RAPPORT D'ENQUÊTE D'ACCIDENT DIRECTION RÉGIONALE MAURICIE-BOIS-FRANCS

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1 EN RAPPORT D'ENQUÊTE D'ACCIDENT DIRECTION RÉGIONALE MAURICIE-BOIS-FRANCS ACCIDENT MORTEL SURVENU À DEUX POMPIERS DE LA VILLE DE SHAWINIGAN LE 19 MARS 1990 LORS DE L'INCENDIE DE L'ÉDIFICE CARRIER DATE: 17 juin 1991 NO DE RAPPORT: NO DE DOSSIER: NO D'ÉTABLISSEMENT: PRÉPARÉ PAR: ANDRÉ MARCHAND Inspecteur

2 TABLE DES MATIÈRES Section I RENSEIGNEMENTS GÉNÉRAUX SUR L'ACCIDENT PAGE 1.1 Sommaire Date et heure de l'accident Employeur Lieu de l'accident Conséquence Accidentés Témoignages 4 Section II DESCRIPTION DU TRAVAIL HABITUEL 2.1 Description générale de l'activité Description détaillée de l'activité Description du poste de travail et 5 de l'environnement Section III ACCIDENT 3.1 Introduction Description de l'accident Cause de l'accident Facteurs reliés au milieu de travail 9 Section IV CONCLUSION ANNEXES Annexe A: Schémas Annexe B: Photos

3 SECTION 1 RENSEIGNEMENTS GÉNÉRAUX SUR L'ACCIDENT SOMMAIRE: Deux pompiers décèdent suite à une explosion en combattant un incendie DATE ET HEURE DE L'ACCIDENT: Le 19 mars 1990 à 11h EMPLOYEUR : Ville de Shawinigan Police et Incendie 145, 6ième Rue Shawinigan (Québec) G9N 1C LIEU DE L'ACCIDENT: Édifice Carrier 563 Place du Marché Shawinigan CONSÉQUENCE: Deux (2) pompiers décédés et cinq (5) autres blessés légèrement ACCIDENTÉS (DÉCÉDÉS) Nom et prénom: Date de naissance: Occupation: Ancienneté: Expérience: Syndicat: M.."A" Policier-pompier 2 ans 5 ans 8 mois dont 3 ans 8 mois à temps partiel Syndicat professionnel des policiers-pompiers de Shawinigan Nom et prénom: Date de naissance: Occupation: Expérience: Syndicat: M.."B" Pompier volontaire 12 ans 5 mois à temps partiel sur appel Syndicat des travailleurs pompiers de Shawinigan

4 1.7 - TÉMOIGNAGES: Ce rapport est rédigé suite: - Aux témoignages de: M. "C", capitaine, protection civile, Ville de Shawinigan M. "D", directeur, protection civile, Ville de Shawinigan M. "E", capitaine aux incendies, Ville de Shawinigan M. Claude Cazes, conseiller en sécurité civile, Ministère de la sécurité publique - Aux témoignages de: Plusieurs personnes lors de l'enquête publique du coroner Cyrille Delage le 18 mars À la consultation des rapports de Claude Cazes et Cyrille Delage

5 SECTION II DESCRIPTION DU TRAVAIL HABITUEL DESCRIPTION GÉNÉRALE DE L'ACTIVITÉ Pour assurer la sécurité du public et la protection des biens sur son territoire, la Ville de Shawinigan est dotée d'un service de police et incendie DESCRIPTION DÉTAILLÉE DE L'ACTIVITÉ Le service d'incendie compte 38 policiers-pompiers et 10 pompiers volontaires qui ont tous au minimum la formation en sécuritéincendie des blocs "A" et "B". La majorité d'entre eux possède également celle des blocs "C" et "D" ou l'équivalence. De plus, le service d'incendie possède des ententes de service avec les villes et villages avoisinants. Pour exécuter leurs tâches, les pompiers disposent de: - 3 camions-pompes - 1 camion échelle - 1 camion élévateur - 1 unité d'urgence Chaque relève (quart de travail) est composée de 5 policierspompiers qui assurent la sécurité sur le territoire de la ville. De 14h00 à 23h00 les relèves se chevauchent; on compte donc sur dix (10) policiers-pompiers durant ces heures DESCRIPTION DU POSTE DE TRAVAIL ET DE L'ENVIRONNEMENT Le 19 mars 1990 à 11h14, le service d'incendie de la Ville de Shawinigan reçoit un appel téléphonique de Mme Thérèse Houle de l'édifice Carrier qui signale un incendie dans l'immeuble.

6 La façade de cet immeuble est située au 563 Place du Marché à Shawinigan. Du côté gauche et à l'arrière on retrouve l'hôtel Shawinigan qui est sensiblement de même hauteur. Un passage d'environ 3 mètres sépare les deux (2) bâtisses. Du côté droit on retrouve la ruelle de la 6 ième Rue (voir annexe A: schéma # 1 localisation de l'édifice Carrier). Les dimensions de l'édifice Carrier sont d'environ 31 mètres de façade par 29 mètres de profondeur. Il possède un sous-sol surmonté de quatre (4) étages pour une hauteur totale de 11.5 mètres. Les murs extérieurs sont fabriqués de blocs de béton recouverts de briques. Au sous-sol, on retrouve des panneaux électriques, un réservoir d'huile, une fournaise, une aire d'entreposage, etc. Au rez-de-chaussée, ce sont des commerces et une aire d'entreposage de véhicules. Les 2 ième, 3 ième et 4 ième étages sont divisés en petits logements (48 au total). On accède aux étages supérieurs par un escalier intérieur situé sur la façade de la bâtisse. Un escalier intérieur est également aménagé au coin arrière droit de la bâtisse. De plus à l'arrière au 2 ième plancher, une porte d'issue donne sur un balcon extérieur muni d'un escalier qui se rend au sol (voir annexe "A": schéma # 2, aménagement du 2 ième étage). Cet immeuble avait déjà subi plusieurs transformations dans le passé, dont entre autres, l'ajout de l'étage supérieur en 1950, au-dessus de l'ancienne couverture de goudron du 3 ième étage, laissant ainsi un vide d'environ un mètre de haut sur toute la surface de l'immeuble. Un vide similaire a été laissé entre le plafond du 4 ième étage et le toit de la bâtisse.

7 SECTION III ACCIDENT INTRODUCTION À 11h17, l'équipe de quatre (4) policiers-pompiers et un sergent arrivent sur les lieux avec deux (2) autos-pompes. Ils constatent que le feu est situé au 2 ième étage, vers le centre de la bâtisse. Des flammes sortent violemment par l'une des fenêtres qui donne sur le passage entre l'hôtel Shawinigan et la bâtisse (voir annexe "B" photo # 1). Le sergent déclenche aussitôt une alarme générale pour les policiers-pompiers. L'équipe déploie et connecte les boyaux d'incendie, s'occupe de l'évacuation de la bâtisse et effectue des sauvetages. Les capitaines "F" et "C" arrivent sur les lieux à 11h24. Constatant que l'incendie prenait de l'ampleur, le capitaine "C" demande aussitôt l'assistance des pompiers volontaires ainsi que de ceux de Grand-Mère. Un boyau de 4 centimètres est déjà introduit à l'intérieur du 2 ième étage pour essayer d'éteindre l'incendie qui fait rage dans l'appartement 8A. Un autre boyau est en service dans le passage entre les deux bâtisses pour protéger l'hôtel et refroidir le brasier par intervalles. Vers 11h35, trois autres pompiers arrivent sur les lieux avec les camions échelle et élévateur. Vers 11h43, on compte sur la présence de 18 pompiers, répartis comme suit: - 1 arrose toujours à l'intérieur du 2 ième ; - 2 terminent l'évacuation à l'intérieur; - 2 sont dans le passage entre l'hôtel et l'édifice Carrier, montés dans les escaliers de secours de l'hôtel et arrosent le brasier; - 2 autres dans ce même passage, installent un boyau de 6.5 centimètres de diamètre (ce sont les victimes M. "A" et M. "B" ); - 1 est au coin arrière droit de l'édifice; - 10 sont dans la rue à manoeuvrer les divers équipements.

8 3.2 - DESCRIPTION DE L'ACCIDENT À 11h43, une violente explosion se produit. Elle cause l'écrasement d'une partie des murs côté gauche et droit, ainsi que de la façade au niveau du 3 ième et 4 ième étages (voir annexe "B" photo # 2). Les pompiers "A" et "B" sont écrasés sous les débris de blocs de béton et de briques du mur de l'édifice. Quelques pompiers en face de l'édifice sont atteints. Deux jeunes hommes qui circulent dans la ruelle de la 6 ième Rue sont également écrasés. L'un d'eux décèdera trois jours plus tard. Avec ce nouvel apport en oxygène, suite à l'explosion, l'incendie prend beaucoup d'ampleur rayant l'édifice Carrier et détruisant une partie de l'hôtel Shawinigan (voir annexe "B" photo # 3). Dans cet incendie, la locataire de l'appartement 8A d'où originait le feu est également décédée ainsi que le locataire d'un autre appartement CAUSE DE L'ACCIDENT La présence d'espaces libres a permis l'accumulation de fumée dont les gaz ont explosé. En effet, la fumée contient des gaz très chauds et imbrûlés particulièrement du monoxyde de carbone et de l'hydrogène. Ces gaz sont produits par la pyrolyse de certains matériaux, tels que: bois de charpente, papier, fibres de carton, etc. La déflagration s'est produite lorsque ces gaz de pyrolyse situés à l'intérieur de leur plage d'inflammabilité au point de vue de leur concentration dans les espaces libres des murs et les vides laissés lors de la construction du 4 ième étage ont atteint ou dépassé leur température d'auto-inflammation. On appelle ce phénomène l'explosion de fumée.

9 3.4 - FACTEURS RELIÉS AU MILIEU DE TRAVAIL A) - Il a été révélé lors de l'enquête publique du coroner que le détecteur de fumée de l'appartement 8A s'est déclenché vers 10h40 et que l'appel a été reçu seulement à 11h14 à la caserne, soit un délai de 34 minutes. B) - L'intensité du brasier ainsi que la configuration intérieure de la bâtisse (subdivision en plusieurs logements) ont empêché l'approche des premiers intervenants du brasier et l'application d'eau. C) - L'évacuation et le sauvetage de 20 personnes présentes dans l'immeuble ont dû être effectués par les pompiers D) - La porte avant du rez-de-chaussée est demeurée ouverte pour l'intervention intérieure et l'évacuation, permettant un apport supplémentaire d'oxygène à l'incendie. E) - La localisation des bâtisses et l'origine du foyer d'incendie ont obligé les pompiers à travailler dans un espace restreint (passage) pour combattre l'incendie, ce qui donnait un angle d'arrosage peu efficace (angle élevé). Tous ces facteurs ont contribué à retarder les opérations de ventilation, permettant à l'incendie de progresser et aux gaz chauds imbrûlés de s'accumuler dans les murs et vides cachés de l'édifice, créant ainsi les conditions propices à l'explosion de fumée avec les conséquences que l'on connaît.

10 SECTION IV CONCLUSION L'explosion de fumée à l'origine du décès des deux pompiers a été causée par l'accumulation de celle-ci dans les espaces libres des murs et des entre-toits de l'édifice. Divers facteurs ont contribué à son accumulation en retardant les opérations de ventilation. Dans le cadre de cette enquête, il a été possible de constater que la Ville de Shawinigan mettait de l'avant les mesures de prévention suivantes: - création d'un poste de capitaine aux incendies - visites préventives dans les établissements et résidences - exercices d'intervention - élaboration de plans d'interventions précis pour les édifices spéciaux (hôpitaux, centres d'accueil, aréna, commerces, vieux édifices, etc..) - refonte des règlements d'urbanisme - implantation d'un code de prévention incendie pour la Ville L'ensemble de ces mesures constitue les principaux éléments du programme de prévention incendie, tout en assurant une plus grande sécurité lors des interventions des pompiers.