Une conférence de consensus européenne sur la prise
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- Thomas Paquin
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1 Traitement de l infection à Helicobacter pylori chez l enfant Helicobacter pylori treatment in children N. Kalach* POINTS FORTS Chez l adulte comme chez l enfant, les trithérapies reposant sur un IPP et deux antibiotiques sont les traitements les plus utilisés. La résistance primaire aux antibiotiques (macrolides et imidazolés) explique les échecs actuels. de l infection dans les pays développés est basse, et seules des études multicentriques permettraient de collecter un nombre suffisant de malades ; deuxièmement, ces études ont un coût élevé et les laboratoires pharmaceutiques ne veulent pas investir dans le marché pédiatrique ; troisièmement, dans les pays en développement où la prévalence de l infection est élevée, il existe rarement des structures permettant de réaliser de tels essais. De ce fait, les propositions de traitement dérivent principalement des études réalisées chez les adultes (5). Mots-clés : Helicobacter pylori Traitement Enfant. Keywords: Helicobacter pylori Treatment Children. Une conférence de consensus européenne sur la prise en charge de l infection à H. pylori chez l enfant s est tenue en 2000, mais elle n a pas concerné le traitement optimal de cette infection du fait de l insuffisance des données existantes à cette époque (1). D autres conférences de consensus pédiatriques, canadienne et nord-américaine, ont proposé différents schémas thérapeutiques chez l enfant (2-4). Devant une pathologie ulcéreuse gastrique ou duodénale, il existe un consensus pour proposer un traitement d éradication. En revanche, en présence d une gastrite, les positions sont beaucoup plus nuancées (1-4). En fait, les essais contrôlés permettant d obtenir des données solides sont rares. Les essais cliniques randomisés contre placebo sont exceptionnels, et même les essais comparant deux traitements différents chez l enfant sont peu nombreux. La plupart des résultats viennent d études ouvertes dont l objectif était soit d étudier l effet du traitement sur les symptômes, soit d évaluer la fiabilité de tests diagnostiques avant et après le traitement. Les séries d enfants étudiés étaient peu importantes. Plusieurs raisons existent pour expliquer l absence d études thérapeutiques dans la population pédiatrique : premièrement, la prévalence * Clinique de pédiatrie Saint-Antoine, hôpital Saint-Vincent-de-Paul, Université catholique de Lille, Lille. MOLÉCULES Antibiotiques Seules trois familles d antibiotiques sont utilisées chez l enfant : les pénicillines A, avec principalement l amoxicilline, qui inhibe la synthèse de la paroi cellulaire bactérienne ; les nitroimidazolés, avec le tinidazole et le métronidazole, qui agissent sur l acide désoxyribonucléique bactérien par l intermédiaire de dérivés nitrés ; et les macrolides, avec principalement la clarithromycine, qui inhibe la synthèse protéique bactérienne en interagissant avec l acide ribonucléique ribosomal de la sousunité 23 (6, 7). Inhibiteurs de la sécrétion acide gastrique La modulation de la sécrétion acide gastrique est liée à l utilisation soit des antagonistes des récepteurs H2 à l histamine, soit des inhibiteurs de la pompe à protons (IPP). Ces derniers sont d introduction récente chez l enfant. Deux molécules sont surtout employées : l oméprazole et le lansoprazole. L emploi des IPP dans ce traitement se justifie par leurs propriétés pharmacocinétiques et pharmacochimiques, essentiellement démontrées chez l adulte : effet antisécrétoire prolongé, optimisant l activité des antibiotiques, et effet bactériostatique sur H. pylori dont les mécanismes ne sont pas totalement connus (8). Sels de bismuth Une parenthèse doit aussi être ouverte sur les sels de bismuth, qui ne sont plus commercialisés sous forme de spécialités pharmaceutiques en France, mais qui sont utilisés dans certains pays européens. Ces molécules exercent différents modes d action sur H. pylori : elles rompent la paroi cellulaire bactérienne et inhibent l adhérence bactérienne à l épithélium gastrique ainsi que la production de plusieurs enzymes bactériennes incriminées dans la pathogénicité (9). 101
2 RÉSISTANCE PRIMAIRE À H. PYLORI CHEZ L ENFANT Prévalence L expérience française portant sur 150 enfants entre 1994 à 1999 montre un taux moyen de résistance primaire au métronidazole et/ou à la clarithromycine de 43 % et 21 % respectivement ; aucune résistance primaire à l amoxicilline n a été retrouvée (7). Récemment, dans une étude multicentrique européenne (10), comprenant 17 centres pédiatriques dans 14 pays européens, souches de H. pylori ont été collectées ; 3 % des souches étaient originaires de l Europe du Nord, 70 % de l Europe occidentale, 9 % de l Europe de l Est et 18 % de l Europe du Sud. Les enfants inclus avaient pour 41 % d entre eux une mère née en dehors de l Europe ; 13 % des enfants avaient un âge inférieur à 6 ans, 43 % avaient de 4 à 11 ans et 44 % avaient plus de 11 ans. L antibiogramme a été réalisé chez enfants (groupe A) avant la cure de traitement d éradication de H. pylori (résistance primaire), et 196 autres (groupe B) après la première cure de traitement (résistance secondaire). La résistance bactérienne à la clarithromycine a été retrouvée dans 24 % des cas (A : 20 %, B : 42 %), celle au métronidazole dans 25 % des cas (A : 23 %, B : 35 %). La double résistance bactérienne a été trouvée dans 6,9 % des cas (A : 5,3 %, B : 15,3 %). La résistance bactérienne à l amoxicilline a été exceptionnelle (0,6 % des cas) [10]. Impact de cette résistance primaire sur les résultats des traitements d éradication L existence d une résistance au métronidazole ou à la clarithromycine est actuellement considérée comme un facteur prédictif d échec du traitement d éradication. Dans une étude française portant sur le suivi de 23 enfants traités par trithérapie (amoxicilline + métronidazole + lansoprazole, ou spiramycine + métronidazole + lansoprazole), le taux d éradication obtenu, quel que soit le schéma de traitement utilisé, était de 83 % en cas de sensibilité préalable au métronidazole et de 17 % en cas de résistance à cet antibiotique (11). De même, dans une autre étude française ayant suivi 49 enfants traités par trithérapie habituelle (IPP + amoxicilline + clarithromycine), un taux d éradication bactérienne de 100 % a été obtenu lorsque les souches de H. pylori étaient sensibles à la clarithromycine, et aucune éradication n a été obtenue chez les enfants présentant avant traitement une résistance à la clarithromycine (12). Vingt-neuf articles ont été publiés durant cette période, rapportant les résultats obtenus chez 870 enfants. Parmi ceux-ci, 345 ont reçu une bithérapie (amoxicilline + nitro-imidazolé, ou association d un antibiotique à un antisécrétoire ou à du bismuth) et 446 une triple thérapie (deux antibiotiques + antisécrétoire ou bismuth). Un total de 22 combinaisons thérapeutiques a été utilisé, mais la majorité des enfants a pu être classée en huit groupes. La comparaison des taux d éradication entre les groupes de traitement rapportés dans les articles et les lettres a montré un taux d éradication très faible avec les bithérapies associant oméprazole ou cimétidine et amoxicilline. Les taux d éradication avec les bithérapies associant deux antibiotiques ou le bismuth à un antibiotique étaient plus satisfaisants, allant de 73 à 76 %. Les trithérapies n ont pas permis d obtenir de meilleurs résultats. La combinaison lansoprazole + amoxicilline + métronidazole (57 enfants) induisait un taux d éradication de 79 %, la combinaison IPP + amoxicilline + clarithromycine (125 enfants) un succès dans 83 % des cas, et la combinaison IPP + métronidazole + clarithromycine (47 enfants) un taux moyen d éradication de 89 %. En ce qui concerne les résumés, 17 ont présenté des résultats portant sur enfants. Parmi ceux-ci, 352 ont reçu une bithérapie double, une triple thérapie et 15 une quadruple thérapie. Le taux moyen d éradication obtenu était de 39 % avec la combinaison IPP + amoxicilline (61 enfants), et de 78 % avec la bithérapie amoxicilline + imidazolé (206 enfants). Comparativement aux trithérapies, l efficacité de cette dernière bithérapie était similaire à celle de bismuth + amoxicilline + imidazolé ou IPP + amoxicilline + clarithromycine. Seule la combinaison IPP + amoxicilline + tinidazole était significativement supérieure à amoxicilline + tinidazole (p < 0,001). La trithérapie bismuth + amoxicilline + imidazolé a été utilisée chez 632 enfants avec un taux moyen d éradication de 82 %, et la trithérapie IPP + amoxicilline + clarithromycine chez 321 enfants avec un taux moyen d éradication de 73 %, taux significativement plus bas que celui obtenu avec les trithérapies à base de bismuth (p = 0,0004). Cependant, la combinaison IPP + amoxicilline + tinidazole (56 enfants) a donné un taux d éradication de 95 %, significativement meilleur que ceux obtenus avec les trithérapies à base de bismuth (p = 0,03) ou avec la combinaison IPP + amoxicilline + clarithromycine (p = 0,0007). ÉTUDES PÉDIATRIQUES PUBLIÉES Revue systématique des différentes associations thérapeutiques Oderda et al. (5) ont réalisé une revue systématique des articles relatifs au traitement de l infection à H. pylori chez l enfant. Les sources de données ont été constituées par les références identifiées sur Medline et Current Contents entre janvier 1987 et octobre De plus, tous les résumés sur ipediatrics et ceux soumis entre 1997 et 1999 dans les principales réunions du domaine ont été revus. Durée du traitement En ce qui concerne la durée du traitement, il a été possible d analyser son effet pour certains bras thérapeutiques. La double thérapie amoxicilline + nitro-imidazole administrée pendant une semaine était significativement moins efficace que lorsqu elle était donnée plus longtemps (2, 4 ou 6 semaines), avec un taux d éradication de 74 % contre 84 % (p = 0,03) pour les traitements plus longs. De la même manière, la trithérapie bismuth + amoxicilline + nitro-imidazole prescrite pendant une semaine a permis un taux d éradication de 74 %, alors 102
3 que lorsqu elle était donnée pendant 2 à 4 semaines le taux d éradication était de 84 %, soit significativement plus élevé (p = 0,03). En revanche, les trithérapies à base d IPP ont obtenu des taux d éradication similaires qu elles soient administrées pendant une semaine (75 % ; IC 95 : 70-90) ou 2 semaines (77 % ; IC 95 : 70-83) [5]. Études pédiatriques récentes Depuis l an 2000, 14 études impliquant enfants ont été publiées dans des journaux à comité de lecture. Cependant, seules sept études étaient randomisées et une seule concernait deux groupes d enfants successifs traités soit par une trithérapie à base d oméprazole, soit par un traitement fondé sur la sensibilité de la souche aux antibiotiques (tableau I) [13]. Tous les enfants ont été traités avec un IPP (oméprazole ou lansoprazole). Dans deux études, l une menée en Italie (14) et l autre en Israël (15), l intérêt de tester la sensibilité aux antibiotiques a été évalué avec des résultats assez différents. Dans l étude italienne, il n y avait pas de différence significative du taux d éradication quand les enfants avaient été traités avec le traitement standard par rapport à ceux traités avec un antibiotique adapté, alors que dans l étude israélienne, le taux d éradication était significativement plus élevé quand l antibiothérapie était adaptée à la sensibilité de la souche. Dans une étude qui avait pour but d évaluer l amélioration de l anémie ferriprive après éradication de H. pylori, un groupe qui a reçu une trithérapie à base de lansoprazole n a eu qu un résultat d éradication faible : 34 %, alors que l autre groupe, qui n était pas traité par les antibiotiques, mais qui recevait une supplémentation en fer, a eu un taux d éradication de 10 % (16). Deux études ont comparé les taux d éradication avec deux antibiotiques avec ou sans IPP, et elles ont obtenu des résultats assez différents (17, 18). Dans une étude, l association amoxicilline + clarithromycine avec l oméprazole a conduit un taux d éradication de 74,2 % alors que sans oméprazole ce taux n était que de 9,4 % seulement (17). Dans l autre étude, il n y a pas eu de différence pour un traitement amoxicilline + tinidazole, avec ou sans lansoprazole (18). Il est possible que cette différence soit due à la nécessité d un ph plus élevé pour que la clarithromycine soit efficace, d où le besoin d associer un IPP, alors que le tinidazole peut être actif à ph bas, et l addition d un IPP ne change pas le résultat. En fait, le même type de résultat a été trouvé en associant le tinidazole à l azithromycine, à la place de l amoxicilline avec ou sans lansoprazole (15). Des résultats prometteurs ont été rapportés par l utilisation d un nouveau régime séquentiel de 10 jours chez des enfants. Un taux d éradication de 94,7 % a été obtenu, significativement plus élevé que le taux de 74,5 % obtenu avec la trithérapie standard oméprazole + amoxicilline + clarithromycine (19). Tableau I. Résultats de sept essais cliniques randomisés chez l enfant publiés dans des journaux à comité de lecture depuis 2000 (nombre total des enfants randomisés et étudiés : 895). D après Oderda et al. (13). Référence Nombre d enfants Premier bras thérapeutique Durée Taux d éradication IC 95 Deuxième bras thérapeutique Taux d éradication IC 95 p < Gottrand F. et al., j 74 % Placebo + AMO + CLA 9 % ,001 Oderda G. et al., LAN + AMO + tinidazole 7 j 68 % Placebo + AMO + tinidazole 71 % Tindberg Y. et al., LAN + azithromycine + tinidazole 6 j 67 % Placebo + azithromycine + tinidazole 58 % ? 73 % % Faber J. et al., 2005 met-sensible met-résistant? 89 % si CLA sensible 75 % 60-87? 45 % si CLA résistant 0 % Gessner B.D. et al., LAN + AMO + CLA 14 j 34 % Sulfate de fer 10 % ,001 Francavilla R. et al., OME + AMO, 5 jours puis OME + CLA + MET 5 jours 10 j 95 % % ,02 Sykora J. et al., L. casei DN j 84,6 % ,5 % ,01 103
4 Du fait de la rareté des études évaluant l efficacité du traitement, un registre a été établi : le Pediatric European Register for Treatment of Helicobacter (PERTH) [13] a été disponible sur le site Internet de l ESPGHAN en 2001 (20), et tous les pédiatres européens désirant traiter un enfant ont pu entrer leurs données sur le type de traitement utilisé et les résultats obtenus. De janvier 2001 à décembre 2002, les données de 597 enfants ont été rapportées par 23 centres et les données complètes ont été analysées pour 518 cas (âge médian 9 ans, 1-14 ans) [tableau II]. À l endoscopie, 450 avaient une gastrite et 64 un ulcère (12,3 %). La sensibilité aux antibiotiques testée chez 361 sujets a montré 18 % de souches résistantes à la clarithromycine et 19 % résistantes au métronidazole. La durée du traitement a été d une semaine pour 388 enfants et de deux semaines pour 130. Les antibiotiques ont été associés à l oméprazole dans 310 cas, au lansoprazole dans 35 cas, au bismuth dans 121 cas, à la ranitidine dans 13 cas et à la ranitidine + bismuth dans 38 cas. Une trithérapie a été prescrite à 485 enfants, une bithérapie à 26 enfants et une quadruple thérapie à 7 enfants. Les données de suivi étaient disponibles pour 481 enfants. Le taux global d éradication a été de 65 %, significativement plus élevé chez les enfants qui avaient un ulcère (80 %) que ceux qui n en avaient pas (64 %) [p = 0,001], et il n y a pas eu de différence entre les traitements donnés pendant une ou deux semaines (tableau III). CONCLUSION Les trithérapies à base d IPP sont les traitements les plus utilisés chez l enfant, bien qu elles ne soient pas les plus efficaces. Les traitements à base de bismuth conduisent à des taux d éradication plus élevés. La résistance primaire est un des problèmes essentiels et actuels du traitement de l infection gastrique à H. pylori chez l enfant, constituant la principale cause d échec de ce traitement. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1. Drumm B, Koletzko S, Oderda G and European Paediatric Task Force on Helicobacter pylori. Helicobacter pylori infection in children. J Pediatr Gastroenterol Nutr 2000;30: Sherman P, Hassall E, Hunt RH et al. Canadian Helicobacter study group consensus conference on the approach to Helicobacter pylori infection in children and adolescents. Can J Gastroenterol 1999;13: Gold B, Colletti RB, Abbott M et al. Helicobacter pylori infection in children: Recommendations for diagnosis and treatment. J Pediatr Gastroenterol Nutr 2000;31: Jones NL, Sherman P, Fallone CA et al. Conference: Update on the approach to Helicobacter pylori infection in children and adolescent An evidence-based evaluation. Can J Gastroenterol 2005;19: Oderda G, Rapa A, Bona G. A systematic review of Helicobacter pylori eradication treatment schedules in children. Aliment Pharmacol Ther 2000;14(Suppl.3): Tableau II. Résultats préliminaires du registre PERTH sur l efficacité des traitements utilisés chez 407 enfants de janvier 2001 à décembre Chaque traitement a été prescrit à au moins 20 enfants. D après Oderda et al. (13). Régime thérapeutique Nombre d enfants traités H. pylori négatif Taux d éradication (%) IC 95 OME + CLA + MET LAN + AMO + MET Bismuth + CLA + MET Bismuth + AMO + MET Tableau III. Différence du taux d éradication bactérienne entre les différentes trithérapies comparables (i.e. un seul médicament différent) et avec un nombre d enfants suffisant pour faire un calcul statistique. D après Oderda et al. (13). Traitement-traitement régime (nombre d enfants traités) Taux d éradication (%) p* Bismuth + AMO + MET (56) versus LAN + AMO + MET (28) 80 versus 57 0,01 Bismuth + AMO + MET (56) versus (83) 80 versus 66 0,04 Bismuth + AMO + MET (56) versus bismuth + CLA + MET (45) 80 versus 73 (83) versus LAN + AMO + MET (28) 66 versus 57 OME + CLA + MET (20) versus OME + CLA + AMO (175) 95 versus 61 0,02 OME + CLA + MET (20) versus bismuth + CLA + MET (45) 95 versus 73 0,003 OME + CLA + MET (20) versus (83) 95 versus 66 0,009 * by χ 2 test. 104
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