microstructurale en faisant varier les paramètres d implantation telles que l énergie et la teneur en hélium. Comme toute étude expérimentale, il est indispensable de définir les paramètres avant la mise en œuvre des expériences. Pour ce faire, nous utiliserons des méthodes de simulation du dommage d implantation. Parmi celles-ci, le logiciel de simulation SRIM (Stopping and Range of Ion in Matter) permet d évaluer l arrêt des ions dans la matière par un traitement des collisions entre les ions incidents et les atomes de la matrice [Ziegler, 2013]. TRIM (Transport of Ions in Matter), un élément particulier de SRIM, est un code de type Monte Carlo qui calcule la distribution finale des ions incidents ainsi que les phénomènes cinétiques associés aux pertes d énergie des ions en considérant certaines hypothèses: Le matériau cible est considéré comme amorphe. Les atomes occupent des positions aléatoires avec une distance moyenne respectant la distance interatomique du matériau considéré. La structure cristalline du matériau est donc ignorée. Les particules incidentes ou les atomes de recul voient leurs trajectoires modifiées par des collisions binaires avec les atomes de la matrice du matériau. La recombinaison des auto-interstitiels avec les lacunes est négligée. Le matériau cible est supposé à 0 K et les atomes déplacés lors des collisions sont immobiles. Malgré ces limitations, le logiciel SRIM est largement employé pour estimer le dommage d implantation, en donnant une estimation fiable et rapide des caractéristiques de l implantation dans des matériaux. Ce logiciel permet, entre autre, d évaluer le niveau d endommagement du matériau par le critère du nombre de déplacements par atomes de la matrice, exprimé en dpa et de calculer la concentration atomique de l hélium dans le matériau à partir des équations suivantes : = é % = é 100 Avant de réaliser ces simulations, nous avons défini les critères de sélection pour satisfaire les besoins de nos expériences : - Il faut respecter une énergie suffisamment faible (< 100 kev profondeur < 500 nm) et une fluence suffisamment grande ( 1x10 16 ) pour pouvoir mesurer le signal d hélium par TDS et SIMS. - Il faut respecter une énergie suffisamment grande (> 10 kev profondeur > 50 nm) pour pouvoir réaliser les implantations dans les accélérateurs disponibles et ne pas être trop proche de la surface où son état (oxydation, contamination, rugosité) pourrait altérer les résultats de nos analyses. 64

65 - Il faut respecter une fluence suffisamment faible (<1x10 17 ) pour que le détecteur ne soit pas saturé pendant l analyse de thermodésorption. - Nous travaillerons à un profil d hélium constant en variant l énergie d implantation pour chaque métal CC. - Nous travaillerons à température ambiante afin de simplifier les paramètres d étude malgré les températures réelles d implantation de l hélium dans les réacteurs plus élevées (>500 C). En tenant en compte de ces critères, nous avons choisi de travailler avec des fluences entre 1x10 16 et 5x10 16 He/cm 2. Pour les valeurs d énergie, nous avons simulé avec SRIM les pouvoirs d arrêt dans les différents métaux CC et nous avons calculé, pour différentes valeurs d énergie d implantation, la profondeur d implantation. Nous avons choisi de travailler à une profondeur moyenne de ~200 nm, avec une énergie de l ordre de 45 kev pour le vanadium et de l ordre de 60 kev pour le fer. Les profils d hélium sont déterminés par SRIM en employant l option "full damage cascade calculation". Les valeurs d énergie seuil de déplacement E 0 (en anglais "threshold displacement energy") utilisées dans le calcul ont été déduites à partir des données de la littérature [ASTM 2003]. La figure II.1 présente le profil d implantation en profondeur des ions 4 He ainsi que le profil de lacunes calculés par SRIM pour une fluence de 5x10 16 He/cm 2. Les profils sont de type Gaussiens. La concentration de lacunes prévue par SRIM est une valeur indicative maximale de la concentration de défaut dans les échantillons car le logiciel SRIM, comme décrit précédemment, ne tient pas compte des recombinaisons en cours d implantation. Fig. II.1- Profils de l hélium et des lacunes obtenus par SRIM dans les métaux CC implantés à une fluence de 5x10 16 He/cm 2. L implantation des ions hélium 4 He + a été effectuée au CSNSM (Centre de Spectrométrie Nucléaire et de Spectrométrie de Masse) du CNRS d Orsay sur l implanteur IRMA, à température ambiante. Cet implanteur possède une source de type Bernas-Nier et permet de produire des ions d énergies allant de quelques kiloélectronvolts à 570 kev. Pour les échantillons monocristallins, le faisceau d ions a été dévié d un angle de 7 par rapport à la normale pour éviter tout phénomène de canalisation. 65

66 Après implantation, les échantillons sont conservés dans un cryostat afin de limiter la diffusion de l hélium dans la structure. Nous avons divisé les implantations en trois séries, qui vont être l objet d étude des trois parties du chapitre "Résultats et Discussion" dans ce manuscrit : - Série 1 : échantillons polycristallins de V et Fe implantés à basse fluence (10 16 He/cm 2 ). - Série 2 : échantillons monocristallins de V et Fe implantés à basse fluence (10 16 He/cm 2 ). - Série 3 : échantillons polycristallins de V et Fe implantés à haute fluence (2,5x10 16 et 5x10 16 He/cm 2 ). Le tableau II.2 reprend les conditions d implantation des échantillons et les paramètres obtenus par la simulation SRIM pour chaque série d implantation. Serie 1 V-PC Fe-PC Ion 4 He + 4 He + Energie (kev) Température ( C) Fluence (ions/cm 2 ) 1x x10 16 Max. dpa R p (nm) 0, , C He (appm) 2,3x10 4 1,7x10 4 C He max. (at./cm 3 ) C He (%at.) 6,75x ,30 6,35x ,79 Serie 2 V-MC Fe-MC Ion 4 He + 4 He + Energie (kev) Température ( C) Fluence (ions/cm 2 ) 1x x10 16 Max. dpa R p (nm) 0, , C He (appm) 2,3x10 4 1,7x10 4 C He max. (at./cm 3 ) C He (%at.) 6,75x ,30 6,35x ,79 II.2.B. Serie 3 V-PC Fe-PC Ion 4 He + 4 He + 4 He + 4 He + Energie (kev) Température ( C) Fluence (ions/cm 2 ) 2,5x x ,5x x10 16 Max. dpa R p (nm) 1, , , , C He (appm) 5,7x10 4 1,1x10 5 4,5x10 4 8,9x10 4 C He max. (at./cm 3 ) C He (%at.) 1,69x ,74 3,38x ,49 1,59x ,47 3,18x ,95 Tableau II.2- Conditions d implantation des échantillons. Traitement thermique post-implantation Dans le but de relier les résultats obtenus par spectrométrie de désorption thermique avec d autres techniques comme le SIMS et le MET et afin d étudier l évolution de l hélium implanté au sein de la matrice, plusieurs traitements thermiques ont été effectués sur des échantillons 66

67 implantés. Deux approches ont été utilisées : une isothermique, impliquant une température et différents temps d exposition, et une isochrone, variant la température pour une même durée de recuit. Les conditions du traitement thermique ont été définies par rapport aux spectres TDS des échantillons du V et Fe polycristallins implantés (voir les items III.1.C, III.2.C et III.3.C). La durée a été arbitrairement fixée à 1 heure et 2 heures pour que le système ait le temps de se réorganiser sans que la désorption ne soit trop importante (Tableau II.3). Fluence (ions/cm 2 ) T ( C) Temps (h) Atmosphère Série 1 et 2 1x , 700 et et 2 Sous vide (V) et sous Ar (Fe) Série 3 II.3. 2,5x Sous vide (V) et sous Ar (Fe) 5x et 2 Sous vide (V) et sous Ar (Fe) Tableau II.3- Conditions des traitements thermiques post-implantation. II.3.A. MÉTHODES EXPÉRIMENTALES Méthodes de caractérisation microstructurale Cette première partie décrit d abord les deux méthodes utilisées, i.e. la microscopie électronique à balayage (MEB) et la diffraction des rayons X (DRX), pour l analyse de la microstructure (taille et forme des grains, état de surface, cristallographie) des échantillons analysés, que ce soit avant implantation, après implantation ou après traitement thermique. II.3.A.a. Microscopie électronique à balayage (MEB) L observation de la microstructure et de l état de surface des échantillons pré-implantation, post-implantation et post-traitement traitement a été effectuée par microscopie électronique à balayage avec un appareil de type Karl Zeiss Gemini FEG. Des microanalyses par Energie Dispersive de rayons X (EDX) associées permettent d établir des cartographies par élément chimique. Les tailles de grain ont été déterminées grâce au traitement des images résolues par le logiciel d acquisition des images LC Micro (fourni par Olympus). Pour chaque image, nous avons pris en compte la mesure de la taille de grain sur un lot de 100 à 150 grains. La taille a été considérée comme la distance la plus large d un joint de grain à l autre. II.3.A.b. Diffraction des rayons X (DRX) La diffraction des rayons X est une technique d analyse non destructive utilisée dans le but d accéder à des informations qualitatives et quantitatives sur les différentes microstructures étudiées. Dans notre étude, l utilisation de la diffraction de rayons X a permis de caractériser l évolution microstructurale dans les échantillons monocristallins après implantation et posttraitement thermique. Les analyses ont été réalisées sur un diffractomètre Bruker D8-Advance au Service de Recherches de Métallurgie Appliquée (SRMA) du CEA Saclay. Ce diffractomètre a été utilisé en mode Bragg-Brentano, en configuration θ-2θ. Les conditions d analyses ont été les suivantes : Générateur RX : anticathode Cu (λ Kα=1, Å), U = 40kV, I = 40 ma. 67

68 Filtre Nickel. Fente divergence = 0,6 mm. Détecteur linéaire Lynxeye (ouverture 3 ). Plage de discrimination en énergie du détecteur : 0,19-0,25 V. Fente détecteur = 8 mm. Acquisition : domaine angulaire (2θ) : 40 à 140 ; pas d analyse : 0,02 et temps de mesure par pas : 10 s. L indexation des diffractogrammes est réalisée à l aide du logiciel Bruker-EVA couplé à la base ICDD Pdf4+. II.3.B. Méthodes d analyse des interactions He-matériaux Cette seconde partie vise à décrire les méthodes utilisées pour analyser les interactions entre l hélium implanté et le matériau à l état implanté et après traitement thermique, que ce soit en termes de nature des sites de piégeage et ses énergies associées, du profil de concentration de l hélium en profondeur et de la distribution des bulles dans la matrice (taille, densité, localisation). Quatre techniques complémentaires ont ainsi été mises en œuvre : la spectrométrie de désorption thermique (TDS), la spectroscopie de masse d ions secondaires (SIMS), l analyse ERDA ions lourds (HI-ERDA) et la Microscopie Electronique en Transmission (MET). II.3.B.a. Spectrométrie de désorption thermique (TDS) Le principe de la TDS consiste à chauffer l échantillon métallique sous ultravide et à identifier, grâce à un spectromètre de masse, les éléments qui en désorbent. Dans le cas présent, nous nous intéressons plus particulièrement au signal d hélium en fonction de la température utilisant une vitesse de chauffage constante (mode isochrone) de 10 C/min pour une gamme de températures allant de la température ambiante à 1300 C. Fig. II.2- Photo d ensemble du bâti de thermodésorption à gauche et photo du four/porteéchantillon (en encart : vue du filament de tungstène) à droite. Le vide est maintenu dans le bâti (Fig. II.2) par un système de pompage comprenant une cascade de pompes primaire et secondaire. Le chauffage est assuré par un four/porte-échantillon 68

69 couplant un filament de tungstène pour la partie chauffage résistif (T max=600 C) et un système de bombardement électronique complémentaire pour atteindre 1300 C. Le contrôle de la rampe se fait via un régulateur de température de type Eurotherm couplé à l alimentation électrique du four (alimentation ACTBE Méca2000). Enfin, le spectromètre de masse (Hidden Analytical- HAL 3F/PIC), quadripolaire, permet la détection en mode Faraday pour les gaz dont la pression est supérieure à 10-7 mbar, ou en mode Multiplicateur d Electrons (SEM en anglais Secondary Electron Multiplier) pour des pressions inférieures. Dans le cas des analyses menées sur les échantillons implantés, les différentes espèces suivies sont l hélium (m/z=4) en mode SEM, l hydrogène (m/z=2), l eau (m/z=18), l azote (m/z=28), l oxygène (m/z=32) et le dioxyde de carbone (m/z=48), ces dernières espèces étant suivies en mode Faraday. Le multiplicateur d électrons n est pas un SEM "classique ", mais un "Fast Pulse Counting detector". Il s agit d un détecteur de type compteur à impulsion qui ne donne pas directement une pression partielle mais un nombre de coups par seconde (CPS) correspondant à la détection des ions d hélium. Pour accéder à la pression exacte d hélium, il est alors nécessaire d étalonner le système à l aide d une fuite calibrée pour transformer par la suite les CPS en mbar. Toutefois cela n a pu être effectué au cours de la thèse pour des raisons techniques (absence d emplacement pour fuite calibrée sur le bâti initial et acquisition tardive de ce modèle de spectromètre de masse). Le réglage des paramètres de l analyse et l acquisition de spectres se fait grâce au logiciel MASsoft Professional Version 7. L émission qui contrôle le courant traversant les filaments de la source, et par conséquent le nombre d électrons émis a été fixée à 100 µa. Pour le SEM, la valeur d émission utilisée, est plus élevée (~250 µa), afin d améliorer le signal d hélium visible sur le détecteur. Le "Settle Time" correspondant au temps de stabilisation de l électronique lors du passage d une masse à une autre est réglé à 100% (réglage idéal défini par le logiciel). Le "Dwell Time" correspondant au temps d intégration de la mesure est également réglé à 100% pour assurer un ratio signal sur bruit de 1%. La tension de multiplication appliquée au SEM est de 1800 V. Avec ces conditions d analyse, un intervalle entre deux acquisitions de l ordre de 6 s a été obtenu, ce qui a permis un écart entre deux points de mesure inférieur à 1 C pour une rampe de 10 C/min. Enfin pour chaque échantillon, 2 cycles thermiques sont successivement réalisés afin de suivre sur plusieurs rampes le comportement de l hélium, la première restant celle qui traduit le mieux les interactions initiales entre He implanté et le matériau considéré. Le spectre brut du premier cycle thermique obtenu par TDS (en fonction du temps) et la rampe de température suivi sont présentés à titre d exemple dans la figure II.3. Tous les spectres bruts sont ensuite traités à l aide du logiciel KaleidaGraph afin d obtenir des spectres d hélium en fonction de la température. 69

70 Fig. II.3- Spectre TDS brut du premier cycle thermique (en fonction du temps) et rampe de température (10 C /min) pour un échantillon de vanadium polycristallin implanté 45 kev à 5x10 16 He/cm 2. Traitement des données - Calcul des énergies L apport thermique lié au chauffage de l échantillon permet de libérer progressivement l hélium initialement piégé sous différentes formes de complexes hélium-lacunes He nv m, héliuminterstitiels He pi q ou de bulles (gros amas). Pour une énergie correspondant à l énergie d activation (ou de dissociation) pour la désorption de l hélium, l ensemble de ces complexes désorbe, donnant un pic de pression à la température T D en fonction de la rampe de chauffage β (en C/min). La connaissance de ces deux paramètres permet la détermination de l énergie de dissociation E D en faisant l hypothèse d une cinétique de diffusion d ordre 1 [Morishita, 2003a], selon l équation suivante : = exp Avec : C (t)= concentration d hélium sur le site de piégeage considéré à la température T. ν 0= fréquence de vibration de l hélium sur le site du réseau (ν 0 = s -1 ). E D= énergie de dissociation entre un hélium et un site de piégeage du matériau (en ev). k B= constante de Boltzmann (k B=8,617x10-5 ev. K -1 ). T= température, fonction du temps T=F(t) (en K). On ne considérera dans cette approche aucun piégeage ou recombinaison en surface et aucune interaction possible entre amas hélium-lacunes ou entre l hélium dépiégé et d autres amas présents sur son parcours. La résolution de l équation précédente par la méthode à une rampe implique la résolution de l équation dc 2 /dt 2 =0 avec l hypothèse d une rampe de température constante (dt/dt=β). On peut montrer que le pic de température T=T D obéit à l équation : = β exp 70

71 Cette équation nous permet de calculer l énergie de dissociation E D à chaque pic de désorption d hélium T D à l aide d un algorithme et de la fonction de Lambert. II.3.B.b. Spectrométrie de masse d ions secondaires (SIMS) Le principe du SIMS (Spectrométrie de masse d ions secondaires) consiste à bombarder progressivement la surface du matériau par un canon d ions incidents, et à mesurer au cours du temps les ions secondaires issus de cette abrasion par spectrométrie de masse (Fig. II.4). A partir de ces données, il est possible de suivre la composition de l échantillon en fonction de la profondeur analysée. Cette technique nous permet de mesurer le profil d hélium implanté, de vérifier s il correspond à ce qui a été préalablement simulé par SRIM et de suivre son évolution suite à différents traitements thermiques. Fig. II.4- Principe de la détection de l hélium par SIMS. Les mesures ont été effectuées sur un SIMS de type CAMECA IMS 7f au laboratoire du Groupe d Etude de la Matière Condensée (GEMaC), au CNRS de Versailles (Fig. II.5). Fig. II.5- SIMS CAMECA IMS 7f au GEMaC (CNRS de Versailles). Un faisceau incident d ions primaires Cs + (10 kev, 40 na) a été utilisé pour balayer une surface de 150x150 µm 2. Afin de détecter les ions secondaires positifs de type MCs +, l'échantillon a été tenu à un potentiel positif élevé (+5 kv) conduisant à une énergie d'impact de 5 kev et un angle d'incidence de 46. Pour obtenir un taux de comptage suffisant, la zone analysée initialement limitée à un cercle de 30 µm a été étendue jusqu'à représenter 70% de la surface balayée. La 71

72 fenêtre électronique de comptage ainsi utilisée permet d'éviter les effets de bord de cratère. Dans ces conditions expérimentales, la résolution de masse est de M/ M = 300. Après l analyse SIMS, des mesures de profondeur de cratère (Z) ont été obtenues sur un profilomètre DEKTAK 8. La vitesse d abrasion (v) est déduite à partir de la profondeur et du temps total d abrasion (Tableau II.4). A partir de la valeur de v, les signaux vs temps d abrasion (coups/s) ont été transformés en signaux vs profondeur (coups/nm). Ceci nécessite que la vitesse obtenue soit constante en tout point de l échantillon. Pour chaque échantillon, au moins deux mesures de cratère ont été réalisées pour s assurer de la reproductibilité du résultat. L hélium est l élément le plus difficile à ioniser du fait d une énergie d ionisation extrêmement élevée (~25 ev), raison pour laquelle il est détecté indirectement sous la forme moléculaire 133Cs 4 He + (m/z=137) et non sous sa forme directe ( 4 He + ). En parallèle de cet élément, sont aussi enregistrées les masses relatives à la matrice. Pour les éléments de matrice, les espèces analysées sont donc: 133 Cs 51 V + (m/z= 184) et 133 Cs 56 Fe + (m/z= 189). Dans certains cas, un spectre de masse général a également été effectué afin de vérifier l absence d interférence de masse ou de pollution. Les profils de 133 Cs 4 He + et 133 Cs 51 V + en profondeur sur un échantillon de vanadium polycristallin implanté 45 kev à 5x10 16 He/cm 2 sont présentés à titre d exemple, dans la figure II.6. Fig. II.6- Profils de 133 Cs 4 He + et 133 Cs 51 V + (détectés sous forme moléculaire positif) pour un échantillon de vanadium polycristallin implanté 45 kev à 5x10 16 He/cm 2. Pour le signal d hélium, la mesure en CPS a été convertie en atomes/cm 3, en utilisant la formule suivante : = Avec : C He =concentration atomique de l hélium (en atomes He/cm 3 ) en une profondeur donnée. I He = le signal de l hélium (en CPS) en une profondeur donnée. I M = le signal de la matrice M (référence) (en CPS) en une profondeur donnée. 72

73 RSF= le facteur de sensibilité relative de l hélium dans une matrice M. Dans le tableau II.4, nous présentons les valeurs de RFS obtenues en suivant la procédure décrite par Lefaix et al. [Lefaix-Jeuland, 2013b] pour chaque métaux CC. Cette constante a été évaluée en considérant que la rétention initiale est de l ordre de l ensemble de la dose implantée. V Fe v (nm/s) 1,02±0,06 1,07±0,13 RSF 1,12x ,83x10 25 Tableau II.4- Vitesses d abrasion (v) (nm/s) et facteurs de sensibilité relative (RSF) (at/cm3) obtenus par SIMS dans les métaux CC implantés. Afin de valider la reproductibilité et la fiabilité d une analyse SIMS, deux cratères (au moins) ont été mesurés sur le même type d échantillon, dans les mêmes conditions. Les profils obtenus pour toutes les masses sont toujours similaires, ce qui démontre une vitesse d abrasion homogène sur l ensemble des mesures et un bon accord avec les résultats obtenus. II.3.B.c. L analyse ERDA ions lourds couplée avec la RBS La spectrométrie de recul élastique induit par un faisceau d ions lourds (HI-ERDA pour High Energy Recoil Detection Analysis) et la spectrométrie de rétrodiffusion élastique Rutherford (RBS pour Rutherford Backscattering Spectrometry) sont des techniques d analyse par faisceau d ions. Elles sont non destructives et ne produisent pas d éléments radioactifs. L analyse HI-ERDA permet d obtenir, comme l analyse SIMS, un profil d hélium dans l échantillon. Le principe de cette technique consiste en l analyse de particules légères (avec Z<6) reculées sous l impact d un faisceau d ions plus lourds. Parallèlement l analyse RBS permet d analyser les ions lourds rétrodiffusés et ainsi d avoir accès à des informations sur la masse et la profondeur des éléments constitutifs de la cible, i.e. les profils des éléments de matrice (V, Fe). L analyse RBS nous donne aussi une information importante sur la charge reçue par l échantillon au cours d une analyse. Les analyses ERDA ions lourds couplées avec la RBS dans cette étude ont été réalisées sur la plateforme triple faisceau JANNUS du Service de Recherches de Métallurgie Physique. La source d ions utilisée est l accélérateur linéaire de 3 mégavolts (MV) EPIMETHEE à résonance cyclotronique électronique. Un schéma de la configuration expérimentale de l analyse est présenté sur la figure II.7. L échantillon et les détecteurs sont localisés dans la chambre monofaisceau E3 [Leprête, 2013 ; Loussouarn, 2015]. L ion incident est un ion 16 O 5+ avec une énergie de 15 MeV. L angle d incidence du faisceau (α) est de 15 par rapport à la surface de l échantillon. L angle de détection du détecteur ERDA (ф) est de 30 par rapport à la direction incidente. Le détecteur ERDA est positionné après un écran absorbant d aluminium d une épaisseur de 9 µm, afin de stopper les ions oxygènes rétrodiffusés dans cette direction. 73

74 Fig. II.7- Schéma de la configuration expérimentale de l analyse ERDA-IL. Après l analyse expérimentale, deux spectres sont obtenus pour chaque échantillon : un spectre ERDA et un spectre RBS. La figure II.8 montre les spectres bruts obtenus pour un échantillon de vanadium polycristallin implanté 1x10 16 He/cm 2. Le spectre RBS comme précisé précédemment nous donne une information sur la matrice vanadium et le spectre ERDA sur les éléments légers (H et He) présents dans la matrice. (a) (b) Fig. II.8- Spectres issus de l analyse ERDA-IL de l échantillon de vanadium polycristallin implanté en hélium à 5x10 16 He/cm 2 : (a) Spectre RBS, (b) Spectre ERDA (en échelle logarithmique). Pour obtenir le profil de concentration de l hélium en profondeur, ces spectres bruts doivent être traités. Pour cela, il faut que les canaux (abscisses du spectre) soient convertis en énergie via un étalonnage [Loussouarn, 2015 ; Trocellier, 2013] et le nombre de coups (ordonnées du spectre) convertis en concentration en utilisant le logiciel de simulation SIMNRA [Mayer, 1997]. Ce logiciel permet de simuler des spectres RBS et HI-ERDA en indiquant tous les paramètres expérimentaux ainsi qu une cible virtuelle formée de couches successives discrètes. Le spectre théorique est ensuite superposé avec le spectre expérimental. S ils ne superposent pas, il faut réajuster les valeurs d entrée jusqu à trouver la meilleure correspondance possible entre spectre simulé et spectre expérimental. Cette correspondance est uniquement visuelle, le logiciel ne prenant pas en compte les données expérimentales, ce qui implique une incertitude liée à l utilisateur. De plus il n existe pas de solution unique à la déconvolution des signaux. Il est donc nécessaire d avoir le plus d informations possibles sur un échantillon pour exploiter les résultats de l analyse. Enfin, la nécessité de décrire la cible comme une succession de couches discrètes peut rendre délicate l interprétation de certaines données comme la description de profils de diffusion. 74

75 Suite aux traitements des deux spectres expérimentaux selon la méthode précédemment décrite, nous obtenons un histogramme de la distribution en profondeur d hélium. Nous pouvons aussi quantifier la dose d hélium total dans l échantillon implanté. Dans la figure II.9, nous pouvons observer à gauche, le meilleur spectre simulé superposé avec le spectre expérimental obtenu pour un échantillon vanadium polycristallin implanté en hélium à 5x10 16 He/cm 2. Comme nous l avons détaillé précédemment, nous pouvons obtenir à partir de ce spectre théorique, l histogramme de la concentration d hélium en profondeur (SIMNRA). Celui-ci est présenté à droite dans la figure II.9, superposé avec le spectre obtenu par SRIM. Fig. II.9- Spectres ERDA expérimental et simulé par le logiciel SIMNRA à gauche et profil SIMNRA obtenu superposé au profil SRIM à droite, pour un échantillon de vanadium polycristallin implanté en hélium à 5x10 16 He/cm 2. II.3.B.d. Microscopie électronique en transmission (MET) La microscopie électronique en transmission permet de caractériser la microstructure de matériaux grâce à des images obtenues en utilisant un faisceau d électrons transmis au travers de zones très minces du matériau (typiquement de l ordre de quelques centaines de nanomètres). L interaction entre le faisceau et la matière donne lieu à des contrastes qui dépendent de la nature des défauts présents dans le matériau d étude et des conditions d imagerie (champ clair, champ sombre). La colonne sous vide d un microscope est constituée d'une source d'électrons, de lentilles condenseurs, d'un porte-échantillon, d'une lentille objective, de plusieurs lentilles intermédiaires et de projection, ainsi que de différents systèmes d'observation et d'enregistrement des clichés. Dans notre étude, l utilisation du MET permet de caractériser la distribution et la morphologie des bulles d hélium (en mode champ clair et diffraction en sélection d aire). Pour les observations conventionnelles nous avons utilisé un microscope FEI TECNAI F20 à 200 kv équipé d un camera CCD Orius SC200 (Fig. II.10). Pour la détermination de l épaisseur locale des échantillons, nous avons utilisé un microscope de type JEOL 2100 à 200 kv équipé d un filtre GIF (Gatan Imaging Filter) EELS et un camera Gatan Orius SC200 D. 75

76 Fig. II.10- Microscope électronique en transmission FEI TECNAI F20 (SRMP). Dans un premier temps, nous présenterons les contrastes induits et les conditions d imagerie pour mettre en évidence et caractériser la distribution et la morphologie de bulles (contraste de bulles). Dans un deuxième temps, nous présenterons la technique employée pour déterminer l épaisseur locale des échantillons, ce qui est indispensable pour calculer la densité des bulles présentes. II.3.B.d.i. Contrastes de bulles Nous présentons ci-dessous les techniques utilisés pour déterminer la taille et la densité de bulles, objets tridimensionnels formés sous implantation. La technique employée pour mettre en évidence et déterminer la taille et la densité de bulles consiste à réaliser des séries focales : soit sous-focalisée ou sur-focalisée [Jenkins, 2006]. De cette manière, nous faisons apparaître des franges de Fresnel dues au changement de potentiel entre la région vide (avec hélium) et la matrice. Les bulles présenteront alors un contraste constitue par un disque clair entouré d une frange sombre en conditions sous-focalisées ou apparaitront sous la forme d un disque sombre entouré d une frange claire en conditions surfocalisées (Fig. II.11) Cette technique permet alors de détecter des bulles de taille nanométrique. Les observations de bulles sont généralement effectuées loin des conditions de Bragg afin de limiter le contraste dû aux dislocations. Fig. II.11- Images MET de bulles d hélium sous-focalisées 1 µm (à gauche) et surfocalisées + 1µm (à droite) dans un échantillon de fer implanté 60 kev à 1x1016 He/cm2 et post-recuit à 700 C pendant 2 heures. Les images prises au MET sont traitées à l aide du logiciel Digital Micrograph, sous format dm3. Les mesures de la taille de bulles (nm) et la densité de bulles (bulles/cm3) sont réalisées sur 76

77 trois images MET pour chacun des échantillons analysés. Dans chaque image, nous avons découpé les lames FIB en segments de 50 nm de profondeur et 200 nm de large. Nous avons mesuré la taille et compté la quantité de bulles pour chacun des segments (entre 100 et 200 bulles par segments) (Fig. II.12). Fig. II.12- Mesure de la taille et la densité des bulles dans une image MET découpée en tranches de 50 nm de profondeur et 200 nm de longueur obtenue pour échantillon de fer implanté 60 kev à 1x10 16 He/cm 2 et post-recuit à 700 C pendant 2 heures. Les mesures de la taille de bulles sont réalisées avec la méthode recommandée par Jenkins et al. [Jenkins, 2006]. Selon cette approche, nous avons considéré que le diamètre du disque clair délimité par la frange sombre correspond, en conditions sous focalisées, à la taille des bulles. Les mesures de la densité de bulles (bulles/cm 3 ) sont réalisées en divisant la quantité de bulles comptées par segment par le volume de la zone analyse. Ce volume est égal à la surface du segment et l épaisseur de l échantillon obtenu par EELS (voir l item II.3.B.d.ii). La morphologie de la microstructure de bulles est déterminée par indexation de clichés de diffraction. En utilisant le porte-objet à double inclination, l échantillon est orienté pour que l un des axes cristallins soit orienté parallèlement au faisceau incident et le cliché peut ainsi être enregistré en axe de zone. La connaissance de la longueur de camera permet de mesurer les valeurs des distances inter-réticulaires d hkl. Les rapports des distances entre le faisceau transmis et différentes réflexions, ainsi que les rapports des angles des vecteurs de diffraction permettent d indexer les réflexions par des indices de Miller correspondants. Les schémas de diffraction correspondant à différents axes cristallographiques des structures cristallines cubiques centrées sont rassemblés dans la figure II

78 Fig. II.13- Schémas des clichés de diffraction de structure cubique centrée en six axes de zone ([111], [001], [011], [113], [133] et [012]) [Loretto, 1984]. II.3.B.d.ii. Mesures d épaisseur L évaluation de la densité de bulles nécessite la connaissance de l épaisseur de la zone de travail. Pour ce faire, la méthode dite de perte d énergie (Energy Electron Loss Spectroscopy EELS) est utilisée. Cette technique repose sur le principe d analyse des pertes d énergie des électrons diffusés inélastiquement par les atomes de l échantillon. Plus les épaisseurs traversées par les électrons émis seront importantes, plus les pertes en énergie le seront aussi [Williams, 1996]. On peut donc aisément accéder à ces grandeurs. Un spectre EELS est généralement divisé en trois parties (Fig. II.14). Le pic très intense de "pertes nulles" (en anglais "zero loss peak") (~0,7 ev) correspond aux électrons transmis élastiquement ou avec des pertes d énergie très faibles. La région des pertes faibles (inférieures à 50 ev) correspond à des excitations individuelles inter- et/ou intra-bandes ainsi qu à une excitation collective des électrons de valence communément appelée plasmon. Les pics "plasmons" sont caractéristiques des éléments composant l échantillon. Enfin, dans la région des pertes élevées (supérieures à 50 ev), les signaux détectés correspondent aux excitations individuelles d électrons de cœur des atomes du matériau irradié. La forme du spectre dépend de la structure du matériau implanté, la tension du microscope, l angle de convergence du faisceau (α) et l angle de collection (β). 78

79 Fig. II.14- Spectre EELS obtenu sur un échantillon de Fe pur implanté 60 kev à 1x10 16 He/cm 2 et post-recuit à 700 C pendant 2 heures. La procédure la plus courante pour estimer l épaisseur locale des échantillons utilise un modèle "log-ratio". Deux spectres sont nécessaires. Le premier est créé avec la fraction des électrons diffusés élastiquement (spectre "zero peak lost" avec une intensité I o). Le deuxième est créé avec tous les électrons diffusés de façon élastique et inélastique par l échantillon (spectre avec une intensité I t). La division des intensités des deux spectres donne accès selon l équation suivante à la valeur du ratio entre l épaisseur de l échantillon (e) et le libre parcours moyen des électrons (λ) [Williams, 1996]. = Ces analyses ont été effectués sur un microscope de type JEOL 2100 à 200 kv équipée d un filtre GIF (Gatan Imaging Filter). L option "compute thickness" dans le software EELS GATAN donne directement la valeur de ln (I t/i o). Il suffit de calculer λ correspondant aux conditions de l expérience et au matériau de l étude grâce à la formule suivante [Iakoubovskii, 2008 ; Ould Amer, 2011]: 1 = 11, ln =,, et =20 mrad Avec: E T= tension du microscope (200 kv). F= le facteur relativiste donné par (1+E 0/1022) / (1+E 0/511)2= 0, ρ= densité massique du matériau. α= 0 mrad. β=100 mrad. Pour chaque métal, les λ obtenus sont présentés dans le tableau II.5. Nous avons travaillé en mode diffraction avec un angle de collection important (> 100 mrad) pour laquelle l intensité des électrons est maximale et λ devient indépendant de β et α. 79

80 V Fe λ (nm) 110,6 117,7 Tableau II.5- Libre parcours moyen des électrons (λ) des métaux CC. L erreur dans la mesure de l épaisseur par cette technique est de l ordre de 20 à 30 %. Cette variation dépend de l expérimentateur et de la qualité des échantillons (contamination, surface non homogène). 80

81 Troisième chapitre III. RÉSULTATS ET DISCUSSION 81

82 82

83 III. RÉSULTATS ET DISCUSSION Les matériaux de structure des futurs réacteurs nucléaires devront faire face à une importante irradiation neutronique, source d endommagement (déplacements atomiques) et de transmutation (formation d hélium et hydrogène) ainsi qu au bombardement de particules d énergie élevée, dont notamment des atomes d hélium. Pour poursuivre le développement des matériaux envisagés dans ces cœurs de réacteurs, et plus particulièrement des alliages métalliques de structure CC, il donc nécessaire d acquérir une meilleure compréhension de l interaction entre l hélium et les métaux de base constituant ces alliages. En effet, le comportement de l hélium dans les métaux CC a fait l objet de nombreuses études dans la littérature. A ce stade des connaissances, plusieurs questions restent toutefois en suspens tant sur le comportement de l'hélium que sur l'évolution des défauts structuraux en présence de ce gaz. Notre objectif est de poursuivre l'analyse du comportement de l hélium dans deux types de métaux CC (le fer et le vanadium) et d'étudier plus précisément les interactions entre l hélium et les matrices métalliques dans diverses conditions d'implantation et ce avec une combinaison de techniques expérimentales complémentaires. Les données expérimentales collectées permettront de décrire les mécanismes thermodynamiques et cinétiques impliqués dans le comportement d He en vue d'un couplage avec la simulation. Dans les futurs réacteurs nucléaires, la maîtrise de ces mécanismes permettra de déterminer les principes de base qui contrôlent les phénomènes d endommagement des alliages métalliques envisagés liés à la présence d hélium (gonflement, fragilisation, cloquage). De plus, une comparaison du comportement de ce gaz dans les deux métaux CC étudiés servira de guide pour la sélection d alliages optimisés pour faire face aux flux neutronique et d hélium dans les réacteurs du futur. L étude présentée ici s oriente vers une approche expérimentale avec des conditions volontairement éloignées de ce que pourra rencontrer les matériaux dans les réacteurs à neutrons rapides et à fusion, i.e. nous travaillerons avec des métaux purs de structure CC (pas d alliages complexes ou d aciers), une température d implantation basse (25 C à la différence des futurs réacteurs où les températures se situent entre 500 C et 800 C), des doses d hélium élevées et des dommages balistiques faibles (contrairement aux futurs recteurs où le taux de génération d hélium varie entre 1 et 10 appm He/dpa). Cependant, l élection de cette gamme de conditions d implantation de l hélium, nous permettra de simplifier les paramètres d étude et d extraire les propriétés fondamentales de l hélium dans les métaux de base de ses alliages. Ce sont aussi des conditions qui, par la suite, sont plus propices à être reproduites par des méthodes théoriques comme la dynamique d amas. Les parties qui constituent ce chapitre s organisent suivant un niveau croissant de complexité du système : - la première partie étudiera le comportement de l He dans des échantillons polycristallins implantés à basse fluence (10 16 He/cm 2 ) afin de déterminer les différents mécanismes impliqués d une part dans le piégeage et la diffusion de l He et d autre part dans la germination et la croissance des bulles dans les deux métaux CC. - la deuxième partie décrira le comportement de l hélium dans des échantillons monocristallins implantés à basse fluence (10 16 He/cm 2 ) dans le but de mettre en évidence le rôle des joints de grains sur le piégeage et la diffusion de l He ou des défauts ponctuels. 83

84 - une troisième partie présentera le comportement de l hélium dans des échantillons polycristallins implantés à haute fluence ( 2,5x10 16 He/cm 2 ) afin d étudier l effet de la dose sur les interactions He-Fe et He-V. Nous suivrons dans ces trois parties la même approche expérimentale précédemment décrite dans le chapitre "Matériaux et Méthodes". Un rappel de cette approche est présenté sur la figure III.1. Nous caractériserons d abord l état non implanté (étape P). Cette étape est commune aux trois parties de ce chapitre et fera l objet d un préambule initial. Ensuite, nous présenterons à l intérieur de chaque partie les résultats obtenus pour la caractérisation de l état implanté (étape a), le comportement de l hélium au cours d un traitement thermique in-situ (étape b) et le comportement après traitements thermiques ex-situ (étape c). Chaque partie sera suivie d une discussion des résultats expérimentaux obtenus. Fig. III.1- Schéma de l approche expérimentale adoptée. 84

85 PRÉAMBULE Afin de déterminer et de comprendre les modifications induites par l implantation, il est nécessaire de bien connaitre le matériau à l état non implanté. D une part, ces analyses nous serviront de base pour étudier l effet de l implantation d hélium sur les propriétés microstructurales et surfaciques des différents matériaux. D autre part, nous vérifierions à partir de ces données qu il n y a aucune interférence avec la masse de l He (m/z = 4) et aucune structure qui pourrait ressembler à des bulles dans les échantillons avant implantation. Dans ce préambule nous commencerons par décrire la microstructure initiale et l état de surface, caractérisés par MEB et DRX, des métaux CC impliqués dans cette étude. Puis, nous présenterons les analyses réalisées par SIMS et TDS ainsi que l observation des échantillons avant implantation par MET. Caractérisation microstructurale de l état non implanté Les images obtenues par MEB ont permis de mettre en évidence la microstructure et l état de surface des échantillons de vanadium polycristallin (V-PC) et fer polycristallin (Fe-PC), juste après traitement thermique (Fig. III.2). Fig. III.2- Micrographies MEB des échantillons de fer polycristallin (Fe-PC) et vanadium polycristallin (V-PC) avant implantation. Les échantillons V-PC et Fe-PC, après un recuit à 1000 C 2h sous vide ou sous argon respectivement, présentent une microstructure formée de grains équiaxes hétérogènes. Les diamètres moyens (D g) obtenus sont de l ordre de 120±25 µm pour le Fe-PC et 200±59 µm pour le V-PC. Nous avons constaté à la surface des matériaux la présence de particules de SiC incrustées. La présence de ces dernières résulte du polissage mécanique des échantillons qui se révèle relativement plus complexe pour le vanadium que pour le fer, du fait de la ductilité du métal et de la dureté de l oxyde à éliminer. Le carbure de silicium présent en surface dégrade la pureté chimique de l échantillon. Néanmoins, l aspect de surface reste suffisamment propre pour l étude à venir. Les images obtenues par MEB ont également permis d évaluer l état de surface des échantillons de vanadium monocristallin (V-MC) et fer monocristallin (Fe-MC). Nous constatons dans la figure III.3 la présence de SiC à la surface des monocristaux tels que fournis par le fabricant 85

86 Neyco. Nous pouvons aussi observer des précipités du type (S, Mn) O dans le cas des échantillons Fe-MC. Hormis ces particules, les surfaces sont relativement propres et ne présentent pas d indice de cristallisation partielle. Fig. III.3- Micrographies MEB des échantillons de fer monocristallin (Fe-MC) et vanadium monocristallin (V-MC) avant implantation. Parallèlement aux observations obtenues par MEB, nous avons réalisé des analyses de DRX afin de vérifier l état microstructural initial des échantillons monocristallins. Dans le cas de Fe-MC, les échantillons présentent un pic majoritaire indexé au plan cristallographique (200) et quelques pics parasites. Ces résultats montrent que les échantillons Fe-MC sont bien des monocristaux du type (100). Dans le cas de V-MC (Fig. III.4), les échantillons présentent un pic (200) moins intense que celui observé dans le cas de Fe-MC et une contribution plus importante de pics parasites reliée aux autres plans cristallographiques du type (110), (211), (220), (310) et (222). Ces derniers échantillons ne seraient pas de "vrais monocristaux". Fig. III.4- Diffractogramme de l échantillon V-MC avant implantation (en échelle logarithmique). Analyse des échantillons non implantés par TDS et SIMS Afin de vérifier qu il n y a pas d interférences proches de la masse de ce gaz (m/z=4) dans les échantillons avant implantation, nous avons analysé le signal de cet élément par SIMS et au cours d un traitement thermique par TDS. 86

87 Les spectres obtenus par TDS sur des échantillons avant implantation prouvent l absence d espèces gazeuses de masse 4. Comme nous pouvons observer dans le spectre ci-dessous obtenu pour un échantillon V-PC non implanté (Fig. III.5), aucune espèce gazeuse n a été enregistrée au niveau de la masse 4. Par contre, l analyse a mis en évidence la présence de nombreuses autres espèces correspondant essentiellement à des polluants. Le spectre obtenu avec l ancien spectromètre TDS (Hidden Analytical-HAL 301) présente la pression d hélium mesurée en mode SEM [Gorondy Novak, 2014]. Ce spectromètre de masse a depuis été remplacé par l actuel spectromètre (Hidden Analytical-HAL 3F/PIC) en raison d irrégularités de mesures aux passages de certaines gammes de pression. Cela ne joue aucunement sur cette mesure à l état non implanté. Les autres espèces présentes et mesurées sur cet échantillon vierge (H 2, H 2O, N 2, O 2 et CO 2) peuvent trouver leur origine à la fois dans une pollution de la surface de l échantillon (espèces adsorbées) ou dans la chambre d analyse. Du fait de l augmentation de la température, elles désorbent sans influencer a priori la désorption d hélium. Elles peuvent cependant être sources de problème pour le maintien d un bon vide dans le bâti, ce qui entraine des soucis d ordre technique vis-à-vis du spectromètre de masse. Fig. III.5- Spectres TDS (10 C/min) obtenus pour un échantillon de V-PC non implanté. Les profils m/z=4 obtenus par SIMS sur des échantillons avant implantation confirment l absence d espèces pouvant interférer avec l analyse du profil d He. Par exemple, nous pouvons observer dans la figure III.6, les profils de 133 Cs 4 He + et 133 Cs 51 V + obtenus par SIMS sur un échantillon de V-PC non implanté. L ensemble des signaux obtenus en coups par seconde (CPS) a été normalisé de telle sorte que pour chaque cratère (chaque mesure) le signal de la matrice ( 133 Cs 51 V + ) soit superposable et ce afin de pouvoir faire la comparaison ultérieure entre différents échantillons. Le profil obtenu est en accord avec le spectre observé dans la Fig. III.5 et tous deux confirment l absence de signal relatif à l hélium dans les échantillons avant implantation. 87

88 Fig. III.6- Profils normalisés de 133 Cs 4 He + et 133 Cs 51 V + (détectés sous forme moléculaire en mode positif) pour un échantillon de V-PC avant implantation. Observation des échantillons non implantés par MET Des échantillons ont été observés par MET avant implantation afin de caractériser l état initial et de vérifier l absence de cavités ou de toute autre structure qui pourrait par la suite gêner les observations des effets de l implantation d He. Nous présentons ci-après des images obtenues par MET sur des échantillons V-PC et V-MC non implantés (Fig. III.7). Aucune cavité ou toute autre structure particulière n est à observer le long de la lame transverse. Il existe du dommage lié à la préparation par FIB. Ce dommage n influence pas a priori l observation de bulles, mais par contre peut être source de problème pour l observation de défauts inhérents aux matériaux massifs (dislocations). Par ailleurs, ces observations MET mettent en évidence une couche d écrouissage proche de la surface (entre 200 et 300 nm) liée au polissage mécanique des échantillons monocristallins vierges. Comme ces échantillons ont été fournis par Neyco à l état poli sans aucun traitement thermique ultérieur, la structure n a pas été relaxée contrairement aux échantillons polycristallins qui ont subi un recuit après le polissage mécanique. La présence de cette couche d écrouissage pourrait aussi expliquer les pics parasites observés dans les diffractogrammes des échantillons monocristallins non implantés (voir Fig. III.4). 88

89 Fig. III.7- Image MET d échantillons V-PC et V-MC non implantés. 89

90 Dans ce préambule, nous avons analysé les caractéristiques microstructurales et surfaciques des échantillons avant implantation. D une part, les échantillons polycristallins (Fe-PC et V-PC) présentent une microstructure avec des grains dont les diamètres varient de 100 à 200 μm. D autre part, les échantillons monocristallins (Fe-MC, V-MC) ont une microstructure du type (100) prédominante. En revanche, nous avons observé la présence de raies reliées à d autres plans cristallographiques dans ces échantillons, plus importantes dans le V-MC que dans le Fe-MC. Des impuretés essentiellement dues au SiC sont toujours présentes en surface dans les échantillons polycristallins et monocristallins. Les analyses SIMS et TDS montrent qu aucune espèce gazeuse pouvant interférer avec la mesure ultérieure d He n a été enregistrée. Parallèlement, l observation des échantillons non implantés par MET montre l absence de cavités ou de toute autre structure ressemblent aux bulles le long des lames transverses. Une couche d écrouissage est présente dans les échantillons monocristallins en accord avec les analyses DRX. A partir de la connaissance des caractéristiques initiales de nos échantillons, nous allons pouvoir doser l hélium et suivre son comportement après implantation et traitement thermique au moyen de différentes techniques d analyse. 90

91 III.1. PARTIE 1 : ÉTUDE DU COMPORTEMENT DE L HÉLIUM À BASSE FLUENCE DANS LE VANADIUM ET LE FER POLYCRISTALLINS La première partie de ce chapitre s attachera à l étude du comportement de l hélium à basse fluence (10 16 He/cm 2 ) dans les matrices de vanadium et de fer polycristallins purs. Comme nous avons mentionnée dans notre étude bibliographique, il existe un grand nombre de travaux qui porte sur le comportement de l hélium dans le fer pur, mais très peu de travaux dans le vanadium. Pour les deux métaux, les mécanismes impliqués dans le piégeage, la migration, la germination et la croissance de bulles sont encore mal compris, bien que certaines conditions aient été identifiées comme favorables à leur apparition. Le but de cette partie de l étude est d identifier les mécanismes qui gouvernent le comportement de l hélium à basse fluence pour chacun des métaux CC d étude et d établir des différences et/ou des similitudes entre les interactions He-Fe et He-V. Pour cela nous avons implanté les échantillons polycristallins avec des ions hélium 4 He + d énergies intermédiaires de l ordre 45 kev pour V et 60 kev pour Fe avec une fluence de 1x10 16 He/cm 2. Les conditions d implantation choisies nous permettent d introduire l hélium à une profondeur de 200 nm et à des concentrations au pic d implantation de l ordre de 6,75x10 20 at./cm 3 pour le vanadium et de 6,35x10 20 at./cm 3 pour le fer. Ces échantillons appartiennent à la série 1 d implantation telle que mentionnée précédemment dans le chapitre "Matériaux et Méthodes". Le tableau III.1 regroupe les données relatives aux conditions d implantation des échantillons de cette série. Série 1 V-PC Fe-PC Ion 4 He + 4 He + Energie (kev) Température ( C) Fluence (ions/cm 2 ) 1x x10 16 Max. dpa 0,4577 0,5205 R p (nm) C He (appm) 2,3x10 4 1,7x10 4 C He max. (at./cm 3 ) 6,75x ,35x10 20 C He (%at.) 2,30 1,79 Tableau III.1- Conditions d implantation des échantillons de la série 1. Une fois les échantillons implantés, nous procéderons à l analyse du comportement de l hélium. D abord, nous mettrons en avant les interactions He-Fe et He-V à partir de l analyse des échantillons polycristallins implantés à une fluence de 1x10 16 He/cm 2. Nous présenterons la caractérisation des échantillons implantés (étape a), i.e. leur profil d hélium en profondeur et leur distribution de bulles initiale. Ensuite, nous analyserons le comportement de l hélium, en regardant d une part la désorption de l hélium (TDS) au cours d un traitement in-situ (étape b), et d autre part la diffusion de l hélium (SIMS) et l évolution de la distribution de bulles (MET) après traitement thermique ex-situ (étape c). Finalement, nous présenterons une discussion des résultats obtenus pour cette première partie sur le comportement de l hélium dans échantillons polycristallins implantés à basse fluence. Ces données nous serviront par la suite de référence pour mettre en évidence l effet de la microstructure sur le comportement de l hélium dans la partie 2 de ce chapitre, en comparant 91

92 celles-ci avec l analyse des échantillons monocristallins implantés dans les mêmes conditions, ainsi que l effet de la dose dans la partie 3 de ce chapitre. III.1.A. Caractérisation des polycristaux implantés (étape a) Afin d étudier l effet de l implantation de l hélium sur les échantillons polycristallins, les états implantés sont caractérisés. D abord, la microstructure et l état de surface sont étudiés par MEB. Ensuite, la distribution de la concentration d He et des bulles d hélium en profondeur est analysée par SIMS et MET, respectivement. III.1.A.a. Caractérisation microstructurale après implantation Pour une fluence de 1x10 16 He/cm 2, les résultats obtenus lors de l observation des échantillons polycristallins réalisée au MEB n indiquent aucun changement de l état de surface après implantation, ni aucune trace de pollution supplémentaire pour les deux matériaux étudiés (Fig. III.8). Fig. III.8- Micrographies MEB des échantillons Fe-PC et V-PC après implantation à 1x10 16 He/cm 2. III.1.A.b. Profils d hélium dans les échantillons implantés Dans la figure III.9, nous pouvons observer les profils de concentration d He obtenus expérimentalement par SIMS et théoriquement par SRIM après implantation à 1x10 16 He/cm 2 pour Fe-PC et V-PC. Le calcul de la concentration atomique d hélium par SIMS et SRIM est réalisé en faisant l hypothèse que toute la dose implantée reste à l intérieur du métal (pas de rétrodiffusion au cours de l implantation, ou juste après à température ambiante). 92

93 Fig. III.9- Profils d hélium après implantation à 1x10 16 He/cm 2 pour les échantillons Fe-PC et V-PC. Comparaison avec les profils théoriques d hélium simulés par SRIM. La dynamique de mesure (2 décades), la limite de détection (1x10 19 He/cm 3 ) et la profondeur analysable (500 nm) sont en bon accord avec les résultats obtenus par Lefaix-Jeuland et al. [Lefaix-Jeuland, 2013b] sur Fe-PC implanté 60 kev et 1x10 16 He/cm 2. L'analyse statistique de la forme du profil d hélium donne une concentration maximale d'hélium de l ordre de 7,90x10 20 at./cm 3 et 6,31x10 20 at./cm 3 dans Fe-PC et V-PC, respectivement. Les profondeurs d implantation obtenues sont de l ordre de 159 nm pour le Fe-PC et 195 nm pour le V-PC (Tableau III.2). Fe (SRIM) Fe-PC (SIMS) V (SRIM) V-PC (SIMS) R p (nm) C He max. (at./cm 3 ) 6,35x ,90x ,75x ,31x10 20 Tableau III.2- Paramètres (R p et C He max.) obtenus par SRIM et SIMS pour des échantillons de Fe-PC et de V-PC implantés à 1x10 16 He/cm 2. En supposant qu il n y a pas de diffusion appréciable au cours et/ou après de l'implantation, ces résultats expérimentaux sont comparés aux profils théoriques calculés par SRIM. Malgré les limites de la simulation SRIM déjà mentionnées dans la partie "Matériaux et Méthodes", nous pouvons observer un bon accord entre les données expérimentales et la simulation. Pour les échantillons polycristallins implantés, les intégrales sous les profils expérimentaux sont similaires à celles obtenues dans le cas des profils théoriques. Cependant, la position des pics simulée par SRIM dans le cas du fer pur est légèrement plus profonde que celle observée expérimentalement par SIMS. Pour expliquer ces différences, trois hypothèses peuvent être avancées : La première hypothèse est appuyée par le fait que le pic du profil théorique de concentration des lacunes prévu par SRIM pour les échantillons implantés est situé plus près de la surface (~170 nm) que le pic du profil théorique de concentration d hélium (Fig. III.10). Par conséquent, si la concentration de lacunes créées pendant l implantation est importante, les atomes d hélium interstitiels vont diffuser jusqu à être piégés par les lacunes (mécanisme I) [Trinkaus, 2003]. Dans le cas contraire, les atomes d hélium se regroupent pour former des amas interstitiels He n (mécanisme par "autopiégage"). A 93

94 partir d une certaine taille, ces amas expulsent des auto-interstitiels pour former des amas hélium-lacunes moins mobiles (mécanisme II) [Lucas, 1984]. Sachant que la mobilité des atomes d hélium et des lacunes dans le fer et le vanadium sont similaires (E V M~0,64 ev et E Hei M~0,06 ev pour les deux métaux CC) [Zhang, 2011 ; Fu, 2005] et que la concentration théorique de lacunes après implantation est différente dans le fer et le vanadium (Fig. III.10), nous pouvons supposer a priori que : - dans le cas du fer, où la concentration de lacunes est supérieure à celle du vanadium, le mécanisme I est prédominant par rapport au mécanisme II ce qui entraine un décalage plus important du pic expérimental d He par rapport au pic d hélium théorique dans ce métal. - dans le cas du vanadium, où la concentration de lacunes est moindre que celle du fer, le mécanisme II serait plus favorisé et le pic d He ne se décalerait pas. Fig. III.10- Profils d hélium et de lacunes obtenus par SRIM pour Fe implanté 60 kev-1x10 16 He/cm 2 et V implanté 45 kev-1x10 16 He/cm 2. Toutefois il existe des points qui contredisent ces hypothèses : premièrement, la concentration réelle de lacunes (après recombinaison des défauts) est plus faible que la concentration théorique calculée par SRIM : seuls 10% des lacunes seraient réellement conservés dans le matériau. La différence entre les deux métaux n est donc peut-être plus significative. Deuxièmement, les faibles énergies de liaison (entre 0,02 et 0,21 ev) calculées théoriquement par DFT dans le vanadium pur [Zhang, 2011] indiquent plutôt une instabilité des amas d hélium He n. A la différence du vanadium, les amas He n dans le fer ont une forte attraction (entre 0,43 et 1 ev) et peuvent ainsi induire la formation de bulles sans la présence de lacunes par éjection d auto-interstitiels [Fu, 2005]. La deuxième hypothèse est associée au fait que SRIM ne tient pas compte de la structure cristalline des matériaux étudiés ou de l existence de défauts intrinsèques dans leur matrice métallique (dislocations, joints de grains). Comme nous avons montré dans la caractérisation microstructurale, la différence de taille de grains entre les échantillons Fe-PC (D g ~100µm) et V-PC (D g ~200 µm) est non négligeable. Des études précédentes ont mis en évidence l effet de la microstructure dans la désorption d He [Lefaix-Jeuland, 2013a]. Ces expériences réalisées sur des échantillons comportant différentes tailles de grain indiquent que pour un même groupe de pics, la désorption s est déroulée à plus basse température dans le cas d une microstructure 94

95 présentant une petite taille de grain. Les joints de grains favorisent la désorption d He, agissant comme courts-circuits de diffusion. D autre part, des expériences par µnra montrent une distribution homogène d hélium sur un échantillon d UO 2 implanté avec des ions 3 He (D g~24 µm), alors que ce même type d échantillon, après post-recuit à 1300 C pendant 1h, affiche une distribution hétérogène à proximité des joints de grains tels que révélés par les micrographies optiques. Cette déplétion est expliquée dans le cadre d un modèle de migration d hélium qui suppose une diffusion accrue à proximité des joints de grains, du fait que la concentration de défauts est différente à proximité des joints de grains que ce qu elle est au cœur du grain [Martin, 2006, 2010, 2012]. Dans notre cas, les échantillons de Fe-PC ont un D g plus petit que les échantillons V-PC. Ainsi, les atomes d hélium interstitiels proches du pic d implantation peuvent diffuser via les joints de grain, en décalant la position du pic. Cette probabilité serait plus élevée dans Fe-PC que dans V-PC. Il est à noter également que les échantillons polycristallins ont une taille de grains plus grande que la profondeur d implantation prédite par SRIM (~200 nm). Toutefois, les grains et les joints de grains dans ces échantillons sont distribués de manière aléatoire dans la matrice métallique. De plus, comme indiqué par des calculs atomistiques [Fu, 2005, 2008 ; Morishita, 2003a], la diffusion via les sites interstitiels reste importante même au-dessous de la température ambiante (~0,08-0,06 ev) et correspond à la diffusion de plusieurs dizaines de microns par seconde à température ambiante. La troisième hypothèse, d origine expérimentale, est liée aux erreurs de l échelle des profondeurs établie à partir de la mesure du cratère après analyse SIMS (profilométrie). Cette dernière est parfois compliquée à établir du fait d un état de surface dégradé. En effet, nous avons constaté au fur de la mesure de l abrasion, et donc de la formation du cratère, que les échantillons de Fe-PC sont plus rugueux que les échantillons de V-PC, ce qui entraine des difficultés pour obtenir une valeur moyenne de profondeur. Bien que les deux métaux ont été initialement polis de la même façon, le traitement thermique préimplantation a induit une surface plus rugueuse ("marbre") dans les échantillons de Fe- PC que dans les échantillons V-PC où aucun changement dans l état de surface par rapport aux échantillons polis n a pas été constaté. Bailey et al. [Bailey, 2010] ont proposé que les effets topographiques (dans leur cas, effets produits par la formation de cloques à la surface d échantillons implantés en H + ), induisent une ionisation non-uniforme des échantillons, et donc une vitesse d abrasion non-uniforme au cours de la mesure SIMS. Ainsi, la profondeur du pic d implantation pourrait inclure des erreurs de l ordre de 20% dû aux variations de la vitesse d abrasion pendant la mesure du profil. D autres études ont également démontré que l orientation cristallographique de la surface a également un effet sur la vitesse d abrasion pendant la mesure SIMS, avec une variation de la vitesse en fonction de l orientation des surfaces vis-à-vis du faisceau d ions primaires incident [Iacob, 2004]. Parmi ces trois hypothèses, les erreurs expérimentales par rapport à la mesure de la profondeur semblent être pour nous la plus probable. Les première et deuxième hypothèses restent assez limitées pour expliquer le décalage du pic d He car : les profils d He et de lacunes calculés par SRIM après implantation ne sont pas de "vrais" profils. Pour comparer nos profils expérimentaux avec des profils théoriques plus fiables et se rapprocher des mécanismes de formation des amas (mécanisme I ou mécanisme II), 95

96 il faudrait simuler tant le profil d He que le profil de lacunes avec des méthodes théoriques considérant la recombinaison des défauts et l arrangement cristallin du matériau. Par exemple, le logiciel MARLOWE simule le profil d implantation des ions incidents ou le profil de déplacement atomique généré quel que soit le matériau, monocristallin ou polycristallin. Cependant, ce code de simulation ne permet pas de rendre compte des recombinaisons entre atomes auto-interstitiels et lacunes dues à l agitation thermique lors d une implantation à une température non nulle. Une autre méthode utilisée pour simuler l état du matériau consécutif à une implantation consiste à coupler les résultats issus de MARLOWE à des simulations de type Monte Carlo cinétique d objets (Object Kinetic Monte Carlo, OKMC) qui permettent de simuler la dynamique des défauts créées en fonction de la température d implantation. nous n avons pas à ce stade de l étude de données suffisantes pour conclure que les joints de grains jouent un rôle sur le profil de l He à l état implanté. Pour vérifier cette hypothèse, une option serait de réaliser des analyses complémentaires sur des échantillons avec des tailles de grain différents et sur des monocristaux implantés aux mêmes conditions d implantation. Nous pourrons également regarder la distribution d hélium par µ-nra comme dans le cas des études de Martin et al. [Martin, 2006] et la distribution de bulles par MET dans la matrice et près de joints de grains des échantillons implantés pour analyser les éventuelles différences dans la germination de bulles. Comme décrit précédemment, les profils obtenus par SIMS sont semi-quantitatifs : le calcul de concentration atomique d hélium par SIMS (et SRIM) est réalisé en faisant l hypothèse que toute la dose implantée reste à l intérieur du métal. Afin de vérifier cette dose d implantation, nous avons fait appel à une deuxième technique expérimentale qui permet d obtenir des profils de concentration en profondeur : l HI-ERDA. Celle-ci, contrairement à l analyse SIMS, nous permet de quantifier la dose d hélium totale dans l échantillon implanté. Pour des raisons de temps et de disponibilité des accélérateurs, seule la caractérisation des échantillons du vanadium implanté a pu être réalisée. Dans la figure III.11, nous pouvons observer le profil théorique SRIM, le profil expérimental obtenu par SIMS et le profil expérimental mesuré par HI-ERDA pour les échantillons polycristallins implantés. Afin de comparer l allure des trois profils, la profondeur du pic du profil HI-ERDA (R p~282 nm) a été alignée sur celle du maximum issu de la simulation SRIM (R p~193 nm). Fig. III.11- Profil HI-ERDA obtenu pour un échantillon de V-PC implanté à 1x10 16 He/cm 2. 96

97 Ces résultats montrent un bon accord entre les données expérimentales (SIMS et HI-ERDA) et la simulation (SRIM). Les paramètres obtenus pour les trois profils sont présentés dans le tableau III.3. A partir du profil HI-ERDA, nous avons mesuré une dose d hélium de l ordre de 1,06x10 16 He/cm 2, en accord avec la dose implantée attendue. Ce résultat montre un taux de rétention de l hélium élevée. Par conséquent, il semblerait que tout l hélium implanté reste piégé dans la matrice métallique. V (SRIM) V-PC (SIMS) V-PC (HI-ERDA) R p (nm) C He max. (at./cm 3 ) 6,75x ,31x ,78x10 20 Fluence (ions/cm 2 ) 1x x ,06x10 16 Tableau III.3- Paramètres (R p, C He max. et fluence) obtenus après implantation avec une fluence de 1x10 16 He/cm 2 par SRIM, SIMS et HI-ERDA pour V-PC. Les fluences pour SRIM et SIMS sont évaluées en considérant que la rétention initiale est de l ordre de la fluence implantée. Si les deux techniques expérimentales permettent de caractériser le profil d hélium après implantation, le SIMS a une meilleure résolution en profondeur et une profondeur analysable plus large (10 nm et 500 nm, respectivement) que la technique HI-ERDA (30 nm et 350 nm, respectivement). De plus, la valeur de la profondeur d implantation obtenue par SIMS semble meilleure et plus en accord avec celle attendue par SRIM. Cependant, cette technique n est pas quantitative par rapport à l analyse HI-ERDA qui permet d estimer plus directement les doses totales d hélium dans l échantillon. Dans le cas présent, il y a néanmoins un bon accord après implantation entre les différentes méthodes mises en œuvre expérimentalement avec des doses proches de celles attendues. III.1.A.c. Distribution des bulles d hélium dans les échantillons implantés En complément des mesures de concentration, la microscopie électronique en transmission a été mise en œuvre pour obtenir des informations sur la forme que peut prendre l hélium dans les matériaux. Après implantation, les images MET mettent en évidence une répartition homogène de bulles avec un diamètre estimé à 1,51±0,19 nm dans Fe-PC et à 1,68±0,21 nm dans V-PC. La densité de bulles, calculée autour du pic d implantation (~200 nm), est de l ordre de 2,6x10 17 cm -3 (3,09 x10 16 m -2 ) et 4x10 17 cm -3 (7,76 x10 16 m -2 ) pour Fe-PC et V-PC, respectivement (Fig. III.12). En raison de la faible résolution spatiale des petites bulles observées, la distribution de la taille et de la densité en fonction de la profondeur n a pas été réalisée. Cependant, il semblerait, à première vue, qu il n y ait pas de différences le long de la profondeur d implantation (~ nm). Nous n avons pas non plus observé de germination préférentielle de bulles dans les joints de grains ou les dislocations. 97

98 Fig. III.12- Distribution des bulles dans Fe-PC et V-PC implantés à 1x10 16 He/cm 2 (images MET en champ clair, sous-focalisation : -1 µm). Dans le fer pur, des études précédentes réalisées par Lefaix-Jeuland et al. et Moll et al. [Lefaix- Jeuland, 2013b ; Moll, 2013] ont observé une microstructure de bulles similaire sur des échantillons de fer pur implantés 60 kev à 1x10 16 et 1x10 17 He/cm 2. Ono et al. [Ono, 2002] ont également décrit des bulles d un diamètre de 1,1 nm à température ambiante dans des échantillons de fer pur implantés en He + à 10 kev avec des fluences comprises entre 9x10 15 et 1x10 17 He/cm 2. Arakawa et al. [Arakawa, 2001] ont observé une densité de bulles supérieure à 8x10 16 m -2 distribuées uniformément à température ambiante dans le fer pur après une implantation d ions He + 5 kev et pour une fluence de 3x10 16 ions/cm 2. Nos résultats sont donc en bon accord avec d autres études menées sur le fer pur dans des conditions similaires. Dans le vanadium pur, il n y a pas, à notre connaissance, d études dans la littérature qui caractérisent la distribution de bulles par MET après implantation d hélium à température ambiante. Quelques études ont été menées lors d implantation d ions He avec des énergies d implantation élevées (> 200 kev) et pour de températures allant de 200 à 750 C. Smidt et al. [Smidt, 1974] n ont pas observé de bulles à 200 C dans des échantillons de V implantés avec une teneur d hélium entre 52 et 64 ppm. Cependant, dans d autres études avec une teneur plus élevée d hélium (~1000 ppm plus proche que la teneur employée dans nos études, i.e.~1200 ppm) [Heerschap, 1973], les bulles (ø~5 nm) se sont formées de façon hétérogène dans les joints de grains et dislocation à 400 et 750 C. Si nous comparons ces observations microstructurales aux profils de concentration précédemment décrits, des bulles sont bien observées sur toute la profondeur où la concentration d hélium (~ nm) est mesurable. Cependant, la distribution des bulles, a priori homogène sur toute la profondeur, ne suit pas à la forme de la concentration pour laquelle un pic est observé. D autres objets de taille insuffisante pour être visible au MET doivent donc être présents dans le matériau implanté 98

99 Après implantation des échantillons de Fe-PC et de V-PC à 1x10 16 He/cm 2, les résultats obtenus révèlent un bon accord entre les profils de concentration en profondeur expérimentaux (SIMS) et les profils théoriques (SRIM), présentant un pic à 200 nm de profondeur. De plus, toute la dose implantée a été retenue dans les matrices métalliques selon l analyse HI-ERDA menée en complément. L observation des coupes transverses par MET a mis en évidence une répartition homogène des bulles nanométriques (ø~1,5-1,7 nm) dans cette zone pour une fluence d implantation de He/cm 2. La densité de bulles, calculée autour du pic d implantation (~200 nm), est de l ordre de 2,6x10 17 cm -3 et 4x10 17 cm -3 pour Fe-PC et V-PC, respectivement. Aucune cloque ou porosité n a été observée par MEB à la surface après implantation. 99

100 III.1.B. Comportement de l hélium au cours du traitement thermique in-situ (étape b) Une fois les états implantés caractérisés, le comportement de l hélium est analysé au cours d un traitement thermique in-situ. L objectif de cette étape est de décrire les différents domaines de désorption ainsi que leurs énergies associées en fonction de la température de désorption. Pour cela, nous avons utilisé la TDS pour chauffer sous ultra-vide les échantillons Fe-PC et V-PC implantés et identifier grâce au spectromètre de masse les espèces qui en désorbent. III.1.B.a. Etude de la désorption d hélium au cours du traitement thermique in-situ La figure III.13 présente le spectre obtenu pour un échantillon Fe-PC implanté. Pour cet échantillon, deux cycles ont été réalisés entre la température ambiante et 1050 C, afin de suivre l évolution de la désorption au fur et à mesure des traitements thermiques. Le tableau à droite de la figure ci-dessous (Tableau III.4) résume les domaines de désorption observés à partir du spectre avec leur gamme de températures (T min-t max), la température maximale (T D) et l énergie d activation (E D) correspondant au pic de désorption d hélium. Les valeurs d E D ont été calculées en faisant l hypothèse d une cinétique d ordre 1 et par la méthode explicitée précédemment dans l item II.3.B.a du chapitre II. Domaine T min-t max ( C) T D ( C) E D (ev) ❶ ,92 ❷ ,75 ❸ ,06 ❹ ,48 ❺ ,94 Fig. III.13- Spectre TDS obtenu pour un échantillon Fe-PC implanté à 1x10 16 He/cm 2. Tableau III.4- Domaines de désorption d He du spectre TDS obtenus pour un échantillon Fe-PC implanté à 1x10 16 He/cm 2. Dans les spectres obtenus, nous pouvons remarquer l existence de plusieurs pics de désorption liés à l existence d espèces He nv m différentes. Comme il en a déjà été fait mention dans le chapitre "Matériaux et Méthodes", chaque pic de désorption, donc chaque température de désorption, correspond indirectement à une énergie d interaction entre l hélium et l un des amas impliqués dans son piégeage. Plus la température de désorption est élevée, plus cette énergie d interaction est grande. La difficulté majeure pour interpréter les données de la TDS vient du fait de la modification en continu du système, avec repiégeage possible de l hélium sur son 100

101 parcours de diffusion. L énergie de migration est suffisamment négligeable pour ne pas intervenir directement dans la température de désorption. Autrement dit, une fois libéré de son site de piégeage, l hélium diffuse suffisamment rapidement dans le matériau pour que cette énergie de diffusion ne rentre pas en jeu dans la température de désorption. Nous pouvons observer dans ce spectre, une forte désorption de l hélium tout au long du premier cycle et une légère désorption au cours du deuxième cycle. Il est également à noter que même après 2 cycles à 1050 C, il reste une quantité non négligeable d hélium piégé dans le matériau. Pendant le premier cycle, les pics de désorption sont plutôt étalés en raison de la multiplicité des espèces He nv m impliquées (nous parlerons plutôt de "domaines"). Cinq grands domaines de désorption peuvent ainsi être définis. Leur interprétation a été réalisée à partir des données de la littérature [Cao, 2011 ; Lefaix-Jeuland, 2012, 2013a ; Morishita, 2003a ; Sugano, 2002, 2003, 2004 ; Xu, 2009] : Le domaine ❶ (25 à 550 C) présente un pic large à 370 C avec une énergie d activation E D de 1,92 ev, correspondant aux atomes d hélium désorbés de monolacunes He-V situées proche de la surface et aux espèces He nv m surpressurisés (n/m>>1). L hélium interstitiel dépiégé va alors diffuser rapidement vers la surface avec une énergie de migration de l ordre de 0,06 ev [Fu, 2005]. Le domaine ❷ (550 à 700 C) est constitué d un pic de désorption à 638 C avec E D de 2,75 ev, associé aux atomes d hélium désorbés des petits amas He nv avec 2 n 6. Le domaine ❸ (700 à 800 C) montre un pic étroit à 739 C avec E D de 3,06 ev, attribué aux atomes désorbés des amas He nv m (avec m>1). Le domaine ❹ (800 à 1000 C) présente un pic large à 874 C avec E D de 3,48 ev, correspondant à l influence de la transformation de phase allotropique α (bcc) γ(fcc) (~910 C). Ce changement structural et le réarrangement du réseau cristallin qui l accompagne déclencherait une mobilité des défauts d implantation et des amas He-V qui diffuseraient très rapidement vers la surface. Le domaine ❺ est caractérisé par un pic intense à 1040 C avec E D de 3,94 ev attribués à la désorption depuis les bulles. Pendant le deuxième cycle, nous pouvons remarquer un décalage progressif des pics vers des températures plus élevées que celles observées au cours du premier cycle, dont l origine peut être la formation et la prédominance d espèces de plus en plus stables au fur et à mesure des cycles de chauffage. Il ne reste que 2 domaines de désorption, un présentant un pic autour de 950 C et autre caractérisé par le début d un pic à partir de 1000 C. Du fait de la complexité liée à l analyse de ces espèces, l interprétation du deuxième cycle ne sera pas réalisée. Il faut remarquer que la plupart des études précédentes, contrairement à celle-ci, ont été effectuées sur des échantillons de Fe pur implantés entre 5 et 10 kev avec des fluences variant de 2x10 13 et 2x10 17 He/cm 3 (voir la Fig. I.22 du chapitre I). Les valeurs de T D obtenues par certains auteurs sont légèrement décalées vers les basses températures par rapport aux valeurs obtenues dans ce travail. Ce décalage peut être expliqué par la différence d énergie d implantation, nos analyses étant réalisées sur des échantillons de Fe implantés à 60 kev. D une part, la différence de profondeur d implantation entraine un parcours de diffusion plus important dans le 60 kev que pour le cas de 8 kev [Lefaix-Jeuland, 2012, 2013a], avec un pic 101

102 d implantation estimé par SRIM de 200 nm et 38 nm, respectivement. L augmentation du parcours de diffusion d He vers la surface a pour premier effet la possibilité de repiégeage de l He au cours de sa diffusion, et donc avant sa désorption. D autre part, la formation d espèces He nv m différentes varie avec l énergie d implantation. Comme il en a déjà été fait mention, chaque pic de désorption, donc chaque température de désorption, correspond indirectement à une énergie d interaction entre l hélium et l un des amas impliqués dans son piégeage. Plus la température de désorption est élevée, plus cette énergie d interaction est grande. La conjonction de la profondeur et de différents amas explique donc les différences observées en TDS selon l énergie d implantation de l hélium. Il existe aussi un décalage des pics lié à la rampe de chauffage utilisé. Les travaux précédents [Cao, 2011 ; Morishita, 2003a ; Sugano, 2002, 2003, 2004 ; Xu, 2009] ont mis en œuvre une rampe plus élevée que celle-ci utilisée dans nos travaux (~60 C/min). Pour des rampes plus élevées, les différents pics apparaissent à des températures supérieures [Runtz, 2010]. Cet effet expérimental de décalage vers les hautes températures devrait légèrement compenser le décalage vers les basses températures lié à la différence d énergie d implantation mentionné précédemment 4. La même analyse est réalisée pour les échantillons de vanadium. Ainsi la figure III.14 présente le spectre obtenu pour un échantillon V-PC implanté à 1x10 16 He/cm 2. Pour cet échantillon, deux cycles ont également été réalisés entre la température ambiante et 1200 C, afin de suivre l évolution de la désorption au fur et à mesure des traitements thermiques. Le tableau à droite de la figure ci-dessous (Tableau III.5) résume les domaines de désorption observés à partir du spectre avec leur gamme de températures (T min-t max), la température (T D) et l énergie d activation (E D) correspondant au pic de désorption d hélium. Domaine T min-t max ( C) T D ( C) E D (ev) ❶ ,90 ❷ ,63 ❸ ,24 ❹ ,49 ❺ >915 3,77 Fig. III.14- Spectre TDS obtenu V-PC implanté à 1x10 16 He/cm 2. Tableau III.5- Domaines de désorption d He du spectre TDS obtenus pour un échantillon de V-PC implanté à 1x10 16 He/cm 2. 4 Une autre explication possible pour analyser les différences de températures observées est purement expérimentale. Les équipements de TDS sont propres à chaque laboratoire et il est possible que la mesure de la température selon la méthode (thermocouple, pyromètre), la position du capteur, le mode de chauffage, etc entraine des différences dans la position des pics. 102

103 Dans le spectre obtenu, nous pouvons remarquer comme dans le cas du fer, la présence de différents pics de désorption liés à l existence d espèces He nv m différentes. De plus, nous pouvons constater, une forte désorption de l hélium tout au long du premier cycle et une légère désorption au cours du deuxième cycle. Même après 2 cycles à 1300 C, il reste une quantité non négligeable d hélium piégé dans le métal. Au cours du premier cycle, cinq grands domaines de désorption peuvent être distingués dans le cas du V-PC. Leur interprétation a été réalisée à partir des données de la littérature [Federov, 1996a, 1996b, 1998 ; Nita, 2007 ; van Veen, 1994] : Le domaine ❶ (25 à 440 C) présente un petit pic à 364 C avec une E D de 1,90 ev, correspondant aux atomes d hélium désorbés d espèces situées proche de la surface. Le domaine ❷ (440 à 715 C) est constitué d un pic intense à 600 C avec E D de 2,63 ev, attribué aux complexes He nxv m avec 2 n 6 (X=C, N ou O). Le domaine ❸ (715 à 830 C) montre un pic étroit à 797 C avec E D de 3,24 ev et le domaine ❹ (800 à 1000 C) présente un pic étroit 870 C avec E D de 3,49 ev. Ces domaines sont plus complexes à analyser car il n y pas beaucoup de données dans la littérature. Nita et al. [Nita, 2007] ont observé deux groupes dans cette gamme de température : un pic à 737 C associé à l hélium désorbé des amas He nv 5 et d autres pics à partir de 817 C correspondant aux amas He nxv m>5. Le domaine ❺ est caractérisé par le début d un pic intense à 915 C avec E D de 3,77 ev attribué à la désorption depuis les bulles. Le deuxième cycle présente uniquement le début d un pic de désorption à partir de 900 C. Comme dans le cas de Fe-PC, un décalage progressif vers les hautes températures est observé pour ce deuxième cycle de désorption. Seules trois publications dans la littérature décrivent la thermodésorption de l hélium dans le cas d échantillons de vanadium pur implantés [Federov, 1996a, 1996b, 1998 ; Nita, 2007 ; van Veen, 1994] et ce dans le cas de monocristaux. Les échantillons étudiés ont été implantés à très basses énergies ( 1 kev) avec des fluences comprises entre 5x10 11 et 1x10 15 He/cm 2 (voir la Fig. I.22 du chapitre I). Il n est donc pas possible de comparer nos résultats à d autres études menées sur le vanadium pur. L attribution des pics de désorption reste assez limitée par comparaison avec les résultats obtenus précédemment. Les données théoriques sont également rares [Chernov, 1999 ; Zhang, 2011]. A partir de la comparaison des spectres précédemment obtenus pour V-PC et Fe-PC dans des conditions identiques, nous pouvons mettre en évidence des différences sur les domaines de désorption de l He. Afin de compléter les données précédentes et comparer l évolution de l intensité du signal d hélium désorbé en fonction de la température entre les deux métaux CC, nous avons calculé l intégrale cumulée de chaque domaine du spectre de désorption (intégrale entre T min. à T max.) en fonction de la température (T max) pour les deux métaux CC (Fig. III.15). Le pourcentage de 100% correspond à la somme de tous les domaines de désorption jusqu à 1050 C (T max du spectre de Fe-PC) pour les deux métaux CC. 103

104 Fig. III.15- Intégrales cumulées pour chaque domaine de désorption calculées à partir des spectres TDS de Fe-PC et de V-PC implantés à 1x10 16 He/cm 2. Ce graphique met ainsi en évidence de différences entre la proportion des espèces impliquées dans la désorption d He en fonction de la température de Fe-PC et V-PC : - Pour les basses températures, la proportion d hélium desorbée est plus importante dans le cas du Fe-PC que dans le cas du V-PC. - Pour les températures intermédiaires, la tendance devient différente entre les deux métaux, avec une très forte désorption (proportionnellement aux autres pics du premier cycle) dans le V-PC, alors qu un affaiblissement de la désorption semble s opérer dans Fe-PC. - Pour les hautes températures, la désorption se déroule de façon régulière jusqu à la fin du recuit dans le V-PC contrairement au cas de Fe-PC où une augmentation abrupte de la pente est observée au-delà de sa transformation de phase (T>900 C). Il faut remarquer que la comparaison entre la proportion des espèces désorbées de Fe-PC et V- PC dans cette gamme de températures (25 C jusqu à 1050 C) est d une certaine manière "faussée" par rapport aux spectres de désorption bruts : la désorption d hélium dans V-PC continue jusqu à 1200 C ("100%" de désorption), contrairement au cas du fer pur où la désorption après pic autour de 1040 C ("100%"de désorption) décroit jusqu à 1050 C Si nous tenons compte de des vraies T max dans le calcul de l intégrale cumulée, la courbe pour le V-PC sera globalement plus faible que pour le Fe-PC sur toutes les gammes de températures. Par contre, elles ne seront pas comparables. Malheureusement, nous ne pouvons pas monter plus haut en températures (1200 C) pendant l analyse TDS dans le Fe-PC parce que nous risquons de fondre le métal dans le bâti. Ces observations in-situ seront intégrées aux analyses microstructurales post TDS et aux données obtenues après traitement thermique ex-situ et discutées à la fin de cette partie 1 dans le but d avancer des hypothèses sur les différences entre le comportement de l hélium dans le fer et le vanadium purs à basse fluence. III.1.B.b. Caractérisation microstructurale post-tds Afin de décrire l évolution de la microstructure et de l état de surface après désorption thermique, les échantillons Fe-PC et V-PC précédemment analysés par TDS (2 cycles à 10 C/min), ont été observés par MEB (Fig. III.16). 104

105 Fig. III.16- Micrographies MEB des échantillons de Fe-PC et V-PC implantés à 1x10 16 He/cm 2, après désorption par TDS à 10 C/min. Pour les deux métaux CC, nous n observons pas de cloques ou de porosités en surface. En revanche, les joints de grains commencent à se distinguer de la matrice métallique. Ce phénomène est plus marqué dans Fe-PC que dans V-PC, probablement liée à l instabilité additionnelle de grains induit par la transformation allotropique qui s est opère dans le fer et pas dans le vanadium. Par ailleurs, les particules de SiC dues au polissage initial sont toujours visibles à la surface après les cycles de chauffage dans les deux métaux d étude. Pour ces paramètres d implantation (énergie, fluence), la durée ou encore la température de recuit lors de l analyse TDS n ont pas entrainé la formation de cloques à la surface malgré la présence des pics intenses à haute température dans les spectres de Fe-PC et V-PC, attribué à la désorption issue de bulles. Les mesures de désorption de l hélium ont mis en évidence l existence de multiples interactions entre He et les structures cristallines, interactions dont la nature ne peut être complètement comprise sans outil de modélisation performant. A ce stade de l étude, nous avons un panorama des espèces impliquées dans la désorption en fonction de la température, mais nous ne connaissons pas les mécanismes thermodynamiques et cinétiques en jeu pendant le traitement thermique. Ces mécanismes vont dépendre de la mobilité de l hélium dans la matrice (son comportement diffusif), ainsi que des modifications microstructurales induites, et tout particulièrement de l évolution de bulles. Pour cela, nous simulerons par des traitements thermiques ex-situ certaines conditions de températures des spectres TDS et nous étudierons ensuite par couplage de différents techniques complémentaires (SIMS et MET) l évolution des profils de concentration et de la microstructure des bulles. 105

106 III.1.C. Comportement de l hélium après traitement thermique ex-situ (étape c) Pour étudier plus en détail l évolution de l hélium implanté au sein de la matrice de vanadium et fer purs, il s avère utile de mettre en regard des résultats TDS précédemment décrits d autres techniques comme le SIMS et le MET. Comme mentionné dans la partie "Matériaux et Méthodes", ces dernières seront à même de donner des éléments sur le profil ou encore l existence de microstructures particulières après un traitement thermique ex-situ effectué sur des échantillons implantés. Deux approches ont été utilisées : une isothermique, impliquant une température et différents temps d exposition, et une isochrone, variant la température pour le même temps. Les conditions du traitement thermique ont été définies à partir des spectres TDS des échantillons de V-PC et Fe-PC implantés (Fig. III.17). Les températures de recuit choisies se positionnent après le premier domaine de désorption d He (400 C), à la fin du deuxième domaine de désorption d He (700 C) et dans le début du cinquième domaine de désorption (1000 C). La durée a été arbitrairement fixée à 1 heure et 2 heures pour que le système ait le temps de se réorganiser sans que la désorption ne soit trop importante. Fig. III.17- Choix des conditions de traitement thermique post-implantation. Après avoir réalisé les traitements thermiques ex-situ sur les échantillons de Fe-PC et V-PC implantés, nous nous intéresserons à trois aspects : Dans un premier temps, nous analyserons l évolution de la microstructure et de l état de surface. Pour ce faire nous décrirons la présence de cloques, de porosités ou d éclatements en surface par MEB. Dans un deuxième temps, nous étudierons la diffusion de l hélium dans la matrice métallique. Pour ce faire, nous regarderons l évolution du profil de la concentration d hélium par SIMS. 106

107 Dans un troisième temps, nous étudierons l évolution de bulles d hélium. Pour ce faire, nous analyserons la microstructure des bulles (taille, densité, morphologie) par MET. III.1.C.a. Caractérisation microstructurale après traitement thermique ex-situ Afin de décrire l évolution de la microstructure et de l état de surface après traitement thermique ex-situ, les échantillons Fe-PC et V-PC, ont été observés par MEB. Dans le Fe-PC, les images obtenues pour des échantillons recuits à 400 C et 700 C ne montrent aucun changement de l état de surface, ni aucune trace de pollution supplémentaire. A partir de 1000 C, nous observons de porosités en surface de l ordre de 0,15±0,02 µm pour le Fe-PC R1000 C (1h) et de l ordre de 0,26±0,07 µm pour le Fe-PC R1000 C (2h) (Fig. IIII.18), ce qui n était pas le cas après TDS. Fig. III.18- Micrographies MEB des échantillons Fe-PC implantés à 1x1016 He/cm2 et recuits à 1000 C pendant 1 et 2h. Dans le V-PC, les images obtenues pour des échantillons recuits à 400 C et à 700 C ne montrent pas de changements ou de pollution supplémentaire en surface. Pour des recuits à 1000 C, les échantillons V-PC contrairement aux échantillons de Fe-PC, ne présentent pas de porosités (Fig. III.19). Fig. III.19- Micrographies MEB des échantillons V-PC implantés à 1x1016 He/cm2 et recuits à 1000 C pendant 1 et 2h. 107

108 III.1.C.b. Diffusion de l hélium dans la matrice métallique Dans la figure III.20, nous observons la comparaison des profils d hélium obtenus par SIMS pour les six échantillons de Fe-PC recuit ex-situ avec celle d un échantillon à l état implanté à 1x10 16 He/cm 2. Fig. III.20- Evolution du profil d hélium obtenu par SIMS après traitement thermique exsitu des échantillons de Fe-PC implantés à 1x10 16 He/cm 2. Après traitement thermique, les résultats SIMS montrent que la concentration d hélium décroit à partir d une certaine température et d un certain temps d exposition. Pour des recuits à 400 C, l analyse montre que le profil d He de l échantillon Fe-PC R400 C (1h) présente des caractéristiques similaires à celles observées dans le Fe-PC implanté. Pour les échantillons Fe-PC R400 C (2h), nous observons une légère diminution de la concentration (~14%) et un décalage du pic d hélium en profondeur (R phe~208 nm). Pour des recuits à 700 C, la concentration d hélium diminue fortement dans l échantillon de Fe-PC R700 C (1h) (~74%) et le pic se décale en profondeur (R phe~228 nm). Nous observons également la présence d He sous la surface. Pour l échantillon Fe- PC R700 C (2h), le profil présente toujours un petit pic d hélium, mais un peu plus profond (R phe~332 nm). Pour des recuits à 1000 C, la concentration d He dans l échantillon passe en dessous de la limite de détection pour le SIMS. Il semble donc qu une très large partie de l hélium a désorbé de la matrice (~100% si l on se base sur l intégrale de la mesure). Au-delà de 1000 C, la forme du pic change avec une diffusion d He globale vers la surface. L augmentation de la durée de recuit de 1h à 2h ne fait qu accentuer la diminution de la concentration, notamment celle sous la surface. Le même type d analyse a également été réalisé sur les échantillons V-PC implanté en hélium à 1x10 16 He/cm 2 et après traitement thermique ex-situ. La figure III.21 compare les profils d hélium obtenus par SIMS pour les six échantillons V-PC recuits ex-situ avec le cas d un échantillon à l état implanté. 108

109 Fig. III.21- Evolution du profil d hélium obtenu par SIMS après traitement thermique exsitu des échantillons de V-PC implantés à 1x10 16 He/cm 2. Comme dans le cas du fer pur, les résultats SIMS montrent que la concentration d hélium décroit à partir d une certaine température et d un certain temps d exposition. Pour des recuits à 400 C, l analyse montre que le profil d He de l échantillon V-PC R400 C (1h) présente des caractéristiques similaires à celles observées dans le V-PC implanté. Nous pouvons remarquer que la concentration d He obtenue pour cet échantillon est supérieure à celle obtenue pour l échantillon V-PC implanté. Ces résultats incohérents pourraient être reliés à l existence d une couche d oxyde (souvent source d exacerbation de signal au SIMS) ou celle d une pollution en hydrogène (en forme de deutérium) qui entraine la présence d hydrures sous la surface, produits pendant le traitement thermique ex-situ. Pour les échantillons V-PC R400 C (2h), nous observons une légère diminution de la concentration (~18%). Il semble dont comme pour le fer qu une température de 400 C ne soit pas suffisante pour entrainer une diffusion importante de l hélium dans le vanadium polycristallin. Pour des recuits à 700 C, il n y a pas de diminution de la concentration d hélium dans l échantillon V-PC R700 C (1h), contrairement à ce qui avait été observé dans l échantillon Fe-PC R700 C (1h). Cependant, une diminution de la concentration est observée dans l échantillon recuit plus longtemps (~68%). Le pic reste toujours centré autour la profondeur d implantation après recuit 1 et 2 heures (R phe ~195 nm). Pour des recuits à 1000 C, une grande partie de l hélium est désorbée après 1 et 2 heures de recuit (~70%). Dans l échantillon V-PC R1000 C (1h), le pic se décale légèrement en profondeur (R phe ~203 nm).pour l échantillon V-PC R1000 C (2h), nous observons un étalement de la distribution de la concentration vers la surface et un décalage du pic vers des profondeurs plus élevées (R phe ~251 nm). Les profils d He obtenus par SIMS n ont pas la forme symétrique caractéristique d une distribution gaussienne. De ce fait, l obtention de paramètres de diffusion à partir de ces profils asymétriques, en appliquant les lois de Fick, s avère compliqué et très approximatif. Les paramètres qui pourraient en découler seraient très éloignés du coefficient de diffusion réel et "mixerait" dans un "coefficient apparent" l ensemble des phénomènes (dépiégegage, diffusion d espèces). Afin de comprendre les mécanismes cinétiques impliqués, il faudrait développer un 109

110 modèle théorique de déconvolution qui décompose les profils obtenus expérimentalement en différents profils gaussiennes, et ensuite étudier leur évolution en fonction de la température et du temps de recuit, en vue d obtenir les paramètres de diffusion correspondants. Cette première série d analyses sur l évolution du profil de l hélium par SIMS après traitement thermique ex-situ met en évidence des similitudes et différences de comportements diffusives de l hélium entre les deux métaux CC purs. D une part, il faut atteindre des températures supérieures à 400 C pour entrainer une diffusion appréciable de l hélium dans les deux métaux CC. La diminution de la concentration d hélium est observée plus rapidement dans le Fe-PC que dans le V-PC. Au-delà de 1000 C, une disparation du pic de l hélium avec une diffusion d He globale vers la surface est constatée dans le Fe-PC, phénomènes absents dans le cas de vanadium pur. D autre part, l allure du pic d implantation dans les échantillons V-PC postrecuits à la différence des échantillons Fe-PC post-recuits ne varie presque pas en fonction de la température ou du temps de recuit. Afin de comprendre en détail la migration de l hélium en fonction de la température et du temps de recuit, il est nécessaire de caractériser les modifications microstructurales induites par le traitement thermique ex-situ, et tout particulièrement l évolution de bulles qui peut fortement influencer la mobilité de l hélium. III.1.C.c. Evolution des bulles d hélium après recuit ex-situ Dans la figure III.22, nous présentons les images obtenues par MET pour les six échantillons recuits ex-situ du Fe-PC. Une évolution des bulles d hélium en fonction de la température et du temps de recuit est observée : Pour des recuits à 400 C, les images montrent que la microstructure des bulles présente des caractéristiques similaires à celles observées à l état implanté, avec une forte densité numérique de bulles sphériques observables à une profondeur comprise entre 0 et 600 nm (ø~ 2 nm). Il n y a pas de croissance de bulles après 1 ou 2 heures de recuit. Ces observations sont en accord avec les profils d hélium en profondeur obtenus par SIMS, où nous n avons pas observé de diminution appréciable de la concentration d hélium après de recuits à 400 C. Pour des recuits à 700 C, la taille des bulles augmente (ø~ 5 nm) et la densité diminue après 1 heure de recuit. Cette tendance est encore plus accentuée après 2 heures de recuit (ø~ 8 nm). Nous pouvons également remarquer une évolution de la morphologie de bulles: elles changent sa morphologie "sphérique" initiale par une morphologie "carré ou rectangulaire" avec des facettes bien marqués pour les deux temps de recuit. De plus, la distribution de bulles ne semblait pas être homogène le long de la profondeur implantée et les bulles seraient plutôt alignées dans certaines directions préférentielles. Parallèlement, par SIMS nous commençons à observer une diminution dans les profils de concentration d hélium avec un élargissement du pic vers la surface. Pour des recuits à 1000 C, les bulles deviennent plus grosses (ø entre 30 et 80 nm) et moins nombreuses. Nous observons toujours de bulles avec de facettes distribuées de manière hétérogène le long de la profondeur d implantation. D autre part, les analyses SIMS montrent que l hélium semble avoir entièrement désorbé de la matrice. 110

111 Sur le même modèle que pour le fer, la figure. III.23 présente les images obtenues par MET pour les six échantillons recuits ex-situ de V-PC. Une évolution des bulles d hélium en fonction de la température et du temps de recuit est également observée : Pour des recuits à 400 C, les images montrent que la microstructure des bulles présente des caractéristiques similaires à celles observées à l état implanté. Il n y a pas de croissance même après 2 heures de recuit. Ces observations sont en accord avec les profils d hélium en profondeur obtenus par SIMS, où nous n avons pas observé de diminution appréciable de la concentration d hélium après des recuits à 400 C. Il semble donc comme pour le fer qu une température de 400 C ne soit pas suffisante pour favoriser l évolution du profil de concentration et des bulles dans le vanadium polycristallin. Pour des recuits à 700 C, nous n observons pas d évolution de la taille ou de la densité contrairement au cas du fer pur, après 1 heure de recuit, ce qui corrobore l absence d évolution de profil observé par SIMS. Après 2 heures de recuit, la taille des bulles augmente, passant d environ 2 nm à 5-6 nm, et leur densité diminue. A ce même temps de recuits, nous observons également que les bulles qui devient facettées. La plupart de ces bulles semblait être distribuée à proximité du pic d implantation, avec une faible densité de bulles (ou des zones déplétées) près de la surface ou plus loin en profondeur. Ces éléments sont aussi en accord avec l évolution déjà constatée par les mesures SIMS pour lesquelles nous avions noté une diminution de la concentration d hélium après 2 heures de recuit. Pour des recuits à 1000 C, les bulles deviennent plus grandes (ø~ 3-4 nm) et moins nombreuses par rapport à l état implanté. Nous ne constatons pas de différences entre 1 et 2 heures de recuit et par rapport aux recuits à 700 C pendant 2 heures (même morphologie et distribution). D après les analyses SIMS, une grande partie de l hélium désorbe dans ces conditions de recuit sans réelle variation avec la durée du traitement thermique. Ces observations MET mettent en évidence des différences de comportements entre les deux métaux purs CC, différences qui peuvent venir éclairer des éléments précédemment décrits pour le SIMS. Si après implantation les deux métaux présentent des tailles de bulle identiques (mais des densités différentes comme nous l avons déjà souligné précédemment), le traitement thermique entraine une augmentation du diamètre et une diminution de la densité des bulles plus rapides dans le cas du fer pur que dans le vanadium pur. Ces observations traduisent une évolution "classique" de la population des bulles avec une augmentation de leur taille en parallèle de la diminution de la densité [Moll, 2013 ; Trinkaus, 2003]. Il faut toutefois aller plus loin dans l analyse des données et regarder l évolution de la population des bulles en fonction de la profondeur dans l échantillon, ainsi que les modifications de leur géométrie. 111

112 Fig. III.22- Evolution de la distribution des bulles après traitement thermique ex-situ des échantillons Fe-PC implantés à 1x10 16 He/cm 2 (images MET en champ clair, sous-focalisation : -1 µm). 112

113 Fig. III.23- Evolution de la distribution des bulles après traitement thermique ex-situ des échantillons V-PC implantés à 1x10 16 He/cm 2 (images MET en champ clair, sous-focalisation : -1 µm). 113

114 Distribution des tailles et densité des bulles après traitement thermique ex-situ Après avoir eu une vision globale de la microstructure des bulles après traitement thermique exsitu des échantillons Fe-PC et V-PC, nous nous sommes intéressés à décrire de façon plus détaillée la distribution de leur taille et densité en fonction de la profondeur implantée. Diamètre et densité des bulles sont en effet des paramètres pertinents pour éclairer les mécanismes sous-jacents à l évolution des bulles d hélium [Trinkaus, 2003]. Pour cela, les dimensions et la localisation en profondeur de chaque bulle discernable en MET, c est-à-dire d un diamètre supérieur à ~2 nm, ont été mesurées. Les données statistiques sur l ensemble de la population des bulles sont détaillées pour les différents traitements thermiques dans chacun des échantillons. Sur la figure III. 24, nous pouvons observer l effet de la température et le temps de recuit, sur le diamètre et la densité moyens des bulles en fonction de la profondeur pour les échantillons Fe-PC. Les barres d erreur représentent l écart-type du diamètre moyen obtenu à partir de la mesure de 100 à 200 bulles par segments. Nous avons représenté seulement l évolution seulement après recuit à 700 C et à 1000 C, aucun réel changement n étant mesurable en dessous de ces températures. Les paramètres moyens obtenus autour de 200 nm de profondeur pour l état implanté et pour les recuits à 400 C sont rappelés au-dessus de chaque figure en tant que références. Pour des recuits à 700 C, la taille des bulles croît et leur densité diminue par rapport aux échantillons Fe-PC R400 C (1 et 2 h) et Fe-PC implanté. La population de bulles est observée sur l ensemble de la zone implantée (0-600 nm). De plus, le diamètre moyen des bulles présente un seul pic autour de 225 nm pour les deux temps de recuit, en accord avec le maximum de concentration d He selon le profil obtenu par SIMS pour l échantillon Fe-PC R700 C (1h) (R phe ~228 nm), mais un peu plus faible que le R p He pour l échantillon Fe-PC R700 C (2h) (R phe ~332 nm) (voir Fig. III.20). Par contre, la densité moyenne des bulles présente une distribution bimodale avec un premier pic situé à 75 nm et un second entre 225 et 275 nm, ce dernier est proche des R phe pour les deux temps de recuits observés par SIMS. Les formes des courbes restent identiques quelle que soit la durée. Mais la taille augmente avec le temps de recuit tout comme la densité. Ce dernier phénomène est incohérent avec les données de la littérature qui proposent que l augmentation de la taille s accompagne de la diminution de la densité [Trinkaus, 2003]. Cela pourrait être expliqué par le fait que : (i) les valeurs de densité moyenne obtenues pour l échantillon Fe-PC R700 C (2h) ont des écarts type très larges qui sont proches des valeurs de densité moyenne obtenues pour l échantillon Fe-PC R700 C (1h) et (ii) les valeurs de la densité moyenne ont été calculées en tenant en compte la moyenne de la mesure d épaisseur de seulement deux échantillons FIB de Fe-PC post-recuit. Afin d avoir une meilleure statistique, il faudrait réaliser d autres lames FIB sur les mêmes échantillons et mesurer l épaisseur de chacun des échantillons FIB analysés. Pour des recuits à 1000 C, les bulles continuent de croître et leur densité continue de diminuer par rapport aux échantillons Fe-PC R700 C (1 et 2 h), Fe-PC R400 C (1 et 2 h) et Fe-PC implanté. La distribution de bulles devient plus étroite qu à 700 C avec des bulles absentes au-delà de 450 nm, voire même 350 nm pour le recuit 2h. Cette fois-ci, 114

115 nous observons bien une augmentation du diamètre en même temps qu une diminution de la densité avec le temps d exposition. Cependant, par rapport aux températures plus basses, la distribution du diamètre moyen des bulles change complètement d aspect avec un décalage du maximum vers des profondeurs plus faibles. L analyse par tranches de profondeur met surtout en évidence l existence de deux "pics" ou familles qui se décalent progressivement vers la surface avec le temps de recuit. Le temps de traitement thermique joue donc un rôle non négligeable. Dans les échantillons Fe-PC R1000 C (1h), nous observons un premier pic situé à 225 nm et un deuxième pic situé à 325 nm. Dans les échantillons Fe-PC R1000 C (2h), le premier pic devient plus important et se décale à 125 nm. Nous observons également autre famille de bulles entre 175 et 275 nm. Il faut remarquer que les écartstype des valeurs du diamètre des bulles, obtenus à partir de l analyse de bulles dans les échantillons recuits 2 heures sont élevées. Pour améliorer la statistique de la mesure, il aurait fallu faire ces mesures sur plusieurs lames FIB, ce qui n a été pas possible pour des raisons de temps. La distribution de la densité moyenne bimodale observée à 700 C a presque disparu : les bulles se concentrent plutôt à proximité de la surface. Dans les échantillons Fe-PC R1000 C (1h), la densité présente un pic entre 75 et 175 nm (ρ~8x10 15 bulles/cm 3 ) et un petit élargissement jusqu à 425 nm (jusqu à ρ~2x10 14 ). Dans les échantillons Fe-PC R1000 C (2h), la densité, faible, reste constante entre 0 et 325 nm (ρ~1x10 14 bulles/cm 3 ). Le décalage progressif du diamètre et de la densité vers la surface est en accord avec la présence d He observée dès les premières couches atomiques par SIMS dans les échantillons Fe-PC pour des recuits à 1000 C. 115

116 Fig. III.24- Evolution du diamètre moyen et de la densité moyenne des bulles en fonction de la profondeur après traitement thermique ex-situ des échantillons Fe-PC implantés à 1x10 16 He/cm 2. Le même type d analyse a également été réalisé sur les échantillons V-PC implantés en hélium à 1x10 16 He/cm 2 après traitement thermique ex-situ à 700 C et 1000 C. La figure III.25 présente selon le même schéma l effet du traitement thermique sur le diamètre et la densité moyens des bulles dans le cas des échantillons V-PC. Les paramètres moyens obtenus autour de 200 nm de profondeur pour l état implanté et pour des recuits à 400 C sont rappelés au-dessus de chaque figure en tant que références. L évolution que ce soit avec la profondeur ou avec le traitement thermique est nettement moindre dans le cas du 116

117 vanadium que dans le cas du fer. La taille des bulles est bien plus petite et la densité reste plus élevée. Pour des recuits à 700 C, les bulles devient légèrement plus grandes et moins nombreuses par rapport aux échantillons V-PC R700 C (1h), à V-PC R400 C (1et 2 heures) et V-PC implanté. La population de bulles est observée à des profondeurs comprises entre 0 et 500 nm, en cohérence avec la distribution de la concentration d He. La distribution du diamètre moyen présente un pic entre 175 et 225 nm, encadrant le maximum de la concentration d He obtenu par SIMS (R phe~195 nm). La distribution de la densité moyenne montre un pic à la différence des échantillons Fe- PC recuits à 700 C où nous avions observé une distribution bimodale de la densité.la position du pic (R pρ~225 nm) est proche des valeurs obtenues pour R pø et R phe (voir Fig. III. 21). Pour des recuits à 1000 C, nous observons toujours une petite augmentation de la taille et une diminution de la densité par rapport aux échantillons implantés ou recuits à des températures plus faibles. Cependant, la taille reste dans la même gamme que pour l échantillon recuit à 700 C quelle que soit la durée de traitement thermique, i.e. entre 2 et 5 nm. D autre part, la distribution de la densité augmente avec l augmentation de la température pour 2 heures de recuit. Comme nous l avons mentionné dans le cas de la distribution de la densité moyenne de Fe-PC R700 C, ces résultats ne sont pas très exacts en raison des écarts type très larges et des épaisseurs moyennes des échantillons FIB employés, raison pour laquelle nos résultats ne suivent pas l évolution "classique" de croissance décrite dans la littérature [Trinkaus, 2003]. La distribution du diamètre moyen de bulles présente, comme pour des recuits à 700 C, un pic entre 175 et 225 nm pour les deux durées de recuit. Pour les échantillons de V-PC R1000 C (2h), nous n avons pas observé de bulles au-delà de 400 nm, contrairement aux échantillons de V-PC R700 C (2h) et V-PC R1000 C (1h) où des bulles sont présentes jusqu à 450 et 500 nm, respectivement. Parallèlement, les profils obtenus par SIMS présentent un R phe à 203 nm pour V-PC R1000 C (1h) et un R phe à 251 nm avec un étalement de la concentration vers la surface pour V-PC R1000 C (2h) (voir Fig. III. 21). La distribution de la densité moyenne de bulles reste équivalente avec la durée du recuit. Le pic de la densité de bulles se trouve à 225 nm en profondeur après 1 heure de recuit et entre 175 et 225 nm en profondeur après 2 heures de recuit. Les positions du pic sont légèrement décalées par rapport aux valeurs obtenues pour les R phe. 117

118 Fig. III.25- Evolution du diamètre moyen et de la densité moyenne des bulles en fonction de la profondeur après traitement thermique ex-situ des échantillons V-PC implantés à 1x10 16 He/cm 2. Si nous comparons l ensemble de ces distributions, nous avons toujours une augmentation de la taille avec une diminution de la densité à partir de 700 C. Ce phénomène semble retardé dans V- PC par rapport à Fe-PC : pour les échantillons V-PC, il faut attendre 2 heures pour commencer à observer une évolution de taille et de densité. Pour les deux métaux CC, nous observons une augmentation de la taille avec la durée de recuit à 700 C. La distribution du diamètre moyen présente un pic autour de 175 et 225 nm, proche du maximum de la concentration d He selon les 118

119 profils obtenus par SIMS. Parallèlement, la densité de bulles prend une distribution bimodale dans le Fe-PC ce qui n est pas le cas dans le V-PC. Pour le recuit à 1000 C, les différences entre Fe-PC et V-PC deviennent plus notables avec une distribution des bulles plus proche de la surface pour le fer et ce d autant plus marquée que la durée de recuit augmente. En revanche, les profils de la taille et du diamètre restent toujours centrée du maximum d implantation dans le V-PC. Ces distributions sont en accord avec l évolution de profils de concentration obtenus par SIMS. L évolution des distributions en taille à différentes profondeurs et de la microstructure de bulles après traitement thermique ex-situ peuvent donner des indications sur les mécanismes mis en jeu dans la croissance des bulles (Mûrissement d Oswald ou Migration-Coalescence). Evolution des distributions en taille après traitement thermique ex-situ à différentes profondeurs Dans la figure III.26, nous pouvons observer l évolution des distributions en taille pour différentes profondeurs données après traitement thermique ex-situ des échantillons V-PC et Fe- PC. Pour les échantillons Fe-PC recuit 1000 C (1h) nous n avons pas caractérisé les diagrammes de fréquences car la quantité de bulles mesurée sur ces échantillons était très limitée et donc non représentative du système. 119

120 Fig. III.26-Evolution des distributions en taille après traitement thermique ex-situ des échantillons de Fe-PC (à gauche) et de V-PC (à droite) implantés à 1x10 16 He/cm 2 : (a) pour une profondeur entre 100 et 150 nm, (b) pour une profondeur de 150 et 200 nm et (c) pour une profondeur entre 200 et 250 nm. Dans le cas de Fe-PC, la distribution en taille après recuit 700 C 1 heure ou 2 heures ne varie pas pour les différentes profondeurs analysées. Pour les deux durées de traitement thermique, la distribution reste centrée entre 5 et 7 nm de diamètre. Au-dessus de 1000 C, nous commençons à observer des populations de taille de bulles différentes. Pour une profondeur entre 150 et 200 nm, nous observons deux populations, une avec des bulles plus petites autour de 10 nm et une autre avec des bulles plus grandes entre 30 et 50 nm. Pour des profondeurs plus élevées (entre nm), la distribution en taille devient plus hétérogène. Dans le cas de V-PC, la distribution en taille après recuit 700 C et 1000 C ne varie pas pour les différentes profondeurs analysées, contrairement au cas de Fe-PC. Pour les deux températures de traitement thermique, la distribution reste centrée entre de 3 et 5 nm de diamètre. De plus, au-dessus de 1000 C, il n y a pas de changement de la distribution pour les deux durées de recuit. 120

121 Microstructure de bulles après traitement thermique ex-situ Le dernier élément qu il est intéressant de regarder sur ces échantillons V-PC et Fe-PC recuits concerne la morphologie et la distribution spatiale des bulles. Comme mentionné précédemment de façon succincte, nous avons observé une évolution de la morphologie des bulles dans les deux métaux en fonction de la température et de la durée du traitement thermique. Dans le cas de Fe-PC, les bulles restent sphériques après traitement thermique à 400 C 1 heure et 2 heures (pour des diamètres inférieurs à 2 nm). Pour des températures au-dessus de 700 C, les bulles présentent une morphologie cubique avec des facettes du type {100}. La figure III.27 présente la morphologie des bulles observée dans un échantillon de Fe-PC recuit à 700 C pendant 2 heures. Pour l axe de zone (001), les bulles sont des rectangles avec des facettes parallèles aux directions [100] et [010]. Pour l axe de zone (011), nous observons des facettes parallèles aux directions [100]. Nous avons constaté une apparition de ces facettes plus importante pour les bulles les plus volumineuses. Fig. III.27- Morphologie des bulles observée dans un échantillon de Fe-PC implanté à 1x10 16 He/cm 2 et post- recuit à 700 C pendant 2 heures (images MET en champ clair, axe de zone (001) et (011), sous-focalisation : -1 µm). Dans le cas de V-PC, les bulles sont sphériques dans le V-PC 400 C (1h), le V-PC 400 C (2h) et le V-PC 700 C (1h) (pour des diamètres inférieurs à 2 nm). Pour des recuits 700 C (2h), 1000 C (1h) et 1000 C (2h) les bulles présentent une morphologie cubique avec des facettes du type {100} (Fig. III.28), comme dans le Fe-PC recuit pour des températures supérieures à 700 C. Pour l axe de zone (011), nous observons des facettes parallèles aux directions [100]. Pour l axe de zone (111), les bulles sont hexagonales, avec des facettes parallèles aux directions [100], [010] et [001]. 121

122 Fig. III.28- Morphologie de bulles observée dans un échantillon V-PC implanté 45 kev- 1x10 16 He/cm 2 et post- recuit à 700 C pendant 2 heures (images MET en champ clair, axe de zone (011) et (111), sous-focalisation : -1 µm). D autre part, l évolution de la distribution spatiale de bulles en fonction de la température et de la durée du traitement thermique a été étudiée. Nous avons regardé d abord la distribution des bulles sur les dislocations après traitement thermique ex-situ. Afin de mettre en évidence les bulles comme les dislocations, nous avons effectué nos observations MET en champ clair proche du axe de zone (100) et en suivant une valeur de =[200]. Dans le cas de Fe-PC, les bulles ont une distribution homogène après traitement thermique 400 C 1 heure et 2 heures. Pour des températures au-dessus de 700 C, il y a une population non négligeable de bulles qui se situe sur les dislocations. Dans la figure III.29, nous pouvons observer la distribution des bulles dans un échantillon de Fe-PC implanté 1x10 16 He/cm 2 et postrecuit à 700 C pendant 2 heures. 122

123 Fig. III.29- Répartition de bulles sur le réseau de dislocations observée dans un échantillon de Fe-PC implanté à 1x10 16 He/cm 2 et post- recuit à 700 C pendant 2 heures (images MET en champ clair, =[ ], axe de zone (001), sous-focalisation : -1 µm). Dans le cas de V-PC, le dommage introduit par la préparation FIB des échantillons post-recuit rend difficile l observation du réseau de dislocations. Pour mettre en évidence une éventuelle distribution préférentielle des bulles sur le cœur de dislocations, il faudrait réaliser des observations sur des lames après polissage électrochimique pour lequel le dommage introduit est plus faible. Nous avons ensuite regardé la distribution de bulles sur les joints de grains après traitement thermique ex-situ. Pour cela, nous avons réalisé des coupes traverses autour d un joint de grain des échantillons massifs post-recuits. Celles-ci, ont été réalisées seulement sur les échantillons V-PC. Dans les Fe-PC, les coupes par FIB ne pouvaient pas être préparées car les joints de grains n étaient pas suffisamment visibles en surface. Dans la figure III.30, nous pouvons observer une population importante de bulles de forme ellipsoïdale (ø~5 nm) située sur le joint de grain dans un échantillon de V-PC implanté à 1x10 16 He/cm 2 et post-recuit 1000 C pendant 2 heures. Des résultats similaires ont été obtenus pour un échantillon de V-PC après recuit 700 C pendant 2 heures. 123

124 Fig. III.30- Répartition de bulles sur le joint de grains observée dans un échantillon de VPC implanté à 1x1016 He/cm2 et post- recuit à 1000 C pendant 2 heures (images MET en champ clair, sous-focalisation : -1 µm). 124

125 III.1.D. Discussion sur l étude du comportement de l hélium à basse fluence dans le fer et le vanadium polycristallins Cette première partie de l étude se focalise sur la description des mécanismes d interaction entre l hélium, les défauts ponctuels (lacunes, auto-interstitiels), les amas (He nv m, He ni p) et les puits (surface, joints de grain, dislocations) impliqués dans le piégeage, la germination et la croissance de bulles au sein des matrices de fer et vanadium polycristallins implantés à basse fluence. Dans les futurs réacteurs, les effets macroscopiques qui se déroulent dans les matériaux de structure endommagent leurs propriétés mécaniques (gonflement, fragilisation, cloquage). Il a été démontré que ces phénomènes dépendent des interactions hélium-matériau, particulièrement du comportement de bulles. Pour comprendre le devenir de l hélium dans les éléments constitutifs des alliages d intérêt nucléaire, nous avons étudié le comportement de l hélium dans le fer et le vanadium purs après implantation et traitement thermique. Pour pouvoir comparer les deux métaux d étude, des conditions d implantation similaires (même profondeur d implantation et même dose) et la même démarche d analyse ont été mises en œuvre Par la suite, la discussion des résultats ainsi obtenus par couplage de plusieurs techniques abordera essentiellement deux aspects : Le premier traitant des phénomènes qui se déroulent au cours l implantation des échantillons (piégeage de l hélium et germination des bulles). Le second correspondant aux phénomènes induits par le post-traitement thermique des échantillons implantés (depiégeage et migration d hélium/ croissance des bulles). Piégeage de l hélium et germination des bulles à l état implanté L implantation des ions He dans la structure métallique met en jeu plusieurs phénomènes : o L insertion d atomes d hélium insolubles, o La création de défauts ponctuels suite au dommage balistique (paires de Frenkel). Il est établi que l hélium est un gaz insoluble dans les métaux qui, dès lors, a une forte propension, pour pouvoir rester, à s agglomérer ou se recombiner avec les autres défauts ponctuels créés ou pré-existants dans la matrice. La tendance de l hélium à s éliminer ou à être piégé par des amas stables va dépendre des conditions d implantation (énergie, fluence et température) et de la nature du métal (structure cristalline, microstructure). Dans la présente étude, nous avons observé que l implantation d hélium induit un profil de concentration avec un pic autour de 200 nm. Ce profil a des caractéristiques similaires quel que soit le type de métal étudié. Ces résultats tendent donc à montrer que la distribution globale de l hélium dans des amas stables est similaire tant pour le fer que pour le vanadium, avec une large concentration d amas localisée autour du pic d implantation (amas He nv m et He ni p). Parallèlement, une distribution homogène de bulles nanométriques a été constatée dans toute la profondeur implantée. Comme nous avons mentionné ci-dessus, le piégeage de l hélium donc sa précipitation sous forme des bulles dépend des conditions d implantation. Dans cette étude, nous avons travaillé : 125

126 o o o Avec des énergies d implantation intermédiaires (45 kev pour le V et 60 kev pour le Fe). Ces valeurs d énergie sont plus élevées que les valeurs d énergies de seuil de déplacement (40 kev dans le deux métaux) [ASTM, 2003]. En conséquence, au cours de l implantation, il y a des défauts ponctuels qui apparaissent parallèlement à l insertion de l hélium dans la matrice. En présence de lacunes, l hélium interstitiel sera dès lors piégé par la première lacune rencontrée. Les amas He nv vont continuer à piéger soit des atomes d hélium soit des lacunes pour former des amas He nv m plus stables et devenir finalement des bulles. De plus, la profondeur impactée par ces énergies d implantation est importante (jusqu à 600 nm), en favorisant ainsi la formation de bulles par rapport à la désorption d He en surface. Avec une dose d implantation relativement basse (~10 16 He/cm 2 ). Cette dose va jouer un rôle dans la nature et le nombre d espèces formées au cours de l implantation (ratio n/m). Une dose de l ordre de 1x10 16 He/cm 2 paraît suffisante pour favoriser la formation d amas He nv m observables par MET (ø>1 nm). A température ambiante. D une part, la dissociation thermique des atomes d hélium de ses pièges est négligeable à cette température, par conséquent les amas formés sont stables. D autre part, la concentration de lacunes est très faible (mais va dépendre du dommage d irradiation). Le processus athermal est favorisé à cette température ("autopiégeage"). Si nous comparons les deux métaux CC, la densité de bulles est plus petite dans Fe-PC que dans V-PC. Ces résultats pourraient être expliqués par le fait que dans Fe-PC, la majeure partie de l hélium reste piégé dans des amas de taille trop petite pour être visibles au MET, amas dont nous ne connaissons pas la densité. Sachant que nous avons implanté les deux métaux avec la même fluence et à la même température, mais avec une énergie plus élevée dans le Fe que dans le V, les défauts induits au cours de l implantation dans ce premier métal seraient ainsi plus nombreux que dans le second (comme nous avons déjà observé par SRIM dans la Fig. III.10). Par conséquent, dans le Fe, les atomes d hélium implantés seront pièges par un nombre plus important de lacunes que dans le V en formant ainsi de nombreux petits amas à la fois de bulles visibles (i.e. pour le Fe, l He serait dans un état "dilué" dans des espèces dont la taille est inférieure à la limite d observation MET contrairement au V où l He serait dans un état "concentré" dans des bulles visibles au MET). Le second point mis en évidence en comparant les résultats obtenus par SIMS et par MET est que la répartition homogène des bulles le long de la zone implantée n est pas en accord avec la présence d un pic de concentration sur le profil d hélium. Deux hypothèses peuvent être proposées pour expliquer ces différences : o o La première associée à la présence d autres amas, invisibles au MET distribués préférentiellement autour du pic d implantation, hypothèse en accord avec le précédent paragraphe ; La seconde reliée au fait que la pression des bulles visibles au MET ne serait pas homogène le long de la profondeur d implantation, avec des amas plus sur-pressurisés au niveau du pic d implantation et des amas moins pressurisés près de la surface ou en profondeur. Pour statuer sur ces hypothèses, il aurait été pertinent d utiliser d autres techniques. La mise en œuvre de la spectroscopie par annihilation de positons (PAS) aurait permis de mettre en 126

127 évidence l existence d espèces de plus petites tailles, de nature et de concentration variables selon la profondeur analysée. Ainsi par mesure du temps de vie d un positon "implanté" à différentes énergies (donc permettant de sonder différentes profondeurs) en plus du temps de vie lié à l annihilation dans la matrice (temps référence) relativement court et mesurable dans la zone non implantée, il aurait sans doute été possible de mesurer plusieurs temps de vie relatifs aux espèces He nv m. La variation de l environnement autour des lacunes aurait sans doute été perceptible. Ainsi schématiquement plus le nombre d He par lacune est élevé (amas en surpression), plus la durée de vie du positon décroit. Une autre technique qui aurait pu permettre de répondre à la question relative à la différence de pression entre les bulles localisées au pic d implantation et celles situées aux extrémités du profil, est la spectroscopie EELS. Si des essais ont été effectués sur des échantillons de vanadium après recuits (essais sur lesquels nous reviendront par la suite) l état implanté reste très difficile à caractériser du fait d un diamètre de bulles extrêmement petit (ø~1nm). Nous ne pourrons donc pas conclure sur l origine exacte de ces différences entre profil SIMS et mesures MET, ni même entre vanadium et fer. Mais il est certain que les résultats observés sont la preuve des différences d interaction He-métal au cours de l implantation. Il est à noter également qu il n existe pas a priori de germination préférentielle des bulles dans les joints de grains ou les dislocations. Pour vérifier cette absence de germination hétérogène à basse fluence, il faudrait pouvoir étudier l état implanté de monocristaux ou encore d échantillons présentant différentes tailles de grains et implantés aux mêmes conditions et caractériser la population de dislocations reliées aux bulles d hélium. Comme nous avons expliqué dans le préambule, le dommage lié à la préparation par FIB rend difficile l observation de ces derniers défauts étendus même après implantation. Afin de décrire le réseau de dislocations, il faudrait travailler avec de lames classiques implantées (préparées par électropolissage). L absence de cloques après implantation dans les deux métaux CC est cohérente avec l observation de petites bulles distribuées de façon homogène dans les métaux implantés. Il semble donc que les bulles n ont pas eu une taille suffisante pour induire de déformations dans la structure métallique. Tous ces résultats expérimentaux sont d autant plus intéressants et "interprétables" qu ils sont mis en regard de données issus de la simulation, méthode pour laquelle il est possible de considérer toutes les espèces quelle que soit leur taille. Cette démarche a été débutée dans le cas du fer pur pour une implantation à 60 kev et 1x10 16 He/cm 2 puisque des calculs de dynamique d amas ont été réalisés [Moll, 2013]. D après ces derniers, deux populations d amas (héliumlacunes et hélium-interstitiels) avec pour chacune une large gamme de ratio n He/n V et n He/n I sont obtenues en fin d implantation au niveau du pic d implantation (Fig. III.31). La concentration d amas lacunaires He nv m est plus élevée au-dessus de la ligne d équilibre thermique (symbolisée en rouge sur le graphique), ce qui démontre que les bulles sont dans un stade plutôt surpressurisé. La distribution des amas interstitiels He ni p met en évidence la formation de boucles avec une quantité importante d hélium piégée dans le cœur de ces dislocations. 127

128 Fig. III.31- Distribution d amas à 180 nm de la surface après la phase d implantation (n V, n I et n He correspondant à la concentration de lacunes, d interstitiels et d hélium, respectivement) obtenue par des calculs de dynamique d amas dans le fer implanté 4 He à 60 kev-1x10 16 He/cm 2. La ligne rouge représente la ligne d équilibre thermique pour les lacunes [Moll, 2013]. La même démarche est envisagée pour le cas du vanadium implanté 45 kev et 1x10 16 He/cm 2. Cependant, ce métal étant beaucoup moins étudié, les données nécessaires pour la réalisation des calculs de dynamique d amas étaient encore très récemment absentes. Des travaux sont en cours au sein du SRMP pour évaluer les énergies de formation des différentes espèces mises en jeu He nv m et He ni p et ainsi pouvoir les intégrer au modèle. Il sera ainsi pertinent pour la suite de voir si les espèces hélium-lacunes et hélium-interstitiels dans le cas du vanadium sont similaires ou différentes à celles décrites par Moll et al. sur le fer implanté [Moll, 2013]. Les résultats expérimentaux mettent en évidence la complémentarité des techniques mises en œuvre. D une part, la mesure de la concentration d hélium en profondeur par SIMS montre l apparition d une surconcentration au pic d implantation sans permettre d affirmer qu elle est due à la présence de bulles. D autre part, les observations MET constatent la présence de bulles mais leur seule présence ne permet pas de rendre compte de la distribution de l hélium en profondeur. Comme mentionné précédemment, la spectroscopie d annihilation de positrons (PAS) nous permettrait de caractériser la nature des amas lacunaires créés après implantation en le comparant avec les amas lacunaires préexistants à l état non implanté. Depiégeage et migration de l hélium/croissance de bulles au cours du traitement thermique Les traitements thermiques appliqués vont activer d autres mécanismes associés aux énergies de migration et de dissociation/formation. La différence des flux d espèces (hélium, défauts ponctuels) entre les amas et les puits présents dans le matériau va favoriser la migration de ces éléments et donc la croissance de certains amas au dépend des autres (comme dans le mécanisme de Murissement d Ostwald). Les déformations dans le réseau cristallin induites par la présence de bulles ou autres défauts peuvent également permettre la mobilité des amas. Les études précédemment menées ont mis en évidence différents comportements en fonction de la température, et ce au travers de l analyse de l évolution des espèces impliquées dans la désorption, du profil de concentration, ou encore de la population de bulles (taille, densité, morphologie) : 128

129 o Pour T 400 C Le comportement dans le fer est similaire au comportement dans le vanadium. Dans cette gamme de températures, il n y a pas d évolution appréciable ni des espèces impliquées dans la désorption, ni du profil d hélium, ou encore de la taille, densité et morphologie des bulles. Les résultats obtenus dans le cas du Fe-PC implanté 60 kev à He/cm 2 sont proches de ceux obtenus par Loussouarn et al. [Loussouarn, 2015] via la technique de l HI-ERDA et par Moll et al. [Moll, 2013] via la technique MET in-situ. Dans l étude de Loussouarn et al., les échantillons analysés sont également du fer pur (même nuance Goodfellow ) mais ont été implantés dans des conditions légèrement différentes des nôtres : 40 kev (R p= 150 nm) et 1x10 17 He/cm 2 à température ambiante. Pour des traitements thermiques ex-situ à 400 C pendant 1 heure, les profils d hélium restent similaires au profil obtenu pour l échantillon implanté, comme dans le cas de notre étude. Dans l étude de Moll et al. [Moll, 2013], les échantillons analysés sont du fer pur implantés dans les mêmes conditions que les nôtres (60 kev 4 He + à He/cm 2 et température ambiante). Au cours du traitement thermique in-situ MET (3 C/min) jusqu à 400 C (673 K), les bulles restent très petites (< 1 nm) et nombreuses (2x10 17 cm -3 ) (Fig. III.32). Fig. III.32- Evolution de la taille moyenne des bulles d hélium et des boucles de dislocations pendant un recuit in-situ au MET dans le fer pur implanté 60keV 4 He + à He/cm 2 (3 C/min) [Moll, 2013]. Le comportement après traitement thermique ex-situ dans cette gamme de températures est également proche du comportement après traitement thermique in-situ. Pendant l analyse TDS, la quantité d hélium désorbée reste assez faible par rapport aux autres domaines de désorption à plus haute température. Selon les données de la littérature, cette désorption correspondrait dans les deux cas aux atomes d hélium d espèces proches de la surface, ainsi qu aux espèces He nv m sur-pressurisées [Cao, 2011 ; Federov, 1996a, 1996b, 1998 ; Lefaix-Jeuland, 2012, 2013a ; Morishita, 2003a ; Nita, 2007 ; Sugano, 2002, 2003, 2004 ; van Veen, 1994 ; Xu, 2009]. Dans cette gamme de températures, les échantillons post-recuits, ne présentent pas de cloques ou de porosités sur la surface, et aucune réelle modification vis-à-vis de l état implanté. Ces observations se corrèlent aussi avec le fait qu il n y a pas de variation dans le profil d hélium et que les bulles ne grossissent pas suffisamment pour induire des modifications importantes à proximité de la surface. 129

130 Au regard de ces données, les résultats suggèrent qu une grande partie de l hélium reste piégée dans des amas très stables au sein de la matrice métallique même après un recuit à 400 C. Ce phénomène pourrait être expliqué par les éléments suivants : - La création de lacunes est limitée [Golubov, 2007]. En effet, la concentration à l équilibre des lacunes est proportionnelle à l exponentiel de (-E v F/kT) : c est-à-dire que pour créer de lacunes, nous devons franchir une valeur importante d énergie, et donc une valeur importante de température (E F V~2,33 ev pour le V et E F V~2,02 ev pour le Fe [Willaime, 2006]). - Les amas surpressurisés pour se relaxer vont avoir tendance soit à éliminer des atomes d He, soit à éliminer des auto-interstitiels qui vont ensuite diffuser vers la surface ou les autres puits (amas, dislocations, joints de grains). D une part, Moll et al. [Moll, AM] montrent via des calculs de dynamique d amas que la distribution des amas hélium-lacunes He nv m est plus importante au-dessous de la ligne d absorption des interstitiels (ligne violet) : l émission des interstitiels est donc élevée dans cette gamme de températures (He nv m He nv m+1 + SIA) (Fig. III.33). Cette émission est partiellement responsable de la légère croissance des bulles et de l absorption d interstitiels par les boucles de dislocations. Elle induit aussi un léger rétrécissement de la distribution des bulles, puisque les bulles sous-pressurisées vont absorber les interstitiels que les bulles sur-pressurisées vont émettre. D autre part, comme nous avons pu constater à partir de nos spectres TDS, les amas émettent aussi des atomes d hélium (He nv m He n-1v m + He). Ainsi à "basse" température, la désorption d une faible quantité d hélium (par rapport à celle piégée dans des amas He nv m plus stables) est la signature de la présence d amas He nv m ayant une forte densité d hélium (n/m élevé) mais aussi de la présence d amas He ni p ayant une énergie de liaison très faible (comme des espèces He 1I p et He 2I p avec p<20) [Ventelon, 2006]. L existence de ces derniers est d ailleurs prouvée dans les calculs de dynamique d amas (Fig. III.31). Fig. III.33- Distribution d amas (à 180 nm de la surface) obtenue par dynamique d amas dans le Fe implanté à 60 kev 1x10 16 He/cm 2 et post-recuit isochrone (3 C/min) à 27 C (à gauche) et 227 C (à droite). Les lignes noire, bleu clair, violet et rouge représentent la ligne d équilibre thermique pour les lacunes, la ligne d absorption de lacunes, la ligne d absorption d interstitiels et la ligne d absorption d atomes d He, respectivement [Moll, AM]. 130

131 o Pour 400 C<T 700 C Pour les deux métaux CC, des différences apparaissent par rapport à l état implanté. Les mesures de désorption d hélium ont mis en évidence une augmentation progressive de la désorption avec l implication de plusieurs types d espèces. Nous avons observé une très forte désorption dans le V-PC, contrairement au Fe-PC où la désorption par rapport aux autres domaines semble s atténuer. Comme précédemment souligné, ces proportions restent "relatives" puisque si la totalité de l hélium désorbée dans le V-PC (jusqu à 1200 C) était prise en compte, la proportion d hélium désorbée dans le Fe-PC serait alors plus importante que celle issue de V-PC. Les espèces à l origine de cette désorption impliquent des éléments d impureté (X=C, N, O) principalement présents dans le vanadium pur [Federov, 1996a, 1996b, 1998 ; Nita, 2007 ; van Veen, 1994]. Les données obtenues après traitement thermique ex-situ suggèrent la même évolution quelle que soit la durée du traitement thermique : une diminution de la concentration d hélium avec une augmentation de la taille et une diminution de la densité des bulles. Ces modifications sont plus lentes et moins marquées dans le V-PC que dans le Fe-PC. En comparant les profils de concentration et la distribution de taille des bulles en fonction de la profondeur, les résultats montrent qu il existe une corrélation entre ces données quel que soit le métal étudié et quelle que soit la durée de recuit (R pø~r phe) : si nous faisons l hypothèse que pour cette plage de température, l hélium est essentiellement présent dans le matériau sous la forme de bulles visibles par MET, il peut être raisonnable d envisager que celles dont le diamètre est le plus grand contiennent également une concentration plus importante d He. Ainsi les bulles de plus grande taille sont observées au niveau du pic d implantation. Les bulles plus petites sont localisées à proximité de la surface ou en profondeur, zones où la concentration d He mesurée est plus faible. La même corrélation peut être effectuée entre la concentration d He mesurée par SIMS et la densité de bulles évaluée à partir des images MET dans le cas des échantillons de vanadium et ce quel que soit le temps de recuit (R pρ~r phe). En revanche, dans le cas des échantillons de fer recuits la distribution bimodale de la densité des bulles ne correspond pas exactement au profil d He mesuré par SIMS. Il est toutefois intéressant de remarquer que le profil de concentration d He obtenu après des recuits à 700 C présente en plus d un pic principal autour du pic d implantation une concentration non négligeable d He sous la surface. La distribution des bulles observée au MET sur deux régions pourrait être reliée à cette diffusion d He vers la surface. La différence d échelles en profondeur entre les deux techniques est peut-être un effet de mesure expérimentale : l échelle SIMS est établie à partir de mesure de profilométrie (très sensible à l état de surface et peu fiable pour les premiers nanomètres), alors que l échelle MET est établie à partir d un découpage des clichés d analyse. D autres études ont déjà mis en évidence une distribution bimodale de la concentration après traitement thermique à partir de 700 C, mais dans le cas du vanadium. Blewer et al. [Blewer, 1976] ont ainsi observé une distribution d hélium en profondeur avec un double pic après des recuits à 750 C et 850 C des échantillons implantés à 80 kev-5x10 17 He/cm 2 à 100 C (Fig. III.34). Ces auteurs ont attribué cette distribution à l existence de différentes populations d amas qui piègent l hélium en fonction de la profondeur, donc avec de stabilités différentes sous l effet de la température : à la fois d avoir qu un seul profil d implantation, il existerait plusieurs profils qui le 131

132 composent. Dans le cas des études menées par Blewer et al., il existe deux populations des amas : une proche du pic théorique de concentration de lacunes (~0,75R p) et autre après le pic d implantation d hélium (~1,25R p). Celles-ci évoluent lors du recuit d une part vers une grande densité de petites bulles (ø~3 nm) proche de la surface qui piégeaient plus fort l hélium (0 x R p), et d autre part vers une petite densité de grandes bulles (ø~7 nm) qui piègent moins fort l hélium aux profondeurs d implantation plus élevées (x>r p). Si nous reprenons cette hypothèse dans le cas de notre étude, nous observerions également les deux "populations" des amas à l état implanté initial dans le Fe, qui tiendraient après recuit aux bulles de densité similaire, une population avec de petites tailles proche de la surface commençant à désorber une partie de leur hélium vers la surface et autre avec une taille et une concentration plus importante d hélium proche du pic d implantation. Fig. III.34- Profils d hélium (ratio du rendement 4He Yield/V Yield) en profondeur (normalisé avec le R p) obtenus par Blewer et al. pour le vanadium pur après implantation à 80 kev-5x10 17 He/cm 2 (à 100 C) et post-recuit à750 C et 850 C. La distribution du rayon et de la densité de bulles sont illustrés pour l échantillon post-recuit à 750 C (carrés avec de lignes pointillée et discontinue) [Blewer, 1976]. Parallèlement à l évolution classique de bulles avec une augmentation de leur taille et une diminution de leur densité, les observations sur la microstructure des bulles ont mis en évidence une évolution de leur morphologie : elles changent sa morphologie "sphérique" initiale par une morphologie "cubique ou rectangulaire" avec des facettes du type {100}. Dans la phase de croissance, les bulles tiendraient à un état d équilibre moins surpressurisé, en minimisant les énergies de surfaces en prenant de facettes sur des plans cristallographiques préférentiels. D après la caractérisation microstructurale par MEB, les échantillons recuits à 700 C ne montrent aucun changement de l état de surface après implantation. La croissance des bulles (avec de ø entre 2 et 8 nm) n induirait donc pas la formation de cloques ou de porosités. De plus, à ces températures, elles ne semblent mobiles puisqu aucune déformation macroscopique n est à déplorer : bien qu un signal de désorption d He soit mesuré par TDS, ce dernier doit migrer de façon interstitielle (une fois dépiégé) et non directement avec l amas. Les résultats expérimentaux obtenus sur le Fe-PC sont bien en accord avec les études réalisées par Moll et al. [Moll, 2013] pour laquelle il avait été montré qu aux températures inférieures à 700 C, la croissance de bulles augmente en parallèle de la croissance des boucles de dislocations 132

133 (voir Fig. III.32). Ainsi, en croisant cinétique de croissance de bulles par recuit isochrone in-situ MET et calculs de dynamique d amas, trois mécanismes pourraient être impliqués dans les évolutions observées : - La dissociation d amas He nv m. Par ce mécanisme, des échanges d espèces s opèrent entre différents populations ("transmutations") et contribuent à leur croissance respective. Celui-ci peut ainsi être corrélé avec les différents domaines de désorption observés au cours du traitement thermique in-situ aux températures intermédiaires tant pour le fer comme dans le vanadium pur. Pendant les mesures TDS, comme déjà souligné, le système évolue de façon continue, avec dépiégeage de l hélium depuis les amas les moins stables, puis désorption ou repiégeage par d autres amas plus stables rencontrés sur le parcours de diffusion. En d autres termes, l He qui désorbe est issu à la fois d espèces He nv m formées immédiatement après implantation et d amas créés pendant le traitement thermique. Par exemple, Xu et al. [Xu, 2010] ont simulé, par des calculs de dynamique moléculaire, l évolution de la distribution d amas pour des échantillons de fer implantés 10 kev avec une fluence de 1x10 15 He/cm 2 et après traitement thermique (rampe 1 C/s) (Fig. III.35). Ils observent que quand la température monte, la population d amas se contracte en raison de l émission d hélium et de lacunes, avec une modification de la pente vers des ratios He/V plus petits. Autour de 600 C, le ratio s approche de 1 et les amas He 3V 2, He 4V 3 et He 5V 4 commencent à se dissocier, en éliminant une large quantité d atomes d hélium et lacunes. L augmentation de la concentration d He et de lacunes dans la matrice favorise la formation d amas He nv m plus grands (des amas He 5V 5 jusqu aux amas He 10V 9). Selon le modèle des énergies de liaison thermodynamiques utilisé par ces auteurs, l énergie de liaison He-V est d autant plus élevée que la taille de l amas augmente, avec toujours un ratio He/V fixé à 1. Il résulte donc une croissance rapide des gros amas alors que dans le même temps les petits amas (au-dessous de He 5V 5) continuent à se dissocier ("mécanisme de Murissement d Oswald coordonné par les atomes d hélium et les lacunes"). Fig. III.35- Distribution d amas (à 37 nm de la surface) obtenue par dynamique d amas dans le Fe implanté à 10 kev -1x10 15 He/cm 2 et post-recuit isochrone (1 C/min) à 350 C (à gauche) et 750 C (à droite) [Xu, 2010]. 133

134 - L émission de lacunes à partir de puits (surface, joints de grains). Dans cette gamme de températures, la création de lacunes dans les puits commence à s activer et pourrait également avoir une influence dans la croissance de bulles. Selon le modèle linéaire d Evans et al. [Evans, 1996], en considérant une situation initiale dans laquelle une couche uniforme de petites bulles surpressurisées se forme après implantation entre la profondeur x 1 et x 2 (Fig. III.36.a), l effet du traitement thermique à haute température induit la formation de lacunes tout d abord à la surface. Celles-ci diffusent ensuite dans le cœur de l échantillon, entrainant la formation d un gradient de concentration de lacunes jusqu à la zone d implantation. La première couche de bulles va absorber les lacunes de ce flux et les bulles croissent jusqu à ce qu elles atteignent une pression d équilibre thermodynamique (Fig. III.36.b). Ce modèle permet aussi d expliquer la croissance de bulles proches de joints de grains après traitement thermique ex-situ des échantillons de vanadium implantés. Lors du recuit, un gradient de concentration de lacunes apparait entre le joint de grains (où sont créées les lacunes) et le centre des grains entrainant une croissance de bulles proches du joint de grains. Fig. III.36- Représentation schématique du modèle linéaire d Evans :(a) au début du traitement thermique à haute température et (b) après traitement thermique [Evans, 1996]. - L émission de lacunes à partir de boucles de dislocations. En effet, les lacunes liées aux boucles de dislocations plus grosses ont une énergie de liaison de lacunes moins importante que les lacunes liées aux boucles de dislocation plus petites, donc l augmentation global de la taille de boucles est accompagnée d un mécanisme de Murissement d Oswald : la densité de boucles plus petites (boucle P) se réduit dû à l absorption de lacunes émises par les boucles plus grosses (boucle G) 134

135 (Fig. III.37.a). Les lacunes émises par ces dernières boucles contribueraient aussi à faire croitre les bulles. Par conséquent, ces amas hélium-lacunes deviendraient moins sur-pressurisés et tendraient donc vers la ligne d équilibre de lacunes (Fig. III.37.b). Autour de 577 C, les boucles de dislocations sont suffisamment grandes et interagissent entre eux en coalescent les uns avec les autres pour finalement former un réseau de dislocations (800 C). Ce mécanisme serait aussi en concordance avec nos observations MET qui décrivent une population de bulles non négligeable sur les dislocations après traitement thermique ex-situ dans les échantillons de fer pur (voir Fig. III.29). Brimbal et al. [Brimbal, 2011, 2012] observent de phénomènes similaires sur des échantillons implantés en mode bi-faisceau (ions Fe +2 et ions 4 He + ) et suggèrent que : (i) les atomes d hélium sont piégés sur les cœurs des dislocations formant de boucles, (ii) les atomes d hélium, mobiles le long de ligne de dislocation, forment de petits amas ("pipe diffusion"), (iii) les boucles croissent par absorption d interstitiels, (iv) ces amas grossissent par absorption de lacunes. (a) (b) Fig. III.37- (a) Représentation schématique du mécanisme de Murissement d Oswald impliqué dans la croissance de bulles et boucles de dislocations (b) Distribution d amas (à 180 nm de la surface) obtenue par dynamique d amas dans le Fe implanté à 60 kev He/cm 2 et post-recuit isochrone (3 C/min) à 427 C. Les lignes noir, bleu clair, violet et rouge représente la ligne d équilibre thermique pour les lacunes, la ligne d absorption de lacunes, la ligne d absorption d interstitiels et la ligne d absorption d atomes d He, respectivement [Moll, AM]. 135

136 Pour V-PC, les mécanismes impliqués dans la croissance des bulles sont probablement similaires que pour le fer mais moins marqués et plus ralentis. L évolution du comportement de l hélium nettement moindre dans le cas du vanadium pourrait être expliqué par : - L énergie de formation de lacunes. Cette valeur est plus grande dans le cas du vanadium (2,33 ev) que dans le cas de Fe (2,02 ev) [Willaime, 2006]. Il est dès lors nécessaire de franchir une température plus importante pour créer des lacunes dans ce métal. - La présence d impuretés. Celle-ci jouerait un rôle sur les mécanismes de dissociation des espèces dans cette gamme de température et influencerait probablement la diffusion et le repiégeage des atomes d hélium par d autres amas plus stables (petites bulles) sur le parcours vers la surface. Comme mentionné cidessus les espèces à l origine de la désorption impliqueraient des éléments d impureté (X=C, N, O), très présents dans le cas de nos échantillons V-PC. Des analyses effectuées sur ces échantillons par SAT à Oxford ont confirmé leur présence en forte densité au sein de la matrice métallique (Fig. III.38). L oxygène ou les autres impuretés sont connus pour induire un comportement de l hélium différent de celui observé dans d autres métaux CC (par exemple le Mo ou le W, où la concentration d impuretés est généralement moins importante). Il a été montré que les atomes d oxygène mobiles autour de 177 C (avec une énergie d activation d l ordre de 1,2 ev) ont une forte propension à décorer les lacunes et les amas HeV. Les nouvelles espèces HeV-O ainsi formées dans le vanadium sont très stables et ne se dissocieront que lorsque l oxygène redevient mobile, en diminuant les sites de nucléation pour des amas HeV-O plus étendues [van Veen, 1994]. Elément % V ±0.013 O 0.792±0.006 Cr 0.374±0.008 Al 0.024±0.003 Si 0.343±0.005 C 0.026±0.003 Fig. III.38- Reconstruction tridimensionnelle obtenue par sonde atomique tomographique du vanadium polycristallin pur. Sont représentés le vanadium (violet), le chrome (vert), l aluminium (bleu clair), l oxygène (jeune) et l oxyde de vanadium VO (noir). - La différence entre la densité de bulles à l état implanté dans le Fe-PC et le V-PC (de l ordre de 2,6x10 17 cm -3 et 4x10 17 cm -3 dans le Fe-PC et le V-PC, respectivement). Pour l état implanté, il avait été suggéré pour le fer qu une grande partie de l hélium reste piégée dans des petits amas He nv m invisibles au MET. Au cours du traitement thermique, la croissance des bulles plus importante dans le fer que dans le vanadium, pour une densité qui diminue également plus fortement, suggère que les amas initialement présents dans la matrice et dont la taille est sub-nanométrique 136

137 (invisibles au MET) ont tendance à venir nourrir les amas plus gros. Le vanadium aurait atteint un état plus "homogène" dès l implantation (beaucoup d amas de tailles similaires) contrairement au fer. Afin d éclaircir les mécanismes impliqués dans la croissance de bulles dans le vanadium, il serait intéressant de réaliser des observations MET in-situ pour suivre selon le même modèle que Moll et al. [Moll, 2013] l évolution de bulles parallèlement avec l évolution du réseau de dislocations. Des calculs de dynamique d amas seraient aussi pertinents pour corréler les mesures ainsi réaliser avec l évaluation théoriques des espèces He nv m, et He ni p présentes dans le matériau pour différents stades de traitement thermique. o Pour 700 C<T 1000 C Dans cette gamme de températures, les différences entre le fer et le vanadium deviennent plus notables. Les spectres TDS ont mis en évidence, des espèces He nv m avec une large gamme de ratio n/m qui désorbent entre 700 C et 800 C. Celles-ci ont été très complexes à analyser en raison des nombreux mécanismes impliqués dans la désorption (recombinaison, migration). D une part il est à noter que le ratio de stabilité n/m plus petit pour le V (n/m~1) que pour le Fe (n/m~1,3), entrainerait une désorption plus tardive en température dans le V que dans le Fe [Fu, 2005, 2008 ; Zhang, 2011]. D autre part, le changement de phase α γ dans le fer pur (T théorique~910 C) favoriserait la libération d une grande quantité d hélium (amas He nv m stables et bulles), tandis que pour le vanadium, sans transformation allotropique, la libération d hélium est progressive avec des amas stables plus "longtemps". L évolution de la concentration d He, de la taille et de la densité de bulles est ainsi plus marquée pour le Fe-PC que pour le V-PC. Dans le Fe-PC, une très large partie de l hélium a désorbé puisque le signal mesuré par SIMS est négligeable. La forme du pic de concentration comme la distribution de la taille et la densité des bulles évoluent avec un étalement vers la surface. Dans le V-PC, le profil de concentration, la taille et la densité de bulles évoluent après 1 heure de recuit de 700 C à 1000 C, mais ils ne varient pas après 2 heures de recuit. Comme déjà démontré pour des températures inférieures à 700 C, l absence de réel élargissement semble indiquer l existence d une large concentration de pièges stables localisés autour du pic d implantation. Pour les deux métaux CC, les bulles conservent une morphologie cubique avec des facettes du type {100}. Le facettage le plus important apparait pour les bulles les plus volumineuses. Ces données indiquent que les bulles approchent l état d équilibre (avec une quantité de lacunes plus importante, proche à celle d une cavité). Par rapport à une sphère, ces formes facettées ont évidemment un rapport surface/volume plus important mais l anisotropie des énergies d interface leur permet de réduire tout de même l énergie globale de l interface. La forme d équilibre de l amas est donc celle qui minimise l énergie de surface totale du système. Une technique intéressante pour vérifier si les "bulles" sont des amas du type hélium-lacunes ou du type lacunaires (cavités) est la spectrométrie EELS. Comme nous avons proposé pour les bulles à l état implanté, nous pourrions utiliser cette technique pour déduire la pression d hélium dedans les bulles. En effet, des essaies ont été effectués sur nos échantillons de vanadium recuit dans le Laboratoire de Physique des Solides à l Université Paris-Sud. Cependant, l obtention de valeurs de densités et pression fiables par cette technique reste limitée d une part par la complexité des méthodes d extraction du signal d hélium des spectres 137

138 EELS obtenus (le signal en question se trouve superposé à celui du pic "plasmon" caractéristique du vanadium) et d autre part par le fait que nos échantillons FIB ne sont pas suffisamment fins pour caractériser les bulles par le couplage STEM/EELS. Les résultats obtenus sur l évolution de bulles dans le Fe-PC sont toujours en accord avec les études réalisées par Moll et al. [Moll, 2013]. A des températures supérieures à 700 C, il a été montré qu un autre mécanisme se met en place (Fig. III.32). La mobilité des bulles à haute température, et visible au cours du recuit in-situ, induit une coalescence qui accélère leur croissance : des bulles de petite taille migrent et coalescent entre elles ou peuvent être piégées par de plus grosses bulles immobiles. Pour le V-PC, les mécanismes impliqués dans la croissance des bulles semblent différents de ceux observés pour le Fe-PC. Ainsi, à 1000 C les résultats obtenus restent similaires à ceux précédemment obtenus à 700 C. Le même mécanisme pourrait dès lors être impliqués dans les interactions He-matrice, avec une probable croissance des bulles liées à l absorption de lacunes créées au niveau des surfaces ou joints de grain ou encore issu du mécanisme de Murissement d Oswald proposé par Moll et al. dans le Fe-PC pour de températures inférieures à 700 C [Moll, 2013]. Il faudrait attendre des températures supérieures à 1000 C et/ou des temps plus longs que 2 heures pour éventuellement observer le mécanisme de migration/coalescence des bulles. Des études complémentaires MET in-situ se devront poursuivre pour expliquer la "vraie" nature de ces mécanismes à haute température. Nous avons constaté également la présence de porosités après traitement thermique ex-situ à 1000 C dans les échantillons de fer implanté mais pas dans les échantillons de vanadium. Deux hypothèses pourraient être avancées pour expliquer ces différences : - La première est liée au mécanisme impliqué dans la désorption de l hélium. Ainsi la présence de porosités à la surface indiquerait une migration des bulles vers la surface du matériau et non plus une diffusion interstitielle des atomes d He. Cela serait donc cohérent avec l hypothèse d une croissance des bulles à haute température, i.e. un mécanisme de migration est coalescence dans le fer pur, mécanisme écarté pour le vanadium. Sharafat et al. [Sharafat, 2009] montrent que la présence de porosités après implantation dans le tungstène à basse énergie (< énergie seuil de déplacement E 0) et à haute température serait liée à la migration rapide et coalescence de bulles d équilibre. Pour le prouver, ces auteurs ont calculé la densité et la taille des porosités, en simulant la migration et la coalescence de bulles d équilibre proches de la surface pendant l implantation à haute température par Monte Carlo Cinétique. Les valeurs théoriques obtenues étaient en bon accord avec l observation expérimentale dans des échantillons de tungstène implantés à 30 kev à 3x10 18 He/cm 2 et à de températures d implantation comprises entre 730 C et 1160 C. - Le deuxième s appuie sur la différence de ductilité entre les deux métaux CC. Celui-ci est plus grand dans le vanadium que dans le fer. Ainsi, le vanadium aurait une tendance plus importante à "tolérer" les déformations dans sa structure cristalline que le fer pur : la formation de porosités ou de cloques due aux déformations induites par les bulles d hélium dans le matériau sera plus marquée pour le fer. Pour arriver à bien comprendre les différences et similitudes entre le comportement de l hélium dans une matrice du fer et une matrice du vanadium, il faudrait avoir une idée de 138

139 la distribution des amas à l échelle atomique à l aide de calculs théoriques par dynamique d amas (He, lacune, auto-interstitiel) ainsi que des flux d espèces thermodynamiquement possibles (émission, absorption et recombinaison, élimination vers les puits) dans le vanadium et ainsi pouvoir comparer ces données à celles décrites par Moll et al. [Moll, AM] sur le fer. Bien que les données obtenues à partir des traitements thermiques in-situ servent de guide pour comprendre les mécanismes impliqués dans le comportement de l hélium au sein des deux métaux CC après traitement thermique ex-situ, il n existe pas de corrélation directe entre les deux procédés. La montée en température au cours de la mesure TDS est tellement rapide que seule une proportion d hélium très faible a désorbé par comparaison avec la quantité d hélium désorbée au cours des recuits isothermes. De plus, les mécanismes impliqués dans le piégeage des atomes d hélium, la désorption de ces atomes à la surface ou leur repiégeage par des autres amas plus stables, ne seront également tout à fait les mêmes : pour un temps de recuit court, le système aura moins de temps pour se réorganiser qu un temps long. Pour identifier réellement ce qui se passe pendant la mesure TDS et mettre en relation le comportement de l hélium avec la nature et la quantité de défauts responsables du piégeage de l hélium, il faudrait compléter nos résultats avec des expériences de thermodésorption stoppées. Avec cette méthodologie, nous pourrions arrêter le cycle thermique à une température voulue et observer "leur profil de concentration" et "leur distribution de bulles" (processus de trempe pour figer le système). Le suivi de la microstructure au cours d un traitement thermique in-situ MET isochrones et isothermes (suivi en continu des bulles, du réseau de dislocations) pourrait aussi apporter des éléments pour comprendre les différences entre le comportement de l hélium dans le Fe-PC et le V-PC. Pour cela, il faudrait travailler avec de lames classiques implantées (préparées par électropolissage) et se mettre dans des conditions d imagerie proches de conditions de Bragg afin d obtenir le contraste dû aux dislocations mais un peu éloignées pour pouvoir observer les bulles. Des modèles théoriques de déconvolution qui décompose les profils de concentration obtenus expérimentalement en différents profils gaussiennes seront envisagées afin de comprendre les mécaniques impliques dans la diffusion d hélium et déduire des paramètres cinétiques. Il serait également intéressant de décrire des isothermes de relâchement à l aide de mesures TDS pour ensuite déterminer des coefficients de diffusion apparents en fonction de la température (par modélisation des spectres isothermes) et la loi d Arrhenius régissant la diffusion de l hélium (D=D 0exp (-E a/kt)), comparables à ceux qui nous pourrions obtenir par SIMS. Toutefois, pour cela il faut avoir accès aux valeurs de pression d hélium désorbé au cours de la mesure TDS. Comme nous avons précisé dans le chapitre "Matériaux et Méthodes", notre équipement de TDS n est pas encore équipé d une fuite calibrée pour transformer les CPS en mbar. Avec des spectres de pression d He en fonction de la température, nous pourrons également calculer la quantité d hélium désorbé est la comparer avec la concentration d hélium obtenue par SIMS pour attirer de conclusions plus précises sur le depiégeage de l hélium en fonction de la température et du temps de recuit. 139

140 Cette partie a porté sur le comportement de l hélium implanté à basse fluence dans le fer et le vanadium polycristallins, analysé par un ensemble de techniques complémentaires. Ainsi nous avons pu décrire le comportement de l hélium dans la matrice métallique de deux métaux CC et ce pour différents stades, i.e. après implantation et après traitement thermique. Nos résultats montrent que l hélium après implantation se met essentiellement sous forme de bulles ou petits amas surpressurisés principalement situés autour du pic d implantation. Ces bulles dans les conditions d implantation ici utilisées germent de façon homogène, au centre des grains sans induire de modifications microstructurales importantes. Après traitement thermique, les mécanismes impliqués dans les interactions He-matrice vont dépendre principalement de la température. Nous avons constaté que des températures supérieures à 700 C seront suffisantes pour induire un grossissement des bulles non négligeable tant dans la matrice du fer que du vanadium par de mécanismes de croissance de bulles liés au Murissement d Oswald, l absorption des lacunes et la dissociation des amas hélium-lacune. Ces processus semblent plus lents dans le vanadium que dans le fer en raison de la présence d impuretés dans ce matériau et de la différence de densité de bulles initialement formées après implantation. Au-delà de 1000 C, la migration et coalescence de bulles avec les modifications induites par le changement de phase dans le fer pur, induisent des modifications plus fortes dans le fer pur que dans le vanadium. Nous avons pu constater que non seulement les défauts ponctuels jouent un rôle sur les interactions He-Fe et He-V, mais également que la microstructure a une influence sur les mécanismes de croissance proposés. Parmi ces éléments microstructuraux, les joints de grains posent un grand intérêt sur le comportement d He dans la matrice métallique. Afin d établir un lien entre les joints de grains et les amas He nv m, il faudrait aller au-delà des résultats obtenus dans cette première partie. Pour cette raison, nous étudierons dans la deuxième partie de ce chapitre des échantillons monocristallins implantés aux mêmes conditions d implantation. Ces données nous aideront à mieux évaluer le rôle de joints de grains sur le piégeage de l hélium, la diffusion de l hélium et l évolution de la population de bulles. 140

141 III.2. PARTIE 2 : MISE EN EVIDENCE DU RÔLE DE JOINTS DE GRAINS SUR LE COMPORTEMENT DE L HÉLIUM À BASSE FLUENCE DANS LE VANADIUM ET LE FER PURS Nous avons précédemment obtenu une base de données sur les interactions He-Fe et He-V dans les échantillons polycristallins implantés à une fluence de 1x10 16 He/cm 2 depuis la caractérisation de l état implanté jusqu au comportement de l hélium au cours d un traitement thermique in-situ ou ex-situ. Dans la littérature, de nombreuses analyses expérimentales [Cao, 2011 ; El-Atwani, 2015 ; Kesternich, 1983 ; Lane, 1983 ; Lefaix-Jeuland, 2013a ; Ono 2007 ; Sugano, 2002 ; Xu, 2009] et théoriques [Gao, 2006 ; Kurtz, 2004b ; Zhang, 2013, 2015] ont mis en évidence l effet de la microstructure, notamment de la présence des joints de grains, sur le comportement d He dans une matrice métallique. Ces défauts microstructuraux sont à la fois des puits pour les défauts ponctuels, des zones de ségrégation pour les atomes d hélium et des courts-circuits de diffusion pour les espèces vers la surface. Ce deuxième partie a pour objectif de mettre en évidence le rôle de joints de grains sur le piégeage de l hélium, la diffusion de l hélium et l évolution de bulles dans le fer et vanadium purs. Pour cela, une comparaison du comportement de l hélium dans le cas de monocristaux avec les précédents résultats a été effectuée, les échantillons monocristallins ayant été implantés dans les mêmes conditions que précédemment, sauf l angle d incidence pour éviter la canalisation (série 2 d implantation). Nous suivrons ainsi la même approche expérimentale pour caractériser d abord l état implanté et ensuite pour décrire le comportement des échantillons après recuit in-situ et ex-situ. III.2.A. Caractérisation des monocristaux implantés (étape a) Afin d étudier l effet de l implantation de l hélium sur les échantillons monocristallins, les états implantés ont été caractérisés. Ainsi, la microstructure et l état de surface ont d abord été analysés par MET et DRX. La distribution de la concentration d hélium en profondeur et la dose implantée ont été caractérisées par SIMS et HI-ERDA. La distribution des bulles d hélium a été déterminée par analyse des images MET. III.2.A.a. Caractérisation microstructurale après implantation A partir de l observation par MEB des échantillons Fe-MC et V-MC implantés, les résultats n indiquent aucun changement de l état de surface après implantation, ni aucune trace de pollution supplémentaire pour les deux matériaux étudiés. Ces observations sont similaires à celles obtenues pour les échantillons polycristallins après implantation. Les analyses DRX montrent une légère perturbation des pics de diffraction après implantation. Dans la figure III.39, nous pouvons observer les diffractogrammes des échantillons V-MC nonimplanté et implanté. Il existe toujours un pic majoritaire du type (200) et des pics parasites du type (110), (211), (220), (310) et (222). La largeur intégrale du pic associé au plan cristallin (200) est de l ordre de 0,36 et 0,369 pour les échantillons non implanté et implanté, respectivement. Cette très légère perturbation est liée à la création de défauts dans les matériaux au cours de l implantation qui induit de petites déformations au sein de la matrice métallique. Pour analyser avec plus de résolution la déformation induite par l implantation 141

142 d hélium, il faudrait utiliser la microdiffraction des rayons X (µ-drx), technique qui nécessite un rayonnement synchrotron. Fig. III.39- Diffractogrammes des échantillons V-MC non implanté et implanté (en échelle logarithmique). Dans la figure III.40, nous pouvons observer le diffractogramme d un échantillon Fe-MC implanté. Comme nous en avons déjà fait mention dans le préambule, les échantillons Fe-MC ont une structure plus proche de celle d un monocristal que les échantillons V-MC. La largeur intégrale du pic associé au plan cristallin (200) est de l ordre de 0,836 pour le Fe-MC implanté. Fig. III.40- Diffractogramme de l échantillon de Fe-MC implanté (en échelle logarithmique). III.2.A.b. Profils d hélium dans les échantillons implantés Dans la figure III.41, nous pouvons observer les profils de concentration d He dans le cas des échantillons monocristallins (Fe-MC et V-MC) et polycristallins (Fe-PC et V-PC) obtenus par SIMS ainsi que le profil simulé par SRIM après implantation à une fluence de 1x10 16 He/cm

143 Fig. III.41- Profils d hélium après implantation à 1x10 16 He/cm 2 obtenus par SIMS dans les échantillons Fe-MC et V-MC, comparés aux profils expérimentaux obtenus dans les polycristaux correspondants et aux profils théoriques simulés par SRIM. La dynamique de mesure, la limite de détection et la profondeur analysable sont similaires à celles obtenues dans le cas des polycristaux. Les profils obtenus confirment également l absence de canalisation des ions en profondeur ce qui était le but recherché par l inclination des échantillons monocristallins pendant l implantation (avec un angle de 7 ). L analyse statistique de la forme du profil d hélium donne une concentration maximale de l ordre de 5,57x10 20 at./cm 3 et 6,72x10 20 at./cm 3 dans le Fe-MC et V-MC, respectivement. Les profondeurs d implantation obtenues sont de l ordre de 201 nm pour Fe-MC et 189 nm pour V- MC (Tableau III.6). Fe (SRIM) Fe-MC (SIMS) V (SRIM) V-MC (SIMS) R p (nm) C He max. (at./cm 3 ) 6,35x ,57x ,75x ,72x10 20 Tableau III.6- Paramètres (R p et C He max.) obtenus par SRIM et SIMS pour les échantillons Fe-MC et V-MC implantés à 1x10 16 He/cm 2. Malgré les limites du logiciel de simulation, nous pouvons observer un bon accord entre les profils expérimentaux obtenus par SIMS et les profils simulés SRIM. Pour les échantillons monocristallins implantés, l intégrale des profils SIMS est similaire à celle obtenue dans le cas des profils SRIM, comme pour les échantillons polycristallins. Cependant, nous n observons pas de décalage entre l analyse et la théorie dans le cas du fer monocristallin. Les différences entre le Fe-PC et le Fe-MC implantés pourraient être expliquées par les hypothèses décrites dans la première partie de ce chapitre (voir l item III.1.A.b de ce chapitre). D une part, nous pouvons supposer que l hélium, une fois implanté dans le matériau, va diffuser vers des sites préférentiels (lacunes) avec une énergie plus basse que celle utilisée pour l implantation (~0.06 ev). Cette diffusion peut notamment s effectuer via les joints de grains, absents dans le cas du monocristal, ce qui peut induire une différence de profondeur d implantation entre les deux structures. D autre part, les erreurs d échelle en profondeur liées à la rugosité des échantillons Fe-PC seraient moins importantes dans les échantillons Fe-MC pour lesquels la surface est plus lisse. Dans le cas du vanadium pur, la profondeur des pics expérimentaux V-MC (R p~189 nm) et V-PC 143

144 (R p~195 nm) par rapport à la profondeur du pic SRIM sont similaires. L effet de la microstructure serait moins évident que dans le cas du fer pur, car les grains des échantillons V- PC (D g~200 μm) sont plus grands que ceux dans les échantillons Fe-PC (D g~120 μm) et l état de surface est similaire pour les deux microstructures (avec une surface relativement lisse). Comme nous avons proposé pour les échantillons polycristallins, les erreurs expérimentales restent probablement la principale cause du décalage des profils expérimentaux. Dans ces travaux, nous avons étudié des polycristaux avec une taille de grains plus grande que la profondeur d implantation calculé par SRIM (~200 nm). Même si nous considérons que les grains et les joints de grains dans ces échantillons sont distribués de manière aléatoire dans la matrice métallique, il est peu probable que la diffusion de l hélium vers les joints soit suffisamment marquée pour décaler le profil d hélium car même si cette diffusion devenait non négligeable nous observerions plutôt un étalement du profil qu un décalage vers la surface. Les profils SIMS obtenus tant pour les échantillons monocristallins que pour les échantillons polycristallins sont semi-quantitatifs. Afin de vérifier la dose d implantation à l état implanté, cette fois-ci dans les échantillons monocristallins, les profils de concentration d hélium en profondeur ont également été déterminés par HI-ERDA. Comme dans l analyse des échantillons polycristallins, seule la caractérisation des échantillons de vanadium implanté a pu être réalisée. Dans la figure III.42, nous pouvons observer le profil théorique SRIM, le profil expérimental obtenu par SIMS et le profil expérimental mesuré par HI-ERDA pour les échantillons V-MC implantés. Afin de comparer l allure des trois profils, la profondeur du pic du profil HI-ERDA (R p~282 nm) a été alignée sur celle du maximum issu de la simulation SRIM (R p~193 nm). Fig. III.42- Profil HI-ERDA obtenu pour un échantillon de V-MC implanté à 1x10 16 He/cm 2, comparés aux profils expérimental SIMS et théorique (SRIM). Ces résultats montrent un bon accord entre les données expérimentales (SIMS et HI-ERDA) et la simulation. Les paramètres obtenus pour les trois profils sont présentés dans le tableau III.7. La concentration maximale d hélium est similaire pour les trois profils. 144

145 V (SRIM) V-MC (SIMS) V-MC (HI-ERDA) R p (nm) C He max. (at/cm 3 ) 6,75x ,72x ,99x10 20 Fluence (ions/cm 2 ) 1x x ,08x10 16 Tableau III.7- Paramètres (R p, C He max. et fluence) obtenus par SRIM, SIMS et HI-ERDA pour V-MC implanté. Les fluences pour SRIM et SIMS sont évaluées en considérant que la rétention initiale est de l ordre de la fluence implantée. A partir du profil HI-ERDA, nous avons mesuré une dose d hélium de l ordre de 1,08x10 16 He/cm 2, proche de la dose implantée attendue et de la dose obtenue pour le V-PC implanté. Quelle que soit la microstructure du vanadium pur, le taux de rétention de l hélium reste élevé. III.2.A.c. Distribution des bulles d hélium dans les échantillons implantés Après implantation, les images MET montrent une distribution homogène des bulles avec un diamètre estimé à 1,81±0,21 nm dans Fe-MC et à 1,7±0,27 nm dans V-MC. La densité des bulles, calculée autour du pic d implantation (~200 nm), est de l ordre de 2,27x10 17 cm -3 et 4,53x10 17 cm -3 pour Fe-MC et V-MC, respectivement (Fig. III.43). En raison de la faible résolution spatiale, la distribution de la taille et de la densité en fonction de la profondeur n a pas été réalisée. Cependant, il semblerait à première vue qu il n y ait pas de différences le long de la profondeur d implantation (~400 nm). Si nous comparons ces observations au profil de concentration précédemment décrit, la distribution spatiale des bulles, a priori homogène sur toute la profondeur, ne correspond pas au pic observé. Ces différences pourraient être expliquées, comme dans le cas des échantillons polycristallins, par la présence d autres amas, invisibles au MET distribués préférentiellement autour du pic d implantation et/ou par le fait que la pression des bulles visibles au MET ne serait pas homogène le long de la profondeur d implantation. Fig. III.43 Distribution des bulles dans Fe-MC et V-MC implantés à 1x10 16 He/cm 2 (images MET en champ clair, sous-focalisation : -1 µm). 145

146 En comparant les échantillons monocristallins et polycristallins, nous n observons pas de différences dans la taille et la densité de bulles à l état implanté. De plus, l écart des densités de bulles observé entre les échantillons de Fe-MC et V-MC est identique à celui déjà observé entre Fe-PC et V-PC. Précédemment, nous avons associé ce phénomène au fait que dans le Fe-PC implanté, la majeure partie de l hélium restait piégée dans des amas de taille trop petite pour être visibles au MET. Il semblerait que ce soit également le cas dans Fe-MC implanté. La distribution d He dans le vanadium implanté, polycristallin ou monocristallin, serait donc majoritairement dans des amas dont la taille est suffisante pour être visibles dès l étape d implantation, i.e. dans des bulles nanométriques. Les échantillons Fe-MC et V-MC présentent des caractéristiques identiques aux échantillons Fe-PC et V-PC après implantation à 1x10 16 He/cm 2. D après la caractérisation microstructurale des échantillons implantés, aucune cloque ou porosité n a été observée par MEB à la surface. Une légère perturbation des pics de diffraction a été mise en évidence par DRX après implantation. Nous observons toujours un bon accord entre les profils de concentration en profondeur expérimentaux et les profils théoriques, avec un pic d implantation à 200 nm de profondeur. De plus, toute la dose implantée a été retenue dans les matrices métalliques que ce soit pour les monocristaux ou les polycristaux. Parallèlement, une répartition homogène des bulles dans la zone d implantation a été mise en évidence par MET. Les valeurs de taille (entre 1 et 2 nm) et densité (entre 2 et 4x10 17 cm -3 ) des échantillons monocristallins sont similaires aux échantillons polycristallins. Comme dans le cas du SIMS et de l HI-ERDA, le MET ne met pas en lumière de différences entre les microstructures polycristallins et monocristallines à l état implanté. Les joints de grains ne joueraient donc pas un rôle prédominant dans la forme du profil d hélium ou la germination des bulles dans ces conditions d implantation. Ces résultats nous amèneront ainsi à supposer que la répartition de l hélium (sous la forme de petits amas ou bulles) est homogène dans la matrice et dans les joints de grains. Il faudra regarder l évolution en température de ces éléments pour mettre en évidence le rôle des joints de grains sur le piégeage et le dépiégeage des espèces formées au cours de l implantation. 146

147 III.2.B. Rôle des joints de grains sur le comportement de l hélium au cours du traitement thermique in-situ (étape b) Nous avons vu précédemment qu il n existait pas de différences visibles entre les microstructures polycristallines et monocristallines à l état implanté. La suite de l étude porte sur l évolution du comportement d He dans les monocristaux au cours des traitements thermiques in-situ. Pour cela, nous répéterons les mêmes analyses TDS que celles réalisées dans les échantillons polycristallins afin d identifier les domaines de désorption ainsi que les énergies associées. III.2.B.a. Etude de la désorption d hélium au cours du traitement thermique in-situ La figure III.44 compare les spectres obtenus pour les échantillons Fe-MC et Fe-PC implantés à une fluence de 1x10 16 He/cm 2. Seul le premier cycle entre la température ambiante et 1050 C est illustré. Le spectre noté "Fe-PC grand" a été obtenu avec des échantillons de diamètre 20 mm alors que le spectre Fe-MC a été obtenu sur des échantillons de diamètre 10 mm, et ce pour des raisons de fourniture matière. Par conséquent, la surface qui désorbe pour Fe-PC est quatre fois plus grande que celle des échantillons Fe-MC implantés à 1x10 16 He/cm 2. Cette différence expérimentale induit indirectement une différence d échelle CPS de désorption d He dont on ne peut directement s affranchir sans étalonnage du spectromètre de masse (ce point sera mis en évidence avec le cas du vanadium pour lequel nous avons testé l effet de taille d échantillon (voir Fig. III.46). Nous focaliserons donc essentiellement notre analyse sur la température de désorption et sur le ratio entre pics d un même spectre. Fig. III.44- Spectres TDS obtenus pour des échantillons Fe-PC grand et Fe-MC implantés à 1x10 16 He/cm 2. Dans le spectre obtenu pour le Fe-MC, nous pouvons observer l existence de différents pics de désorption liés à l existence d espèces He nv m différentes. A la différence des échantillons Fe-PC, la désorption au cours du premier cycle est plus importante, même en tenant compte du facteur 147

148 d échelle liée aux surfaces des échantillons implantés. De plus, les pics de désorption sont globalement décalés vers des températures plus élevées. Le tableau III.8 résume les domaines de désorption observés à partir du spectre avec leur gamme de températures (T min-t max), la température (T D) et l énergie d activation (E D) correspondant à leur pic de désorption d hélium. Domaine T min-t max( C) T D ( C) E D (ev) ❶ ,48-2,32 ❷ ,27 ❸ ,57 ❹ >1000 >3,87 Tableau III.8- Domaines de désorption d He du spectre TDS obtenu pour Fe-MC implanté à 1x10 16 He/cm 2. Afin de compléter les résultats précédents et de comparer l évolution de l intensité du signal d hélium désorbé en fonction de la température pour les deux microstructures, nous avons calculé l intégrale cumulée de chaque domaine de désorption (Fig. III.45). Le maximum (100%) correspond à la somme de tous les domaines de désorption jusqu à 1050 C (T max pour le Fe-PC et Fe-MC). Fig. III.45 Intégrales cumulées pour chaque domaine de désorption, calculées à partir des spectres TDS de Fe-PC grand et Fe-MC implantés à 1x10 16 He/cm 2. A partir de tous ces résultats, nous pouvons décrire les principaux domaines de désorption dans Fe-MC et les comparer avec les domaines déjà définis dans Fe-PC (par rapport à T D, T max-t min, E D et l intégrale cumulée). Le domaine ❶ de Fe-MC (entre la 25 et 600 C) présente deux petits pics autour de 227 C et 501 C avec E D de l ordre de 1,48 et 2,32 ev, respectivement. Contrairement au Fe-MC, le domaine ❶ de Fe-PC se décale vers des températures inférieures (entre 25 et 550 C) et présente un seul pic à 370 C avec E D de 1,92 ev. La désorption du domaine ❶ 148

149 est plus faible comparée avec celle du domaine ❶. Dans les deux microstructures, ces domaines correspondraient aux atomes d hélium faiblement liées, désorbés des espèces proches de la surface et des petits amas He nv (surpressurisés). Le domaine ❷ de Fe-MC (entre 600 et 890 C) est constitué d un pic étroit intense à 809 C avec E D de 3,27 ev. Dans cette même gamme de températures, nous avons deux domaines de désorption présents dans le Fe-PC : le domaine ❷ (entre 550 et 700 C) et le domaine ❸ (entre 700 et 800 C). Ces résultats mettent en évidence l existence d un plus large panorama d espèces dans Fe-PC par rapport à Fe-MC, dont la désorption intervient aux températures intermédiaires. Les espèces desquelles est issu He dans le domaine ❷ seraient plus stables que les petits amas He nv dissociés dans domaine ❷ et moins stables que les amas He nv m dissociés dans le domaine ❸. De plus, il est à noter que la désorption dans le cas des polycristaux reste plus importante que celle observée pour les monocristaux pour des températures au-dessous de 860 C. Cette différence est quand-même relative, puisque pour comparer la proportion réelle d hélium désorbée il faudrait tenir compte de la différence de surface des échantillons MC et PC. Le domaine ❸ de Fe-MC (entre 890 et 1000 C) présente un pic étroit très intense à 904 C avec E D de 3,57 ev. Parallèlement dans le Fe-PC, le domaine ❹ (entre 800 et 1000 C) montre un pic de caractéristiques similaires, à 874 C avec E D de 3,48 ev. Les deux domaines correspondraient à l influence de la transformation de phase du fer pur. Celle-ci induirait une désorption plus importante dans Fe-MC par rapport à celle du polycristal, même si la surface est quatre fois plus petite dans le Fe-MC que dans le Fe- PC. Le domaine ❹ de Fe-MC est constitué par le début d un pic à 1000 C avec E D supérieures à 3,87 ev. Dans le Fe-PC, nous avons observé le domaine ❺ caractérisé par un pic intense à 1040 C avec E D de 3,94 ev. Nous pourrions associer ces deux domaines à la désorption depuis des amas plus stables tels que les bulles. Le deuxième cycle de désorption (non présenté) comporte un seul pic très intense compris entre 866 C et 904 C (domaine associé à l influence du changement de phase α γ). Comme nous l avons également observé dans le Fe-PC, il reste une quantité non négligeable d hélium fortement piégée dans la matrice métallique, même après 2 cycles de désorption. La même comparaison a été effectuée dans le cas des échantillons V-MC et V-PC implantés à une fluence de 1x10 16 He/cm 2 (Fig. III.46). Dans ce cas, nous avons analysée trois types d échantillons implantés : un cercle V-PC de diamètre 20 mm (V-PC grand), un cercle V-PC de diamètre 10 mm (V-PC petit) et un cercle V-MC de diamètre 10 mm (V-MC). L ajout du disque V- PC de petit diamètre nous a permis d illustrer l effet de taille d échantillons sur la désorption mesurée. Seul le premier cycle de désorption entre la température ambiante et 1200 C est présenté sur la figure III

150 Fig. III.46- Spectres TDS obtenus pour des échantillons V-PC grand, V-PC petit et V-MC implantés à 1x10 16 He/cm 2. Dans les trois spectres, nous pouvons constater à première vue des différences dans la position et la largeur des pics de désorption liés à l existence de différentes espèces He nv m, ainsi que dans l intensité du signal d hélium désorbé. Premièrement, le spectre obtenu pour V-PC petit est moins intense que celui obtenu pour le V- PC grand, ce qui est logique si nous tenons compte de la différence entre les surfaces des deux échantillons. Il y a aussi un décalage de température (20 et 50 C) entre les deux spectres. Ces différences pourraient s expliquer par le fait que pour tester les plus petits échantillons (V-PC petit, V-MC, Fe-MC), nous avons utilisé un autre porte-échantillon plus petit qui se place sur le porte échantillon de plus grand diamètre. Dans le porte-échantillon de petit diamètre, les thermocouples sont localisés un peu plus loin de l échantillon lors du recuit in-situ, ce qui peut entrainer une légère différence entre les températures mesurées pour ces deux échantillons. Il est également à noter que la taille de l échantillon ne joue aucun rôle sur la nature et le nombre de pics observés par la mesure TDS. Deuxièmement, l échantillon V-MC, à la différence des échantillons de V-PC grand et petit, présente une désorption lors du premier cycle plus importante et décalée vers des températures plus élevées. Le tableau III.9 résume les domaines de désorption observés à partir du spectre avec leur gamme de températures (T min-t max), la température (T D) et l énergie d activation (E D) correspondant à leur pic de désorption d hélium. 150

151 Domaine T min-t max( C) T D ( C) E D (kev) ❶ ,79-2,20 ❷ ,40 ❸ >925 3,64 Tableau III.9- Domaines de désorption d He du spectre TDS obtenu pour un échantillon de V-MC implanté à 1x10 16 He/cm 2. Comme dans le cas du fer pur, nous avons également calculé l intégrale cumulée de chaque domaine de désorption pour V-PC grand, V-PC petit et V MC (Fig. III.47). Le pourcentage de 100% correspond à la somme de tous les domaines de désorption jusqu à 1200 C (T max pour le V-PC grand, V-PC petit et V-MC). Fig. III.47 Intégrales cumulées pour chaque domaine de désorption, calculées à partir des spectres TDS pour des échantillons V-PC grand, V-PC petit et V-MC implantés à 1x10 16 He/cm

152 A partir de toutes ces données, nous pouvons décrire les différents domaines de désorption dans V-MC et les comparer avec les domaines observés dans V-PC (par rapport à T D, T max-t min, E D et l intégrale cumulée). Le domaine ❶ de V-MC (entre 25 et 550 C) présente deux petits pics autour de 327 C et 461 C, avec E D de l ordre de 1,79 et 2,20 ev. Dans la même gamme de températures, nous observons un pic (avec T D=364 C et E D=1,90 ev) dans le domaine ❶ de V-PC grand (entre 25 et 440 C) et un pic (avec T D=413 C et E D=2,05 ev) dans le domaine ❶ de V-PC petit (entre 25 et 500 C). Le domaine ❶ est décalé vers des températures supérieures à celles observées dans le cas des polycristaux. Le décalage peut s expliquer en partie par l écart expérimental de température lié à l utilisation d un porte-échantillon de diamètre différent, comme, précédemment mentionné car si nous comparons les échantillons monocristallins et polycristallins de même diamètre, la désorption d hélium dans les domaines ❶ et ❶ est assez proche. Les trois domaines de désorption correspondraient aux atomes d hélium faiblement liées, désorbés des espèces proches de la surface et des petits amas He nv surpressurisés. Le domaine ❷ de V-MC (entre 550 et 925 C) est constitué d un pic étroit intense à 848 C avec E D de 3,40 ev. Parallèlement, nous avons observé trois domaines dans le vanadium polycristallin, situés entre 440 et 915 C (domaines ❷, ❸ et ❹) ou entre 500 et 912 C (domaine ❷, ❸ et ❹) respectivement pour le petit et grand diamètre. Comme dans le cas du fer pur, nous avons moins de types d espèces impliquées dans la désorption pour les monocristaux par rapport aux polycristaux, pour cette gamme de températures. En revanche, si nous comparons les quantités relatives d He désorbées pour V-PC petit et le V-MC, elles sont similaires. Le domaine ❷ de V-MC serait probablement lié aux complexes HeXV m ou He nv m comme il en a déjà été fait mention pour le polycristal, mais dans des configurations (n,m) plus stables que pour V-PC. Le domaine ❸ de V-MC (entre 925 et 1200 C) est caractérisé par le début d un pic intense à 925 C avec E D de 3,64 ev. L augmentation franche de la désorption au-delà de 915 C a également été observée dans le domaine ❺ de V-PC petit et ❺ de V-PC grand. Elle est associée à la désorption depuis de bulles. Le deuxième cycle de désorption de V-MC (non présenté) se caractérise par le début du pic intense à 950 C, ce qui illustre comme dans le cas du V-PC de la présence d une quantité d hélium non négligeable encore piégé dans le matériau après 2 cycles de désorption. Dans les deux métaux CC, les spectres de désorption des échantillons monocristallins montrent deux caractéristiques qui les différencient des résultats observés pour les échantillons polycristallins: (i) le décalage des domaines de désorption principaux des monocristaux vers des températures plus élevées associé aux espèces d hélium désorbés de plus en plus stables et (ii) la réduction des domaines de désorption entre 600 et 900 C dans les échantillons monocristallins par rapport aux échantillons polycristallins. En parallèle des aspects précédemment mentionnés, il est également possible de noter des différences entre le fer et le vanadium. Dans le cas du vanadium, l intégrale cumulée (Fig. III.47) de la désorption de V-MC suit la même tendance (même courbure) que celle du polycristal V-PC 152

153 et ce tout le long du traitement thermique. Dans le cas du fer, cette intégrale cumulée (Fig. III.45) a une forme différente selon la microstructure. Il semble difficile de conclure complètement sur ces éléments du fait de la différence de surface entre MC et PC. Toutefois, pour des températures supérieures à 900 C, le changement de phase induirait des modifications plus importantes dans Fe-MC que dans Fe-PC, avec une désorption d hélium largement supérieure dans Fe-MC. III.2.B.b. Caractérisation microstructurale post-tds Afin de décrire l évolution de la microstructure et de l état de surface après désorption thermique, les échantillons Fe-MC et V-MC précédemment analysés par TDS ont été observés par MEB (Fig. III.48). Fig. III.48- Micrographies MEB des échantillons Fe-MC et V-MC implantés à 1x10 16 He/cm 2 après analyse TDS (2 cycles à 10 C/min). Après TDS, la microstructure des échantillons a évolué tout comme leur état de surface. D une part, nous observons des porosités en surface de l ordre de 0,12±0,03 µm dans Fe-MC et de 0,09±0,02 µm dans V-MC. D autre part, nous pouvons souligner l apparition de petits grains en surface de la structure monocristalline après traitement thermique in-situ en dessus de 1000 C dans les deux métaux CC. Ces observations suggèreraient un processus de recristallisation partielle au niveau de la surface caractérisée par la germination et la croissance de nouveaux grains. Ce changement microstructural observé par MEB est confirmé par DRX dans les échantillons Fe-MC et V-MC post-recuits ex-situ à 1000 C pendant 1 et 2 heures (résultats que nous présenterons ultérieurement dans l item III.2.B.a). Il est également à noter que les porosités sembleraient s aligner essentiellement sur les joints de petits grains en surface. Dans le Fe-PC, il existe de lignes de glissement à la surface, témoins de la déformation structurale dans la matrice, probablement dues aux plusieurs changements successifs de phase au cours de deux cycles TDS. La présence de porosités est en accord avec la désorption intense d He vers les températures élevées dans les spectres TDS des échantillons monocristallins. Dans le cas des échantillons polycristallins, la désorption d hélium n était pas suffisamment importante pour entrainer l apparition de porosités en surface ou mettait en jeu des mécanismes différents (migration des bulles?, tailles plus importantes?). 153

154 A partir des analyses de désorption d hélium, nous avons mis en évidence des comportements différents dans les monocristaux et les polycristaux de fer et de vanadium purs. Nous avons constaté une désorption à plus haute température et plus forte dans les monocristaux que dans les polycristaux. Une discussion plus exhaustive du comportement de l hélium après traitement thermique in-situ en présence de joints de grains sera abordée à la fin de cette partie. Les observations MEB montrent la présence de porosités sur la surface dans Fe-MC et V- MC. Parallèlement, nous observons une recristallisation partielle en surface après 2 cycles de désorption. Ces résultats sont à relier avec la désorption intense d He aux températures élevées dans les spectres TDS des échantillons monocristallins. La suite de ce chapitre cherchera à approfondir les processus qui accompagnent la désorption de l hélium en fonction de la température en analysant comme dans le cas des échantillons polycristallins, l évolution microstructurale, la diffusion de l hélium et la distribution de bulles après traitement thermiques ex-situ. 154

155 III.2.C. Rôle des joints de grains sur le comportement de l hélium après traitement thermique ex-situ (étape c) Au cours des traitements thermiques in-situ réalisés précédemment par TDS, nous avons mis en évidence des différences sur le comportement de l hélium dans les échantillons monocristallins et polycristallins. Comme dans le cas des polycristaux, nous avons réalisé des analyses complémentaires par MEB, SIMS et MET après traitement ex-situ pour caractériser plus précisément les évolutions de la microstructure, des profils d He et des bulles associées. Afin de comparer les deux microstructures, nous avons utilisé les mêmes conditions de température et durée de recuit que dans le cas des échantillons polycristallins. III.2.C.a. Caractérisation microstructurale des monocristaux après traitement thermique ex-situ Afin de décrire l évolution de la microstructure et de l état de surface après traitement thermique ex-situ, les échantillons monocristallins post-recuits ont été analysés par MEB et DRX. Dans le Fe-MC, les images obtenues pour des échantillons recuits à 400 C et 700 C ne montrent aucun changement de l état de surface, ni aucune trace de pollution supplémentaire. A partir de 1000 C, nous observons la formation de porosités en surface de l ordre de 0,20±0,04 µm pour le Fe-MC R1000 C (1h) et de l ordre de 0,15±0,05 µm pour le Fe-MC R1000 C (2h) (Fig. III.49). Comme précédemment mentionné, la présence de porosités a aussi été constatée dans les échantillons Fe-MC après TDS (2 cycles à 10 C/min jusqu à 1050 C). Dans le cas de ces recuits ex-situ les porosités sont réparties de façon plus homogène à la surface de l échantillon (pas d alignement clairement visible). De même, nous n observons pas de joints de grain ou de lignes de glissement à la surface. Ces modifications microstructurales observées dans le cas de la TDS sont peut-être à relier à l effet de plusieurs changements successifs de phases au cours des deux cycles TDS. Dans le V-MC, la microstructure et l état de surface des échantillons recuits à 400 C et 700 C ne présentent pas des modifications par rapport à ceux des échantillons implantés. A partir de 1000 C, nous n avons pas observé de porosités, contrairement aux échantillons de Fe-MC. Pourtant, nous avions observé des porosités dans les échantillons V-MC après TDS. Il est à noter que pour la TDS le recuit s était poursuivi au-delà de 1000 C (jusqu à 1200 C). Par contre, les images MEB après recuit à 1000 C mettent en évidence la présence de petits grains sur la surface des échantillons monocristallins après 1 et 2 heures de recuit, en accord avec les images obtenues dans les échantillons après TDS (Fig. III.49). Quelle que soit sa microstructure dans le fer pur, les analyses MEB mettent toujours en évidence la présence de porosités pour de recuits au-dessus de 1000 C. Contrairement au vanadium pur où nous n observons pas de porosités tant dans le V-MC comme dans le V-PC pour toute la gamme de températures et temps étudiés. Ces différences entre traitement in-situ et ex-situ semblent indiquer l existence d une température seuil pour la formation de porosités dans le vanadium, comprise entre 1000 C (maximum des recuits ex-situ) et 1200 C (maximum de la TDS). 155

156 Fig. III.49-Micrographies MEB des échantillons de Fe-MC et V-MC implantés à 1x10 16 He/cm 2 après recuit à 1000 C pendant 1 et 2 heures. Afin de vérifier la recristallisation partielle des échantillons monocristallins telle qu observée par MEB au-delà de 1000 C, nous avons étudié nos échantillons recuits par DRX. La figure III.50 montre les diffractogrammes de Fe-MC implanté et de Fe-MC post-recuit à 1000 C pendant 1 heure. Nous observons la disparation du pic du type (200) et l apparition d un nouveau pic correspondant au plan cristallographique (310). Nous avons constaté une évolution similaire dans l échantillon Fe-MC post-recuit R1000 C (2h). Fig. III.50- Diffractogrammes des échantillons de Fe-MC implanté et de Fe-MC recuit 1000 C pendant 1 heure (en échelle logarithmique). Dans la figure III.51, nous pouvons observer les diffractogrammes des échantillons de V-MC non implanté, de V-MC implanté et de V-MC post-recuit à 1000 C pendant 2 heures. Comme dans le 156

157 cas de Fe-MC, le pic (200) a pratiquement disparu. La largeur intégrée est de l ordre de 0,391 pour l échantillon de V-MC R1000 C (2h). Fig. III.51- Diffractogrammes des échantillons de V-MC non implanté, de V-MC implanté et de V-MC post-recuit 1000 C pendant 2 heures (en échelle logarithmique). Les analyses DRX montrent une évolution des pics de diffraction après traitement thermique exsitu à 1000 C dans les deux types de métaux CC. Ces résultats sont en accord avec les observations MEB précédentes, où nous avons mis en évidence une recristallisation partielle des échantillons monocristallins. Après traitement thermique au-delà de 1000 C, les monocristaux perdront l orientation préférentielle qui les caractérise et deviendront des échantillons polycristallins. Dans le cas du fer, le changement de phase autour de 910 C accentuerait encore plus l apparition de ces nouveaux plans cristallographiques à haute température. III.2.C.b. Effet de la microstructure sur la diffusion de l hélium dans la matrice métallique Dans la figure III.52, nous observons l évolution des profils d hélium obtenus par SIMS pour les six échantillons recuit ex-situ de Fe-MC, avec celui d un échantillon à l état implanté. 157

158 Fig. III.52- Evolution du profil d hélium SIMS après traitement thermique ex-situ des échantillons Fe-MC implantés à 1x10 16 He/cm 2. Après traitement thermique, nous observons, comme dans le cas de Fe-PC, une évolution de la concentration d hélium à partir d une certaine température et d un certain temps d exposition. Pour des recuits à 400 C, l analyse montre que les profils d He présentent des caractéristiques similaires au profil obtenu à l état implanté. Il est à noter que le profil d He obtenu pour l échantillon de Fe-MC R400 C (1h) est décalé vers la surface et contient une concentration supérieure à celle mesurée pour l échantillon implanté. Ce phénomène a déjà été observé sur les échantillons V-PC R400 C (1h). Il pourrait être associé à l existence d une couche d oxyde ou à celle d une pollution en hydrogène (sous forme de deutérium). Pour des recuits à 700 C, la concentration d hélium diminue fortement dans l échantillon de Fe-MC R700 C (1h) (C Hemax~6,73x10 19 at./cm 3 ) et le pic est décalé vers des profondeurs supérieures (R phe~246 nm). Après 2 heures, il ne reste que peu d hélium dans le matériau. Pour des recuits à 1000 C, une très large partie de l hélium a désorbé de la matrice des échantillons. La concentration résiduelle est en dessous de la limite de détection pour le SIMS. Au-delà de 1000 C, la forme du profil change avec une diffusion d He vers la surface. La même analyse que pour le Fe-MC a été réalisée sur les échantillons de V-MC après traitement thermique ex-situ pour évaluer l évolution du profil d hélium en fonction de la température et du temps de recuit. Dans la figure III.53, nous comparons les profils d hélium obtenus par SIMS pour les six échantillons recuit ex-situ V-MC avec celui d un échantillon à l état implanté. 158

159 Fig. III.53- Evolution du profil d hélium SIMS après traitement thermique ex-situ des échantillons de V-MC implantés à 1x10 16 He/cm 2. Pour des recuits à 400 C, l analyse montre que les profils d He présentent des caractéristiques similaires à celles du profil obtenu à l état implanté. La concentration obtenue après 1 et 2 heures de recuit est légèrement supérieure à celle mesurée pour l échantillon implanté. Comme dans le cas de Fe-MC R400 C (1h) et V-PC R400 C (1h), la modification de la surface par la présence d oxyde ou par la pollution en hydrogène (sous forme de deutérium) influencerait la mesure des profils dans cette gamme de température et de temps de recuit. Pour des recuits à 700 C, la concentration d hélium diminue légèrement après 1 heure de recuit (C Hemax ~4,05x10 20 at./cm 3 ). Après 2 heures, la désorption est encore plus importante (C Hemax ~1,10x10 20 at./cm 3 ). La forme du profil reste toutefois la même avec un maximum situé à 184 nm. Notons qu après une heure de recuit, il semble apparaitre une légère queue de diffusion en profondeur, la diminution de la concentration d He étant moins marquée pour les profondeurs comprises entre 300 et 500 nm que dans les couches supérieures. Pour des recuits à 1000 C, une partie plus importante de l hélium est désorbée après 1 et 2 heures de recuit. Le profil se décale un peu vers de profondeurs inferieures (R phe entre 160 et 170 nm). Le pic diminue jusqu à une C Hemax ~1,73x10 20 at./cm 3 pour l échantillon de V-MC R1000 C (1h) et une C Hemax ~1,04x10 20 at./cm 3 pour l échantillon de V-MC R1000 C (2h). Si nous comparons ces résultats avec les données obtenues par SIMS pour les deux types de microstructure, il est possible de mettre en évidence les grandes lignes suivantes : Pour les recuits à 400 C, quelle que soit la microstructure, nous n observons pas d évolution appréciable du profil d hélium en profondeur. Seule une petite désorption a été constatée dans les polycristaux Fe-PC et V-PC après 2 heures (entre 14 et 18%), ce qui n est pas le cas dans les monocristaux Fe-MC et V-MC aux mêmes conditions de recuit. Pour les recuits à 700 C, la désorption semblerait être moins importante dans les échantillons polycristallins que dans les échantillons monocristallins. 159

160 Pour les recuits à 1000 C, la quantité désorbée dans le V-PC est légèrement inférieure à celle désorbée dans le V-MC que ce soit après 1 heure (V-PC : 71% V MC : 74%) ou 2 heures de recuit (V-PC : 70% V MC : 81%). Cette différence semble toutefois assez négligeable. Dans Fe- PC et Fe-MC, la majeure partie de l He a désorbé de la matrice après 1 et 2 heures (100%). Bien que nous ayons constaté des différences dans la quantité d hélium désorbée après recuit, l évolution de l allure des profils de concentration en fonction de la température des échantillons monocristallins n est pas très éloignée de celle dans des échantillons polycristallins : quelle que soit la microstructure étudiée, nous observons toujours après recuit à haute température, une forte diminution de la concentration liée à une diffusion de l hélium globale vers la surface dans le cas du fer et une diminution de la concentration moins marquée traduisant un fort piégeage de l hélium autour du pic d implantation dans le cas du vanadium. Pour éclaircir l effet de la microstructure sur l évolution du profil d hélium, il est nécessaire de connaitre également le rôle de joints de grains sur l évolution des amas hélium-lacunes qui accompagne les modifications du profil de concentration au cours du traitement thermique, notamment celle de bulles. III.2.C.c. Effet de la microstructure sur l évolution des bulles après recuit ex-situ Dans la figure III.54, nous présentons les images obtenues par MET dans les six échantillons recuits ex-situ du Fe-MC implanté à 1x10 16 He/cm 2. L évolution des bulles d hélium en fonction de la température et du temps de recuit est observée : Pour des recuits à 400 C, les images montrent que la microstructure de bulles présente des caractéristiques similaires à celles observées à l état implanté, avec une forte densité numérique de bulles sphériques observables pour des profondeurs comprises entre 0 et 600 nm. Il n y a pas de croissance de bulles après 1 ou 2 heures de recuit. Ces observations sont en accord avec les profils d hélium en profondeur obtenus par SIMS, où nous n avons pas observé de diminution appréciable de la concentration d hélium. Pour des recuits à 700 C, la taille des bulles augmente (ø~12 nm) et la densité diminue après 1 heure de recuit. Cette tendance est encore plus accentuée après 2 heures de recuit (ø~19 nm). Il est également à noter le changement dans la morphologie des bulles : elles présentent une morphologie avec des facettes du type {100} pour les deux temps de recuit. Parallèlement, en SIMS nous observons une diminution de la concentration d He avec un élargissement du pic vers la surface. Pour des recuits à 1000 C, les taille et densité continuent à augmenter (ø~ nm) et à diminuer, respectivement. Les bulles sont toujours facettées. Il est importante de noter que pour ces tailles-là, nous parlerons plutôt de cavités que de bulles (des amas purement lacunaires ou ayant une faible densité en He). Pour vérifier la nature de ces amas (bulles ou cavités), il faudrait utiliser d autres méthodes expérimentales qui peuvent mesurer la densité d hélium comme la technique EELS. D autre part, les analyses SIMS montrent une concentration d He dans la matrice des échantillons en deçà de la limite de détection. Sur le même modèle que pour le Fe-MC, la figure III.55, présente les images obtenues par MET pour les six échantillons recuits ex-situ du V-MC implanté à 1x10 16 He/cm 2. Nous avons mis en 160

161 évidence, comme dans le Fe-MC, une évolution des bulles d hélium en fonction de la température et du temps de recuit : Pour des recuits à 400 C, les images montrent que la microstructure de bulles présente des caractéristiques similaires à celle observée à l état implanté. Les bulles restent sphériques et ne croissent pas après 1 ou 2 heures de recuit. Ces observations sont en accord avec les profils d hélium en profondeur obtenus par SIMS, où nous n avons pas observé de diminution appréciable de la concentration d hélium. Pour des recuits à 700 C, nous n observons pas d évolution de la taille ou de la densité après 1 heure de recuit contrairement au cas du Fe-MC. Après 2 heures de recuit, la taille des bulles augmente (d environ 2 nm à 4-6 nm) et leur densité diminue. Nous constatons là-aussi une évolution dans la morphologie des bulles avec l apparition de facettes après 2 heures de recuit. Parallèlement, en SIMS nous commençons à observer une diminution de la concentration d hélium après 1 heure de recuit (35%). Pour des recuits à 1000 C, les bulles deviennent plus grandes (4-6 nm) et moins nombreuses par rapport à l état implanté initial. Il n y a pas de différences notables dans la taille entre 1 et 2 heures de recuit. Cependant, la densité semble diminuer avec les temps de recuit. Nous observons des bulles avec des facettes distribuées tout le long de la profondeur d implantation pour les deux temps de recuits. D après les analyses SIMS, une grande partie de l hélium a désorbé pour les deux durées. Celle-ci est plus importante pour 2 heures de recuit (81%) que pour 1 heure de recuit (74%). Si nous comparons ces observations avec les images obtenues par MET sur les échantillons polycristallins post-recuits, nous pouvons noter que la tendance dans l évolution des bulles est similaire pour le MC et le PC tant dans le cas du vanadium pur que dans le cas du fer pur: les bulles restent petites pour des températures inférieures à 400 C et elles commencent à grossir à partir de 700 C. Pour les deux microstructures, le traitement thermique induit une augmentation de la taille et une diminution de la densité plus rapides dans le fer pur que dans le vanadium. Dans le fer pur, l évolution des tailles et densité en fonction du temps et la température semblerait être plus marquée dans le MC que dans le PC, contrairement au cas de vanadium, où l évolution ne présenterait pas de différences notables entre les deux microstructures. Pour étendre l analyse et dégager le rôle joué par les joints de grain dans l évolution de l hélium, la distribution en taille et densité de chaque population des bulles en fonction de la profondeur a été étudiée selon la même méthodologie que pour les polycristaux. 161

162 Fig. III.54 Evolution de la distribution des bulles après traitement thermique ex-situ des échantillons Fe-MC implantés à 1x10 16 He/cm 2 (images MET en champ clair, sous-focalisation : -1 µm). 162

163 Fig. III.55 Evolution de la distribution des bulles après traitement thermique ex-situ des échantillons V-MC implantés à 1x10 16 He/cm 2 (images MET en champ clair, sous-focalisation : -1 µm). 163

164 Evolution de la distribution en taille et de la densité des bulles après traitement thermique ex-situ Les dimensions (taille, densité) et la localisation en profondeur de chaque bulle discernable en MET, c est-à-dire d un diamètre supérieur à ~2 nm, ont été mesurées. Les données statistiques sur l ensemble de la population des bulles sont détaillées pour les différents traitements thermiques dans Fe-MC et V-MC. Sur la figure III.56, nous pouvons observer l effet de la température et du temps de recuit sur le diamètre et la densité moyens des bulles en fonction de la profondeur après traitement thermique ex-situ à 700 C et 1000 C pour les échantillons Fe-MC. Nous avons représenté seulement l évolution après recuit à 700 C et 1000 C, aucun réel changement n étant mesurable en dessous de ces températures. Les paramètres moyens obtenus autour de 200 nm de profondeur pour l état implanté et pour les recuits à 400 C sont rappelés au-dessus de chaque figure en tant que références. Pour des recuits à 700 C, les bulles deviennent plus grosses (jusqu à 11 nm et 18 nm après 1 et 2 heures, respectivement) et moins nombreuses (jusqu à 1,4x10 16 cm -3 et 3,9x10 15 cm -3 après 1 et 2 heures, respectivement) par rapport aux échantillons Fe-MC R400 C (1 et 2 h) et Fe-MC implanté. Elles sont observables sur l ensemble de la zone implantée (0-600 nm). Le diamètre moyen de bulles présente un pic autour de 225 nm dans Fe-MC R700 C (1h) et à 275 nm dans Fe-MC R700 C (2h). En regardant la distribution de la densité moyenne de bulles, nous remarquons une forte densité entre 175 et 275 nm (R pρ) pour 1 heure de recuit et entre 75 et 325 nm pour 2 heures de recuit. En SIMS, nous avons également observé un pic avec R phe~246 nm dans les échantillons Fe-MC R700 C (1h). La position de celui-ci est proche de R pø~225 nm et comprise dans le R pρ~ nm. Pour les échantillons Fe-MC R700 C (2h), une très large partie de l hélium a désorbé et nous n observons pas de pic dans le profil de concentration. Pour des recuits à 1000 C, nous observons une augmentation de la taille moyenne et une diminution de la densité moyenne par rapport à l état implanté et aux recuits à 400 C, et 700 C. Les bulles atteignent des tailles de 185 nm après 1 heure de recuit et de 100 nm après 2 heures de recuit. Les densités varient entre 5,60x10 13 et 1,06x10 14 bulles/cm 3 après 1 et 2 heures. La distribution du diamètre moyen des bulles change considérablement avec l apparition de 2 zones distinctes : une proche de la surface (225 nm pour le Fe-MC R1000 C (1h) et 125 nm pour Fe-MC R1000 C (1h)) et une autre plus en profondeur (350 nm pour le Fe-MC R1000 C (1h) et entre 175 et 475 nm pour le Fe-MC R1000 C (1h)). En augmentant le temps de recuit, nous constatons un décalage de ces zones vers la surface. La distribution de la densité moyenne de bulles reste relativement constante avec la durée, présentant une petite densité à la proximité de la surface (entre 0 et 275 nm) pour les deux temps de recuit. La distribution du diamètre et la densité de bulles dans cette gamme de température est en accord avec l observation d un élargissement en sub-surface (ou du moins d une 164

165 concentration résiduelle sur les premiers 200 nanomètres) dans les profils de concentration mesurés par SIMS dans les échantillons Fe-MC. Fig. III.56- Evolution du diamètre moyen et de la densité moyenne des bulles en fonction de la profondeur après traitement thermique ex-situ des échantillons Fe-MC implantés à 1x10 16 He/cm 2. Afin de comparer l effet de la microstructure sur l évolution de la taille et la densité de bulles, nous avons reporté dans une même figure les données obtenues pour chaque condition de recuit dans le cas des monocristaux Fe-MC et des polycristaux Fe-PC. La figure III.57 montre l évolution du diamètre et densité moyens pour les recuits à 700 C. 165

166 Dans le cas de Fe-MC, le diamètre moyen est plus important et la densité plus faible que dans le cas de Fe-PC, pour une durée de recuit déterminé. Par exemple, les valeurs maximales de diamètre et densité de bulles sont de l ordre de 11 nm et 1,4x10 16 cm -3 pour le Fe- MC R700 C (1h) et de l ordre 5 nm et 3,1x10 16 cm -3 pour le Fe-PC R700 C (1h). En regardant la distribution du diamètre moyen en profondeur, nous pouvons observer que la position du pic ne présente pas de variations importantes avec la microstructure pour la même condition de recuit (le R pø reste toujours autour de 225 et 275 nm). En revanche, les échantillons Fe-MC recuits à 700 C ne présentent pas de distribution bimodale de la densité à différence des échantillons Fe-PC. La position du pic de la distribution pour les monocristaux est similaire à la position du deuxième pic de la distribution bimodale des échantillons Fe-PC (~225 nm). Fig. III.57- Comparaison des profils du diamètre moyen et de la densité moyenne des bulles après traitement thermique ex-situ à 700 C des échantillons Fe-MC et Fe-PC. 166

167 Pour les recuits à 1000 C (Fig. III.58), nous observons une tendance similaire aux profils obtenus pour les recuits à 700 C : les bulles sont plus grandes et moins nombreuses dans le cas de Fe-MC que dans le cas de Fe-PC, pour une durée de recuit déterminée. Après 1 heure de recuit, le diamètre maximum et la densité maximale sont respectivement de 185 nm et 5,6x10 13 cm -3 pour le Fe-MC et de 30 nm et 1x10 16 cm -3 pour le Fe-PC. Après 2 heures de recuit, la taille continue à être plus élevée dans Fe-MC (ø~100 nm) que dans Fe-PC (ø~80 nm). Cependant, les valeurs de densité moyenne sont assez proches pour les deux microstructures (ρ~1x x10 13 cm -3 ). Dans les deux microstructures, nous mettons toujours en évidence deux familles de bulles qui se décalent progressivement vers des profondeurs plus faibles avec la durée de recuit. Parallèlement, une forte densité de bulles est observée au voisinage de la surface. Fig. III.58- Comparaison des profils du diamètre moyen et de la densité moyenne de bulles après traitement thermique ex-situ à 1000 C des échantillons Fe-MC et Fe-PC. 167

168 La même analyse réalisée sur le Fe-MC (voir Fig. III.56) a été effectuée sur les échantillons V-MC après traitement thermique ex-situ à 700 C (2 h) et 1000 C (1 et 2 h). Dans les échantillons monocristallins recuits à 400 C (1 et 2 h) et à 700 C (1 h), l évolution de bulles est pratiquement négligeable par rapport aux autres traitements thermiques. Sur la figure III. 59, nous pouvons observer l effet de la température et du temps de recuit, sur le diamètre moyen et la densité moyenne des bulles en fonction de la profondeur des échantillons V-MC recuits. Les paramètres moyens obtenus autour de 200 nm de profondeur pour l état implanté, pour les recuits à 400 C (1 et 2 h) et à 700 C (1 h) sont indiqués au-dessus de chaque figure en tant que références. Pour des recuits à 700 C (2h), la taille augmente et la densité diminue par comparaison avec l état implanté et les échantillons recuits 400 C (1 et 2 h) et 700 (1 h). La distribution du diamètre moyen de bulles reste autour de 3 et 7 nm et la densité moyenne des bulles varie entre 1,7x10 14 et 2,5x10 16 cm -3. La population de bulles est observée à des profondeurs comprises entre 0 et 600 nm, en accord avec le profil de concentration d He obtenu en SIMS. Le pic des profils du diamètre moyen et de la densité moyenne des bulles se trouve à 225 nm en profondeur. La position du pic est un peu plus élevée que la valeur obtenue par SIMS (R phe~183 nm). Pour des recuits à 1000 C, la distribution du diamètre moyen de bulles reste similaire à celle observée à 700 C (avec des tailles autour de 2 et 4,5 nm après 1 et 2 heures de recuit). Pour les échantillons de V-MC R1000 C (1h) et de V-MC R1000 C (2h), nous n avons pas observé de bulles au-delà de 400 nm, contrairement aux échantillons de V-PC R700 C (2h) où des bulles étaient visibles jusqu à 500 nm. Nous notons également une homogénéité du diamètre moyen de bulles avec la profondeur pour les deux temps de recuit contrairement au cas du Fe-MC où les profils présentent une distribution bimodale bien marquée. La distribution de la densité moyenne de bulles diminue avec la durée de recuit. Le pic du profil de la densité de bulles se trouve à 225 nm en profondeur après 1 heure de recuit et à 175 nm en profondeur après 2 heures de recuit. Pour les recuits pendant 2 heures, l allure du profil de la densité ne varie pas avec l augmentation de la température. Cependant, nous observons un décalage de R pρ vers de plus faibles profondeurs (225 nm pour 700 C 175 nm pour 1000 C). 168

169 Fig. III.59- Evolution du diamètre moyen et de la densité moyenne des bulles en fonction de la profondeur après traitement thermique ex-situ des échantillons V-MC. Comme pour le cas du fer, nous avons reporté sur une même figure les données obtenues pour les échantillons polycristallins et monocristallins soumis aux mêmes traitements thermiques. Sur la figure III.60, nous pouvons observer l évolution du diamètre et de la densité moyens pour les recuits à 700 C (2h). La distribution du diamètre moyen est similaire dans les deux microstructures aux erreurs de statistique près (écarts types proches). La distribution de la 169

170 densité est par contre inférieure dans le V-MC, avec une zone de présence de bulles plus profonde (second pic à 380 nm). Après 2 heures de recuit, la densité maximale est de 2,5x10 16 cm -3 dans le V-MC et de 7x10 16 cm -3 dans le V-PC. La position des pics du diamètre et de la densité sont similaires pour les deux microstructures (R pø et R pρ autour de 225 nm). Fig. III.60- Comparaison des profils du diamètre moyen et de la densité moyenne des bulles après traitement thermique ex-situ à 700 C (2h) des échantillons V-MC et V-PC. La figure III.61 montre l évolution des mêmes paramètres pour les recuits à 1000 C. La taille est similaire dans V-MC et V-PC pour les deux temps de recuit. Nous pouvons remarquer que la gamme de profondeurs où nous avons observé des bulles est plus étroite dans l échantillon V-PC R1000 C (1h) que dans l échantillon V-MC R1000 C (1h). 170

171 La densité des échantillons V-MC est similaire à celle des échantillons V-PC après 1 heure de recuit. A partir de 2 heures de recuit, nous observons une diminution de la densité bien plus marquée dans le V-MC que dans le V-PC. Comme pour les échantillons recuits à 700 C, la position des pics du diamètre et de la densité restent identiques quelles que soient les conditions de recuit. Fig. III.61- Comparaison des profils du diamètre moyen et de la densité moyenne des bulles après traitement thermique ex-situ à 1000 C des échantillons V-MC et V-PC. Pour les deux métaux CC, nous avons constaté de manière générale que les bulles sont plus grandes et moins nombreuses dans la microstructure monocristalline pour les mêmes conditions de recuit. Nous pouvons également remarquer quelques différences entre les deux métaux. D une part, la différence entre la taille de MC et PC post-recuits à 700 C et 171

172 1000 C est moins marquée dans le vanadium que dans le fer. D autre part, la densité est similaire entre MC et PC dans le vanadium pour des recuits 1000 C pendant 1 heure, contrairement au fer où la densité est largement inférieure dans le MC que dans le PC. 172

173 III.2.D. Discussion sur le rôle des joints de grains dans le comportement de l hélium dans le fer et le vanadium pur Dans cette partie de l étude, nous nous sommes intéressés au rôle joué par les joints de grains sur le comportement de l hélium dans le fer et le vanadium pur. Un des problèmes majeurs de la présence de l hélium sur les matériaux envisagés pour les futurs réacteurs est la fragilisation induite par l accumulation de bulles d hélium au niveau de joints de grains à haute température. Ce phénomène macroscopique est gouverné par l évolution de bulles intergranulaires à haute température associées aux mécanismes de migration et piégeage des atomes d hélium et défauts ponctuels autour des joints de grain. Afin de mettre en évidence la relation qui existe entre les joints de grains et le comportement de l hélium dans les métaux constitutifs des alliages envisagés pour les futurs recteurs, des échantillons monocristallins ont été étudiés dans les mêmes conditions (d implantation et de recuit) que les échantillons polycristallins analysés précédemment. Les analyses réalisées juste après implantation n ont pas mis en évidence de réelle différence entre les deux microstructures : même profil d He implanté, même taille et même densité de bulles. En revanche, des différences sur les interactions de l hélium avec la matrice métallique monocristalline et polycristalline ont été constatées au cours du traitement thermique, non seulement dans la désorption d hélium via les spectres TDS, mais également dans l évolution du profil de concentration et de la distribution des bulles observées après traitement thermique exsitu des échantillons implantés. Ces différences dans le comportement de l hélium entre les échantillons monocristallins et polycristallins sont vraisemblablement liées à l absence de joints de grain dans les monocristaux. Quatre aspects sont abordés pour mettre en évidence le rôle des joints de grain : L étape de piégeage de l hélium à l état implanté. L étape de dépiégeage et diffusion de l hélium au cours du traitement thermique. L évolution des bulles au cours du traitement thermique. L effet de la recristallisation partielle de monocristaux. Le rôle des joints de grain sur le piégeage de l hélium à l état implanté Les résultats obtenus après implantation suggèrent que la distribution des amas He nv m créés au cours et suite à l implantation d He dans le matériau est similaire dans les grains et les joints de grains à l état implanté. L hypothèse initiale retenue est que les quantités d hélium implantée et de défauts ponctuels créés au cours de l implantation (lacunes, auto-interstitiels) sont les mêmes pour les deux microstructures, puisque les conditions d implantation sont identiques (énergies intermédiaires, dose relativement basse et température ambiante). Les éléments ainsi implantés et créés vont ensuite interagir avec différents types "d objets" au sein de la matrice métallique. Tant dans le MC que dans le PC, les atomes mobiles (He, I) vont diffuser pour s éliminer à la surface, se recombiner avec les lacunes (très peu mobiles), s agglomérer entre eux ou encore diffuser vers des dislocations préexistantes. Dans le PC, une partie de l hélium peut également diffuser vers les joints de grains pour y être piégée (Fig. III.62). 173

174 Fig. III.62- Représentation schématique des phénomènes qui se mettent en place entre l hélium (He), les lacunes (V), les auto-interstitiels (I) et les puits (surface, joints de grains, dislocations) dans des échantillons PC au cours de l implantation. La conséquence immédiate de la présence de joints de grains dans la matrice métallique est une plus faible quantité d hélium piégée par les lacunes situées à l intérieur des grains. Les amas qui en découlent seront dès lors moins nombreux, plus petits ou moins pressurisés que dans le cas où nous n aurions pas de joints de grains dans la matrice. Cette première hypothèse ne correspond pas aux résultats puisque nous n avons pas observé d une part de différences en termes de taille ou densité des bulles entre les monocristaux et les polycristaux et d autre part de germination hétérogène après implantation. Cependant, une deuxième hypothèse pourrait être avancée, reliée au fait qu il existerait une concentration non négligeable d He piégé dans des amas invisibles au MET. En effet, les analyses MET ne permettent pas de voir l ensemble des formes sous lesquelles la rétention d He opère dans le fer et le vanadium et ce quelle que soit la microstructure. Cette technique ne permet d observer que les amas de taille nanométrique, que l on appelle plus généralement les bulles. Pourtant il est certain que des espèces de plus petite taille sont formées au cours de l implantation comme nous avons pu l illustrer dans notre discussion dans la partie 1 (voir Fig. III.31) [Moll, 2013]. Une distribution spatiale de ces petits amas différente selon la microstructure initiale serait alors soutenue par la forte propension des joints de grains à piéger l hélium démontrée par plusieurs études théoriques précédemment publiées [Kurtz, 2004b ; Zhang, 2015]. Kurtz et al. ont démontré que tant les atomes de hélium en position interstitielle que ceux en position substitutionnelle vont être piégés par les joints de grains dans le fer pur avec des énergies de liaison différentes, de l ordre de 0,5 et 2,5 ev pour le He interstitiel et entre 0,2 et 0,8 ev pour l hélium substitutionnel. L énergie de formation dépend linéairement du volume libre des joints de grains [Kurtz, 2004b]. De même, Zhang et al. [Zhang, 2013] ont constaté que les valeurs d énergie de formation de site substitutionnel et interstitiel sont plus petites à proximité des 174

175 joints de grains que dans la matrice du fer, ce qui indiquerait une tendance forte de ségrégation de l hélium au niveau de ces défauts structuraux : la configuration de plus basse énergie dans le joint de grain est la position interstitielle (2,91 ev contre 4,39 ev dans la matrice). La position substitutionnelle dans le joint de grains a une énergie comprise entre 2,83 ev et 3,21 ev (contrairement à 4,22 ev dans la matrice). Ces auteurs suggèrent également que la taille et la pression des amas He nv m sont plus petites au sein des joints de grain que dans le grain du fait d un plus petit ratio n/m. Cette propriété facilite l émission d auto-interstitiels ("loop punching") dans les joints de grains et la formation de lacunes. Au regard de ces éléments, les joints de grains joueront a priori un rôle de puit pour les atomes d hélium au cours de l implantation. Malheureusement, comme nous avons précisé précédemment, les techniques expérimentales employées dans nos études ne peuvent pas caractériser la population des amas "invisibles" dans la matrice métallique et en l absence de traitement thermique il est fort probable que He soit localisé dans des amas de taille sub nanométrique. Il faudrait soit réaliser des mesures d annihilation de positons afin de pouvoir évaluer la différence des amas "invisibles" entre les deux systèmes, soit effectuer des simulations de dynamique des amas sur monocristaux et polycristaux. Une autre possibilité qui pourrait peut-être permettre de visualiser indirectement l effet des joints de grains sur la population des amas après l implantation serait de chercher à observer non plus les bulles ou amas He nv m mais plutôt les boucles de dislocations I p, voire He ni p. Ainsi si les joints de grain influencent autant les deux populations de défauts (V et I) tel que suggéré par Zhang et al. [Zhang, 2013] il sera peut-être possible de mettre en évidence l effet indirect des amas lacunaires via la densité et localisation des boucles. Le rôle des joints de grain sur le piégeage et la diffusion de l hélium au cours du traitement thermique Dans nos études, les mesures réalisées par thermodésorption montrent une augmentation du nombre de domaines de désorption entre 600 et 900 C dans les échantillons polycristallins par rapport aux cas des échantillons monocristallins. Des résultats similaires à nos travaux ont été obtenus par Xu et al. [Xu, 2009] en comparant la thermodésorption de monocristaux et de polycristaux de fer pur implantés à 5 et 10 kev avec une fluence comprise entre 1x10 14 et 1x10 15 He/cm 2 (Fig. III.63). Les échantillons polycristallins présentent trois domaines de désorption : le domaine I entre température ambiante et 300 C, le domaine II entre 300 C et 600 C et le domaine III entre 600 C et 900 C finissant avec un pic étroit lié à la transformation de phase du fer. A l opposé, les monocristaux présentent uniquement deux domaines de désorption : le domaine I entre température ambiante et 300 C et le domaine II entre 600 C et 900 C (jusqu à la transformation de phase α γ). La désorption dans le domaine de températures intermédiaires y est inexistante ce qui rejoint aussi la réduction du nombre de domaines de désorption entre 600 et 900 C observée dans cette étude. 175

176 Fig. III.63- Spectres de thermodésorption (1 C/min) obtenus par Xu et al. pour des monocristaux et polycristaux de fer pur implantés 5 et 10 kev avec une fluence de 1x10 15 He/cm 2 [Xu, 2009]. Bien que des réarrangements locaux aient probablement eu lieu au cours du traitement thermique et aient initié des modifications de l état implanté (dans les amas He nv m et/ou dans le processus de diffusion d He), la multiplicité des pics de désorption dans les échantillons polycristallins confirmera notre hypothèse de départ sur une différence de piégeage de l hélium implanté. Au cours du traitement thermique, la dissociation des amas activée par l augmentation de la température est donc influencée par la présence du réseau de joints de grains. De plus, l existence de plusieurs domaines de désorption dans les polycristaux contrairement aux monocristaux suggèrerait des énergies de dissociation des amas liés aux joints de grains différents, donc dépendant soit de la position de l hélium (hélium interstitiel, hélium substitutionnel), soit du type d amas piégé (He nv m, He n) ou encore du volume libre de joints de grains. Autre question à souligner est la différence possible de stabilité des amas autour de joints de grains, dans les joints de grains et à l intérieur des grains. La stabilité des amas dans les matériaux d étude va dépendre de la dissociation et de la migration des atomes d hélium piégés, en lien direct avec la forme sous laquelle cet élément se trouve et avec le mécanisme de migration prédominant à la température considérée. Prenons tout d abord le cas du fer pur, pour lequel de nombreuses études théoriques ont été menées. Si l on considère la faible énergie de migration de l hélium interstitiel dans la matrice (~0,06 ev), la diffusion devrait toujours être favorisée dans les grains plutôt que dans les joints de grains dans lesquels l énergie de migration est plus grande. Cependant, cette tendance 176

177 n implique pas nécessairement que la diffusion le long des joints de grains est plus lente que dans la matrice. En réalité, la plupart des atomes d He sont en position substitutionnelle dans la matrice [Fu, 2005] ce qui limite fortement leur diffusion (avec une barrière énergétique entre 0,24 et 2,36 ev). A l opposé, dans les joints de grains, la majorité des atomes préfèrent occuper des sites interstitiels avec pour conséquence une diffusion favorisée le long du joint de grain (de l ordre de 0,17 ev et 0,29 ev pour des joints de grains du type Σ5(310) et Σ9(114), respectivement) [Zhang, 2013]. Ce constat a permis à ces auteurs de conclure que dans le cas du fer finalement les joints de grains servent de courts-circuits pour la diffusion de l hélium. Pour le cas du vanadium nous n avons pas connaissance de données aussi précises sur les barrières énergétiques impliquées dans les mécanismes de migration de l hélium au sein des joints de grains. Nous nous limiterons donc à la comparaison avec les études théoriques sur le fer. Ces données théoriques peuvent justifier le décalage des domaines de désorption vers de températures plus faibles des échantillons polycristallins par rapport aux échantillons monocristallins, observée dans nos analyses TDS sur les échantillons monocristallins et polycristallins et dans les expériences TDS réalisés dans la littérature [Xu, 2009 ; Lefaix-Jeuland, 2013a]. Lefaix-Jeuland et al. [Lefaix-Jeuland, 2013a] ont comparé la thermodésorption d échantillons comportant différentes tailles de grain (i.e. 2μm, 40μm et 100μm) et implantés 8 kev avec une fluence de 1x10 16 He/cm 2 (Fig. III.64). Ils ont remarqué que pour un même groupe de pics, la désorption se décalait progressivement vers des températures plus élevées quand la taille des grains augmentait (donc que la densité de joints de grains diminuait). Des simulations par dynamique moléculaire ont confirmé ces mesures expérimentales mettant ainsi en évidence l'effet de la densité des joints de grain sur la répartition d He. Fig. III.64- Spectres de thermodésorption (10 C/min) obtenus par Lefaix-Jeuland et al. pour les trois microstructures de Fe implanté 8 kev à 1x10 16 He/cm 2 : (a) 100 µm, (b) 40 µm, (b) 2 µm [Lefaix-Jeuland, 2013a]. Cependant, la diminution plus accentuée des profils obtenus par SIMS dans les monocristaux par rapport au cas des polycristaux contredit ce point. Il faut noter que les écarts entre la quantité désorbée d hélium dans le cas des MC et PC ne sont pas très différents (~10%) et que la technique SIMS est semi-quantitative par rapport au calcul de la concentration. Afin de vérifier la quantité d hélium désorbée, des études complémentaires d HI-ERDA ont été réalisés. Dans la Fig. 177

178 III.65, nous pouvons observer les isochrones de la désorption d hélium pour le V-PC et V-MC implantés puis recuits obtenus par SIMS et par HI-ERDA. Si nous comparons les données obtenues par HI-ERDA sur les échantillons V-MC et V-PC recuits à 700 C, la désorption est plus importante dans les polycristaux que dans les monocristaux, contrairement à ce que nous avons constaté par SIMS. Ces nouveaux résultats s avèrent en accord avec les données théoriques et les résultats obtenus par TDS. Pour des recuits à 1000 C, le pourcentage d hélium désorbé dans les échantillons polycristallins est proche du pourcentage désorbé dans les échantillons monocristallins. Comme nous avons également observées par MEB après TDS, la recristallisation partielle des monocristaux à haute température favoriserait le relâchement de l hélium vers la surface. Apres traitement thermique ex-situ, nous observons de différences de mesures importantes entre les techniques SIMS et HI-ERDA, qui en revanche n ont été pas observées dans les échantillons implantés. Celles-ci pourraient être expliquées par l influence de l évolution de la morphologie et la taille de bulles contenant du gaz (dans ce cas de l He) qui sous-estiment la mesure de l hélium par SIMS en gênant par exemple l ionisation des atomes d hélium depuis les plus grosses bulles. En effet, d autres études expérimentales ont démontré que les analyses SIMS sous-estiment la teneur en hydrogène total dans le GaAs, dû au fait que l hydrogène qui s échappe des microcavités sous-pressurisés pendant l analyse n est pas complètement détecté [Bailey, 2010]. Fig. III.65- Isochrones de la désorption d hélium obtenus par SIMS et HI-ERDA après traitement thermique ex-situ à 700 C (2h) et 1000 C (2h) des échantillons V-PC et V-MC implantés. 178

179 Par ailleurs, des expériences de µnra montrent une distribution homogène d hélium sur un échantillon d UO 2 implanté avec des ions 3 He (D g~24 µm), alors que ce même type d échantillon, recuit à 1300 C pendant 1h, affiche une distribution hétérogène à proximité des joints de grains tels que révélés par les micrographies optiques (Fig. III.66). Cette déplétion est expliquée par un modèle de migration d hélium qui suppose une diffusion accrue à proximité des joints de grains, du fait que la concentration de défauts est différente à proximité des joints de grains qu au cœur du grain [Martin, 2006, 2010, 2012]. Fig. III.66- Distributions latérales d hélium obtenues par µ-nra dans des grains d UO 2 après implantation (A) et après implantation puis recuit à 1300 C pendant 1h (B) [Martin, 2006, 2010, 2012]. Toutes ces discussions nous confortent à l idée que les petits amas qui doivent être présents au niveau des joints de grains à l état implanté sont moins stables que les amas situés à l intérieur de grains et évoluent donc fortement au cours du traitement thermique. Autrement dit, les joints de grains favorisent la désorption d He, agissant d abord comme puits pour les défauts et l hélium, puis comme courts-circuits de diffusion. Le rôle des joints de grain sur l évolution de la microstructure de bulles après traitement thermique D après nos résultats, nous avons constaté des bulles plus petites et moins nombreuses dans les échantillons polycristallins par rapport aux échantillons monocristallins après traitement thermique ex-situ à 700 C et 1000 C. Parallèlement, nous avons aussi observé la présence de bulles de forme ellipsoïdale dans les joints de grain (voir Fig. III.30). Pour expliquer ces différences, il est nécessaire de revenir là encore sur les mécanismes de croissance de bulles proposé dans la discussion de notre partie 1, particulièrement sur la 179

180 création de lacunes et le rôle de puits que sont les joints de grain pour les atomes d He et les lacunes. Au cours du traitement thermique, notamment aux températures ici considérées (T 700 C), la création de lacunes commence à s activer (proportionnellement à l exponentiel de E V F/kT). Nous pouvons considérer deux mécanismes différents : o Dans le premier cas, les lacunes sont créées dans la matrice ou à la surface. Si nous reprenons l hypothèse qu il existe une quantité non négligeable de petits amas autour des joints de grains, les lacunes crées vont se répartir entre les amas hélium-lacunes à l intérieur des grains et les amas hélium-lacunes proche de joints de grains. En conséquence, il y aurait moins de lacunes qui migrent vers les amas intra-granulaires. La croissance des amas dans la matrice serait dès lors limitée. Ce premier mécanisme expliquerait pourquoi les polycristaux recuits présentent de bulles de taille et densité moins importantes que les monocristaux. o Si nous avions implanté les échantillons à plus haute température, nous aurions vu ces phénomènes plus tôt. Par exemple, El-Atwatni et al. [El-Atwani, 2015] ont étudié la formation de bulles dans des nanocristaux de tungstène implanté 8 kev avec une fluence de 1,5x10 18 He/cm 2 à 25 C et implanté 2 kev avec une fluence de 4x10 16 He/cm 2 à 950 C. Pour la première série des échantillons implantés à température ambiante, ils observent une distribution homogène de bulles le long de la lame implantée. A cette énergie d implantation, des lacunes et des auto-interstitiels sont créés au cours de l implantation, mais les lacunes sont immobiles à température ambiante. Pour la deuxième série des échantillons implantés à haute température, ces auteurs ont observé des bulles allongées distribuées préférentiellement sur joints de grains de nanocristaux. Dans cette gamme de températures contrairement au cas des implantations à température ambiante, les lacunes crées sont mobiles. Ces défauts ponctuels pourraient effectivement migrer vers les joints de grains nanocristallins pour faire croitre les amas proches d eux. Dans le deuxième cas, les lacunes sont créées dans les joints de grains et nourrissent les amas plus proches de joints de grains [Evans, 1996]. Dans le cas du fer et vanadium, les énergies de formation des lacunes sont toutes positives et plus petites dans les joints de grains que dans la matrice [Zhang, 2013, 2015]. Par conséquent, lors du recuit, un gradient de concentration de lacunes apparait entre les joints de grains et le centre de grains entrainant une croissance plus importante des He nv m proches des grains (analogue à l effet de la surface illustré sur la Fig. III.36). Ce deuxième cas est en cohérence avec les images obtenues par MET où nous avons observé une population importante de bulles de forme ellipsoïdale (ø~5 nm) située le long des joints de grains (+5 nm et -5 nm du joint de grains) et une population moins importante de bulles à leur proximité dans la matrice (+20 nm et -20 nm du joint de grains). Des calculs de dynamique moléculaire classique et DFT valident aussi ces résultats en proposant des amas dans les joints de grains allongés dans les directions parallèles à l interface et contractés dans la direction normale au plan de joint de grain [Zhang, 2015]. Au cours du traitement thermique, les lacunes pourraient se créer soit à la surface ou soit dans les joints de grains, les deux mécanismes entraineraient donc la croissance de bulles de petits amas invisibles autour de joints de grain formés à l état implanté. La dominance d un mécanisme sur l autre va dépendre du flux de lacunes entre les grains, les joints de grains et la surface, donc des énergies de migration et de formation de lacunes, du nombre des amas présents dans les 180

181 grains et piégés dans les joints de grains, de la position de puits (surface, joints de grains) par rapport aux amas présents dans la matrice. Des simulations par dynamique d amas pourront fournir de réponses sur ces mécanismes. L effet de la recristallisation partielle des échantillons monocristallins Dans le fer pur, la désorption et la croissance de bulles pour des températures au-delà de 1000 C est largement supérieure dans le Fe-MC que dans le Fe-PC. Pour les deux microstructures, les spectres obtenus par TDS présentent un large pic autour de la température de transformation allotropique, pic qui se répète à chaque cycle, et observable avec une hystérésis lors du refroidissement de l échantillon. Parallèlement, nous avons constaté la présence de porosités à la surface après traitement thermique ex-situ à 1000 C dans les deux types de microstructure. Cependant, après traitement thermique in-situ, des porosités ont été observées seulement dans les échantillons monocristallins. Ces données suggéreraient une instabilité additionnelle au niveau de la surface liée à la recristallisation partielle des échantillons monocristallins. Après traitement thermique au-delà de 1000 C, ce phénomène a été confirmé par la présence de petits grains en surface, avec la disparition du pic du type (200) et l apparition des nouveaux pics correspondant aux autres plans cristallographiques. Cette recristallisation se caractériserait par la germination et la croissance de nouveaux grains de forte désorientation dans la "surface restaurée" dues à la force motrice de l énergie de déformation emmagasinée après implantation. L apparition de petits grains dans les échantillons "monocristallins" entraine la formation de désorientations dans la matrice qui aboutiront à celle de joints de grain. Le mouvement des bulles est plus important quand les joints de grains bougent en parallèle. Certaines vont coalescer pour former des bulles plus grandes et des autres vont disparait par balayage de bulles induit par le mouvement de grains vers la surface [Lefaix-Jeuland, 2013a]. Dans le vanadium pur, nous avons également constaté une recristallisation partielle des monocristaux au-delà de 1000 C. Ce changement de la microstructure n a pas un effet aussi important sur la désorption d hélium ou le mouvement global de bulles, que dans le cas de Fe- MC. Ces différences pourraient être expliquées d une part par des mécanismes dans la désorption de l hélium plus lent dans le vanadium par rapport au fer et que par conséquence il faut atteindre de températures et temps plus longs pour arriver à voir une évolution plus remarquable et d autre part par la différence de ductilité entre les deux métaux CC. Ces explications est en cohérence avec le fait que nous avons observé de porosités dans les échantillons V-MC après recuit in-situ jusqu à 1200 C mais pas après recuit ex-situ jusqu à 1000 C. 181

182 Cette deuxième partie de l étude, nous avons permis de confirmer certains éléments déjà évoqués sur des études expérimentales et théoriques précédentes associés au rôle joué par les joints de grains sur le comportement de l hélium dans les matrices métalliques. Bien nos résultats obtenus juste après implantation n aient pas mis en évidence de réelles différences entre les microstructures PC et MC, nos analyses menées par traitement thermique ont révélé l existence d interactions différentes. Il est certain qu une partie de celles-ci résulte de l existence dès l étape d implantation d amas de nature différente. Cependant leur taille (ou leur nature) ne permet pas de les observer dès l étape d implantation par les techniques ici mises en œuvre. Seul l effet de la température met en évidence l évolution de ces petits amas dont la dissociation apparait aux températures intermédiaires dans le spectre de désorption. Ils seraient moins stables que les amas situés dans la matrice. Ces résultats confirment également que les joints de grains jouent un rôle de courts-circuits de diffusion de l hélium vers la surface. Le mode de diffusion de l He, seul ou sous forme alliée, n est pas clairement établi. Toutefois l existence de porosités à haute température dans le cas des monocristaux laisse à penser que la formation des joints de grain dans le cas de cette microstructure, en parallèle des évolutions microstructurales des amas He nv m, provoque une diffusion d objets de taille assez importante et non le dépiégeage uniquement d He suivi d une diffusion interstitielle. Au cours du traitement thermique, l évolution de bulles dans les échantillons polycristallins est moins marquée que dans les échantillons monocristallins, avec des taille et densités de bulles moins importantes. Parallèlement, la présence d une densité importante de bulles inter-granulaires a été mise en évidence. Ces phénomènes pourraient être expliqués par l approvisionnement de lacunes à partir de la surface et de joints de grains au cours du traitement thermique. L ensemble de résultats apporte de nouvelles informations sur le rôle de joints de grains sur le grossissement de bulles d hélium dans les métaux de base des alliages envisagés pour les futurs recteurs nucléaires. La présence de joints de grains diminuerait a priori le taux de gonflement puisque les bulles restent plus petites (mais aussi plus nombreuses) dans les polycristaux que dans les monocristaux. Ces résultats suggéreront que l insertion des interfaces pourrait être un outil intéressant pour prévenir le gonflement dans les matériaux envisagés dans les réacteurs du futur. Une approche d ingénierie proposé dans la littérature pour maîtriser l hélium à l intérieur des matériaux de cœur est basé sur la compréhension de la transition "bulle-cavité" : d une part il faut maximiser le rayon critique auquel les bulles se transforment en cavités, par exemple en diminuant la concentration de lacunes crées au cours de l irradiation et d autre part il faut augmenter le nombre de bulles stables en maximisant les sites de germination. Pour piéger l hélium dans un réseau de bulles stables, nombreuses solutions pourraient être proposés : des matériaux nanocristallins, des multicouches de différents composants (Cu/Nb, Cu/V et Cu/Fe) ou ainsi des aciers avec de précipités ODS. Toutefois, le contrôle de la composition et la cristallographie des interfaces de ces nouveaux matériaux est absolument nécessaire pour concevoir des interfaces qui piègent l hélium dans des bulles stables mais aussi résistant à la fragilisation induite par l accumulation d hélium à haute température [Demkowicz, 2012 ; Yu, 2012]. 182

183 Comme il a été fait par la passé d autres études expérimentales et théoriques focalisées seulement sur les joints de grains (type, orientation, localisation, densité) sont nécessaires pour bien maitriser les interactions entre l hélium, les défauts ponctuels et les joints de grains impliqués dans les phénomènes macroscopiques d endommagent. L enjeu est de pouvoir par la suite intégrer ces éléments de microstructure aux modèles utilisées pour appréhender le vieillissement des matériaux de structure. Au cours de la première et deuxième partie de ce chapitre, l étude a porté sur le comportement de l hélium implanté à basse fluence dans le fer et le vanadium. Par la suite, nous nous sommes intéressées au comportement de l hélium à haute fluence afin de mettre en évidence l effet de la dose sur les interactions He-Fe et He-V. A hautes fluences d irradiation, des nouveaux défauts étendus se développent au voisinage de la surface bombardée : des cloques apparaissent en dessous d une dose critique d irradiation. La raison pour laquelle ces cloques se forment est un problème d intérêt pour la technologie de futurs réacteurs. 183

184 III.3. PARTIE 3 : ÉTUDE DU COMPORTEMENT DE L HÉLIUM À HAUTE FLUENCE DANS LE VANADIUM ET LE FER POLYCRISTALLINS La troisième partie de ce chapitre s attache à l étude du comportement de l hélium à haute fluence ( 2,5x10 16 He/cm 2 ) dans les matrices de vanadium et de fer polycristallins. Dans cette partie, nous mettrons en évidence l effet de la fluence (ou de la dose) sur les interactions He- Fe et He-V à partir de l analyse des échantillons polycristallins implantés avec des fluences de 2,5x10 16 He/cm 2 et 5x10 16 He/cm 2 et de la comparaison de ces résultats avec l analyse précédemment réalisée sur les échantillons polycristallins implantés à 1x10 16 He/cm 2. Un des paramètres clés influençant le comportement de l hélium dans les structures métalliques est la fluence. Le choix d une gamme de fluences particulière nous aidera à comprendre certains phénomènes associés aux interactions hélium-métaux. Dans le cas de notre étude, l intérêt d étudier le comportement à haute fluence et de le comparer avec celui décrit à basse fluence porte sur la compréhension des processus liés à la saturation des amas hélium-lacune (i.e. surpressurisation des amas hélium-lacune) et à la déformation induite par leur évolution à haute température, tous deux impliqués dans l apparition de cloques. Les précédentes études menées sur l influence de la dose d implantation ont surtout mis en évidence son rôle sur le piégeage et la diffusion de l hélium [Agarwal, 2014a, 2014b ; Behrish, 1975 ; Ehrenberg, 1983 ; Fu, 2004 ; Trocellier, 2015 ; Zelenskij, 1987]. Elle influencerait d une part la nature et le nombre des espèces impliquées dans la désorption [Fu, 2004 ; Zelenskij, 1987] et d autre part l évolution de la taille et de la densité des bulles en fonction de la température et du temps de recuit [Trinkaus, 2003]. Dans cette partie de l étude, des échantillons polycristallins de fer et de vanadium ont été implantés avec des ions hélium 4 He + respectivement à 60 et 45 kev pour des fluences de 2,5x10 16 et 5x10 16 He/cm 2. A ces énergies, la zone implantée est identique à celle obtenue dans les précédents échantillons, seules les concentrations augmentent avec un maximum attendu entre 1,69x10 21 et 3,38x10 21 at./cm 3 pour V-PC et entre 1,59x10 21 et 3,18x10 21 at./cm 3 pour Fe- PC. Ces échantillons appartiennent à la série 3 d implantation que nous avons déjà mentionnée dans le chapitre "Matériaux et Méthodes". Le tableau III.10 regroupe les données relatives aux conditions d implantation des échantillons de cette série. Série 3 V-PC Fe-PC Ion 4 He + 4 He + 4 He + 4 He + Energie (kev) Température ( C) Fluence (ions/cm 2 ) 2,5x x ,5x x10 16 Max. dpa 1,14 2,29 1,30 2,60 R p (nm) C He (appm) 5,7x10 4 1,1x10 5 4,5x10 4 8,9x10 4 C He max. (at./cm 3 ) 1,69x ,38x ,59x ,18x10 21 C He (%at.) 5,74 11,49 4,47 8,95 Tableau III.10- Conditions d implantation des échantillons de la série 3. Après implantation, la même démarche que celle déjà présentée pour les séries 1 et 2 est adoptée, avec la caractérisation des échantillons implantés (étape a) puis l analyse du comportement d He au cours d un traitement in-situ (étape b), et après traitement thermique ex-situ (étape c). 184

185 III.3.A. Caractérisation des polycristaux implantés (étape a) Afin d étudier l effet d implantation de l hélium pour les différentes conditions de fluences sur les échantillons polycristallins, les échantillons Fe-PC et V-PC implantés à 2,5x10 16 et 5x10 16 He/cm 2 sont caractérisés dès l implantation et mis en regard des données précédemment obtenues pour une fluence inférieure (1x10 16 He/cm 2 ). III.3.A.a. Caractérisation microstructurale après implantation Pour des fluences de 2,5x10 16 et 5x10 16 He/cm 2, les résultats obtenus lors de l observation au MEB des échantillons polycristallins n indiquent aucun changement de l état de surface après implantation, ni aucune trace de pollution supplémentaire pour les deux matériaux étudiés (Fig. III.67). Ces observations sont similaires à celles obtenues pour les échantillons polycristallins implantés à 1x10 16 He/cm 2. Fig. III.67- Micrographies MEB des échantillons Fe-PC et V-PC implantés à 2,5x10 16 et 5x10 16 He/cm 2. III.3.A.b. Profils d hélium dans les échantillons implantés Dans la figure III.68, nous pouvons observer les profils de concentration d He obtenus par SIMS et SRIM après implantation à 2,5x10 16 He/cm 2 pour le Fe-PC et le V-PC. 185

186 Fig. III.68- Profils d hélium après implantation à 2,5x10 16 He/cm 2 des échantillons de Fe- PC et de V-PC et comparaison avec les profils théoriques d hélium simulés par SRIM. La dynamique de mesure, la limite de détection et la profondeur analysable sont similaires à celles obtenues sur les échantillons implantés à 1x10 16 He/cm 2. L analyse statistique de la forme du profil d hélium donne une C He max de l ordre de 1,72x10 21 at./cm 3 et 1,82 x10 21 at./cm 3 dans le Fe-PC et le V-PC, respectivement. Les profondeurs d implantation obtenues sont de l ordre de 176 nm pour Fe-PC et 185 nm pour V-PC (Tableau III.11). Fe (SRIM) Fe-PC (SIMS) V (SRIM) V-PC (SIMS) R p (nm) C He max. (at./cm 3 ) 1,59x ,72x ,69x ,82x10 21 Tableau III.11- Paramètres (R p et C He max.) obtenus par SRIM et SIMS pour des échantillons de Fe-PC et de V-PC implantés à 2,5x10 16 He/cm 2. Dans la figure III.69, nous pouvons observer les profils de concentration d He obtenus par SIMS et SRIM après implantation à 5x10 16 He/cm 2 pour le Fe-PC et le V-PC. Fig. III.69- Profils d hélium après implantation à 5x10 16 He/cm 2 des échantillons de Fe-PC et de V-PC et comparaison avec les profiles théoriques d hélium simulés par SRIM. Les paramètres de détection sont proches de ceux déjà obtenus pour les échantillons implantés à 1x10 16 et 2,5x10 16 He/cm 2. L analyse statistique de la forme du profil d hélium donne une C He max de l ordre de 3,49x10 21 at./cm 3 et 3,60x10 21 at./cm 3 dans le Fe-PC et le V-PC, 186

187 respectivement. Les profondeurs d implantation obtenues sont de l ordre de 188 nm pour Fe-PC et 182 nm pour V-PC (Tableau III.12). Fe (SRIM) Fe-PC (SIMS) V (SRIM) V-PC (SIMS) R p (nm) C He max. (at./cm 3 ) 3,18x ,49x ,38x ,60x10 21 Tableau III.12- Paramètres (R p et C He max.) obtenus par SRIM et SIMS pour des échantillons de Fe-PC et de V-PC implantés à 5x10 16 He/cm 2. Dans la figure III.70, nous comparons les profils de concentration d He obtenus par SIMS pour les trois fluences dans le cas des deux métaux purs. L allure du pic d implantation des échantillons Fe-PC et V-PC ne varie pas en fonction de la fluence d implantation, la position du maximum reste également autour des mêmes valeurs aux erreurs expérimentales près. Fig. III.70- Profils SIMS obtenus pour des échantillons de Fe-PC et V-PC implantés à 1x10 16, 2,5x10 16 et 5x10 16 He/cm 2. Comme écrit précédemment, le calcul de concentration atomique d hélium par SIMS et SRIM est réalisé en faisant l hypothèse que toute la dose implantée reste à l intérieur du métal. Cette hypothèse a été vérifiée uniquement pour la fluence la plus élevée, i.e. 5x10 16 He/cm 2, par une mesure complémentaire de la dose par HI-ERDA. La figure III.71 présente ainsi le profil expérimental mesuré par HI-ERDA, le profil expérimental précédemment obtenu par SIMS et le profil théorique SRIM pour un échantillon de V-PC implanté à 5x10 16 He/cm

188 Fig. III.71- Profil HI-ERDA obtenu pour un échantillon de V-PC implanté à 5x10 16 He/cm 2 comparé aux profils expérimental SIMS et théorique (SRIM). Ces résultats montrent un bon accord entre les données expérimentales (SIMS et HI-ERDA) et la simulation (SRIM). Les paramètres obtenus pour les trois profils sont présentés dans le tableau III.13. Nous pouvons observer que la concentration maximale d hélium (C He max. entre 2,82x10 20 et 3,6x10 20 cm- 3 ) est similaire pour les trois profils. Cependant, il existe des différences dans la profondeur d implantation. L écart obtenu par HI-ERDA, et déjà observé dans les échantillons implantés à basse fluence, est difficile à expliquer. La reconstruction mathématique du profil par SIMNRA nécessite l introduction de couches supplémentaires en surface, sans doute liées à la présence de pollution. A partir du signal brut d HI-ERDA (non montré), la dose d hélium mesurée est de l ordre de 5,08x10 16 He/cm 2, en accord avec la dose implantée attendue. Ce résultat montre un taux de rétention de l hélium élevé. Par conséquent, il semblerait que tout l hélium implanté reste piégé dans la matrice métallique, même à ces fortes doses, mettant ainsi en avant la formation d espèces He nv m. V (SRIM) V-PC (SIMS) V-PC (HI-ERDA) R p (nm) C He max. (at./cm 3 ) 3,38x ,60x ,82x10 21 Fluence (ions/cm 2 ) 5x x ,08x10 16 Tableau III.13- Paramètres (R p, C He max. et fluence) obtenus après implantation avec une fluence de 5x10 16 He/cm 2 par SRIM, SIMS et HI-ERDA pour le V-PC. Les fluences pour SRIM et SIMS sont évaluées en considérant que la rétention initiale est de l ordre de la fluence implantée. III.3.A.c. Distribution des bulles d hélium dans les échantillons implantés Dans les échantillons Fe-PC implantés, nous observons une distribution homogène des bulles avec un diamètre estimé à 1,28±0,16 nm pour une fluence de 2,5x10 16 He/cm 2 et à 1,19±0,15 nm pour une fluence de 5x10 16 He/cm 2. Ces diamètres sont similaires et du même ordre de grandeur que ceux obtenus dans le cas d échantillons implantés à 1x10 16 He/cm 2 (1,51±0,19 nm). La densité de bulles, calculée autour du pic d implantation (~200 nm), est de l ordre de 1,22x10 18 cm -3 et 1,15x10 18 cm -3 pour des fluences de 2,5x10 16 et 5x10 16 cm -3, respectivement 188

189 (Fig. III.72). Elles sont proches pour les deux fluences mais cinq fois plus élevées que pour une fluence de 1x10 16 He/cm 2 (~2,6x10 17 cm -3 ). Dans les échantillons de V-PC implantés, les images MET mettent également en évidence une répartition homogène de bulles avec un diamètre estimé à 1,04±0,17 nm pour une fluence de 2,5x10 16 He/cm 2 et à 1,15±0,16 nm pour une fluence de 5x10 16 He/cm 2. Comme dans le cas du fer, ces diamètres sont similaires pour les deux fluences. L écart avec les résultats obtenus pour la plus basse fluence est plus marqué puisqu à une dose de 1x10 16 He/cm 2 le diamètre moyen s élevait à 1,68±0,21 nm. Toutefois à ces tailles, cela reste parfois difficile de bien mesurer les diamètres. La densité de bulles, calculée autour du pic d implantation (~200 nm), est de l ordre de 9,72x10 17 cm -3 et 9,19x10 17 cm -3 pour des fluences de 2,5x10 16 et 5x10 16 cm -3, respectivement (Fig. III.72). Là encore, la quantité de bulles est plus élevée que pour une fluence de 1x10 16 He/cm 2 (~4x10 17 cm -3 ), mais dans une moindre mesure (le double seulement). En comparant les deux métaux CC, nous pouvons remarquer : D une part, que les diamètres des bulles sont peu affectés par la dose implantée ou par le matériau, D autre part, que la densité des bulles augmente avec la fluence de façon plus importante dans le fer que dans le vanadium. Les deux métaux présentent d ailleurs à haute fluence une densité de bulle similaire (~10 18 cm -3 ) ce qui n était pas du tout le cas à basse fluence où pour rappel la densité observable était deux fois plus grande dans le V-PC que dans le Fe-PC. Nous avions alors attribué ces différences à un nombre important d espèces He nv m de taille inférieure à la limite d observation MET dans Fe-PC. Après implantation des échantillons de Fe-PC et de V-PC à 2,5x10 16 et 5x10 16 He/cm 2, les résultats obtenus révèlent un bon accord entre les profils de concentration en profondeur expérimentaux et les profils théoriques SRIM, présentant un pic à 200 nm de profondeur. De plus, toute la dose implantée semble avoir été retenue dans les matrices métalliques. L observation des coupes transverses par MET a mis en évidence une répartition homogène des bulles dans cette zone pour une fluence d implantation de 2,5x10 16 et 5x10 16 He/cm 2. La taille (ø~1-1,3 nm) et la densité de bulles (ρ~1x10 18 cm -3 ) sont similaires entre les deux fluences et entre les deux métaux purs. Cependant, les bulles sont plus nombreuses que pour une fluence d implantation de 1x10 16 He/cm 2. Aucune cloque ou porosité n a été observée par MEB à la surface après implantation. 189

190 Fig. III.72- Distribution des bulles dans les échantillons Fe-PC et V-PC implantés (images MET en champ clair, sous-focalisation : -1 µm). 190

191 III.3.B. Effet de la fluence sur le comportement de l hélium au cours du traitement thermique in-situ (étape b) Comme précédemment, la suite de l étude consiste à caractériser le comportement de l hélium au cours d un traitement thermique in-situ. L objectif de cette nouvelle étape est de mettre en évidence l effet de la fluence d implantation sur la nature et le nombre des espèces qui désorbent par l analyse des spectres de thermodésorption obtenus pour chacune des fluences, couplée aux données théoriques de la littérature. III.3.B.a. Etude de la désorption d hélium au cours du traitement thermique in-situ Nous avons analysé tout d abord, la désorption de l hélium par TDS dans le cas des échantillons Fe-PC et V-PC implantés à 2,5x10 16 He/cm 2, en caractérisant la nature des sites de piégeage ainsi que leurs énergies associées en fonction de la température. La figure III.73 présente le spectre obtenu pour un échantillon de Fe-PC. Pour cet échantillon, deux cycles ont été réalisés entre la température ambiante et 1050 C. Fig. III.73- Spectres TDS obtenus pour un échantillon Fe-PC implanté à 2,5x10 16 He/cm 2. Dans les spectres obtenus, nous pouvons observer la présence de différents pics de désorption. Ces pics ne sont pas fins mais plutôt étalés du fait de la multiplicité des amas He nv m impliqués. Contrairement aux spectres obtenus pour un échantillon Fe-PC implanté à 1x10 16 He/cm 2, la désorption de l hélium tout au long du premier cycle est moins importante que celle au second cycle. Le tableau ci-dessous (Tableau III.14) résume les domaines de désorption observés à partir du premier cycle du spectre avec leur gamme de températures (T min-t max), la température (T D) et l énergie d activation (E D) correspondant à leur pic de désorption d hélium. 191

192 Domaine T min-t max ( C) T D ( C) E D (ev) ❶ ,75 ❷ ,55 ❻ ,82 ❹ ,5 ❺ ,04 Tableau III.14- Domaines de désorption d He à partir du spectre TDS pour Fe-PC implanté à 2,5x10 16 He/cm 2. Si nous appliquons les mêmes interprétations et découpage que pour l implantation à 1x10 16 He/cm 2, des différences sont à noter dans certains domaines de température. Au cours du premier cycle, nous pouvons distinguer cinq domaines de désorption dans le Fe-PC implanté 2,5x10 16 He/cm 2 : Le domaine ❶ (25 à 450 C) présente un pic large à 315 C avec une énergie d activation E D de 1,75 ev. La position du pic est décalée vers des températures inférieures à celles observées dans Fe-PC implanté 1x10 16 He/cm 2 (T D~370 C). L intensité du pic est deux fois plus grande (~12000 CPS) que celle obtenue sur le même domaine dans le Fe-PC implanté à plus basse fluence (~6000 CPS). Le domaine ❷ (450 à 620 C) est constitué d un petit pic de désorption à 576 C avec E D de 2,55 ev. La position du pic est également décalée vers des températures inférieures à celle obtenue pour 1x10 16 He/cm 2 (T D~638 C). L intensité du pic reste similaire pour les deux fluences (entre 4000 et 6000 CPS). Le domaine ❻ (620 à 740 C) présente un pic large à 633 C avec E D de 2,82 ev. Ce domaine n a pas été observé dans Fe-PC implanté 1x10 16 He/cm 2. Il pourrait donc s agir d un nouveau type d amas He nv m. Le domaine ❹ (740 à 940 C) présente un pic étalé autour de 882 C avec E D de 3,5 ev. La position du pic est similaire à celle observée dans l échantillon Fe-PC implanté 1x10 16 He/cm 2 (T D~874 C). L intensité augmente de CPS à CPS avec l augmentation de la fluence. Le domaine ❺ (940 à 1050 C) est caractérisé par un pic intense à 1035 C avec E D de 4,04 ev. La position du pic est proche de celle observée dans Fe-PC implanté 1x10 16 He/cm 2 (T D~1040 C). L intensité du pic est par contre plus grande (~4,6x10 6 CPS) que celle obtenue sur le même domaine dans le Fe-PC implanté à plus basse fluence (~1,9x10 5 CPS). Nous observons également un pic supplémentaire autour de 952 C dans le spectre. En comparant ces domaines avec ceux obtenus sur les échantillons implantés à basse fluence, nous pouvons constater la disparition du domaine ❸ (T D~739 C) et l apparition du domaine ❻ (T D~633 C) dans les échantillons implantés à 2,5x10 16 He/cm 2. Ce nouveau type d amas associé au domaine ❻ de désorption sera probablement moins stable que les amas He nv m (avec m>1) attribués au domaine au domaine ❸ dans les échantillons implantés à 1x10 16 He/cm

193 Le deuxième cycle de désorption présente seulement trois pics à haute température : le premier à 740 C, le deuxième à 850 C et le troisième à 940 C. Comme nous l avons également observé dans le Fe-PC implanté à 1x10 16 He/cm 2, il reste une fraction importante d hélium fortement piégé dans la matrice métallique, même après 2 cycles de désorption. L interprétation de ces pics reste toutefois très délicate puisque le système a pu se réorganiser au cours du cycle précédent et la nature des pièges impliqués change continument. La même démarche est adoptée pour le vanadium comme le montrent la figure III.74 et le Tableau III.15. Pour cet échantillon, deux cycles ont été réalisés entre la température ambiante et 1200 C. Domaine T min-t max ( C) T D ( C) E D (ev) ❶ ,88 ❷ ,77 ❻ ,00 ❸ ,22 ❼ ,40 ❹ ,53 ❺ >920 >3,75 Fig. III.74- Spectres de désorption d He obtenus pour un échantillon de V-PC implanté à 2,5x10 16 He/cm 2. Tableau III.15- Domaines de désorption d He correspondant. Dans le spectre obtenu, nous pouvons remarquer différentes espèces qui désorbent au cours du recuit in-situ. Nous pouvons également observer, une forte désorption de l hélium au cours du premier cycle et une désorption moindre au cours du deuxième cycle, uniquement présente à haute température. Ce premier constat est donc très différent de ce qui a été observé pour le cas du fer. En appliquant le même découpage que pour l échantillon V-PC implanté à 1x10 16 He/cm 2, les domaines de désorption s avèrent assez similaires dans les deux cas, sauf les domaines 6 et 7 non présents à basse fluence. Dans le premier cycle, nous pouvons distinguer sept domaines de désorption dans le V-PC implanté à 2,5x10 16 He/cm 2 : Le domaine ❶ (25 à 490 C) présente un petit pic à 357 C avec une énergie d activation E D de 1,88 ev. La position du pic est décalée vers de températures inférieures, avec de ce fait une valeur d énergie d activation plus petite que dans le V-PC implanté à 1x10 16 He/cm 2 (T D de 364 C et E D de 1,90 ev). L intensité du pic est similaire à celle obtenue sur le même domaine dans le V-PC implanté à plus basse fluence (~2500 CPS). Nous avons observé également dans le spectre une légère augmentation du signal de l hélium à des températures plus basses (~150 C). 193

194 Le domaine ❷ (490 à 700 C) est constitué d un pic large de désorption à 644 C avec E D de 2,77 ev. La position du pic se décale aussi vers des températures plus basses (V-PC implanté 1x10 16 He/cm 2 : T D de 600 C et E D de 2,63 ev). L intensité du pic est légèrement plus petite (~11000 CPS) à celle obtenue sur le même domaine dans le V-PC implanté à plus basse fluence (~13500 CPS). Le domaine ❻ (700 à 750 C) montre un pic petit à 721 C avec E D de 3 ev et le domaine ❼ (825 à 860 C) est constitué par un pic petit à 848 C avec E D de 3,40 ev. Ces deux domaines n ont été pas observés dans le V-PC implanté 1x10 16 He/cm 2. Le domaine ❸ (750 à 825 C) présente un pic étroit à 790 C avec E D de 3,22 ev et le domaine ❹ (860 à 920 C) montre un petit pic à 889 C avec E D de 3,53 ev. Leur position du pic est similaire que dans le V-PC implanté 1x10 16 He/cm 2 (domaines 3 et 4 de la Fig. III.14), mais leur intensité est plus élevée. Le domaine ❺ (920 à 1200 C) est caractérisé par le début d un pic intense à 920 C avec E D supérieures à 3,75 ev. Le début du pic est similaire à celui observé à plus basse fluence, mais son intensité est plus élevée. Le deuxième cycle de désorption présente seulement le début d un pic à partir de 920 C. Il est à noter que même après 2 cycles à 1200 C, il reste une quantité d hélium sans doute non négligeable piégé dans la matrice métallique. La même démarche et les mêmes analyses ont été réalisées pour les deux métaux dans le cas de la fluence plus élevée, i.e. 5x10 16 He/cm 2. Ainsi la figure III.75 et le tableau III.16 présentent les spectres de désorption et les cinq domaines de désorption qu il est alors possible de définir pour le fer. Fig. III.75- Spectres TDS obtenus pour un échantillon de Fe-PC implanté à 5x10 16 He/cm

195 Domaine T min-t max ( C) T D ( C) E D (ev) ❶ ,72 ❷ ,41 ❻ ,79 ❹ ,46-3,52 ❺ ,89 Tableau III.16- Domaines de désorption d He du spectre TDS obtenu pour un échantillon de Fe-PC implanté à 5x10 16 He/cm 2. Comme pour le cas précédent, les différents pics de désorption obtenus sont toujours étalés du fait de la multiplicité des amas He nv m impliquées. Cependant, contrairement au cas de la fluence intermédiaire 2,5x10 16 He/cm 2, la désorption au cours du second cycle, pour les températures inférieures à la transformation allotropique (T<912 C), diminue du deuxième cycle. Sans revenir sur l ensemble des détails de chacun des domaines, éléments donnés dans le précédent tableau (Tableau III.16) il est possible de noter les grands points suivants : Le pic pour les domaines présents à toutes les fluences (domaines ❶, ❷ et ❺) se décale progressivement vers des valeurs de températures plus faibles quand la fluence augmente. La position du pic pour le domaine ❻ (absent à basse fluence) reste identique pour 2,5x10 16 et 5x10 16 He/cm 2. Le domaine ❹ présente deux pics dans les échantillons implantés à 5x10 16 He/cm 2, contrairement aux échantillons implantés à plus basse fluence où nous n avons observé qu un seul pic. Pour l ensemble des domaines, sauf le domaine ❷, l intensité augmente avec l évolution de la fluence, pouvant parfois être multipliée par 10 (domaine ❹). Le domaine ❸ (présent à basse fluence) est toujours absent pour 2,5x10 16 et 5x10 16 He/cm 2. De même, la figure III.76 et le tableau III.17 résument les éléments d analyse pour le cas du vanadium implanté à 5x10 16 He/cm

196 Domaine T min-t max ( C) T D ( C) E D (ev) ❶ ,86 ❷ ,75 ❻ ,94 ❸ ,14 Fig. III.76- Spectres de désorption d He obtenus pour V-PC implanté à 5x10 16 He/cm 2. ❼ ,35 ❹ ,51 ❺ >900 >3,56 Tableau III.17- Domaines de désorption correspondant. L augmentation de la fluence entre 2,5x10 16 et 5x10 16 He/cm 2 ne modifie pas le nombre de domaines de désorption observés au cours du premier cycle, ni même l allure du second. Il est principalement à noter que : Pour quatre domaines de désorption sur sept (domaines ❶, ❺, ❻ et ❼), les pics se décalent vers des températures plus basses avec l augmentation de la fluence. Pour les autres (domaines ❷, ❸ et ❹) la position reste identique. Pour tous les pics de désorption au-dessus de 700 C, l intensité augmente avec la fluence, cette augmentation étant d autant plus marquée que la température augmente. Une légère augmentation du signal pour des températures inférieures à 150 C est également remarquée comme dans le cas de la fluence intermédiaire. Une quantité importante d He est encore présente dans le matériau au second cycle, mais la désorption se limite comme pour les autres fluences à des mécanismes activés à haute température. Afin de comparer l ensemble des spectres pour les deux métaux et les trois fluences, la figure III.77 regroupe l intégrale cumulée de chaque domaine du spectre de désorption en fonction de la température. 196

197 Fig. III.77- Intégrales cumulées pour chaque domaine de désorption calculées à partir des spectres TDS de Fe-PC et V-PC pour les trois conditions d implantation. 197

198 Ces graphiques nous renseignent sur plusieurs tendances liées à l augmentation de la dose d implantation : Pour le fer, si la désorption était régulière tout le long du recuit à basse fluence, pour les fluences plus élevées elle se déroule majoritairement au-delà de la transformation allotropique (T>912 C) avec une augmentation abrupte de la pente ; Pour le vanadium, la tendance précédemment mentionnée est moins marquée : la désorption se déroule toujours de façon régulière quelle que soit la fluence. Elle débute simplement un peu plus tôt (dès ~200 C pour la haute fluence) ; La comparaison entre les deux métaux purs, Fe et V, met ainsi en évidence une désorption proportionnellement plus importante dans le vanadium à basse température que dans le fer. Seul le cas de la fluence la plus basse (1x10 16 He/cm 2 ) diffère pour les températures inférieures à 500 C (domaine ❶ pour le Fe-PC et domaine ❷ pour le V- PC) ; Le nombre de domaines de désorption qu il est possible de distinguer semble supérieur dans le cas du vanadium que dans le cas du fer quand la fluence augmente, ce qui traduirait une plus grande richesse d espèces He nv m dans le vanadium. Ces observations in-situ seront mis en regard des analyses microstructurales post TDS et des données obtenues après traitement thermique ex-situ et discutées à la fin de cette partie 3 afin d émettre des hypothèses sur le rôle de la fluence dans le dépiégeage des amas hélium-lacunes en fonction de la température. III.3.B.b. Caractérisation microstructurale post-tds Afin de décrire l évolution de la microstructure et l état de surface après désorption thermique, les échantillons Fe-PC et V-PC précédemment analysés par TDS, ont été observés par MEB. Après TDS, la microstructure des échantillons a évolué tout comme leur état de surface. Dans le Fe-PC, nous observons des porosités en surface de l ordre de 0,08±0,02 µm pour les deux doses. De plus, la surface des échantillons implantés à plus haute fluence révèle après désorption, la présence de cloques dont le diamètre varie de 1 à 1,5 µm (Fig. III.78). Quelques-unes ont apparemment éclatées. Ce phénomène n a pas été observé dans les échantillons de fer implantés à basse fluence (1x10 16 He/cm 2 ). Fig. III.78- Micrographies MEB de Fe-PC après désorption par TDS (2 cycles à 10 C/min). Dans le V-PC, nous n observons pas de porosités pour une fluence de 2,5x10 16 He/cm 2. En revanche, les joints de grains commencent à se distinguer de la matrice métallique. Pour une 198

199 fluence de 5x10 16 He/cm 2, nous commençons à observer de porosités autour de 0,49±0,26 dans des zones intra-granulaires et de l ordre de 1,17±0,21 dans des zones inter-granulaires (Fig. III.79). Ce phénomène n avait pas été observé dans les échantillons implantés à basse fluence (1x10 16 He/cm 2 ). Fig. III.79- Micrographies de V-PC après désorption par TDS (2 cycles à 10 C/min). Les mesures de désorption de l hélium montrent que la fluence joue un rôle non négligeable sur la dissociation des amas hélium-lacune en fonction de la température. Nous avons constaté que l augmentation de la fluence induit d un part une augmentation de l intensité des pics avec un décalage vers des températures inférieures et d autre part l apparition de nouvelles espèces aux températures intermédiaires. Parallèlement, les observations MEB ont mis en évidence la présence de porosités dans les échantillons implantés à très haute fluence. Ceux-ci sont en accord avec la désorption de l hélium plus importante à haute température quand la fluence augmente. Pour mieux comprendre l effet de la fluence sur le comportement de l hélium in-situ, les résultats précédemment obtenus vont être complétés par une description de processus accompagnant le dépiégeage des amas lors du recuit, notamment les processus associés à la diffusion de l hélium dans la matrice et à la croissance de bulles. 199

200 III.3.C. Effet de la fluence sur le comportement de l hélium après traitement thermique ex-situ (étape c) Au cours des traitements thermiques in-situ réalisés précédemment par TDS, nous avons mis en évidence un effet de la fluence sur le processus de désorption de l hélium ainsi que sur l intégrité des matériaux avec l observation d une multiplication des pics de désorption, de leur intensification et de la présence de porosités en surface. Cette dernière étape a pour objectif de relier le comportement en désorption d hélium à des phénomènes observés à l échelle microscopique par le biais d un couplage entre le SIMS et le MET. Afin de mettre en évidence de différences dans les interactions He et les défauts dans les matériaux entre les trois fluences d implantation et entre le fer et le vanadium purs, un traitement thermique est réalisé sur les échantillons uniquement à 700 C (Fig. III.80). Ce choix émane des conclusions obtenues suite aux traitements thermiques in-situ et ex-situ réalisés sur les échantillons Fe-PC et V-PC implantés à 1x10 16 He/cm 2 : - Des températures inférieures à 700 C (400 C) n induisent pas d évolution appréciable de la quantité d hélium desorbée, du profil d hélium en profondeur ou encore de la distribution de bulles dans la matrice des deux métaux CC. - Des températures supérieures à 700 C, conduisent par contre à une évolution notable dans le comportement de l hélium des deux métaux CC, mais la présence d un changement de phase α γ dans le cas du fer pur ajoute un effet dif icile à interpréter aux autres évolutions structurales. La durée a été arbitrairement fixée, comme dans le cas des échantillons implantés à 1x10 16, à 1 et 2 heures. Pour des raisons de temps, seul le temps court (1h) a été appliqué à la plus haute fluence (5x10 16 He/cm 2.). Fig. III.80- Conditions de traitement thermique ex-situ de Fe-PC et V-PC à haute fluence. 200

201 Comme précédemment trois aspects seront principalement analysés : la diffusion de l hélium dans la matrice (SIMS), l évolution de la distribution, de la taille et de la densité des bulles d hélium (MET) et l évolution de la microstructure et de l état de surface (MEB). III.3.C.a. Caractérisation microstructurale après traitement thermique ex-situ Afin de décrire l évolution de la microstructure et de l état de surface après traitement thermique ex-situ, les échantillons Fe-PC et V-PC précédemment analysés, ont été observés par MEB. Dans les échantillons Fe-PC et le V-PC recuit 700 C (1h) (implantés 5x10 16 ) et recuit 700 C 2h (implantés 2,5x10 16 et 5x10 16 He/cm 2 ), les images obtenues ne montrent aucun changement de l état de surface après implantation, ni aucune trace de pollution supplémentaire (Fig. III.81), à la différence des observations réalisées après recuit in-situ (voir Fig. III.78 et Fig. III.79). Ces résultats sont similaires aux ceux obtenus sur des échantillons de Fe-PC et V-PC implantés 1x10 16 He/cm 2 et recuit à 700 C (1 et 2 h). Fig. III.81- Micrographies MEB après traitement thermique ex-situ à 700 C pendant 1 ou 2 h des échantillons Fe-PC et V-PC implantés 2,5x10 16 et 5x10 16 He/cm 2. III.3.C.b. Diffusion de l hélium dans la matrice métallique La figure III.82 présente l évolution du profil d hélium après traitement thermique ex-situ à 700 C pendant 1 et 2 heures des échantillons de Fe-PC et V-PC implantés à 1x10 16, 2,5x10 16 et 5x10 16 He/cm

202 Fig. III.82- Evolution du profil d hélium obtenu par SIMS après traitement thermique ex-situ à 700 C pendant 1 ou 2 h de Fe-PC et V-PC implantés à 1x10 16, 2,5x10 16 et 5x10 16 He/cm

203 Pour la durée de traitement thermique la plus courte, i.e. 1h (vert clair sur la Fig. III.82), des différences apparaissent dans les profils d He mesurés par SIMS : Dans le Fe-PC R700 (1h), l analyse montre une diminution de la concentration après recuit dans les échantillons implantés 1x10 16 et 5x10 16 He/cm 2. Le profil se décale très légèrement en profondeur, de 30 à 50 nm pour les deux fluences et s élargit vers la surface surtout dans le cas de la dose la plus faible. Dans le V-PC R700 (1h), seul l échantillon initialement implanté avec la plus forte dose voit la concentration d He diminuer après recuit. Le pic reste toujours centré autour du pic d implantation pour les deux fluences. Pour la durée de recuit la plus longue, i.e. 2h (vert foncé sur la Fig. III.82), et pour laquelle nous avons des données pour les 3 fluences, les différences sont encore plus marquées, et ce surtout entre les deux matériaux : Dans le Fe-PC R700 (2h), la concentration d He atteint la limite de détection de la technique SIMS, sauf dans le cas de la dose maximale où une quantité d He est encore détecté au niveau du pic d implantation. La désorption a donc été importante avec ce traitement thermique. Les profils se sont tous élargis vers la surface, voire également en profondeur. Dans le V-PC R700 (2h), et contrairement au fer, la quantité d He même après traitement thermique reste non négligeable. La concentration d hélium a tout de même diminué pour les trois fluences d implantation, le profil restant centré autour du pic d implantation L évolution du profil dans le cas du vanadium (position, concentration) est toujours moins importante que dans le cas du fer et cela quelle que soit la fluence. Comme ces profils n ont pas une forme symétrique caractéristique d une distribution gaussienne, il n est pas possible d utiliser la loi de diffusion de Fick pour accéder au coefficient de diffusion apparent de l He. Nous limiterons donc cette analyse à l évolution des intégrales de chaque profil, calculées entre 10 et 1000 nm de profondeur (Fig. III.83). 203

204 Fig. III.83- Isothermes après traitement thermique ex-situ à 700 C des échantillons de Fe- PC et V-PC implantés à 1x10 16, 2,5x10 16 et 5x10 16 He/cm 2. Ces graphiques nous confirment que : Pour le fer, quelle que soit la fluence, la désorption se fait progressivement avec la durée de recuit, la fluence ne semblant jouer un rôle que sur la "cinétique" de désorption. Autrement dit, plus la concentration d He est importante au départ, plus la quantité (en proportion) qui désorbe au bout d une heure sera importante. Il est à noter que la limite de cette analyse (100% désorbé) est arbitrairement fixée par la limite de détection du SIMS. Pour le vanadium, si l on a déjà noté plusieurs fois que l He était plus fortement piégé dans ce matériau, ces courbes isochrones mettent en avant le fait que la rétention semble plus importante à 1 heure quand la fluence augmente, ce qui est à l opposé du cas du fer. Ainsi plus la fluence augmente, dans la gamme considérée, plus la quantité d He qui désorbe au cours du recuit est faible au départ. Après traitement thermique ex-situ, l évolution du profil d hélium obtenue par SIMS montre que la fluence a un effet sur la diffusion d hélium. Dans les premiers stades du recuit, nous avons constaté une accélération de la diminution de la concentration avec l augmentation de la fluence quel que soit le métal CC d étude. Lors d un recuit de plus longue durée, le profil semblerait être moins stable à basse fluence qu à haute fluence dans le vanadium pur. En revanche, l analyse des profils dans le fer pur reste limitée par la détection de la technique expérimentale. Pour comprendre le rôle de la fluence sur la migration de l hélium, une comparaison de l évolution des amas aux différents stades du recuit pour les différentes fluences étudiées serait nécessaire, notamment de l évolution des bulles. 204

205 III.3.C.c. Evolution des bulles d hélium dans les échantillons postrecuits La fluence semble jouer un rôle non négligeable sur l évolution du profil d hélium après traitement thermique ex-situ. Pour compléter ces résultats, nous avons analysé l évolution des bulles des mêmes échantillons afin de mettre en évidence l origine des différences précédemment observées entre les deux métaux purs. La figure suivante (Fig. III.84) présente les observations MET réalisées dans le cas d un traitement thermique d une heure pour les échantillons implantés avec la dose minimale (1x10 16 He/cm 2 ) et maximale (5x10 16 He/cm 2 ). Fig. III.84- Evolution de la distribution des bulles après traitement thermique ex-situ à 700 C (1h) des échantillons Fe-PC et V-PC implantés 1x10 16 et 5x10 16 He/cm 2 (images MET en champ clair, sous-focalisation : -1 µm). Dans le Fe-PC, pour les deux fluences, la taille des bulles augmente et leur densité diminue après 1h à 700 C. De plus, les bulles présentent des facettes bien marquées. 205

206 Dans le V-PC, il n y a pas de différences notables entre l état implanté et les échantillons recuits à 700 C (1h) pour les deux fluences, contrairement au cas de Fe-PC. Les images mettent en évidence une répartition homogène de bulles sphériques dans la zone implantée. Ces modifications microstructurales sont donc en accord avec les précédents résultats SIMS : l évolution est beaucoup plus marquée dans le cas du fer pour lequel il avait été noté une forte désorption d He. La figure III.85 résume les résultats obtenus pour les trois fluences après un recuit de 2h à 700 C et mettent en avant l accentuation des phénomènes déjà visibles pour le temps de recuit court : Pour le fer, pour les fluences 1x10 16 et 2,5x10 16 He/cm 2, la taille des bulles continue à augmenter avec le temps de recuit, diminuant d autant plus leur densité. Les facettes sont désormais bien visibles. Pour la fluence la plus élevée, i.e. 5x10 16 He/cm 2, la présence de "cavités" de forme tubulaire le long de la surface est à noter en parallèle de petites bulles en profondeur. Pour le vanadium, l évolution microstructurale est surtout visible pour la plus petite fluence avec comme pour le fer une augmentation de la taille des bulles parallèle à la diminution de leur densité. A plus haute fluence, peu d évolution sont à noter. Toutes ces observations sont là encore en accord avec les évolutions de profil SIMS des deux matériaux. Le traitement thermique induit une augmentation de la taille des bulles et une diminution de leur densité plus marquées dans le fer pur que dans le vanadium pour les trois fluences, ce qui suit les tendances de désorption observées par SIMS, ou encore par TDS. Afin d approfondir le lien entre ces évolutions microstructurales et les profils SIMS, la distribution en taille et densité de chaque population des bulles en fonction de la profondeur ainsi que les modifications de leur géométrie, ont été étudiés selon la même méthodologie que pour les échantillons polycristallins implantés à 1x10 16 He/cm

207 Fig. III.85- Evolution de la distribution des bulles après traitement thermique ex-situ à 700 C (2h) des échantillons Fe-PC et V-PC implantés 1x10 16, 2,5x10 16 et 5x10 16 He/cm 2 (images MET en champ clair, sous-focalisation : -1 µm). 207

208 Distribution de la taille et la densité de bulles après traitement thermique ex-situ La même procédure d analyse que celle déjà appliquée à basses fluence pour la taille et densité des bulles a été reprise pour les deux nouvelles fluences. Toutefois il est à noter que l étude de ces paramètres avec la fluence n a réellement été possible que dans le cas du fer pur, puisque comme mentionné dans le paragraphe précédent, l évolution dans le cas du vanadium est limitée. Les bulles restent petites à haute fluence, même après traitement thermique, avec un diamètre moyen autour de 1-2 nm. La figure III.86 présente l effet de la fluence sur le diamètre moyen et la densité moyenne de bulles en fonction de la profondeur après 1 heure de recuit à 700 C dans le cas de Fe-PC implantés à 1x10 16 et 5x10 16 He/cm 2. Compte tenu des écarts-types, les échantillons recuits présentent une augmentation du diamètre des bulles similaire pour les deux fluences considérées, avec des valeurs assez constantes sur toute la zone implantée entre 3 et 5 nm. A haute fluence, la distribution semble même plus homogène qu à basse fluence où un petit maximum semble se détacher, correspondant au pic d implantation (~220 nm). Si la taille des bulles augmente, leur densité diminue fortement, entre 4 et 10 fois moins. De plus, la distribution de la densité des bulles entre les deux fluences est très différente. D une part, les échantillons implantés à 5x10 16 He/cm 2 présentent des valeurs de densités très supérieures aux échantillons implantés à 1x10 16 He/cm 2, comme c était déjà le cas initialement. D autre part, pour la fluence maximale, un pic est clairement visible autour de 275 nm de profondeur, correspondant au pic de profil mesuré par SIMS. 208

209 Fig. III.86- Evolution du diamètre moyen et de la densité moyenne des bulles en fonction de la profondeur après traitement thermique ex-situ à 700 C (1h) pour Fe-PC implantés à 1x10 16 et 5x10 16 He/cm 2. La figure III.87 montre l effet de la fluence sur le diamètre moyen et la densité moyenne des bulles en fonction de la profondeur après 2 heures de recuit à 700 C dans Fe-PC implantés 1x10 16 et 2,5x10 16 He/cm 2. Dans cette figure, nous n avons pas décrit la distribution dans le cas de la plus forte fluence (5x10 16 He/cm 2 ) car comme observé précédemment, les objets visibles sont essentiellement des "cavités" et des bulles nanométriques qu il est difficile de comparer avec les autres microstructures d intérêt. Ces résultats mettent en évidence une évolution très marquée du diamètre moyen pour les deux fluences considérées, d autant plus importante que la fluence augmente. Ainsi le diamètre est 209

210 jusqu à 12 fois plus élevé par rapport à l état implanté dans les échantillons implantés à 2,5x10 16 He/cm 2 et 5 fois plus pour la plus faible fluence. Un pic du profil de diamètre est cette fois bien marqué autour de 225 nm, position qui reste constante avec l augmentation de la fluence. Contrairement au cas précédent du recuit d une heure, la densité des bulles est plus faible dans le cas de la fluence élevée, ici 2,5x10 16 He/cm 2 et un pic unique est visible vers 275 nm. Fig. III.87- Evolution du diamètre moyen et de la densité moyenne des bulles en fonction de la profondeur après traitement thermique ex-situ à 700 C (2h) de Fe-PC implantés à 1x10 16 et 2,5x10 16 He/cm 2. Ces analyses plus détaillées de la taille et de la densité des bulles d He dans le fer corroborent les conclusions données initialement à partir des micrographies MET. La durée du recuit accentue la croissance de bulles tant dans les échantillons implantés à 1x10 16 He/cm 2 (bulles de ø~5 nm à 210

211 des bulles de ø~8 nm) que pour les échantillons implantés à 5x10 16 He/cm 2 (bulles de ø~5 nm à de cavités tubulaires). Ceux-ci se corrèlent avec une diminution de la concentration plus importante. Pour un recuit de plus courte durée, la vitesse avec laquelle les bulles vont croitre serait similaire à basse et haute fluence. Cependant, le grossissement de bulles pour de plus longues durées devient plus rapide avec l augmentation de la fluence, pouvant parfois entrainer la formation d un réseau de "cavités" proche de la surface. Microstructure des bulles après traitement thermique ex-situ Une fois décrite l évolution de la taille et la densité de bulles pour les différentes fluences d implantation, nous nous sommes intéressés à la morphologie des bulles dans les échantillons Fe-PC et V-PC implantés 2,5x10 16 He/cm 2 et 5x10 16 He/cm 2. Dans le cas de Fe-PC, les bulles présentent une morphologie cubique avec des facettes du type {100} dans l échantillon implanté 2,5x10 16 He/cm 2 et recuit 700 C (2h) et dans l échantillon implanté 5x10 16 He/cm 2 et recuit 700 C (1h). Par exemple, nous pouvons observer dans la figure III.88, la morphologie de bulles obtenue pour le Fe-PC implanté 2,5x10 16 He/cm 2 et recuit 700 C (2h). Pour l axe de zone (001), les bulles sont des rectangles avec des facettes parallèles aux directions [010] et [100]. Pour l axe de zone (111), les bulles sont hexagonales, avec des facettes parallèles aux directions [100], [010] et [001]. Dans l échantillon de Fe-PC implanté 5x10 16 He/cm 2 et recuit 700 C (2h), nous avons observé des petites bulles sphériques et des cavités tubulaires le long de la surface sans morphologie particulière. Fig. III.88- Bulles facettées observées dans Fe-PC implanté 2,5x10 16 He/cm 2 et recuit à 700 C pendant 2 heures (images MET en champ clair, axe de zone (001) et (111), sousfocalisation : -1 µm). Dans le cas de V-PC, les bulles restent toujours sphériques quelles que soient la fluence ou la durée de traitement thermique appliquée. L évolution de la distribution spatiale des bulles (le long des dislocations ou des joints de grains) n a pas été approfondie. Il semblerait pourtant qu il existe une croissance préférentielle des bulles sur les dislocations (voir Fig. III.85) comme déjà constaté après traitement thermique ex- 211

212 situ dans les échantillons de Fe-PC implanté à 1x10 16 He/cm 2 (voir Fig. III.29). Des observations supplémentaires sont nécessaires pour bien mettre en évidence les dislocations et les bulles et spécifier leurs conditions d imagerie (l axe de zone et la valeur de ). De même, la distribution des bulles sur les joints de grains après traitement thermique ex-situ serait également à considérer pour avoir une description complète de la microstructure de bulles après traitement thermique et ce à différentes fluences. 212

213 III.3.D. Discussion sur l effet de la fluence dans le comportement de l hélium dans le fer et le vanadium polycristallins Le but de cette partie de l étude est d analyser l effet de la fluence d implantation sur l évolution du comportement de l hélium dans les matrices de fer et vanadium purs. Pour cela, nous avons mis en place des expériences d implantations à haute fluence supplémentaires aux expériences effectuées précédemment à basse fluence, couplées à des caractérisations des états implantés ainsi obtenus et des microstructures obtenues après traitement thermique in-situ et ex-situ. L étude du comportement de l hélium implanté à très haute fluence est de grande importance pour comprendre les phénomènes d endommagement de matériaux de cœur dans les futurs réacteurs, plus particulièrement dans l érosion de parois et dans la contamination du plasma des réacteurs à fusion liés à la formation de cloques et leur éclatement sous irradiation continue [Kalleta, 1976 ; Lucas, 1984]. Même si ces conditions d étude sont éloignées des conditions réelles dans les réacteurs nucléaires (où le taux de génération d hélium varie entre 1 et 10 appm He/dpa), l utilisation de fluences plus élevées permet d augmenter la cinétique de phénomènes pour mettre en évidence les mécanismes impliqués à l échelle microscopique. En fait, l augmentation de la quantité des atomes d He implantés et du dommage balistique associés (paires de Frenkel) à l augmentation de la fluence jouent un rôle non négligeable sur les déformations induites par l évolution de bulles proche de la surface, donc dans la formation de cloques. Cette étude nous apporte des données expérimentales qui couplées à d autres résultats expérimentaux issus de la littérature nous permettront de discuter l effet de la fluence sur les interactions de He-Fe et He-V et de mettre en avant des différences entre ces deux métaux. Pour cela, nous essaierons de répondre aux différentes questions émergeant des données expérimentales obtenus, discussions qui nous aideront à comprendre le piégeage à l état implanté, la migration/désorption de l hélium ou encore l évolution de la distribution des bulles et à déterminer les frontières en termes de température et de fluence d implantation auxquelles les différents phénomènes apparaissent. Effet de la fluence sur le piégeage de l hélium à l état implanté La fluence d implantation influence très fortement les interactions He/matériau et donc la capacité de l He à migrer à longue distance. C est donc l effet de la fluence sur l état initial du matériau après implantation et avant recuit thermique qui jouerait un rôle importante dans la migration et la désorption postérieures de l hélium. Le but de cette première discussion est d estimer l influence de la fluence d implantation sur l état du matériau juste après implantation et avant traitement thermique, en termes de répartition des différentes espèces attendues. o La forme du profil ne change pas en fonction de la fluence d implantation (même R phe pour les trois fluences étudiées). Ces données expérimentales suggèrent que même à haute fluence, l hélium ne migre pas ni vers la profondeur ni vers la surface et pourrait être relié à l existence d une large concentration de pièges stables localisés autour du pic d implantation. De plus, quels que soient la fluence d implantation et le métal considéré, la quantité d hélium mesurée juste après implantation est 213

214 égale à la quantité introduite, aux incertitudes près. La totalité de l hélium a donc été piégée dès l implantation pour les trois fluences étudiées. o L implantation d hélium induit la formation de bulles nanométriques distribuées de façon homogène le long de la profondeur d implantation pour les trois fluences étudiées dans les deux métaux CC. Si nous comparons ces résultats avec les profils de concentration, la distribution a priori homogène sur toute la profondeur d implantation, ne correspond pas. Ces différences pourraient être expliquées par la présence d autres amas, invisibles au MET distribués préférentiellement autour du pic d implantation et/ou par le fait que la pression des bulles visibles au MET ne serait pas homogène sur toute la zone implantée. Il est à noter également que la forme sphérique des bulles nanométriques indiquerait un état plutôt surpressurisé après implantation. o La taille des bulles reste constante à l état implanté (1-2 nm) mais la densité de bulles augmente avec la fluence d implantation pour se saturer à partir de 2,5x10 16 He/cm 2 à environ 1x10 18 cm -2 tant dans le Fe-PC que dans le V-PC. Ces observations suggèrent que la fluence joue un rôle sur la quantité de défauts ponctuels créés au cours de l implantation (lacunes, auto-interstitiels), éléments de microstructure contrôlant la germination des bulles d hélium. Quand on augmente la fluence, la concentration d hélium initialement présente dans le matériau augmente logiquement, tout comme le taux de lacunes et interstitiels présents (issus de paires de Frenkel). Comme mentionné précédemment, les atomes d hélium et les interstitiels sont dans nos conditions d implantation (à température ambiante) plus mobiles que les lacunes. Ils peuvent dès lors migrer jusqu à se recombiner (uniquement pour les SIA) ou former des amas. En se recombinant avec les lacunes, moins mobiles à ces températures, les interstitiels vont par conséquence diminuer la concentration de lacunes disponibles pour former des amas He nv m dans le matériau. Toutefois ce processus d annihilation des paires de Frenkel reste limité d une part par la possibilité des interstitiels d être piégés par d autres défauts du matériau (dislocations, joints de grain) et d autre part par le volume de recombinaison. De plus, il est largement établi dans la littérature qu une lacune peut piéger un nombre important d hélium avant que l amas He nv soit complètement saturé et se transforme en un amas de type He nv m. Ainsi dans le cas où les germes à l origine des bulles se forment à partir de monolacunes, le degré de remplissage augmente progressivement avec la fluence [van Veen, 1994], e.g. He + V HeV, He + HeV He 2V, etc, en parallèle du fait que le nombre de monolacunes initialement disponibles évolue également avec la fluence. D après nos études (Fig. III.89) : - La taille des bulles observables n évolue pas : nous pouvons donc supposer que l amas a atteint une taille critique dans les conditions d implantation, avec sans doute une surpression d He puisque la forme reste sphérique. Taille et forme permettent de limiter les distorsions du réseau et ce dans les deux métaux purs. - La quantité des bulles observables n évolue plus à partir d une certaine fluence : nous pouvons ainsi supposer qu à basse fluence il existe une quantité non négligeable d amas sub-nanométriques, invisibles au MET, qui peu à peu se remplissent d He pour atteindre une taille critique d environ 1 nm (et devenir 214

215 visibles au MET). Cette concentration d espèces nanométriques est atteinte a priori plus rapidement dans le cas du vanadium que dans le cas du fer puisque la densité de bulles visibles à l état implanté est 2 fois plus élevée à basse fluence pour V que pour Fe, écart qui tend à s annuler à plus haute fluence. Ces différences pourraient être expliquées par le fait que le degré de remplissage d une monolacune dans le vanadium est plus grand que celui dans de remplissage dans le fer pur (jusqu à n=6 dans le fer [Gao, 2011] et n= 9-12 dans le vanadium [Chernov, 1999]) : la plus haute densité de bulles dans le vanadium à basse fluence se compenserait par le plus forte degré du remplissage à haute fluence. Fig. III.89- Représentation schématique du premier cas hypothétique qui expliquerait pourquoi la densité de bulles sature à haute fluence. Si nous ajoutons au processus précédent, uniquement axé sur le remplissage progressif de monolacunes immobiles, un processus impliquant la mobilité des lacunes pendant l implantation, il est également possible que les amas He nv m se forment et croissent par absorption progressive de lacunes. Ainsi, quand la fluence est faible, le libre parcours moyen de lacunes créées au cours d irradiation vers un amas déjà formé ou vers d autres lacunes pour former un nouvel amas est relativement similaire. A contrario quand la fluence augmente, compte tenu du fait que la quantité d He présente est élevée, le libre parcours moyen de lacunes, qui peuvent rencontrer d autres lacunes sur le trajet de diffusion, est moindre par conséquent il ne se formera plus de bulles et la densité se maintiendra constante (Fig. III.90). De plus, il y aurait moins d amas lacunaires (avec m>n) pour piéger l hélium et ainsi former des amas He nv m stables (germes) que d amas surpressurisés (avec n>m) sources de bulles. Fig. III.90- Représentation schématique du deuxième cas hypothétique qui expliquerait pourquoi la densité de bulles sature à haute fluence. 215

216 Dans ces deux cas hypothétiques, l augmentation de la fluence entrainerait d abord une augmentation de la taille des petits amas ce que fait augmenter la densité de germes visibles (liée à l augmentation de lacunes crées parallèlement avec l implantation) et ensuite une augmentation du degré de surpressurisation des germes (par sursaturation des amas ou indisponibilité de lacunes). Pour éclaircir les mécanismes impliqués, plusieurs expériences pourraient être proposées : - Il faudrait regarder l évolution de dislocations parallèlement avec la germination des bulles par MET pour les trois fluences étudiées afin de mettre en évidence la croissance de boucles de dislocations par l absorption des auto-interstitiels éjectés par les amas He nv saturés. - Nous pourrions aussi envisager de faire des observations MET sous implantation (autre type de MET in-situ) et regarder l évolution des dislocations et des bulles en augmentant peu à peu la dose ou la fluence d implantation par palier. - Il serait intéressant de regarder la germination des bulles après implantation en température à différents fluences (là où la dissociation thermique d amas et la création de lacunes vont jouer un rôle prédominant). - Autre option (celle-ci suivie dans cadre de cette étude) sera d étudier le dépiégeage des amas, la diffusion d hélium et l évolution de bulles au cours du traitement thermique in-situ et ex-situ. Il est à noter que cette notion de sursaturation appuiera l idée que les différences entre le profil de concentration d He et la distribution de bulles seront liés principalement à une différence de pression des bulles visibles au MET non homogène sur la zone implantée. o L augmentation de la fluence n induit aucun changement de l état de la surface. L absence de cloques après implantation dans les deux métaux CC est compatible non seulement avec le fait que toute la dose a été retenue dans les échantillons après implantation, mais aussi avec l observation des petites bulles distribuées de façon homogène. Il a en effet déjà été fait mention dans la littérature de dose critique minimale nécessaire à l observation de cloque à la surface des matériaux, dose variant par exemple pour le vanadium pur entre et He/cm 2 [Blewer, 1976 ; Das, 1973 ; Kaletta, 1976 ; Lucas, 1984]. Pour le fer pur, la présence de blisters n a jamais été observée après implantation à température ambiante pour des conditions similaires à celles appliquées dans le cas de cette étude [Lefaix-Jeuland, 2013a ; Loussouarn, 2015]. Ces résultats suggèrent donc que les fluences utilisées dans nos études sont plus petites que la fluence de seuil pour l apparition de blisters après implantation. L absence de blisters est probablement à relier au fait que les bulles n ont pas une taille suffisante pour induire des déformations appréciables à proximité de la surface. Cette première série d éléments sur le piégeage de l hélium à l état implanté montrent que la fluence joue un rôle sur la formation des amas et donc sur la germination des bulles à l état implanté. Quelle que soit la fluence, il existerait une surconcentration importante des amas autour du pic d implantation probablement avec une surpression d He très importante. Ce niveau de surpression ou remplissage augmenterait avec la fluence jusqu à leur saturation à 2,5x10 16 He/cm

217 Il serait intéressant de décrire le panorama des espèces formées après implantation par la dynamique d amas comme Moll et al. [Moll, 2013] l ont fait pour les échantillons implantés à 1x10 16 He/cm 2. Cependant, la mise en place de ces outils théoriques dans des échantillons implantés à plus haute fluence (>1x10 16 He/cm 2 ) reste limitée par la complexité de processus à l échelle atomistique. Il faudrait aussi s appuyer sur d autres méthodes expérimentales afin de caractériser la composition des amas hélium-lacune formés après implantation (ratio n/m) en fonction de la fluence. Par exemple, la spectrométrie d élargissement Doppler de la raie d annihilation (Doppler Broadening Positron Annihilation Spectroscopy, DB-PAS) permet d obtenir des informations sur la nature des défauts dans les échantillons en mesurant la dispersion en énergie de la raie d annihilation (traduit par les paramètres de faible moment cinétique S et haute moment cinétique W). Les caractéristiques des paramètres S et W dépend de l environnement chimique du positron lors son annihilation. En présence d hélium dans les amas lacunaires, la densité électronique des amas change et par conséquence le ratio S/W variera aussi pour chaque type des espèces He nv m (chaque rapport n/m). Généralement, lorsque le rapport n/m augmente, les points S en fonction de points W ont tendance à se déplacer dans le sens s une diminution de S et d une faible diminution de W. De plus, les courbes S et W en fonction de l énergie d implantation de positrons permettent d obtenir la distribution des caractéristiques d annihilation en fonction de la profondeur [Carvalho, 2013a, 2013b]. Une autre méthode qui pourrait peut-être permettre de décrire le niveau de pressurisation des bulles est la technique EELS. Cependant comme nous l avons précédemment précisé dans la discussion des autres parties de cette étude, son application reste limite par la taille nanométrique de bulles. Effet de la fluence sur le dépiégeage de l hélium au cours du traitement thermique Il est largement admis que la fluence influence fortement le comportement en désorption de l hélium. En fonction de la fluence utilisée, de grandes différences peuvent être observées, mais dans des gammes thermiques différentes selon le type de métal étudié. Le but de cette deuxième discussion est d expliquer l influence de la fluence d implantation sur le dépiégeage et la désorption de l hélium en fonction de la montée en température, en termes de nature, stabilité et quantité des espèces. Dans la première partie de ce chapitre, nous avons constaté pour des échantillons implantés avec une fluence d implantation de 1x10 16 He/cm 2, 5 domaines de désorption pour chacun des métaux CC étudiés : o Dans le fer pur : le domaine ❶ correspondant aux atomes d He de monolacunes HeV situées proche de la surface, le domaine ❷ associé aux atomes d He désorbés des petits amas H nv (2 n 6), le domaine ❸ attribué aux atomes désorbés des amas He nv m (avec m>1), le domaine ❹correspond aux atomes d hélium désorbés suite à la transformation de phase α γ et le domaine ❺ associé à la désorption depuis de bulles. o Dans le vanadium pur : le domaine ❶ correspondant aux atomes d He désorbés d espèces situées proche de la surface et aux amas surpressurisés, le domaine ❷ associé aux atomes d He désorbés des complexes H nvx (avec 2 n 6 et X=C, N ou O), le domaine 217

218 ❸ et ❹ attribué à l hélium désorbé des amas He nv m ou He nxv m>5 et le domaine ❺ associé à la désorption depuis de bulles. Les résultats obtenus dans cette troisième partie montrent que pour des échantillons implantés avec des fluences plus élevées ( 2,5x10 16 He/cm 2 ) la plupart des domaines de désorption est relativement reproductible d une condition à l autre, ce qui porte à croire que la nature des interactions entre He et la matrice reste similaire. Toutefois, trois conséquences principales de l augmentation de la fluence pour les deux métaux CC ont été mises en évidence: o La position des pics d hélium se décale vers des températures inférieures et leur intensité augmente avec la fluence. Le décalage des pics vers des températures plus basses, principalement dans les domaines situés à basse température des spectres de désorption (domaine ❶ et ❷ dans le Fe-PC et domaine ❶ et ❷ dans le V-PC), est sans doute lié à un remplissage plus important des amas (nombre n d atomes d hélium dans les amas hélium-lacune plus grand à haute fluence qu à basse fluence) qui se traduit par une plus forte propension de l hélium à se dissocier. Il est d ailleurs à noter une désorption qui débute même pour des températures relativement basses (< 150 C) dans le cas du vanadium, ce qui prouve l existence d interaction assez faible entre l He et la matrice (pièges saturés). Ainsi, la pression à l intérieur de ces espèces sursaturées serait tellement élevée qu une faible augmentation de température permet la désorption d hélium. Cela traduit une plus faible énergie de liaison entre cet atome d He et l amas He nv m correspondant. Ce phénomène a déjà été observé dans d autres métaux, comme par exemple dans le nickel implanté entre 20 et 40 kev avec des fluences de 1x10 17 à 1x10 19 He/cm 2 [Ehrenberg, 1983 ; Zelenskij, 1987]. L augmentation de la fluence se traduit par l augmentation en parallèle du décalage en température du nombre d He impliqués dans cette désorption à basse température. Cela peut être relié à la progressive saturation du nombre de bulles observées dans les échantillons, et renforce l hypothèse émise dans le paragraphe précédent : augmenter la fluence revient à progressivement "remplir" des sites de piégeage He nv m, avec un ratio n/m de plus en plus élevé pour un diamètre de bulles relativement stables. Celle-ci est en fait la même hypothèse proposée au début de cette discussion pour expliquer la saturation de la densité de bulles après implantation à partir de 2,5x10 16 He/cm 2 (voir Fig. III.89). De même, l augmentation de la désorption à haute températures (domaine ❺ dans le Fe-PC et domaine ❹ et ❺ dans le V-PC) traduit l augmentation de la quantité des amas He nv m stables et bulles présentes dans la matrice. Ces amas peuvent être initialement présents dans la matrice, mais peuvent aussi se former au cours du traitement thermique, par réorganisation progressif d He et désorption de l hélium (pics précédents). Dans le cas de Fe-PC, le changement de phase (domaine ❹) induit une désorption plus importante à haute fluence qu à basse fluence : la transformation de phase déstabilise un nombre plus important d amas du système. Il est également à noter, que l effet de la fluence sur la position et l intensité est plus important dans le cas du fer pur que dans le cas du vanadium pur. Ces résultats suggèrent : - que quelle que soit la fluence d implantation, les espèces présentes dans la matrice du vanadium seraient très stables et leur dissociation est donc limitée en fonction de la température. - que les amas dans le vanadium "admettraient" un plus grand nombre d atomes d hélium avant d induire des déformations et d éjecter soit d hélium ou soit d un auto-interstitiel que dans le cas du fer (comme nous avons mentionné 218

219 o précédemment He nv sont stables jusqu à n=6 dans le fer [Gao, 2011] et n= 9-12 dans le vanadium [Chernov, 1999]). Des nouvelles espèces apparaissent dans les spectres de désorption (domaine ❻ dans le Fe-PC et domaine ❻ et ❼ dans le V-PC) Ces observations sont à relier au fait que certains amas hélium-lacunes (états discrets ou pics) n existent qu à partir d une certaine fluence. Ainsi, Zelenskij et al. [Zelenskij, 1987] explique l apparition de nouveaux pics dans les spectres de désorption avec l augmentation de la fluence par le phénomène de remplissage. Nous pouvons observer dans la figure III.91 la fraction d hélium désorbée en fonction de la fluence d implantation pour des différents pics de désorption. Ces auteurs montrent qu au fur et à mesure que les fluences augmentent, de nouveaux pics apparaissent à plus basses températures. Fig. III.91- Fraction d hélium (R) en fonction de la fluence d implantation pour différents pics de désorption obtenu par Zelenskij et al. dans le cas d échantillons Ni implantés 20 kev [Zelenskij, 1987]. Si nous reprenons le modèle de remplissage des amas en fonction de la fluence d implantation, les amas ne se rempliront pas de manière homogène, certains se rempliront ainsi plus vite que autres. Certains vont devenir des bulles visibles à l échelle du MET et d autres vont rester dans un état "invisible" surpressurisé. Cela est en accord également avec le décalage de plusieurs pics en température (différents niveaux de surpressurisation) et de l observation au cours du recuit d une large gamme de tailles et morphologies des bulles. La discussion de l effet de la température sur l évolution de la population des bulles après traitement thermique ex-situ pourrait préciser ces phénomènes. o Des porosités et/ou cloques se forment dans la surface de certains échantillons après TDS. Pour le Fe-PC, nous observons la présence de porosités dans les échantillons implantés à 2,5x10 16 et 5x10 16 He/cm 2. De plus pour la plus haute fluence, des cloques apparaissent dans la surface après thermodésorption. Pour le V-PC, nous observons seulement des porosités dans les grains et les joints de grains à partir de la fluence de 5x10 16 He/cm 2. Ces données sont en accord avec l augmentation de la quantité désorbée à haute température plus importante à haute fluence. Dans la littérature, Loussouarn et al. [Loussouarn, 2015] ont constaté la présence de cloques de taille supérieure à 1 µm après recuit ex-situ à 850 C 1h dans un échantillon de Fe-PC implanté

220 kev à 1x1017 He/cm2. Ils ont également noté par l observation MEB d une coupe FIB sur le même échantillon, la présence de traces de glissement caractérisés par des stries visibles (Fig. III.92). Fig. III.92- Formation de cloques dans des échantillons de fer polycristallin pur implanté 40 kev à 1x1017 He/cm2 et post-recuit à 850 C pendant 1 h : (a) image MEB de la surface de l échantillon, avec de cloques ouverts et fermés, (b) image MEB d une coupe transverse de l échantillon [Loussouarn, 2015]. Toutes ces modifications de la surface montreraient que le matériau a subi d importantes contraintes interne dues à la pressurisation de bulles, la migration de l hélium et probablement à la coalescence des bulles lors du recuit. D autres éléments seront présentés plus tard pour expliquer ces phénomènes. Les conséquences de l augmentation de la fluence nous laissent à penser que la dose implantée influence fortement le piégeage de l hélium dans le matériau et par la suite celui de sa désorption. Toutefois, il est assez difficile de comparer complètement ces résultats et ceux publiés car, comme il en est fait mention au début de cette partie et dans l étude bibliographique, peu d études concernent directement les métaux purs et très peu ont été réalisées dans des conditions similaires aux nôtres. La plupart de ces travaux expérimentaux analysent le comportement soit à basse fluence dans le métal pur ( 2x1016 He/cm2 pour le Fe et <1x1014 He/cm2 pour le V) ou soit à haute fluence dans les alliages (>5x1016 He/cm2). Pour des échantillons implantés à basse fluence ( 2x1016 He/cm2), la figure ci-dessous (Fig. III.93) présente à titre d exemple les spectres de désorption obtenus d une part pour des échantillons de V-PC implantés à 1 kev [Federov, 1996a] et d autre part pour des échantillons de Fe-PC implantés à 8 kev [Sugano, 2003]. Nous pouvons constater que, malgré la différence d énergie d implantation entre les deux métaux, il existe quelques points communs concernant l effet de l augmentation de la fluence sur la désorption de l hélium en fonction de la température. Le premier est associé au fait que la désorption d He devient de plus en plus élevée quand la fluence d implantation augmente. Le second est lié à l apparition des pics supplémentaires à haute température avec l augmentation de la fluence, phénomène relié à la formation de bulles [Sugano, 2003]. 220

221 Fig. III.93- Spectres de désorption obtenus par (a) Federov et al. (10 C/min) pour le vanadium pur monocristallin (110) implanté à 1 kev à température ambiante [Federov, 1996a] et par (b) Sugano et al. (60 C/min) pour le fer pur implanté 8 kev à température ambiante [Sugano, 2003]. Pour les échantillons implantés à haute fluence (jusqu à 1x10 17 He/cm 2 ), la désorption de l hélium en fonction de la fluence évolue différemment que pour ceux implantés à basse fluence. Par exemple, la figure III.94 présente l effet de la fluence dans le cas de l alliage V-4Ti-4Cr implanté à 5 kev [Hirohata, 2006b] et dans le cas de l acier austénitique 304SS implanté à 2 kev [Tokitani, 2004]. Nous remarquons que pour les deux types de matériau plus la fluence augmente, plus l intensité des pics devient importante et plus le spectre TDS s enrichit aux faibles températures. (a) (b) Fig. III.94- Spectres de thermodésorption obtenus par (a) Hirohata et al. (60 C/min) pour l alliage V-4Ti-4Cr implanté 5 kev [Hirohata, 2006b] et par (b) Tokitani et al. (60 C/min) pour l acier austénitique 304SS implanté 2 kev [Tokitani, 2004]. Si nous comparons nos études pour des fluences "intermédiaires", nous nous rapprochons plus des données expérimentales obtenues à haute fluence. A basses fluences (<1x10 15 He/cm 2 ), la 221

222 désorption de l hélium serait principalement attribuée à la désorption de l hélium depuis de amas hélium-lacune dans la matrice métallique (jusqu à ce que le pic relié à la présence des bulles apparaisse). A hautes fluences (>5x10 15 He/cm 2 ), les doses mises en jeu entraineraient nécessairement un régime différent avec la formation de bulles et de gros amas dès le départ. La superposition des pics liée à la désorption d hélium depuis de grands amas hélium-lacune ou des bulles rend difficile l interprétation des pics. D autres méthodes qui caractérisent la nature de bulles sont donc nécessaires afin de comprendre les mécanismes impliqués, comme par exemple des expériences de désorption stoppées en corrélant SIMS, MET et MEB à une température voulue du spectre TDS [Tokitani, 2004]. Des expériences de DB-PAS pourraient s appliquer dans le cas des échantillons recuits afin de regarder l évolution des défauts lacunaires en fonction de la température. Effet de la fluence sur la migration de l hélium, la distribution des bulles et la formation de porosités et blisters Au travers des expériences de recuit ex-situ, nous avons pu constater que la fluence modifie l évolution du profil et de la distribution de bulles tant dans le fer que dans le vanadium. Si nous analysons maintenant l effet de la fluence pour chaque métal d étude : o Dans le fer pur : Nous observons une diminution de la concentration avec une croissance des bulles quelle que soit la dose d implantation. Cependant, l effet de la fluence semblait être différent selon la durée du recuit. Pour une durée de recuit plus courte, i.e. 1 heure, la diminution de la concentration d hélium est plus importante à 5x10 16 He/cm 2 que à 1x10 16 He/cm 2. Ces résultats sont accord avec l augmentation de l intensité des pics observée au-dessous de 700 C dans les spectres de désorption des échantillons implantés à haute fluence, domaines associés aux amas He nv m surpressurisés. Parallèlement, l augmentation de la taille et la diminution de la densité par rapport à l état implanté initial restent similaires pour les deux fluences. Ces résultats suggèrent que la plus forte désorption d hélium dans les échantillons implantés à haute fluence est probablement associée aux atomes d hélium en excès dans les amas et que ceux-ci ne joueraient a priori aucun rôle sur les mécanismes de croissance impliqués. Des observations de MET in-situ sont à envisager sur les échantillons implantés à haute fluence en décrivant l évolution de dislocations et de bulles par exemple au cours d un recuit isotherme (à 700 C pendant 1 heure) ou isochrone (jusqu à 700 C avec une rampe pas très éloigné de celle utilisé dans nos mesures TDS) afin de vérifier s il existe un effet de la fluence sur les mécanismes de croissance qui se mettent en place au cours du recuit in-situ et ex-situ (particulièrement les mécanismes de Murissement d Oswald déjà constatés par Moll et al. dans des échantillons implantés à basse fluence [Moll, 2013]). Pour une durée de recuit plus longue, i.e. 2 heures, le traitement thermique induit une désorption totale de l hélium quelle que soit sa fluence d implantation avec un grossissement des bulles jusqu à des "cavités" de forme tubulaire. Pour une fluence intermédiaire, les répartitions en taille des bulles nous indiquent que les bulles initiales de tailles nanométriques grossissent avec la température et que des "bulles-cavités" de tailles importantes apparaissent dans nos échantillons. Ces résultats nous confortent dans l idée que le grossissement de bulles est dû à élimination de l hélium et à la capture des lacunes. Ces 222

223 mécanismes de croissance seraient aussi justifiés par la tendance des bulles à croitre en prenant de morphologies moins surpressurisées et proches de l équilibre (sachant que la pression d équilibre des bulles est P=2γ/r) avec de facettes qui minimisent les énergies de surface (voir Fig. III.27 et Fig. III.88 des échantillons implantés à 1x10 16 et 2,5x10 16 He/cm 2, respectivement). Il est à noter également que la distribution de la taille le long de la profondeur implantée semblerait a priori très hétérogène (des bulles de 4 et 5 nm parallèlement avec des "bullescavités" de 10 et 20 nm) en regardant les observations MET (voir Fig. III.85) et les écarts de la mesure dans les graphiques (voir Fig. III.87). Ces observations appuieront cette notion de non uniformité dans le remplissage des amas au cours de l implantation proposée précédemment pour expliquer l apparition de nouvelles espèces dans les spectres de désorption. Plus la fluence est grande, plus les bulles ont tendance à relâcher l hélium dans la matrice. Par ailleurs comme la densité de bulles est élevée à haute fluence, les bulles pourraient coalescer entre elles, s agglomérer et éliminer des atomes d hélium plus facilement. Ce phénomène serait probablement le précurseur de la formation de cloques à la surface des échantillons. Ces hypothèses sont soutenues par la présence de cloques dans les échantillons implantés à 5x10 16 He/cm 2 après 2 cycles de thermodésorption jusqu à 1050 C. Ces résultats sont cohérents avec les études réalisées par Zelenskij et al. [Zelenskij, 1987] qui observent un pic de désorption importante autour de 900 C dans le spectre de désorption obtenu pour des échantillons de nickel implantés à haut fluence relié à la formation de cloques et à leur évolution pendant le recuit (T>0,6T F) des échantillons implantés. Pour expliquer les mécanismes impliqués dans ce phénomène, ces auteurs ont réalisé des recuits TDS stoppé avant, dans et après la température du pic de désorption. Dans la figure III.95, nous pouvons observer une représentation schématique du mécanisme de formation de cloques proposés par Zelenskij et al. [Zelenskij, 1987] à partir de la coalescence de bulles ("chain of bubbles"). Fig. III.95- Représentation schématique de la formation de cloques à haute température à partir de la coalescence de bulles dans le nickel [Zelenskij, 1987]. 223

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