Mémoire. présenté dans le cadre de la Consultation sur un projet de politique linguistique pour l Université du Québec en Outaouais.

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1 Mémoire présenté dans le cadre de la Consultation sur un projet de politique linguistique pour l Université du Québec en Outaouais par Eric Ouellet, Ph.D. 16 février 2007

2 Introduction Ce mémoire est présenté à titre personnel et est basé sur mon expérience en tant qu exprofesseur au Département des sciences adminsitratives de l UQO. J ai enseigné dans le programme en version anglaise de la Maîtrise en Gestion de projet, et je continue de le faire à titre de chargé de cours. Ce mémoire ne cherche pas à présenter une longue analyse chiffrée sur les programmes de langue anglaise. Non, il cherche plutôt à éclaicir la véritable nature des enjeux qui se camouflent derrière cet exercice de consultation. De plus, ce mémoire se veut aussi une critique du manque de vision au niveau stratégique à l UQO, et qui explique pourquoi les programmes en anglais se retrouvent au coeur d une fausse controverse. Problématique Encore une fois, la question des programmes en anglais offerts par l UQO fait l objet de critiques. Cette critique est maintenant intégrée dans un document officiel et s inscrit dans le cadre plus large d une politique linguistique pour l UQO. Le document de consultation, dans sa deuxième phrase, annonce l enjeux fondemental d un manière très claire: En effet, bien que notre Établissement se définisse comme francophone depuis sa création, on y dispense, à Gatineau, quelques programmes de cycles supérieurs en anglais depuis une dizaine d années et, de ce fait, on y accueille des étudiantes et des étudiants qui ne s expriment pas en français. Le document de consultation propose par omission l élimination de ses quelques programmes en anglais dans la section 7.1, alors que les recommendations du groupe d étude (7.1 (f) i à iii) ne sont pas retenues, lesquelles permettant l existence de programmes dans une autre langue que le français sous certaines conditions. Le fait qu il y ait quelques programmes en anglais à l UQO semble donc problématique pour certains. La question est de savoir pourquoi est ce si problématique? La réponse est pour moi on ne peut plus évidente: cet état de fait est problématique pour certains essentiellement pour des raisons d ordre idéologique. Pour être encore plus clair, le problème n existe que pour ceux qui partagent l idéologie ethno nationaliste québécoise. Leur attitude est dictée par une intolérence face à la présence de l Autre, qui ne semble pas s identifier à la Nation, tel que les nationalistes cherchent à la définir. Les programmes en anglais ne constistiuent pas en eux même le véritable enjeux, mais plutôt l étroitesse d esprit de certains.

3 La présence de programmes de langue anglaise n est absolument pas problématique d un point de vue pratique. Jamais je n ai entendu mes étudiants qui suivent un programme en anglais se plaindre que l UQO fonctionnait essentiellement en français. De plus, ces programmes représentent un atout financier important, participent activement au rayonnement de l Université, et offrent un potentiel considérable d internationalisation des activités de l UQO. Finalement, je ne vois pas en quoi la présence de quelques programmes en anglais menace le caractère français de l institution. L UQO, une institution en déclin Il est important de mettre en contexte où se situe l UQO en tant qu institution. L UQO fait face à un lent mais certain déclin sur le long terme. Des actions vigoureuses doivent être entreprises dans un cadre stratégique bien réfléchis le plutôt possible. L élimination des programmes en anglais ne ferait que rendre pire la situation de l UQO. Les finances L UQO a un important déficit accumulé et un service de la dette qui gruge une partie importante de son budget annuel. Malgré l annonce récente de financement supplémentaire pour les universités par le Gouvernement du Québec, les fonds additionnels devraient à peine combler le déficit annuel. Ainsi, non seulement nous sommes loin d un réinvestissement authentique pour l UQO, mais les mesures d austérité misent en place durant les dernières années resteront vraisemblablement en place. De plus, l époque où le Gouvernement du Québec épongeait les déficits de ses institutions est révolue depuis bien longtemps. Si malgré tout l État s engage dans un tel exercice, il ne fait aucun doute qu il sera assortie de conditions équivalentes à une mise en tutelle. Bref, la situation financière de l UQO n est pas du tout prometteuse. Dans un tel contexte, il est complètement illogique de se débarrasser de programmes qui fonctionnent et qui rapportent des revenus non négligables à l UQO. Seule une attitude idéologique peut expliquer une telle proposition. Les inscriptions Les inscriptions à l UQO sont plutôt stagnantes depuis quelques années, et en l absence d un véritable plan stratégique basé sur le réalisme (plutôt que sur la fantaisie de rapatrier les francophones qui étudient à l Université d Ottawa), la situation des inscriptions ne s améliorera pas dans un avenir prévisible. Il y a des programmes et des départements comme le génie informatique qui ont très peu d étudiants, et dont on devrait repenser le rôle au sein de l UQO. Mais non, au lieu on pense à fermer les programmes qui marchent! Fermer les programmes en anglais, non seulement réduira les inscriptions immédiatement, mais réduira le potentiel de croissance. De plus, l existence de programmes en anglais permet d avoir un plus grand potentiel pour fournir de la formation sur mesure en milieu de travail, qui peut générer des revenus intéressants pour l UQO. Dans un contexte d inscription stagnante, il est foncièrement illogique de vouloir fermer des programmes qui marchent tout en maintenant artificiellement en vie des

4 départmeents avec très peu d étudiants. Encore une fois, seule une attitude idéologique peut expliquer une telle proposition. La réputation Il me semble important de souligner un élément fondamental, mais dû à la rectitude politique ambiante en Outaouais0 n est que rarement dit tout haut. La réputation générale de l UQO laisse très sérieusement à désirer. L UQO est souvent comparée à gros CÉGEP lorsqu on parle au gens dans la rue. Les parents qui ont les moyens préfèrent habituellement envoyer leurs enfants à l Université d Ottawa ou dans les universités de Montréal. De nombreux étudiants de France m ont dit que l UQO était d intérêt pour eux seulement parce que c est facile à l UQO. Il ne faut pas tout généraliser. Certains programmes de l UQO ont bonne presse dans les milieux spécialisés, en particulier la Maîtrise en Gestion de projet, qui est une des rares reconnues par le Project Management Institute (PMI), l organisation professionnelle clé dans le domaine de la gestion de projet. Couper les programmes en anglais signifie donc réduire la réputation déjà assez faible de l UQO, et réduire son potentiel de rayonnement. Encore une fois, seule une attitude idéologique qui ne s embarasse pas de ces questions et qui cherche seulement la pureté linguistique peut expliquer une telle proposition. La brique et le mortier comme stratégie de développement L UQO semble miser sur une stratégie de brique et mortier pour assurer son avenir. Elle cherche à développer un campus unifié sur le boulevard Taché, et cherche à acquérir des bâtiments, comme à St Jérôme. La stratégie de la brique et du mortier est reconnue par la plupart dans les milieux de l enseignement supérieur, du moins en dehors du Québec, comme une approche perdante. De plus, avec le déclin démographique que le Québec connaîtra sous peu, les immobilisations à long terme pour de nouveaux équipements n a guère de sens. Durant mes nombreuses années dans le domaine de l enseignement supérieur en dehors du Québec, j ai noté que les institutions généralement misent sur un mélange d enseignement à distance, de partenariat avec d autres institutions, de formations sur mesure chez le client, et de formation à recouvrement complet des coûts, le tout en fonction de leurs créneaux d excellence. L UQO n a aucune stratégie sérieuse et compréhensive pour se situer dans un contexte d enseignement supérieur de plus en plus compétitif, où les frontières nationales sont de moins en moins pertinentes (les frontières provinciales canadiennes étant encore moins pertinentes). Qu on le veuille ou non, la mondialisation de l enseignement supérieur fait partie de la réalité, et les petits joueurs comme l UQO doivent faire preuve d encore plus d ingéniosité que les grandes institutions qui ont beaucoup de ressources. Dans un tel contexte, fermer la porte à des programmes en anglais, qui offrent pourtant une carte de visite exceptionnelle à l UQO dans un monde de plus en plus ouvert, est une abération. Mais pour les idéologues nationlistes, le repli sur soi est toujours vu d un bon oeil, malgré que l histoire ait montré à de nombreuses reprises les dangers d une telle attitude.

5 Une diversion pour ne pas s attaquer aux vrais problèmes Cette initiative de l UQO pourrait avoir pour conséquence la fermeture des programmes en anglais me rappelle beaucoup l Argentine du début des années L économie argentine était en déroute et déclin de puis longtemps, et la junte au pouvoir n avait rien d ingénieux à proposer pour remédier à la situation. Alors, on décide de faire diversion et d attaquer quelques ilots britanniques dans l Atlantique Sud. Le reste de l histoire est bien connu; la junte n est plus et l économie est toujours dans le marasme. Lorsqu on regarde l ensemble des facteurs touchant le futur de l UQO, comme la situation financière, les inscriptions, la réputation, et la stratégie de développement, il m apparait tellement évident que l UQO est un navire à la dérive. J espère sincèrement que le capitaine tentera de retrouver ses instruments de navigation, et de remettre à l ordre certains individus qui embrassent un ethno nationalisme des plus primaire. Ici, je me dois de souligner que lorsque j ai remis ma démission comme professeur à l UQO, elle fut motivée en bonne partie parce que cette institution n a guère d avenir. Tant et aussi longtemps qu une véritable réflexion stratégique ait lieu, fondée sur une acceptation d une réalité pas toujours nécessairement plaisante à regarder mais épurée d idéologie, l UQO ne cessera de décevoir. Je crois pourtant au programme de Maîtrise en gestion de projet, et c est bien pourquoi j ai accepté d enseigner à temps partiel au sein du programme. Le maintien des programmes en anglais n est certainement pas une panacée, mais il fait partie de tout plan sérieux de relance de l UQO. Et je le répète, cette relance doit être mise en place le plus tôt possible car nos compétiteurs, eux, ne perdent pas leur temps avec de telles fadaises. Recommendation À la lumière des propos ci haut, je recommande que la section 7.1 du Projet de politique linguistique soumis à la consultation par le Conseil d adminstration soit amendée pour inclure le libellé 7.1 (f) i à iii du Projet de politique linguistique produit par le groupe de travail.