km de tranchées et de boyaux de la Grande Guerre en Champagne- Ardenne, révélés par l outil SIG.

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1 km de tranchées et de boyaux de la Grande Guerre en Champagne- Ardenne, révélés par l outil SIG. Auteurs : Pierre Taborelli (GEGENAA): pierre.taborelli@univ-reims.fr Alain Devos (GEGENAA): alain.devos@univ-reims.fr Nicolas Bollot (GEGENAA): nicolas.bollot@univ-reims.fr Jérome Brénot (EVEHA): jerome.brenot@eveha.fr Yves Desfossés (DRAC): yves.desfosses@culture.gouv.fr GEGENAA Campus Croix-Rouge Bâtiment Recherche 13 57, rue Pierre Taittinger Reims Cedex France Thématique : Géosciences Logiciel ESRI : ArcGis 10.3 Public visé : Tout public Mots-clés : Tranchées, SIG, Grande Guerre, densité linéaire, Plans Directeurs, Champagne- Ardenne. Résumé communication : La Grande Guerre a fortement marqué les paysages du Nord Est de la France, des Flandres à l Alsace sur près de 750 km de front dont la représentation spatiale est généralement limitée à la ligne de front. Pourtant la guerre de position s exprime sous la forme de réseaux de défense (tranchées et boyaux) complexes et profonds dont l organisation spatiale est peu étudiée. L objectif de cette contribution est de caractériser sous SIG, ce dispositif de défense à partir des Plans directeurs des Groupes de Canevas de Tirs des Armées (GCTA) sur les 90 km de ligne de front en Champagne-Ardenne.

2 Introduction La Grande Guerre est principalement marquée sur le front ouest par une guerre de position des Flandres à l Alsace sur près de 750 km. Le front est très souvent résumé à une ligne, sans profondeur alors qu il est structuré en réseaux de défense, organisés en plusieurs lignes de tranchées. L objectif de cette contribution est de comprendre l organisation spatiale des réseaux de défense sur les 90 km de zone de front en Champagne-Ardenne. A partir des Plans directeurs, réalisés par les GCTA (Groupes de Canevas de Tirs des Armées), l outil SIG est utilisé pour analyser spatialement et statistiquement chaque entité digitalisée. Le front champardennais s étend du célèbre secteur de mine de Berry-au-Bac, passe devant la ville martyre de Reims puis les Monts de Champagne, traverse le Vallage d Aisne (Champagne Humide) pour rejoindre la forêt d Argonne. Le croisement de données digitalisées avec les données de l IGN (MNT, BD Forêt ) détermine des densités de tranchées et de boyaux contrastés selon les conditions géographiques de cette zone de front. Méthodologie Devant la stabilisation du front et l enracinement du conflit dans une guerre de tranchées, la carte d État-Major au 1/ ème utilisée durant la guerre de mouvement devient inadaptée pour la guerre de position. L Armée française crée les Groupes de Canevas de Tirs des Armées (GCTA) pour l élaboration de cartes plus précises, dénommé Plans directeurs. Ils sont réalisés à partir de l interprétation des photos aériennes, de croquis de terrain, croquis perspectifs et d interrogatoires de prisonniers, notamment pour le positionnement des éléments de défenses adverses. Les GCTA créent des cartes à différentes échelles, 1/ ème, 1/ ème et 1/5 000 ème utilisé à la fois par les Etats-majors, mais aussi les officiers sur le terrain. La production atteint 4 millions de Plans directeurs en L Armée allemande réalise des cartes thématiques avec une échelle différente, 1/ ème. Pour cette étude, 10 Plans directeurs (Berry-au-Bac, Brimont, Warmeriville, Jonchery-sur-Vesle, Reims, Beine, St Marie à Py, Tahure, Cernay-en-Dormois, Argonne) ont été numérisés à haute définition, géoréférencés via la méthode des points amers en se basant sur les SCAN de l IGN avec le système de coordonnées RGF 1993 Lambert 93 (Fig.1). Chaque signe des cartes représentant les organisations défensives allemandes en bleu ou françaises en rouge est digitalisé, et intégré dans une géodatabase.

3 Figure 1 : Tableau d assemblage des Plans directeurs au 1/ ème et tracé du front (en rouge) au 15 novembre Résultats Le travail de digitalisation montre d une part, que les réseaux de défense concentrent plus de km de tranchées et de boyaux dans la traversée de la région, ce qui se traduit par une densité linéaire moyenne de 111 km par kilomètre de front. D autre part, ces réseaux s organisent en rideaux ou positions, puis en lignes ou parallèles, selon les reliefs, la nature géologique des terrains et la couverture forestière. En effet, l approche morphométrique des réseaux de défense, détermine des densités contrastées dans l espace comprises entre 72 km à 116 km de tranchées et de boyaux par kilomètre de front (Fig. 2). Leur organisation spatiale obéît à des logiques militaires et balistiques sous la commande des conditions géographiques du milieu selon les Pays traversés (Pays rémois, Champagne crayeuse, Champagne humide ou Vallage de l Aisne et Argonne). Le Pays Rémois de Berry au Bac au fort de la Pompelle s organise en 4 positions côté français des faubourgs de Reims au pied de la Montagne de Reims, tandis que l Armée allemande occupe des points hauts stratégiques (Fort de Brimont sur la Butte de Brimont ou le fort de Nogent-l Abesse sur le Mont de Berru). La Champagne crayeuse est caractérisée par la plus forte densité linéaire ; 116 km/km de front avec des positions prisent et reprisent par les deux armées au gré des batailles très meurtrières du secteur. Seulement 74 km/km de front dans le Vallage d Aisne s expliquent par les conditions hydromorphes des sols et l impossibilité de lancer de grandes attaques dans ce secteur ; il restera calme pendant le conflit. Enfin l organisation défensive dans le massif d Argonne représente une densité relativement moyenne (78 km/km de front) et différentes entre les deux camps. L armée française établit 4 positions alors que les allemands seulement une position dense et inextricable avec 14 lignes de tranchées parallèles.

4 Figure 2 : Carte des réseaux de défense français et allemands en 1918 en Champagne- Ardenne. Applications Le croisement des données intégrées dans la géodatabase et la BD forêt de l IGN permet de quantifier un potentiel de linéaire de tranchées et de boyaux conservés. La couverture forestière est la première condition à la conservation de ces formes de la Grande Guerre, tandis que les réseaux de défense ont été nivelés lors de la mise en culture des plaines champardennaises. 43% des km de tranchées et de boyaux se retrouvent sous couvert forestier aujourd hui et sont donc probablement conservés. Le Mont de Berru, la Butte de Brimont, les trois camps militaires (Mourmelon, Moronvilliers et Suippes) ainsi que l Argonne sont les zones regroupant la majeure partie de ces formes potentiellement conservées (Fig. 3). Figure 3 : Carte du croisement des réseaux de défense et de la couverture forestière actuelle (BD Forêt IGN )

5 Pour mesurer le degré de conservation du réseau de défense, cinq campagnes LiDAR aéroporté ont été réalisées en Champagne-Ardenne regroupant 100 km² dans le Pays rémois et en Argonne (Fig. 3). L analyse de ce MNT à haute résolution (12 points/m²) montre la conservation de ces formes (tranchées et boyaux) mais également des zones nivelées par des travaux forestiers (Fig. 4). Figure 4 : Réseaux de défense et cratères d obus en image LiDAR en Argonne et parcelles nivelées. Conclusion La digitalisation des 10 Plans directeurs permet d identifier un front épais et large (20 à 30 km). De plus, km de tranchées et boyaux ont été recensés sur les 90 km de front champardennais avec une densité linéaire de 111 km par km de front, soit environ 20 millions de mètres cubes creusés par les soldats pour se protéger et circuler. Ce chiffre ne prend cependant pas en compte les abris pour les hommes ou les rameaux de combats pour la guerre des mines. Ces réseaux de défense sont retrouvés partiellement sur les images LiDAR aéroporté sous couvert forestier, en fonction des pratiques sylvicoles. L apport du SIG et du LiDAR constitue un formidable outil de potentiel de patrimonialisation dans le cadre du Centenaire. Crédits et remerciements : Ce programme «Emergence Impact 14-18» porté par l EA3795 GEGENAA, est financé par la région Champagne-Ardenne.