Chaire Entrepreneuriat Familial et Société. 2ème atelier de la Chaire

Transcription

1 RECHERCHE Chaire Entrepreneuriat Familial et Société 2ème atelier de la Chaire Comment concilier vision entrepreneuriale et vision patrimoniale de l entreprise familiale? Compte rendu 3 décembre 2013

2 En bref. Le mardi 3 décembre 2013 a eu lieu le second atelier de la Chaire Entrepreneuriat Familial et Société à Audencia Nantes sur le thème «Comment concilier vision entrepreneuriale et vision patrimoniale de l entreprise familiale?» avec l intervention de Maître Pitron, avocat en droit des affaires, spécialisé en ingénierie patrimoniale. Dans le cadre de ses travaux, la Chaire s est fixé l objectif d organiser des ateliers de réflexion à destination des entreprises familiales du Grand Ouest. Au nombre de 3 par an, ces ateliers sont l occasion d aborder de manière concrète les problématiques rencontrées par les entreprises familiales. Ces ateliers de réflexion visent également à aider les familles qui le souhaitent à rester durablement propriétaires de leur entreprise, en adaptant à chaque génération la meilleure gouvernance pour l entreprise et la famille. Les participants ont l opportunité de rencontrer des dirigeants d entreprises familiales et des experts de la région, ainsi que des professeurs d Audencia afin d échanger sur des problématiques communes. La Chaire Entrepreneuriat Familial et Société a pour vocation la production et la diffusion de connaissances innovantes afin de contribuer à la pérennité et à la compétitivité des entreprises familiales. La Chaire a pour objectif de publier des travaux de recherche, d organiser des ateliers de réflexion et de formation trimestriels à destination des entreprises familiales sur quatre grandes thématiques reparties sur quatre années : L identité et l image de l entreprise familiale, une légitimité sociale à construire La transmission de l entreprise familiale : un parcours d initiation Le leadership de l entreprise familiale : gouvernance et management des talents Le développement de l entreprise familiale : un modèle entrepreneurial L équipe de la Chaire est constituée de : Miruna Radu Lefebvre, Dr., Titulaire de la Chaire, Professeur associé en Entrepreneuriat à Audencia Ariane Berthoin Antal, PhD, Chercheur (Senior fellow) au WZB Berlin Social Research Center et membre de la Faculté Internationale Affiliée d Audencia (Distinguished Research Professor), et Honorary professor à l Université Technique de Berlin Noémie Lagueste, chargée d études Sophie Delaporte et Marine Gouëdard, doctorantes

3 - Conférence de Maître Christian Pitron, avocat spécialisé en droit fiscal, associé responsable du bureau de EY Rennes «Comment concilier vision entrepreneuriale et vision patrimoniale?» Ci-après, vous trouverez quelques éléments, non exhaustifs, abordés par Maître Pitron lors de son intervention : Maître Pitron a dans un premier temps évoqué la naissance d une aventure entrepreneuriale, bien éloignée des préoccupations d une gestion patrimoniale. Au démarrage du projet, l attention est portée sur sa mise en œuvre et son développement, la vision entrepreneuriale passe alors en premier, et la vision patrimoniale est encore inexistante. Au fur et à mesure du cycle de vie de l entreprise, la question de la transmission de l entreprise et de sa fiscalité vont finir par se poser. A un moment donné, le dirigeant commence à réfléchir sur la transmission de la propriété de l entreprise, donc des titres. «Est-ce que je dois vendre les titres? Est-ce que je dois donner les titres? Est-ce que je donne de l argent à mes enfants pour qu ils vivent eux aussi l aventure entrepreneuriale?» Bien que toutes ces questions et réflexions soient propres à chaque famille, certains éléments liés à la fiscalité méritent d être confiés à des professionnels. Maître Pitron souligne les modifications constantes induites par nombre de réformes dans le paysage fiscal, et recommande de s entourer de spécialistes. Dans ce contexte et étant donnés les taux de fiscalité, la création d une société holding peut être une solution à envisager. Les flux financiers sont alors dirigés vers la holding et stockés dans celle-ci. Concernant l ISF, une certaine réflexion doit être menée pour éviter le cercle vicieux de la vente des titres pour payer l impôt. Il faut donc bien appréhender les contours des outils à disposition, leurs avantages mais aussi leurs inconvénients. La transmission est donc une étape particulièrement importante, il faut anticiper afin d optimiser les outils à disposition pour surmonter cette étape et trouver une alternative aux modèles de mise sur le marché. Dans ce cas, pérennité et recherche de compétences au sein de la structure sont privilégiées. Une des solutions est donc de constituer une société civile dans laquelle on insère des clauses particulières. Cela permet de séparer le niveau professionnel du niveau patrimonial, la famille reste décideur et garde le contrôle (quel que soit le type de gouvernance choisi), tandis qu au niveau opérationnel il est possible d ouvrir le management à des tiers, non-membres de la famille fondatrice.

4 Maître Piton expose alors les différentes manières d envisager la transmission : La transmission par donation à titre gratuit efface toutes les plus values en report d imposition. Il reste cependant le problème de la donation et de son financement. Il y a la possibilité de faire remonter l argent de la société opérationnelle vers la société civile de gouvernance pour financer la transmission. Maître Pitron précise qu il faut anticiper la problématique de la transmission pour qu elle coïncide avec les cycles de l entreprise. En effet, selon lui, il faut pouvoir agir lorsque l entreprise est en période «basse» afin d utiliser de manière optimale la mécanique fiscale. Concernant les membres de la famille qui ne souhaitent plus s investir dans l entreprise, il est possible de réaliser une opération de réduction du capital, c est une opération complexe mais faisable. D autre part, pour éviter que des branches familiales se retirent, il est possible d appliquer une décote aux titres. Ces stratégies sont propres à chaque entreprise et révélatrices de l état d esprit de la famille, tout comme le fait, par exemple, de renoncer à une capitalisation maximale. Des arbitrages sont donc nécessaires entre croissance et gestion du patrimoine, d autant plus que les membres ne sont pas tous impactés de la même manière par la gestion de l entreprise. Cela implique de maintenir une forme de cohésion familiale. (Les membres de la famille qui sont impliqués dans l opérationnel ne sont pas soumis à l ISF, tandis que les membres de la famille non impliqués dans l opérationnel, sont eux soumis à l ISF). Pour ce faire, Maître Pitron explique que la distribution de dividendes peut permettre de maintenir cette cohésion, mais diminue dans le même temps la trésorerie et pénalise la capacité d investissement des entreprises. Pour conclure, les visions entrepreneuriale et patrimoniale correspondent donc à deux phases distinctes. Dans un premier temps, la phase entrepreneuriale correspond au lancement et au développement du projet, puis dans un second temps arrive la phase «calculée», qui correspond à une phase de gestion du patrimoine familial. La famille est donc confrontée à un certain nombre d arbitrages et peut mettre en place, à travers les instances de direction ou de surveillance, une stratégie de gestion du patrimoine, en lien avec le fondateur, permettant de maintenir une cohésion, et donc la pérennité de l entreprise. L intervention de Maître Pitron a été suivie d une table ronde en présence de : - Maître Pierre Menanteau, Notaire - Monsieur Philippe Fertil, co-gérant de FP Finance, gestion du patrimoine - Monsieur André Cassar responsable ingénierie patrimoniale du CIC Ouest - Monsieur Paul-Henri Dubreuil, Président du directoire du Groupe Dubreuil Monsieur Cassar a apporté des précisions concernant la loi de finance 2014, ses impacts et les changements importants, notamment la volonté de drainer l épargne vers le capital et les fonds propres de l entreprise, et la création de nouveaux produits bancaires favorisant la croissance des fonds propres de l entreprise.

5 Philippe Fertil a ensuite évoqué la manière dont l entreprise peut se faire accompagner pour bien séparer la gestion du patrimoine privé et la gestion de patrimoine de l entreprise, ce qui permet de limiter les risques. La société civile patrimoniale permet de travailler avec un mode de gouvernance propre à l entreprise et aussi de construire une vision globale de la famille. Le point de vigilance réside avant tout dans le fait de faire en sorte que les engagements privés ne viennent pas contraindre le développement de l entreprise. La table ronde s est poursuivie avec des éclairages apportés par Maître Menanteau concernant la transmission de l entreprise familiale. Celui-ci a décliné les différents outils à disposition des familles en fonction de leur choix et de leurs arbitrages (donation simple, donation partage, donation graduelle ). Le maître mot de la transmission est l anticipation. En effet, cela permet de payer moins sur la valeur de la propriété, quels que soient les outils choisis par la famille. Enfin, Monsieur Dubreuil a partagé sa vision de la gestion du patrimoine et de la transmission, en tant que dirigeant de l entreprise familiale. Trop anticiper ne risque-t-il pas de mettre les enfants dans une position délicate, ou contraire aux valeurs que souhaitent transmettre les parents? La transmission ne peut pas être abordée uniquement d un point de vue fiscal, le facteur humain est déterminant d un point de vue managérial. L intérêt pour l entreprise familiale doit avant tout être manifesté par les héritiers, afin de commencer à parler de transmission et ne pas «forcer» la nouvelle génération à être impliquée dans l entreprise si elle ne le souhaite pas. Suite à ces interventions, des échanges avec les participants ont permis d éclairer certains points. Selon Maître Pitron, le système politico-fiscal n est pas aujourd hui en adéquation avec le système managérial. Chaque génération doit renoncer à la capitalisation maximale pour permettre la pérennité de l entreprise, mais veut-on vraiment transmettre l entreprise en tant que «charge» aux enfants? En effet, on envisage souvent la prise de valeur de l entreprise, mais ce n est pas toujours le cas. L entreprise est soumise à des fluctuations, et trop anticiper peut s avérer pénalisant pour les générations futures. Il faudrait pouvoir assurer une certaine protection de la valeur de l entreprise dans le temps.

6 Pour en savoir plus sur les activités de la Chaire Consultez le blog : Consultez le site internet d Audencia : Suivez nous sur twitter Contacts Miruna Radu Lefebvre, Professeur en Entrepreneuriat, titulaire de la Chaire mradu@audencia.com Arianne Berthoin Antal, Professeur membre de la faculté affiliée d Audencia abantal@audencia.com Noémie Lagueste, Chargée d études nlagueste@audencia.com Marine Gouëdard, doctorante mgouedard@audencia.com