LES MATINALES DE LA FONDATION
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- Quentin Lavoie
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1 LES MATINALES DE LA FONDATION «Les nouvelles formes de radiothérapie dans le traitement des cancers de l enfant» Conférence du Professeur Jean-Louis HABRAND, Université de Caen-Basse Normandie, Chef du Service de Radiothérapie au Centre François Baclesse de Caen Directeur scientifique d Archade (Advanced Resource Center for Hadrontherapy in Europe). Vendredi 17 avril 2015 Fondation Hôpitaux de Paris-Hôpitaux de France Le traitement du cancer de l enfant est en train de faire des progrès fabuleux en radiothérapie avec le développement du traitement par les protons. La radiothérapie, qui reste le traitement essentiel du cancer, connait les propriétés des protons depuis le début du XXème siècle. L idée de l appliquer aux tumeurs cancéreuses est née à Harvard dans les années 80. L intérêt est considérable mais nécessite d énormes moyens. C est seulement depuis les années 2000 que la technique s est développée avec l apparition de nouveaux programmes de recherche aux Etats Unis et en Europe. Il existe actuellement en France deux centres maitrisant la radiothérapie par protons : l institut Curie en région Parisienne et le Centre Antoine Lacassagne à Nice. Le troisième centre ouvrira à Caen, au cœur d une zone à la pointe de la recherche nucléaire incluant Cherbourg (Sous-marins nucléaires), Flamanville et Caen avec son campus scientifique comprenant le GANIL (Grand Accélérateur National d Ion Lourd). + Les tumeurs de l enfant : rares et difficiles à traiter Les tumeurs chez l enfant sont rares : moins de 1% de l ensemble des cancers diagnostiqués chaque année. Ce sont 2500 tumeurs en France par an. Mais les cancers sont devenus un problème de santé majeur. Avec plus de cas, c est la première cause de maladie cardio vasculaire. Un chiffre qui a doublé en moins de 30 ans. Chez les jeunes de 1 à 14 ans, c est la deuxième cause de décès, juste derrière les accidents. Des progrès énormes dans le traitement des cancers de l enfant ont toutefois été réalisés depuis les années 70. La proportion d adultes qui ont fait un cancer dans leur enfance et qui sont maintenant en bonne santé est de plus en plus importante. En 2000, un adulte sur 2000 avait guéri d un cancer survenu dans son enfance. En 2015, la proportion tombe à 1 adulte sur 750 qui a guéri d un cancer dans son enfance. C est une nette progression. Mais le chiffre est significatif. Un exemple parlant : 1
2 sur l ensemble des personnes présentes dans une rame de métro, au moins une a eu un cancer dans son enfance et en est guérie. + Différents types de cancers entre enfants et adultes Les enfants développent des cancers très différents de ceux que l on retrouve chez l adulte qui se concentrent, en général autour du poumon, de la prostate, du sein, de l appareil ORL, de l appareil digestif et gynécologique. Chez les enfants, il s agit essentiellement de tumeurs du système lymphoïde, de tumeur cérébrale, de tumeur du réseau de nerfs et ganglions, de cancer des os ou de cancer du rein. Ces tumeurs chez l enfant sont souvent plus difficiles d accès et plus difficiles à diagnostiquer que chez l adulte. Le «camembert» des tumeurs Lymphomes Cerveau 20% Neuroblastomes Rétinoblastome Rein Foie Os Sar. T. mous 30% Germinales Carcinomes Leucémies Autres - Cette différence se vérifie dans les nominations des cancers : on parle des carcinomes chez l adulte et de sarcomes chez l enfant. - Chez l enfant, la différence se constate également dans l évolution rapide des tumeurs. Leur croissance peut s observer jour après jour. - Le dépistage du cancer chez l enfant est inefficace, et souvent inexistant. Sa croissance trop rapide empêche toute prévision. Seul le dépistage du neuroblastome peut se révéler utile, mais cette tumeur évolue vite et disparait souvent de manière naturelle chez l enfant. - Chez l enfant, il est fréquent de constater de grosses tumeurs et de nombreux métastases. La poussée pubertaire étant responsable de la stimulation des tumeurs, qui étaient restées inaperçues jusque-là. Pour toutes ces spécificités, les cancers chez l enfant sont donc restés pendant longtemps très problématiques. Les nombreux progrès réalisés dans l approche des cancers chez l enfant ont permis, depuis les années 80, de baisser nettement la mortalité. La préoccupation majeure pour les médecins est maintenant la qualité de la guérison. 2
3 + La chimiothérapie : vecteur essentiel des progrès depuis les années 80 La chimiothérapie a bouleversé en quelques années le traitement des cancers de l enfant. Il y a eu des résultats extraordinaires avec des traitements chimiothérapiques intensifs et courts, qui sont mieux supportés chez l enfant que chez l adulte. Et 20 ans plus tard, il n y a pratiquement pas de récidives. 70% des tumeurs sont donc traitées par chimiothérapie. Seul le domaine du cerveau pose problème, où la chimiothérapie semble moins efficace pour franchir la barrière hématoencéphalique. L acteur principal dans le traitement des tumeurs de l enfant est donc naturellement le pédiatre qui s est spécialisé en oncologie. Ces oncologues-pédiatres sont devenus les acteurs incontournables depuis le milieu des années 80. Sur la photo suivante, les résultats sont spectaculaires après un cycle de chimiothérapie, sur une tumeur des tissus mous, le long de la mâchoire, chez un enfant. + Des innovations nombreuses pour améliorer le traitement des cancers chez l enfant - Les chirurgiens-pédiatres ont mis au point de nouveaux outils pour des opérations de grande précision : scalpel ultrasonique (Cavitron), neuro-navigation, évaluation endoscopique, imagerie per op (TDM/IRM) - La biologie qui promet, dans un avenir assez proche, de connaitre la signature biologique d un individu, et d adapter ainsi des soins personnalisés. - L utilisation des expandeurs, qui permettent, lors des radiothérapies, de repousser les tissus sains et d éviter de les irradier. Des poches gonflées avec du sérum physiologiques mettent à jour les tumeurs en écartant les autres organes, pour faciliter le travail des radiothérapeutes. 3
4 + La radiothérapie : élément important du traitement du cancer Chirurgie + chimiothérapie + radiothérapie reste le triptyque idéal pour le traitement du cancer. Pourtant, le traitement par rayons, a connu une période difficile. Les rayons ont en effet leur propre toxicité et leurs propres risques. Les spécialistes se sont rendu compte qu on ne peut pas faire la même radiothérapie chez l enfant que chez l adulte. Les rayons peuvent provoquer des retards énormes dans le développement de l enfant (troubles de croissance, retards psychologiques et risques de second cancer). C est là que le radiothérapeute joue un grand rôle dans le dosage des rayons. Chez l enfant, la tolérance est nettement inférieure que chez l adulte. Et particulièrement chez la plupart des organes voisins de la tumeur. Les croissances de ces organes peuvent être stoppées. La sensibilité la plus importante se retrouve chez les tissus osseux (os, cartilages de croissance) et les tissus mous (muscles). Plus d un enfant sur 10 risque de faire un 2 nd cancer dans les 15 ans qui suivent à l endroit où il a reçu de la radiothérapie. Exemples de différentes formes de troubles de développement après une radiothérapie chez l enfant. 4
5 La photo montre bien la sensibilité des os des enfants : la colonne vertébrale a reçu une dose d irradiation, qui n était pas prévue. Résultat : colonne vertébrale tordue avec une scoliose importante. Les conséquences des radiothérapies sont très visibles : os déformés, retard dans le développement, atteinte des matières blanches dans le cerveau Mais attention à ne pas accuser la radiothérapie de toutes les séquelles liées au traitement contre le cancer. La chimiothérapie, qui est un traitement lourd, a ses propres séquelles. Elle augmente le risque de leucémie (dans les 5 ans qui suivent), elle provoque des toxicités cardiaques, des problèmes de stérilité, de fibrose pulmonaire, des complications au niveau des reins ou encore de l audition. + De nombreux progrès en radiothérapie Le niveau d exigence s est énormément élevé en radiothérapie, et seuls les centres les plus performants sont aujourd hui actifs, avec des experts reconnus et des contrôles fréquents. Cette hausse du niveau s est faite grâce à une mise en commun des connaissances et un contrôle de qualité drastique. Plusieurs évolutions majeures sont à souligner : - Les doses de rayons sont moins fortes, grâce au complément de la chimiothérapie. Les doses tournent autour de 25 gray aujourd hui, contre 35 gray dans les années 90. Le fractionnage en petite dose est mieux supporté et moins toxique. Pour administrer 60 gray, le traitement peut être divisé en 60 rayons de 1 gray. Cette technique a toutefois de lourdes contraintes d organisation. - De nouveaux appareils permettent d épargner au maximum les tissus sains et de donner la dose dans un endroit bien précis. Il s agit de tomothérapie, qui a permis de grand progrès. - La curiethérapie permet l implantation d un matériel radioactif dans la tumeur. De grosses doses de rayon sont envoyées directement au contact de la tumeur grâce à un fil radioactif. 5
6 - Le Cyberknife, robot inspiré de l industrie automobile appliqué à la médecine, qui comporte un petit accélérateur de particules, et permet de cibler la tumeur dans n importe quelles position dans l espace. Le Cyberknife dépose des centaines de mini-faisceaux sur la zone à traiter. + La dernière grande évolution : le changement de rayonnements Les rayons X (photons) découverts en 1895 sont toujours les seuls rayons employés en radiothérapie. Depuis quelques années, des rayonnements différents sont efficaces pour traiter les tumeurs : ce sont les protons : des particules, des grains de matière et non plus des rayonnements électromagnétiques. L inconvénient des photons est de traverser les tissus de part en part. Ils ressortent de l autre côté de la partie traitée, et arrosent forcément les tissus devant, derrière la tumeur et un peu sur les côtés. La particularité des protons, particules lourdes chargées positivement, est de ne pas traverser de part en part. Les protons déposent leur dose a une certaine profondeur : très peu avant et pas du tout après. Ces rayonnements se concentrent sur la tumeur. Cette nouvelle forme de traitement très performante offre des perspectives considérables.. 6
7 Le matériel a beaucoup progressé. Nous sommes passés en quelques décennies à des machines pesant des milliers de tonnes à quelques centaines. Ces équipements se chiffrent toutefois à plusieurs dizaines de millions d euros et restent limités aux pays en pointe sur ces questions. Le traitement par proton peut être couplé de manière beaucoup plus efficace avec une chimiothérapie. Il est même possible de procéder à des ré-irradiations, c est-à-dire taper deux fois au même endroit avec les rayons. Le risque de deuxième cancer s est avéré être nettement inférieur avec le traitement par protons qu avec un traitement par photons. Les premiers résultats sont extrêmement encourageants. Il manque toutefois des publications. + Avec le site de Caen : la France se place à la pointe dans le traitement contre le cancer Le projet ARCHADE, Advanced Resource Center for Hadrontherapie in Europe, est un pôle d excellence dans la lutte contre le cancer, qui se situe dans une région Normande au patrimoine exceptionnel et à la pointe des savoirs en technologie nucléaire. Ouverture prévue en
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