LA GARDE CÔTIÈRE CANADIENNE EN PERSPECTIVE

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1 LA GARDE CÔTIÈRE CANADIENNE EN PERSPECTIVE DOCUMENT PRÉPARÉ POUR ACTION CANADA James R. Mitchell Août 2013 BUILDING LEADERSHIP FOR CANADA S FUTURE

2 DISCLAIMER: The views, opinions, positions or strategies expressed herein are those of the author alone, and do not necessarily reflect the views, opinions, positions or strategies of Action Canada, Action Canada Foundation, or the Government of Canada. Action Canada, Action Canada Foundation, and the Government of Canada make no representations as to accuracy, completeness, non-infringement, reliability or currency of any information in this paper and will not be liable for any errors or omissions in this information or any losses, injuries, or damages arising from its display, use or publication.

3 INTRODUCTION Le document Ce document a été préparé pour le programme 2013 d Action Canada, pour mettre en contexte leur travail dans le Nord et, plus spécifiquement, en préparation à leur traversée du passage du Nord-Ouest à bord du Louis St-Laurent, brise-glace de la Garde côtière. Le but est de fournir un contexte et une perspective aux Fellows qui s efforcent de comprendre les enjeux et les défis auxquels sont actuellement confrontées les populations du Nord, y compris le rôle essentiel du gouvernement Canadien dans le Nord, avec des organismes comme la Garde côtière canadienne (GCC). Nous nous intéressons plus particulièrement ici à la Garde côtière, une institution chère aux Canadiens mais mal comprise. Qu ils vivent à Halifax, Vancouver ou Saskatoon, les gens pensent généralement qu il s agit d un organisme qui s occupe principalement de fournir des services essentiels de recherche et sauvetage aux navigateurs sur les trois côtes et sur les Grands Lacs. Pourtant, la Garde côtière canadienne est beaucoup plus que ça et c est ce que nous essayons de montrer ici. De la même façon, certains Canadiens lui attribuent des fonctions et des capacités qu elle n a pas. Influencés peut-être par leur idée de la U.S. Coast Guard, ils voient la GCC comme un service quasi-militaire patrouillant le long de nos côtes et y «montant la garde». Cependant, même si sa contribution à la sécurité du Canada a augmenté au cours des dernières années, la Garde côtière canadienne demeure essentiellement ce qu elle a toujours été un service civil, non armé, avec un mandat pluriel qui va bien au-delà de la recherche et du sauvetage ou surveillance des pêches 1. Les questions de politiques concernant actuellement la Garde côtière ne portent pas sur la nécessité de son existence ou sur la façon dont elle devrait fonctionner mais plutôt sur l équipement et les ressources que devrait avoir cette organisation nationale essentielle pour pouvoir répondre à la liste de plus longues d attentes et d exigences, tant publiques que privées, à son égard. Ces questions sont tout particulièrement pertinentes si l on pense au rôle de la Garde côtière dans le Nord. Jusque très récemment, les gouvernements fédéraux successifs ont eu tendance à ignorer l Arctique et ceux qui vivent au Nord du 60 e parallèle. De nos jours, du fait du réchauffement climatique, les pressions pour l exploitation de l énergie et des ressources et la révolution informationnelle qui a fait entrer le reste du monde dans les collectivités du Nord, il n est plus possible de les ignorer ou d opter pour le laissez-faire. Le Nord est enfin devenu une priorité pour le gouvernement du Canada. Le Nord est important pour le Canada et ses populations ont des besoins et des attentes dont doivent tenir compte leurs gouvernements. La Garde côtière canadienne est un outil essentiel pour l exercice des responsabilités fédérales dans le Nord et pour s acquitter de ses responsabilités envers les gens qui y vivent. LA GARDE CÔTIÈRE CANADIENNE (GCC) De nos jours, la Garde côtière est une institution de bonne taille, avec environ employés et un budget de fonctionnement annuel autour de 470 millions de dollars. Suite à une réorganisation récente, l organisme est à présent en trois régions géographiques Atlantique, centre et Arctique, et Pacifique avec un quartier général à Ottawa et environ 20 bases et bases secondaires, ainsi que 30 stations de la GGC à travers le Canada (plus de 120 points de service au total). Une partie des services de recherche et sauvetage sont offerts par les employés de la Garde côtière auxiliaire, nom sous lequel sont regroupées les organisations bénévoles de recherche et sauvetage situées dans des collectivités des côtes Est et Ouest. 1 Il est généralement vrai qu elle est «non armée», en dehors du fait qu elle compte deux navires armés, le Cygnus et le Cowley, qui appuient les activités de surveillance des pêches. Ils soutiennent les agents des pêches avec des armes personnelles et des mitrailleuses de 0.50 pouvant être montées sur tous les navires. Les équipages sont choisis et formés spécialement pour cette fonction. La Garde côtière canadienne en perspective 3

4 La Garde côtière a une flotte de 116 navires, grands et petits, (en date de juillet 2013), y compris deux grands brise-glaces pour l Arctique (le Louis St-Laurent et le Terry Fox), quatre brise-glaces de taille moyenne, plusieurs navires de recherche scientifique de grande ou de moyenne taille et plus de 80 petits navires remplissant des fonctions multiples, de l entretien des balises à la surveillance des pêches en passant par la recherche et le sauvetage. Il est important de noter que, étant un service civil, la Garde côtière fonctionne selon les mêmes règles et essentiellement avec le même régime des relations de travail que ceux qui régissent les navires côtiers et de haute mer du secteur privé. Les officiers de navire doivent avoir les mêmes certifications professionnelles que leurs homologues du secteur privé. Aujourd hui, le rôle et la présence de la Gare côtière changent, comme il se doit, en fonction de l évolution de la situation nationale, des nouvelles orientations stratégiques et du changement climatique. Avec le recul de l Arctique et l allongement de la saison de pêche qui commence plus tôt au printemps et se termine plus tard à l automne, la demande pour les services de brise-glace est plus grande que jamais. Les nouveaux débouchés en termes d exploitation des ressources amènent de nouvelles exigences pour avoir des voies de navigation sûres et pour des services maritimes connexes allant du déglaçage aux aides à la navigation, sans oublier les relevés hydrographiques, les interventions hydrographiques et bien sûr la recherche et le sauvetage maritimes. Pour répondre à ces nouvelles demandes, en particulier dans le Nord, il faut continuer à investir dans les biens d équipement (grands et moyens brise-glaces et autres navires pouvant opérer dans les eaux envahies par les glaces), dans une présence physique et bien sûr dans le personnel. Pour répondre aux attentes actuelles des Canadiens, il faut du personnel spécialisé officiers de navire, mécaniciens, matelots qualifiés et autres hommes et femmes qualifiés qui exploitent et entretiennent la flotte et fournissent des services maritimes sophistiqués. Le gouvernement du Canada a reconnu la nécessité d investir de façon substantielle dans la Garde côtière canadienne. Depuis le Budget de 2005, le gouvernement a affecté 6,8 milliards de dollars au renouvellement de la flotte de la Garde côtière. Cela inclura la construction d un brise-glace de classe polaire (le NGCC John G. Diefenbaker) et de quatre brise-glaces de taille moyenne au cours des cinq à huit prochaines années. Ces navires remplaceront certains des navires actuels (et en particulier le Louis St-Laurent) et répondront également aux nouveaux besoins, tant dans le Golf du Saint-Laurent que dans le Nord. Mais, pour que la Garde côtière fasse le travail attendu d elle par le gouvernement et par les Canadiens, il faudra continuer à investir dans des bateaux. Et il faudra apporter certaines modifications aux services et à la façon dont ils sont financés si l on veut que la Garde côtière continue de répondre aux besoins de ses clients à l avenir. La Garde côtière canadienne est une institution nationale avec derrière elle une histoire fascinante de service à son pays qui remonte au 18 e siècle. Comme toutes les entreprises maritimes, elle est, de nature, résistante au changement. Mais elle sait que, si elle veut s acquitter de ses responsabilités envers les Canadiens à l avenir, elle doit continuer à évoluer pour être une organisation de service moderne. LES ORIGINES DE LA GARDE CÔTIÈRE Comprendre l histoire de la Garde côtière est important pour comprendre son rôle et son fonctionnement de nos jours. Ceux-ci remontent aux premières colonies européennes dans ce pays. Ce sont les richesses associées à la pêche à la morue qui ont attiré des pêcheurs espagnols, français et anglais à Terre-Neuve et dans le Golf du St. Laurent au 15 e siècle (peut-être même avant). Si la présence coloniale de la Grande- Bretagne et de la France ont évolué avec le temps, les réalités des colonies en Nouvelle-France, à Terre- Neuve et en Nouvelle-Écosse aux 17 e et 18 e siècles ont été accompagnées d un besoin, éventuellement, d aides à la navigation (les premiers phares et bateaux-feux), de services de sauvetage et de surveillance 4 La Garde côtière canadienne en perspective

5 des pêches autant d éléments qui demeurent essentiels dans la mission de la GCC de nos jours 2. Après 1763, puis avec l expansion des colonies dans le Haut-Canada, le besoin de services similaires s est fait sentir sur les Grands Lacs puis, plus tard, dans les eaux autour des colonies de la Couronne de l Île de Vancouver et, encore plus tard, de Colombie-Britannique. Certains de ces services (comme le dragage et quelques aides à la navigation) étaient fournis par le gouvernement et d autres, comme le sauvetage, étaient offerts par des organisations bénévoles qui existent encore aujourd hui, comme le Royal Canadian Marine Search and Rescue. Si les diverses tâches actuelles de la GCC remontent presque au début des colonies au Canada, la Garde côtière en tant qu organisation s inscrit dans la lignée de fonctions et de services offerts pendant presque toute notre histoire par d autres secteurs du gouvernement. Ainsi la fonction protection des pêches, remonte à la convention de 1818 entre la Grande-Bretagne et les États-Unis pour la règlementation des droits de pêche sur la côte Est. À cette époque, cela signifiait la nécessité pour le Canada d avoir des goélettes de pêche légèrement armées pour faire respecter les lois sur les pêches. En même temps, l obligation d avoir des voies navigables sur le St. Laurent, avec plus tard le système de canaux, a signifié la nécessité d avoir des aides à la navigation (feux, bouées et phares) ainsi que des services de dragage et de remorquage. Le ministère des Travaux publics remplissaient beaucoup de ces fonctions dans ce qui était alors la Province unie du Canada. Quand le Canada est devenu membre du Commonwealth en 1867, c est le nouveau ministère de la Marine et des Pêcheries qui est devenu responsable des fonctions liées à la pêche pour les quatre provinces concernées. La responsabilité des canaux a cependant été confiée au ministère des Travaux publics du Dominion jusqu à sa division en deux ministères distincts Les travaux, et les «chemins de fer et canaux». Ce dernier ministère a survécu jusqu en 1936, année où il est devenu, avec ce qui était devenu le département de la Marine, une composante du nouveau ministère des Transport.. Opérations dans le Nord En 1880, la souveraineté dans l Arctique a été transférée de la Grande-Bretagne au Canada et, vers le milieu des années 1880, le ministère de la Marine a commencé à envoyer de petites expéditions dans les eaux arctiques pour en savoir plus sur l état de la glace et pour étudier d éventuelles routes de navigation jusqu à la baie d Hudson. Ces activités se sont renforcées au début du 20 e siècle, principalement avec l amélioration des capacités des brise-glaces. Il y a aussi eu des tentatives pour utiliser les navires du gouvernement pour apporter la Royale gendarmerie à cheval du Nord-Ouest dans le Nord et pour faire un peu de recherche dans l Arctique. Une expédition notable pendant cette période a été l expédition arctique canadienne de , menée par Vilhjalmur Stefansson. Malgré la perte du navire principal de l expédition, le Karluk, Stefansson et son équipage ont réussi à cartographier des régions inconnues jusqu alors dans l Ouest du Haut-Arctique et à préparer le terrain pour les explorations futures dans ces régions. Histoire plus récente En 1962, le service maritime du ministère des Transports a été transformé pour devenir la Garde côtière canadienne. La GCC est alors entrée dans une période d expansion et de croissance qui comprenait la création du Collège de la Garde côtière canadienne à Sydney (Nouvelle-Écosse) et une augmentation considérable de la flotte de la Garde côtière. Dans les années 1980, l intérêt grandissant pour l Arctique et les transports dans les corridors de transport arctiques a grandi avec la traversée par le Polar Sea, un bateau de la garde côtière américaine, du Passage du Nord-Ouest, un endroit que le Canada considérait 2 Après l arrivée de la vapeur dans les années 1850, il y a même eu quelques tentatives pour briser les glaces, même si premier brise-glace efficace ne date que de La Garde côtière canadienne en perspective 5

6 (et considère encore) comme faisant partie de ses eaux intérieures. À la même époque, la flotte de la GCC commençait à vieillir de façon indéniable et, du fait de l austérité fiscale d alors, les fonds étaient limités pour son renouvellement. En 1994, le gouvernement a décidé d amalgamer la flotte de bateaux de pêche et de recherche du ministère des Pêches et des Océans et celle de la Garde côtière, et la Garde côtière dans sa totalité est passée du ministère des Transports à celui des Pêches et des Océans. En 2005, la Garde côtière a été désignée «organisme de service spécial» au sein du MPO, ses responsabilités en matière de politiques retournant à Transports Canada. Les grands points à retenir de l histoire complexe de la Garde côtière sont les suivants : Ça a toujours été un service civil aux responsabilités diverses et multiples; Elle a connu un cycle d expansion et de ralentissement pour le renouvellement de sa flotte; Son rôle et ses responsabilités ont continué de grandir au fil des ans. LA GARDE CÔTIÈRE AUJOURD HUI Introduction De nos jours, la Garde côtière est un organisme de service spécial (OSS) au sein du ministère des Pêches et des Océans. En tant que telle, elle a un certain degré d autonomie pour son administration et sa gestion à l intérieur du ministère. Comme on l a souligné, c est aussi un organisme d opérations essentiel qui reçoit de Transports Canada le cadre stratégique qui oriente son travail. La Garde côtière tire ses pouvoirs de deux statuts, principalement : A. La Loi sur les océans, qui donne au ministre des Pêches et des Océans la responsabilité de fournir les services suivants : aides à la navigation; communications et gestion du trafic maritime; déglaçage et gestion des glaces; entretien des chenaux; recherche et sauvetage maritimes; intervention en cas de pollution marine; appui aux autres ministères, conseils et organismes du gouvernement, en fournissant des services de navires et d aéronefs ainsi que d autres services. B. La Loi sur la marine marchande du Canada, qui donne au ministre les pouvoirs, les responsabilités et les obligations ayant trait aux domaines suivants : les aides à la navigation; l île de Sable; la recherche et sauvetage; les interventions en cas de pollution marine; les services de trafic maritime. Programmes Même rapide, un résumé des grands programmes de la Garde côtière est utile pour mieux comprendre la taille et la complexité de l organisation. Ces grands programmes sont les suivants : A. Navigation maritime Dans le cadre de ce programme, la GCC fournit de l information et des services pour aider les opérateurs de navires commerciaux, de bateaux de pêche et d embarcations de plaisance sur les eaux canadiennes. 6 La Garde côtière canadienne en perspective

7 Les services incluent divers types d information et d aides pratiques à la navigation ainsi que des services de déglaçage et autres services connexes pour les navires sur le St. Laurent et dans l Arctique. Le programme couvre aussi le transport de marchandises et de fournitures jusqu aux communautés du Nord. Présenté comme un programme de soutien à la prospérité économique canadienne plus vaste, le programme facilite clairement l utilisation des eaux canadiennes à diverses fins comme l apport de soutiens essentiels aux gens du Nord et à leurs collectivités. La Garde côtière prévoit consacrer plus de 40 millions de dollars et l équivalent de 226 années personnes à ce programme dans l année qui vient. B. État de préparation opérationnelle de la flotte Il s agit du plus grand programme de la Garde côtière, et de loin. Il consommera plus de 475 millions de dollars pendant l année qui vient ( ) et représentera le travail de plus de années personnes. Ce programme peut être défini comme une entreprise fournissant la capacité maritime nécessaire pour aider la Garde côtière, les autres programmes du MPO (recherche sur les pêches, par exemple) et d autres organismes gouvernementaux (comme la Gendarmerie royale) à remplir leur mandat. Ce programme travaille essentiellement à bâtir, entretenir et déployer les navires et autres capacités requises compte tenu des responsabilités toujours plus grandes de la Garde côtière. Il faut souligner que le programme de renouvellement de la flotte, à hauteur des 6,8 millions de dollars, annoncé par le gouvernement comprenait, pour 2011, la construction ou l achat, dans les dix prochaines années de l équipement suivant : Le premier brise-glaces polaire du Canada Trois navires hauturiers de recherche sur les pêches Un navire hauturier d exploration océanographique Neuf navires de patrouille semi-hauturiers Un aéroglisseur Jusqu à 24 hélicoptères C. État de préparation des actifs terrestres de la flotte Ce programme est le pendant de l État de préparation des actifs de la Flotte et comprend la provision d aides à la navigation allant des phares aux cornes de brûme, en passant par les aides radar, le nouveau système de géolocalisation GPS différentiel et les nouveaux systèmes de navigation et de communications électroniques. La Garde côtière prévoit consacrer 110 millions de dollars et près de années personnes à ce programme au cours de l année qui vient. D. Services de communications et de trafic maritimes Ce programme s occupe de la prestation de services de communications maritimes essentiels aux navigateurs au Canada et en eaux côtières canadiennes. Cela comprend les communications de détresse et les communications radio générales en mer, la diffusion de renseignements sur la sécurité maritime, le contrôle des navires entrant en eaux canadiennes et la fourniture de renseignements maritimes à d autres ministères et organismes du gouvernement fédéral. Ces services constituent l infrastructure invisible des services maritimes modernes pour un pays qui a les côtes les plus longues du monde. La Garde côtière prévoit consacrer 45 millions de dollars et quelque 400 années personnes à ce programme pendant l année qui vient. La Garde côtière canadienne en perspective 7

8 Enjeux et défis Contrôler les coûts et améliorer l efficience Comme tous les autres ministères et organismes du gouvernement fédéral, la Garde côtière a connu des examens stratégiques successifs, avec des réductions budgétaires pour remédier à des pratiques peu efficientes; pour repérer le gaspillage, les chevauchements et le double-emploi; et pour cibler les domaines dans lesquels les ressources fédérales limitées peuvent être utilisées plus efficacement pour offrir les programmes nécessaires. De ce fait, en dépit des engagements du gouvernement à investir largement dans la nouvelle flotte et les biens d équipement connexes, la garde côtière a dû constamment réfléchir à sa façon de travailler et décider de l utilisation la plus judicieuse des ressources et des programmes à réduire ou à supprimer. La quête d une efficience et d une pertinence accrues et d une plus grande efficacité des programmes devrait vraisemblablement continuer longtemps. Pour les gestionnaires comme pour les employés, cela signifie continuer à chercher : de nouvelles façons, meilleures, de faire le travail de l organisation; de nouvelles sources de revenus pour mettre en œuvre, soutenir et améliorer les programmes; de nouvelles applications des technologies permettant de réduire les coûts et d améliorer l efficacité des programmes. Le passage prévu à la navigation électronique, l adoption du GPS différentiel, le passage à des phares sans personnel et la fermeture de certaines des plus petites stations de la Garde côtièe (comme Kitislano) sont es illustrations des efforts constants pour réduire les coûts et améliorer l efficience et l efficacité des programmes. Disons-le sans détour : de nos jours, pour la Garde côtière, chaque dollar et chaque personne est une ressource précieuse. Il n y a de la place que pour ce qui est essentiel. Travailler dans le Nord La Garde côtière a un rôle central à jouer dans la Stratégie pour le Nord, la vision d avenir formellement définie par le gouvernement pour cette région en La stratégie compte quatre grands piliers : Exercer notre souveraineté dans l Arctique Protéger notre patrimoine naturel Promouvoir le développement social et économique Améliorer et décentraliser la gouvernance dans le Nord. La GCC est un contributeur décisif aux trois premiers piliers, maintenant une présence canadienne effective dans le Nord, contribuant à la protection de l environnement et créant et entretenant des voies de transport maritime dans le Nord pour soutenir le développement économique de la région. Travailler dans le Nord est évidemment coûteux en termes de biens d équipement et de personnel. Depuis le début des opérations modernes dans l Arctique, la Garde côtière suit un emploi du temps saisonnier qui voit les brise-glaces qui travaillent dans le St. Laurent en hiver et au printemps partir dans le Nord pour offrir des services de déglaçage de juin à octobre avant de repartir dans le Sud au début de l hiver. Avec la diminution de la couche de glace dans l Arctique ces 30 dernières années, on a assisté à une extension de la saison de transport maritime plus tôt au printemps et plus tard à l automne. On prévoit par conséquent un changement fondamental du schéma saisonnier traditionnel de déploiement des navires et du personnel de la Garde côtière. Il faudra plus de navires et une utilisation différente du personnel. Éventuellement, cela signifiera une présence à l année dans le Nord. 8 La Garde côtière canadienne en perspective

9 Il est à noter que, en 2013, le Canada a pris la présidence du Conseil de l Arctique, un organisme multinational regroupant huit nations polaires et diverses autres parties concernées (le Conseil circumpolaire inuit et des groupes similaires, par exemple). La priorité déclarée du gouvernement canadien, pendant sa présidence, est le «développement au service de la population du Nord». Protection de l environnement L augmentation du volume et de l étendue des transports maritimes dans l Arctique et l accélération du développement économique, y compris de l exploration gazière et pétrolière, signifient une multiplication des menaces pour l environnement marin. La Garde côtière a un rôle particulièrement important à jouer dans ce domaine, pour la protection de l intérêt public. Bien que les utilisateurs du milieu marin les transporteurs et les entreprises de forage pétrolier et gazier soient légalement responsables en cas de pollution ou autre incident environnemental, la Garde côtière constitue un filet de sécurité essentiel en cas d incident environnemental majeur en eaux canadiennes. Ces considérations sont à la base de l annonce par le gouvernement, en mars 2013, d un Système de sécurité de classe mondiale pour les navires-citernes. Ce système inclut de nouvelles législations, de nouveaux engagements fondamentaux et de nouveaux programmes dans le cadre desquels le Canada élaborera un régime de règlementation et d interventions d urgence environnementales de pointe sur les côtes Est et Ouest pour relever les défis associés par l usage croissant de navires-citernes pour le transport du pétrole et du gaz naturel liquéfié dans des eaux où la navigation est difficile et le risque environnemental élevé. La Garde côtière jouera un rôle majeur pour aider à respecter ce nouvel engagement. Le nouveau Système de sécurité pour les navires citernes comprend entre autres mesures : le renforcement des exigences actuelles en matière de prévention de la pollution et d intervention aux installations de manutention d hydrocarbures; l accroîssement de la capacité de surveillance et d application de la loi de Transports Canada; l instauration de nouvelles infractions à la Loi et des sanctions plus importantes ayant trait à la pollution; l amélioration des interventions en cas d incident; Ie renforcement de l inspection des navires-citernes pour s assurer qu ils sont conformes à la règlementation, surtout en ce qui a trait aux doubles coques; la surveillance et contrôle systématiques des navires par le biais d une extension du Programme national de surveillance aérienne; la mise en place d un système de commandement en cas d incident pour la Garde côtière canadienne (GCC), pour lui permettre d intervenir de façon plus efficace lors d un incident et d intégrer ses activités à celles de partenaires clés; l examen des exigences actuelles en matière de pilotage et de remorqueurs escortes; la désignation de plus de ports publics pour des raisons de contrôle de la circulation, en commençant par Kitimat; des recherches sur les produits pétroliers non conventionnels, comme le bitume dilué, pour avoir une meilleure compréhension de ces substances et de leur comportement lorsqu elles sont déversées dans les milieux marins; des aides à la navigation nouvelles et modifiées pour baliser l emplacement des voies de transport à privilégier; la soumission à l attention du gouvernement d options pour améliorer le réseau de navigation canadien actuel (aides à la navigation, cartes hydrographiques, etc.) d ici l automne La Garde côtière canadienne en perspective 9

10 (On notera que c est Transports Canada qui est principalement responsable de l élaboration des politiques pour le nouveau Système de sécurité des navires-citernes, alors que la Garde côtière a la responsabilité fonctionnelle de beaucoup de ses éléments.) Nouveaux corridors de transport La fonte de la calotte glacière arctique ouvrira entre l Asie et l Europe de nouvelles routes maritimes porteuses de débouchés et de menaces pour le Canada. Les débouchés sont liés au nouvel accès à des ressources dans le Nord, accès qui aura des retombées économiques et sociales positives pour les communautés du Nord et pour le Canada. Et plus encore pour l exploitation des ressources, avec la perspective d emplois modernes et stables pour les habitants du Nord. Certaines menaces potentielles sont cependant associées à l exploitation des ressources, du fait de : la pollution transportée par bateau; l impact direct sur l environnement de l exploitation minière et du développement énergétique; les risques de déversements de pétrole et d explosions dans le milieu marin; les impacts sociaux sur les collectivités du Nord, suite à l arrivée soudaine d argent et de gens; l incidence de l exploitation des ressources sur la faune nordique. Le ministère des Pêches et des Océans et la Garde côtière préparent un plan pour L initiative des corridors de transport maritime du Nord pour permettre l exploitation responsable des ressources dans le Nord et pour atténuer les risques qui y ont associés. Protéger la sécurité du Canada Comme indiqué précédemment, la Garde côtière est un organisme civil dont les activités sont guidées par son mandat et par les programmes d autres organismes fédéraux. Bien qu elle ait un rôle capital à jouer dans la sécurité nationale du Canada, la Garde côtière n est pas considérée au sein du gouvernement ou à l extérieur comme faisant partie du système de sécurité nationale du Canada. Elle fournit plutôt des plateformes à d autres organismes qui ont des responsabilités directes en matière de sécurité, comme la Gendarmerie royale. Ces dernières années, le gouvernement a envisagé d «armer la Garde côtière», mais cela n a pas été fait. L une des raisons est le coût majeur de cette proposition, mais c est aussi le changement profond de la culture institutionnelle de l organisation qui serait nécessaire, celle-ci ayant toujours été une organisation civile. Au-delà de ses services de plateforme pour les autres, la Garde côtière contribue également de façon significative à la sécurité du Canada en étant présente dans nos eaux côtières, en particulier dans l Arctique. Elle fournit par exemple les navires à partir desquels des relevés hydrographiques essentiels sont effectués pour délimiter le plateau continental canadien. De plus, la Garde côtière est tout simplement une manifestation visible et efficace de la souveraineté du Canada sur les eaux canadiennes. La flotte La flotte de la Garde côtière est à la fois un formidable atout national et un défi constant pour les gestionnaires de la GCC et le gouvernement, les navires polyvalents les grands en particulier coûtant cher à construire et à utiliser et étant difficiles à remplacer lorsqu ils vieillissent. Le grand programme de construction de navires annoncé en 2011 constituait le premier investissement de cette ampleur dans la Garde côtière depuis plus de 30 ans. Et, si l engagement à construire un brise-glace polaire est une bonne nouvelle, la date de la construction dépendra de la place au Vancouver Shipyard qui a aussi été choisi pour construire de grands navires de soutien pour la Marine royale canadienne. L un des deux la GCC ou la Marine devra attendre. Une autre complication pour la flotte est que, étant donné la demande accrue de services de déglaçage dans le Nord, un seul grand brise-glace risque de ne pas suffire pour répondre à la demande. 10 La Garde côtière canadienne en perspective

11 Les gens La Garde côtière est servie par une élite professionnelle, difficile à trouver et à remplacer. Beaucoup d employés ont des compétences très recherchées dans le secteur privé, tant en mer que sur la terre ferme (on pense aux sables bitûmineux, par exemple). Attirer et retenir le personnel qualifié dont a besoin la Garde côtière du 21 e siècle est l un des grands défis pour ses dirigeants actuels. Autre défi : la vie de marin attire nettement moins de Canadiens qu autrefois. Moins de jeunes hommes et femmes sont enclins à passer régulièrement un mois loin de chez eux sur un bateau, même si la rémunération et le travail sont intéressants. En dépit de ses inconvénients, une carrière dans la Garde côtière offre des défis et des possibilités qui se rencontrent rarement dans les autres organisations du secteur public. Et les possibilités iront croissantes au cours des prochaines années. Les attentes du public La Garde côtière doit aussi répondre de nos jours aux nouvelles attentes des Canadiens du fait, entre autres, des changements sociaux et technologiques plus vastes au Canada et dans le monde. Pensons, par exemple, aux attentes d un chasseur du Nord en termes de sauvetage dans un endroit isolé. Autrefois, un chasseur partait dans la nature pendant une semaine et, si tout se passait bien, il rentrait chez lui, sain et sauf et chargé de gibier. Le «sauvetage» en cas de détresse était alors une question locale, pas la responsabilité du gouvernement. Aujourd hui, par contre, si un chasseur a des problèmes loin de chez lui, il a juste à activer sa balise de détresse qui envoie un signal à un satellite. Ce signal est transmis à une station terrestre aux États-Unis, puis est relayé au Centre conjoint de coordination de sauvetage de la GCC qui envoie un navire ou un avion de sauvetage (qui se trouve souvent à des milliers de milles de là). Bref, les attentes quant à la façon dont le gouvernement répond aux urgences concernant des particuliers ont augmenté radicalement, en partie du fait de la disponibilité des technologies disponibles. On citera les exemples récents du sauvetage d un chasseur inuit pris sur un floe qui s était soudainement détaché dans la baie d Hudson ou aux longues recherches, en février 2013, pour retrouver des survivants du naufrage du bateau de pêche de Nouvelle-Écosse, Miss Ally, qui montrent que ces attentes sont une réalité de nos jours. La Garde côtière et ses partenaires de recherche et sauvetage à la Défense nationale et la Gendarmerie royale doivent être prêts à y répondre. De la même façon, les entreprises d extraction de ressources faisant de l exploration minière ou énergétique dans l Arctique attendent de la Garde côtière qu elle soit là pour fournir des services de déglaçage et de communications maritimes et les services météo connexes, des aides à la navigation et, si nécessaire, des experts pour intervenir lors d un accident de pollution ou autre. Quelle que soit leur nécessité ou leur utilité pour le Nord et pour le développement économique plus général du Canada, ces services prennent de l argent et des gens qu il est toujours difficile d obtenir. La demande est inévitablement supérieure à l offre. CONCLUSIONS : LA GARDE CÔTIÈRE À L AVENIR L histoire nous montre que les fonctions essentielles de la Garde côtière canadienne sont aussi vieilles que notre pays. Elle nous montre aussi le rôle crucial qu elle et ses incarnations intérieures ont joué dans le développement économique du Canada, en plus d avoir rendu l idée même du Canada possible. Une petite population étalée sur des terres extrêmement vastes, avec la plus grande longueur de côtes de tous les pays du monde ce qui permet à ce pays d exister est, pour une large part, les transports maritimes. Aujourd hui, indépendamment de l ubiquité des transports aériens, particulièrement dans le Nord, ce sont les transports maritimes qui détermineront la viabilité économique et sociale dans les collectivités du Nord. Sans voies de transport efficaces, il ne peut y avoir d exploitation des ressources. Sans corridors de transport efficaces jusqu au Nord, les fournitures ne peuvent entrer et les produits ne peuvent être La Garde côtière canadienne en perspective 11

12 amenés jusqu aux marchés du monde. Sans relevés hydrographiques convaincants et sans recherche scientifique soutenue sur l environnement, le climat et les écosystèmes complexes du Nord, l exploitation des ressources ne peut être durable. Toutes ces fonctions relèvent, en partie ou dans leur totalité, du gouvernement et, ce qui n est pas anodin, du gouvernement du Canada. La Garde côtière canadienne est le principal organisme du gouvernement pour le soutien de ces programmes, fonctions et services. Pour que les collectivités du Nord puissent réussir de même que l ensemble du Canada il est essentiel que la Garde côtière conserve son efficacité et sa vitalité organisationnelles. 12 La Garde côtière canadienne en perspective