I.1. INTRODUCTION I.2. CLASSIFICATION DES PLASMAS. Etudes bibliographiques sur les décharges
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- Amélie Géraldine Papineau
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1 I.1. INTRODUCTION Le plasma est défini comme étant le quatrième état de la matière, en suivant les états «solide-liquide-gaz» et défini aussi comme étant un gaz partiellement ou totalement ionisé. Ce terme a été introduit pour la première fois pour expliquer un état de la matière contenant des espèces chargées positivement ou négativement, mais globalement neutre. Ceci peut être généré en fournissant de l énergie à un gaz, en appliquant par exemple un champ électrique intense conduisant à l ionisation du gaz. Cette dernière se fait par le transfert de l énergie cinétique des électrons aux molécules neutres du gaz, et dans ce cadre il existe deux types de collisions entre ces éléments : - les collisions élastiques, sont responsables de la conduction et de la diffusion de la chaleur. Elles conduisent essentiellement à un changement de trajectoire des particules et des transferts d énergie cinétique, sans modification des énergies internes. - les collisions inélastiques, sont responsables de changements au niveau de l énergie interne des molécules, de la nature des particules (ionisation, dissociation, attachement électronique, etc.), en fonction de l énergie cinétique des électrons. Ces collisions participent à la réactivité chimique des plasmas. Parmi les décharges électriques, on trouve les décharges couronne qui se développent entre deux électrodes dissymétriques (par exemple, pointe-plan) dans un milieu gazeux à champ non uniforme. Tout au long de sa propagation, la décharge électrique laisse derrière elle une traînée de plasma (canal ionisé), constituée d espèces neutres excitées ou non et d espèces chargées (électrons ou ions). Plusieurs études ont été menées sur ce type de décharge, pour expliquer les différents mécanismes mis en jeu lors de la formation, du développement et de la propagation de cette décharge. Au début du siècle, Townsend [1] donna une théorie pour l obtention d une décharge auto-entretenue. Cette théorie trouve sa limite à haute pression. Par la suite, à partir des années 1940, Loeb [2], Meek [3] et Raether [4], proposent un nouveau modèle de propagation de l avalanche électronique. I.2. CLASSIFICATION DES PLASMAS Il est possible de distinguer deux grandes catégories de plasma, selon la température et leurs différentes composantes : plasma thermique et non-thermique. Les plasmas thermiques sont caractérisés par une seule température de gaz Tg, les autres températures des électrons Te, 3
2 des ions Ti et des neutres TN étant proches, voire égale à celle de gaz. Ces plasmas froids thermiques sont donc généralement à l équilibre thermodynamique local (ETL). En revanche, cet équilibre thermodynamique est loin d être vérifié dans le cas des plasmas froids non thermiques qui nous intéressent dans le cadre de cette étude. Ces plasmas non thermiques sont naturellement caractérisés par plusieurs températures. La température des électrons Te est très grande devant celle de gaz Tg qui reste assez proche de la température ambiante, il y a également une température des ions qui peut être assez grande par rapport à celle du gaz surtout à basse pression ainsi qu une température propre aux états excitées notamment les états vibrationnels qui sont un réservoir d énergie souvent à l origine de la dynamique du gaz provoquée au sein de ces plasmas froids nonthermiques. Ce sont donc des plasmas en régime hors équilibre thermodynamique mais aussi chimique parce que la micro-réversibilité n est naturellement pas vérifiée lors des collisions inélastiques. On définit le degré d ionisation d un gaz αi, en connaissant la densité d électrons ne et la densité de neutres n 0 : Équation I-1 On parle de gaz faiblement ionisés lorsque α i 10-4 (principales interactions de type collisions électron-neutre) et de gaz partiellement voire fortement ionisés lorsque α i > 10-4 lorsque les interactions coulombiennes ne sont plus négligeables (collision électron-électron ou électron ion). Dans les plasmas froids hors équilibre, les électrons vont pouvoir acquérir des énergies suffisamment élevées pour induire des collisions inélastiques générant des radicaux, des ions et des espèces métastables. L énergie électrique est dans ce cas transformée en énergie chimique entrainant de l ionisation, de la dissociation et de l excitation des atomes et des molécules de notre milieu gazeux. I.3. LES SOURCES DE PLASMAS NON-THERMIQUES A LA PRESSION ATMOSPHERIQUE I.3.1. Faisceaux d électrons Dans ce genre de système, un faisceau d électrons monocinétiques de grande énergie (100 kev à 1 MeV) est injecté dans le gaz cible après avoir été généré dans une chambre sous très basse pression (<10-4 mbar). Les électrons primaires, qui sont généralement émis par une 4
3 cathode thermo-ionique, sont ensuite accélérés par un champ électrique intense de plusieurs centaines de kv/cm (voir Figure I-1). Figure I.1: Schéma d une installation à faisceau d électrons appliquée au traitement d effluents gazeux [5]. Les collisions provoquées par les électrons énergétiques sont la source de toute la chimie du système. Les électrons primaires injectés dans le gaz entrent en collisions inélastiques avec les molécules majoritaires et leur cèdent de l'énergie principalement à travers des processus d'ionisation, de dissociation et d'excitation. Les électrons au fur et à mesure de leur pénétration dans le milieu gazeux déposent leur énergie cinétique via les processus inélastiques. La formation d un plasma réactif s'arrête quand l'énergie des électrons devient inférieure aux plus bas seuils de collisions inélastiques des molécules du gaz. Dans ces conditions, le faisceau d'électrons énergétiques a la capacité de générer à la pression atmosphérique un grand volume de plasma réactif plutôt homogène. 5
4 L application des faisceaux d électrons énergétiques pour l élimination des effluents toxiques (NOx et SOx) contenus dans les gaz d échappement a été initiée notamment par la société EBARA au Japon [6], puis s est développé dans les années 80 en Allemagne et aux Etats-Unis (voir en particulier les travaux de B. Penetrante qui ont permit d étendre le champ d application à la destruction des composés volatils organiques (COV) [7]). L efficacité ou le rendement énergétique de ces pilotes industriels comparée à celle des décharges électriques n a pas fait l unanimité en raison des méthodes de mesure de l énergie injectée qui différent dans les deux cas. A titre d exemple, Penetrante soutient une plus grande efficacité des faisceaux d électrons [8] tandis que Mizuno accorde deux fois plus d efficacité a une décharge couronne pulsée [9]. Les autres méthodes consistent à créer les électrons énergétiques directement dans le gaz à dépolluer grâce à des décharges électriques. Les types de décharges testées pour la dépollution sont très nombreuses : les arcs électriques, les glidarcs [10], les torches a plasma, les décharges micro-ondes [11], ou encore les décharges couronne [12] et les décharges à barrières diélectriques [13], etc. I.3.2. Plasmas micro-ondes On appelle plasmas micro-ondes, les gaz ionisés par injection d'une puissance microonde. A l'inverse des décharges électriques, ces plasmas ne sont pas générés à l'aide d'électrodes, mais en utilisant des systèmes à cavité résonante, à guide d'onde ou à effet de surface, alimentés par un générateur d ondes électromagnétiques (magnétron ou surfatron). Les plasmas micro-ondes sont caractérisés par une bonne uniformité en volume ou en surface, et ils sont principalement utilisés à basse pression ou à pression réduite dans les procédés de traitement de surface comme la stérilisation [14], [15] ou le dépôt de couches minces, ou encore la gravure [16], [17]. Différents types de lampes [18] et de lasers UV [19], utilisent des molécules excimères produites par des décharges micro-ondes en mode pulsé ou continu. Ces plasmas sont également étudiés à haute pression pour des applications dans le domaine de l'analyse spectroscopique [20]. Finalement, les décharges les plus prometteuses, et de fait les plus couramment utilisées pour la dépollution, sont les décharges à barrière diélectriques et les décharges couronnes. 6
5 Figure I.2: Schéma d un dispositif expérimental utilisé pour la stérilisation [14]. I.4. DECHARGES ATMOSPHERIQUE La foudre est un ensemble de phénomènes physiques et électriques complexes qui se présente dans la nature sous différentes formes [21, 22,23] : I.4.1. Décharges nuage - sol Parmi toutes les formes de décharges atmosphériques, la décharge nuage - sol est la moins fréquente mais certainement la plus contraignante et la mieux étudiée. Elle représente à peu près le tiers [24, 25, 26,23] de la totalité des décharges atmosphériques que connaît le globe terrestre. Ce pourcentage est fonction des conditions météorologiques et physiques (humidité, température, localisation des charges dans le nuage,...), de l'altitude du nuage et enfin de la latitude. Elle se présente sous la forme d'une succession de décharges "nuage - sol - nuage" appelées coups de foudre. Ces derniers sont classés en deux groupes selon deux critères [25, 26,27] : -la polarité du canal ionisé : les coups de foudre sont dits positifs ou négatifs -le sens du traceur principal : les coups de foudre sont dits ascendants ou descendants. On définit ainsi quatre types de foudre comme indiqué à la (figure I.3) où v est la vitesse de propagation du canal ionisé et i le courant de foudre. Dans les régions tempérées, le type le plus fréquent est toutefois le coup de foudre négatif et descendant (80 à 90%). Les effets nuisibles de ces décharges touchent principalement les 7
6 réseaux de communications et de transports d'énergie, les équipements industriels à base d'électronique et le transport aérien. Figure I.3 : classification des coups de foudre [25] (a) : foudre ascendante positive (canal ionisé +, courant de foudre -) (b) : foudre ascendante négative (canal ionisé -, courant de foudre +) (c) : foudre descendante positive (canal ionisé +, courant de foudre +) (d) : foudre descendante négative (canal ionisé -, courant de foudre -) 8
7 I.4.2. Décharges intra - nuages Contrairement aux décharges nuage - sol, la décharge intra - nuage est de loin la plus fréquente mais la moins étudiée [23,28]. Elle se présente sous la forme d'une succession d'arcs électriques qui se tendent entre une ou plusieurs poches de charges opposées contenues dans un même nuage. En règle générale, ces arcs sont fortement ramifiés et se produisent à l'intérieur du nuage. Mais il arrive parfois qu'ils sortent du nuage pour y revenir en passant par l'extérieur, formant ainsi une espèce de pont très lumineux et visible de la terre. La durée de ces décharges est de l'ordre de plusieurs centaines de millisecondes et leurs effets sont plutôt minimes [28]. I.4.3. Décharges entre nuages Comme leur nom l indique, ces décharges se développent entre deux ou plusieurs nuages orageux différemment chargés se trouvant à une distance telle que l'ionisation de l'air qui les sépare devient possible. Elles se produisent généralement à de très grandes altitudes, et elles sont d'autant plus fréquentes que la densité de l'air est faible. Ces décharges inquiètent surtout les engins aéronautiques et les systèmes de transmissions par satellite [23,28]. I.4.4. Foudre en boule Il s'agit là de l'une des formes les plus rares et les plus spectaculaires de la foudre. Une boule de feu, lumineuse de quelques dizaines de centimètres de diamètre, qui se déplace librement et avec une vitesse vertigineuse du ciel vers la terre [28]. La foudre en boule est crainte surtout par les fermiers, en raison des incendies et des dégâts matériels qu'elle peut provoquer. I.4.5. Autres formes D'autres formes de décharges sont observées de temps à autre, comme les décharges nuages air [28], fréquentes dans les régions arides et en période de beau temps, ou encore les décharges chaudes, une forme très rare qui associe plusieurs types de décharges (les types 2 et 3) et qui se produisent à de très grandes altitudes, si bien qu'il est impossible d'entendre le tonnerre qui les accompagne, ou de les distinguer à l'œil nu. 9
8 I.5. INTRODUCTION AUX MECANISMES DE MAINTIEN DES DECHARGES ELECTRIQUES : MECANISME DE TOWNSEND DE MAINTIEN DE LA DECHARGE CONTINUE BASSE PRESSION Les premiers travaux menés sur les mécanismes d initiation de décharge dans le gaz sont dus à Townsend. Ils sont focalisés sur l étude de décharges obtenues entre deux électrodes planes soumises à une tension continue et disposées dans une enceinte sous une pression réduite de l ordre du torr. Le dispositif de Townsend, schématisé sur la (Figure I.4), a donné naissance à une des décharges les plus étudiées sur le plan académique [29, 30, 31,32] : la décharge continue basse pression. C est un exemple bien connu pour présenter certains phénomènes qui jouent un rôle clé dans l établissement et le maintien des décharges électriques à basse et haute pression. Si on applique une tension V entre les deux électrodes on obtient un champ Laplacien Ē qui est uniforme en l absence d ionisation et de construction de charges d espace. Figure I.4 : Configuration initiale du circuit électrique utilisé pour la réalisation et l étude des décharges électriques par Townsend. Le circuit est composé d une source de tension V, d une résistance variable R, qui permet de contrôler et de limiter le courant [29] Les décharges obtenues dans le dispositif de Townsend peuvent être analysées en examinant la courbe caractéristique V(I) qui lui est associée (Figure I.5). Quatre régimes [30,31] de décharges peuvent être obtenus dans ce type de systèmes (Figure I.5) : -Le premier régime : correspond aux décharges non autonomes. La décharge ne peut exister qu en présence d un moyen extérieur, souvent une source lumineuse, assurant la production d électrons primaires à la cathode par effet photoélectrique. 10
9 -Le second régime : correspond à ce que l on appelle les décharges de Townsend. Il est caractérisé par une croissance quasi-verticale du courant pour une valeur de tension appelée tension disruptive. Cette croissance correspond au passage d un régime où la multiplication des électrons est principalement gouvernée par l ionisation par impact d électrons sur les molécules du gaz à un régime où l essentiel de la multiplication est assurée par l augmentation du flux d électrons extraits par bombardement ionique de la cathode. Dans le régime de Townsend, la charge d espace générée par le plasma est faible et le champ électrique reste égal au champ Laplacien. - Le troisième : type de régimes de décharges, correspond aux décharges luminescentes. Dans le cas des basses pressions considérées, ces décharges sont également généralement entretenues par un mécanisme de type Townsend. La grande différence qu elles présentent avec les décharges dites de Townsend réside dans le fait que c est le champ de charge d espace et non pas le champ Laplacien qui gouverne la dynamique des espèces chargées. - Le quatrième : type de régime qui va nous intéresser dans l'étude des décharges haute pression est le régime d arc. Celui-ci est caractérisé par une très faible tension de maintien (quelques dizaines de volts), de fortes densités de courant et un échauffement important de la décharge dont la température peut facilement atteindre plusieurs milliers de Kelvin. Le maintien du régime d arc est également gouverné par des processus élémentaires à la cathode. Ces processus très complexes sont cependant différents de ceux rencontrés dans le cas des décharges luminescentes. On cite souvent des effets comme l effet thermo-ionique, l'émission de champ,, etc. Le maintien d un régime d arc impose également de fortes contraintes sur l'alimentation électrique qui doit pouvoir assurer la circulation de courants forts. 11
10 Figure I.5 : Caractéristiques tension-courant des différents régimes d'une décharge basse pression et d'une décharge couronne I.6. DECHARGES ELECTRIQUES A LA PRESSION ATMOSPHERIQUE Le plasma froid non thermique est créé à l aide d une décharge électrique hors équilibre établie entre deux électrodes par application d une tension (continue, alternative ou pulsée). Les électrons énergétiques sont créés lors de leur accélération par le champ électrique au sein même du milieu gazeux contrairement aux procédés à faisceaux d électrons, où les électrons énergétiques sont injectés dans le milieu à partir d une source externe. Lorsque l énergie gagnée par le champ est suffisante, ont lieu les collisions inélastiques qui forment le plasma réactif recherché. Comme à la pression atmosphérique la décharge électrique possède généralement une structure filamentaire (le régime diffus relève plutôt d une particularité de la source de tension ou de la composition du gaz ou encore de la nature du diélectrique dans le cas d une décharge DBD), le plasma est donc spatialement inhomogène (filament lumineux très fins de quelques dizaine de micromètres) tout en étant dans un régime transitoire de courte durée (quelques dizaines de nanosecondes). 12
11 Selon que la configuration des électrodes, les décharges électriques à la pression atmosphérique peuvent être de type couronne (lorsque l électrode portée à la haute tension a une structure incurvée) ou DBD (lorsque une ou les deux électrodes sont recouvertes d un diélectrique). I.6.1. Décharge à barrière diélectrique Les décharges à barrières diélectriques, sont caractérisées par la présence d au moins une couche de matériau isolant en contact avec la décharge (Figure I.6), ce qui nécessite l emploi d une alimentation alternative ou pulsée. Dans ce type de décharge, le passage à l arc électrique est empêché grâce à un isolant placé entre les électrodes. L accumulation des particules chargées sur la surface du diélectrique, au moment de l arrivée des filaments de décharge sur le diélectrique, génère un champ électrique qui s oppose au champ externe dû à la tension appliquée entre les électrodes. Au fur et à mesure que les charges électriques se déposent sur le diélectrique, le champ électrique vu par le gaz diminue, ce qui induit à l extinction de la décharge avant que les processus de thermalisation du gaz dans le canal de décharge n aient eu lieu. Figure I.6: Configurations existantes de décharges à barrière diélectrique [33]. Dans l air à pression atmosphérique avec une distance inter-électrodes de quelques millimètres, le plasma est constitué d une succession de filaments très fins (~ 100 μm) qui traverse l espace gazeux sur des temps très courts (~ 10ns). On utilise généralement une tension alternative avec une fréquence de répétition de quelques khz pour générer un plasma réactif assez riche en espèces actives. Mais pour une source d espèces actives encore plus efficace, on peut aussi utiliser des sources pulsées en particulier mono-polaires (tension uniquement positive par exemple) où l inversion des charges se produit non pas lorsqu on passe de l alternance positive à l alternance négative 13
12 comme dans les DBD classiques mais lorsqu on passe de la partie montante à la partie descendante de l impulsion de tension [34]. De plus dans le cas des configurations d électrodes classiques (voir la Figure I.7) ci dessus), la décharge se développe principalement dans le volume gazeux. Il existe d autres géométries d électrodes où on peut être en présence d une DBD de surface lorsque les deux électrodes sont en contact avec la même barrière diélectrique car le plasma se développe le long de la surface isolante. Ce type de géométrie peut être notamment utilisé pour les actionneurs plasmas [35]. Figure I.7: géométrie de DBD générant de décharge de surface [36]. I.6.2. Décharges couronne Les décharges couronne sont caractérisées par une dissymétrie géométrique des électrodes. Les configurations courantes utilisées dans les expériences sont de type pointe-plan, fil-plan et fil-cylindre (Figure I.8). Lors de l application d une haute tension au niveau de l électrode ayant le plus petit rayon de courbure, le champ électrique réduit produit dans l espace interélectrodes est fortement inhomogène. Il a une valeur élevée au voisinage de cette électrode puis décroit rapidement au fur et à mesure qu on s approche de la cathode plane. A proximité de la pointe anodique, l amplitude importante du champ électrique réduit permet de générer des électrons avec des énergies suffisantes pour ioniser le gaz. C est une zone où se développent les avalanches électroniques ce qui permet rapidement l accumulation d une charge d espace à l origine de la propagation de la décharge. Naturellement dans cette zone proche de la pointe les processus d ionisation prédominent sur les processus d attachement 14
13 des électrons. En revanche, si on s éloigne de la pointe, le champ électrique devient plus faible. L avantage de la décharge couronne est de pouvoir fonctionner avec tous les types d alimentation électrique. Figure I.8: Différentes configurations de décharge couronne. La difficulté principale rencontrée avec ce type de décharge est la transition à l arc électrique [37]. Cette transition est accompagnée par une forte augmentation de courant circulant dans la décharge et une hausse de la température de gaz et par conséquent le plasma généré est proche de l équilibre thermodynamique et la puissance injectée dans le gaz est majoritairement dissipée par effet de Joule. Dans la majorité des applications utilisant des décharges couronne, on cherche à éviter le passage à l arc pour ne pas détériorer les électrodes et pour optimiser les processus de formation d espèces actives en fonction de l énergie injectée. La Figure I.9, issue de la référence [38] montre les différentes phases des décharges couronne positive et négative en partant des premières avalanches primaires jusqu au «spark» (étincelle ou claquage). Il est important de souligner que les processus de surface jouent un rôle essentiel dans le développement et la propagation d une décharge couronne négative alors que ce sont les processus ayant lieu dans le gaz qui sont pour l essentiel à l origine du développement et la propagation de la décharge positive qui fait l objet du présent travail. 15
14 Figure I.9: Schéma de différents types de décharges [38]. 16
15 I.7. MECANISME DE FORMATION DES DECHARGES COURONNE I.7.1. Sources des électrons germes La décharge électrique s établissant dans un espace gazeux soumis à un potentiel, nécessite la présence de charges libres dans le milieu : électrons germes. Ces électrons libres présents dans le milieu gazeux, gagneront de l énergie sous l action du champ électrique externe et en perdent sous l effet des collisions élastiques et inélastiques avec les particules présentes dans le gaz. Nous allons maintenant donner quelques indications sur les sources possibles d électrons germes, nécessaires à l amorçage de notre décharge. I Rayonnement cosmiques ou radioactivité naturelle Sous l effet de l irradiation par rayonnements cosmiques ou par les processus de radioactivité naturelle, 7 à 20 électrons par cm3/sec sont produits dans l air à la pression atmosphérique [39]. I Détachement d électrons des ions négatifs C est le processus principal de production d électrons à partir d ions négatifs. Ces derniers peuvent préexister dans l espace inter-électrodes, c est le cas de la présence des impuretés telles que O 2 et les pourvoyeurs principaux en électrons germes seront les ions - négatifs O 2 liés aux impuretés [40], [41]. I Contribution de la cathode Dans le cas d une configuration pointe positive-plan négatif, la cathode est généralement des cas, une source d électrons germes peu efficace, parce qu elle est d une part soumise à un champ électrique faible et d autre part située à une distance importante de la zone de décharge. I.7.2. Le mécanisme de streamer Cette partie décrit les différentes phases constituant un streamer positif dans le cas d une décharge couronne à pression atmosphérique. Dans une décharge couronne, la haute tension est appliquée au niveau de l électrode de faible rayon de courbure et si la polarité de la haute tension est positive, le streamer se propage en direction de la cathode et on parle de streamer positif. Ce dernier est une onde d ionisation se propageant de l anode vers la cathode c'est-à-dire dans le sens inverse du mouvement des électrons soumis au champ laplacien. 17
16 I L avalanche électronique L amorçage de la décharge commence par une série d avalanches électroniques au voisinage de la pointe. La condition d existence d une décharge est la présence de particules chargées dans le gaz et l application d une tension suffisamment élevée entre les électrodes. Ces particules chargées ne sont que des électrons germes présents naturellement dans le gaz et qui vont être accélérés par le champ extérieur appliqué en direction de l anode. Ils entrent en collision avec les molécules de gaz (pression atmosphérique, la densité est de 2.4 x m -3 ), et perdent de l énergie suite aux collisions inélastiques (excitation, dissociation et ionisation du gaz). Chaque collision ionisante permet la formation d un nouvel électron qui est accéléré à son tour et vient impacter les molécules. La répétition de ce processus permet une croissance exponentielle du nombre d électrons et d ions positifs. C est le phénomène de l avalanche électronique (Figure I.10-a). Les électrons ayant une masse beaucoup plus faible que les molécules du gaz, ils sont beaucoup plus mobiles que les ions créés dans les avalanches et en raison de cette différence de masse et sous un champ extérieur, les électrons vont dériver beaucoup plus vite que les ions. Les charges positives et négatives vont se séparer en créant un champ induit opposé au champ extérieur (Figure I.10-b). Pour qu une avalanche électronique soit possible il faut que l électron puisse acquérir grâce au champ appliqué, une énergie au moins égale à l énergie d ionisation du gaz sur la longueur de son libre parcours moyen (distance moyenne sur laquelle un électron ne rencontre pas de molécule). Lorsque le nombre de paires électrons-ions formé au voisinage de l anode atteint une taille critique (environ 10 8 valeur définie par des critères donnés dans la littérature comme le critère de Raether [4] ou de Meek [3]), le champ induit devient du même ordre de grandeur que le champ appliqué. Dans ces conditions, la zone de séparation de charge va pouvoir se propager vers l anode (c'est-à-dire dans le sens inverse du sens naturel du déplacement des électrons dans le champ géométrique appliqué), créant ainsi une onde d ionisation, appelée streamer. I Propagation du streamer La tête d avalanche électronique et le nuage d ions positifs forment une sorte de dipôle électrique. Les lignes de champ de ce dipôle renforcent localement le champ électrique appliqué au voisinage immédiat de la tête (Figure I.10-c) et devient supérieur au champ électrique externe. Ce champ élevé situé au niveau du front de la décharge permet de nouvelles avalanches électroniques. S il existe des électrons germes dans cette région du front 18
17 de la décharge, le streamer peut donc se propager par l effet de son propre champ de charge d espace. L apport de nouveaux électrons germes dans cette zone de champ fort situé sur le front du streamer est dû aux processus de photo-ionisation. En effet, pendant les avalanches électroniques primaires, les collisions inélastiques engendrent, des processus d excitation des molécules neutres de leur état fondamental vers des états radiatifs. La désexcitation radiative de ces états vers des niveaux d énergie inférieure conduit à l émission de photons énergétiques. Cependant, la photo-ionisation du gaz requiert des photons dont l énergie correspond au potentiel d ionisation des molécules entrant dans la composition du milieu gazeux. Si les probabilités de transition sont suffisamment élevées, les électrons germes sont ainsi formés par photo-ionisation. Ces électrons sont ensuite accélérés par le champ de charge d espace important situé sur le front de la décharge déclenchant ainsi de nouvelles avalanches électroniques. Chaque avalanche laisse dans son sillage une nouvelle population d ions positifs, qui va renforcer la charge d espace, et des espèces excitées radiatives susceptibles d émettre des photons ionisants. Dans l air sec, le mécanisme de photo-ionisation le plus probable est la photo-ionisation de l oxygène moléculaire (potentiel d ionisation : ev) par des photons émis par certains états excités de N2 [42]. Dans le cas de gaz purs, par exemple dans l azote seul, le mécanisme de photoionisation directe n est pas envisageable pour expliquer la création de nouveaux électrons germes. Il faut alors considérer la présence d impuretés dont le seuil d ionisation est inférieur à celui de gaz majoritaire. En général, les gaz de laboratoire, même à un degré de pureté très élevé, contiennent toujours des traces résiduelles de O2 ou H2O. La Figure I.10, représente un schéma montrant le développement d un streamer. La tête du streamer émet de la lumière qui aurait suffisamment d énergie pour ioniser des molécules du gaz situées devant le streamer et produire les électrons nécessaires à la formation et à la propagation de la charge d espace en direction de la cathode. Entre l anode et la tête de streamer, un canal ionisé est formé dans le sillage du streamer au cours de la propagation. Ce canal composé d un plasma réactif (électrons, ions, espèces radicalaires et espèces excitées) est quasi-neutre électriquement. Le champ électrique qui règne dans le canal (de l ordre de 4.5 kv.cm -1 dans l air à pression atmosphérique) est beaucoup plus faible que le champ de la charge d espace sur le front du streamer. 19
18 Figure I.10: Schématisation des étapes de formation d un streamer [36] 20
19 I L arrivée à la cathode Sur la Figure I.11, est représenté le schéma montrant le développement d un streamer avec les processus ayant lieu devant le streamer et le canal ionisé, tandis que, la Figure I-12, représenté schématiquement les différents mécanismes de formation et de propagation d un streamer positif de la pointe vers le plan (phase a, b et c) jusqu au passage à l arc. Lorsque le streamer arrive à proximité de la cathode (phase d), la différence de potentiel entre la charge d espace et l électrode est très élevée et la zone est soumise à un champ électrique très intense, qui induit une ionisation importante du milieu. La cathode est alors soumise à un bombardement des différentes espèces créées par avalanche électronique et l émission secondaire d électrons sera principalement due à l effet photoélectrique et au bombardement ionique. Les électrons extraits de la cathode sont multipliés dans la zone de fort champ et une onde d ionisation remontant de la cathode vers l anode le long du canal ionisé, rééquilibrant ainsi le potentiel entre les électrodes. Ces derniers se retrouvent ainsi en jonction par l intermédiaire du canal ionisé de micro-décharge. Dans la phase (e) et (f), c est un nouveau canal qui apparait au niveau de l anode et qui se propage en direction de la cathode à une vitesse plus lente que le streamer précédent (primary streamer). Cette nouvelle décharge, appelé secondary streamer, [43]. 21
20 Figure I.11: Schéma montrant le développement d un streamer avec les processus ayant lieu devant le streamer et le canal ionisé laissé dans son sillage [44]. Figure I.12: Illustration des différentes phases de propagation d un streamer positif [45]. 22
21 I Passage à l arc électrique Le streamer laisse derrière lui un canal conducteur formant un pont entre les deux électrodes lorsqu il atteint le plan. Le champ réduit E/N (E est le champ électrique (en V.cm -1 ) et N la densité du gaz (en cm -3 )) est faible dans le canal, l attachement est dominant en comparaison de l ionisation ce qui provoque une diminution du courant. Si on augmente la tension un peu plus, les électrons résiduels non combinés gagnent de l énergie et peuvent ioniser les neutres dans le canal de micro-décharge et par conséquent, la densité en électrons et le courant augmentent (Figure I.13). Selon Marode et al. ([46], [47]), ce processus conduit à un échauffement progressif des espèces lourdes du gaz et une élévation de la pression ce qui provoque une diminution de la densité des neutres dans le canal ionisé et par conséquent le champ réduit E/N s accroît (Figure I.12-g). Si la valeur de E/N dépasse le champ critique (champ pour lequel les coefficients d ionisation α et d attachement électroniques η sont égaux), une nouvelle phase d ionisation massive peut se produire, menant à la transition vers l arc (Figure I.12-h). Au-delà d une densité électronique de cm -3, les interactions coulombiennes ne peuvent plus être négligées. Elles conduisent à un échauffement du gaz jusqu à des températures pouvant atteindre 10 4 K. A cette température l équilibre thermodynamique local est atteint et le plasma reliant les deux électrodes est un plasma thermique. 23
22 Figure I-13: Développement du primary streamer à l arc [46], [47]. I.8. CONCLUSION Ce premier chapitre a fait l objet d une étude bibliographique sur les plasmas en général, pour bien situer en particulier les plasmas non-thermiques générés par décharge couronne qui sont ensuite étudiés dans ce travail. Au cours ce chapitre, nous avons d abord évoqué les deux catégories classiques des plasmas selon leur degré de déséquilibre thermique et chimique (plasma thermique et plasma non-thermique). La deuxième catégorie de plasmas étudiés dans ce mémoire est des plasmas froids réactifs hors équilibre caractérisés notamment par des températures électroniques très élevées par rapport à celle du gaz qui reste proche de la température ambiante. Ensuite, nous avons décrit plusieurs types de sources capables de générer un plasma froid non-thermique à différentes pressions en insistant plus particulièrement pour les sources plasmas à la pression atmosphérique (cas des décharges DBD et couronne). Comme les décharges couronne que nous étudions sont des décharges filamentaires de types streamer, nous avons aussi décrit les différents mécanismes à l origine de la formation et de la propagation de ce type de décharge. 24
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