BARIL DE PETROLE A 200$
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- Marie-Josèphe Turgeon
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1 BARIL DE PETROLE A 200$ QUELLES CONSEQUENCES SUR L ACTIVITE DES STATIONS DE MONTAGNE? Janvier 2009 Étude réalisée par : - Stewart Sheppard : stagiaire Mountain Riders, Mastère en management du développement durable, CERAM Nice Sophia-Antipolis - Laurent Burget : responsable pôle environnement Mountain Riders 1
2 Introduction Janvier 2009 : entre un enneigement hors du commun et un taux de réservation record malgré la crise, la saison s annonce exceptionnelle. Du coup plus personne ne prête attention au prix du baril de brut qui est redescendu aux alentours des 40$. Et si le lien entre ces deux éléments n est pas évident au premier coup d œil, il existe à travers notre dépendance énergétique. L industrie du tourisme repose de façon intrinsèque sur l industrie du transport : pour amener les touristes sur leur lieu de vacances, pour se déplacer au sein de ce lieu ou en tant qu activité en soi (Becken, 2002). Dans notre économie ou le coût de l énergie est encore faible par rapport aux services rendus, le transport repose essentiellement sur la consommation de produits pétroliers. Selon l Institut Français du Pétrole (IFP) les produits pétroliers représentent 97 % de l'approvisionnement en énergie du transport (routier, aérien et maritime). Au niveau mondial, plus de 50 % du pétrole produit a pour usage final le transport, plus de 60 % pour les pays de l OCDE (IFP, 2007). La disponibilité de cette ressource non renouvelable et son prix vont donc avoir une importance capitale en termes économiques mais aussi en en termes écologiques puisqu il s agit de la 1 ère source d émission anthropique de gaz à effet de serre (UNEP, 2008). En France et plus particulièrement en montagne, l industrie du tourisme s appuie sur des infrastructures routières importantes (Beture conseil, 2002), ce qui se traduit par un taux de déplacement en véhicule individuel de 70 à 95 % des modes de transport principaux pour les stations (Mountain Riders, 2008), et l augmentation de la demande mondiale pour cette ressource non renouvelable, parmi d autres facteurs, entraînera inévitablement une augmentation de son coût à long terme (AIE, 2004). De nombreuses études se sont déjà penchées sur le lien entre l augmentation du prix du baril de brut et ses conséquences sur l économie : Hamilton (2005), Kilian (2007), Bernanke, Gertler et Watson (1997), Davis & Haltiwanger (2001). Comme l industrie du tourisme repose sur cette ressource fossile en tant que source de mobilité, on peut s attendre à ce que cette augmentation ait un effet direct sur l industrie du tourisme en général et l industrie du tourisme hivernal en particulier. L objectif n est pas de démontrer ce lien une nouvelle fois, mais de quantifier cet effet, en termes monétaires, sur l activité de trois stations type en France et de tenter de répondre à la question suivante: Quel effet un baril à 200$ aura t il sur l exploitation d une station de ski, les consommateurs pourront-ils encore se permettre d aller au ski? 2
3 I_ Dépendance aux énergies fossiles. Notre société de consommation se caractérise par une dépendance forte aux énergies fossiles. En effet, la répartition mondiale de la production d énergie par type de combustible, est la suivante : 85 % de l énergie dans le monde provient de combustibles fossiles et non renouvelables (Charbon, Pétrole, Gaz), 92 % en intégrant le nucléaire. Source : manicore.com/ jmjancovici L industrie du ski se caractérise elle aussi par sa dépendance forte au pétrole, il permet : - Les déplacements touristiques, 83% des déplacements se font en utilisant des carburants issus de la transformation du pétrole - Le chauffage des logements et des commerces, 40% des bâtiments sont chauffés au fioul - Le damage des pistes ; un grand domaine skiable consomme jusqu'à 1 Million de litres de fioul par saison - Le fret pour l approvisionnement en denrées alimentaires et en bien divers qui se fait presque exclusivement par la route - Les secours (hélicoptères et motoneiges), la fabrication du matériel, des vêtements et de nombreux biens de consommation courants Il apparaît que 74% des émissions de GES liés à l activité d une station de ski proviennent du transport des vacanciers pour se rendre en station. Ce déplacement se fait pour plus de 80% par consommation directe de pétrole (voiture, bus et avion). Le chiffre d affaire d une station, lié à l enneigement, mais aussi et surtout à la fréquentation des vacanciers est donc largement dépendant des énergies fossiles et de leur coût. Source : Bilan GES (Gaz à Effet de Serre) d une station de montagne (Duprez & Burget, Mountain Riders 2007). 3
4 II_ Peak-oil Le Peak-oil, ou pic pétrolier mondial désigne le moment où la production mondiale de pétrole commencera à décliner du fait de l'épuisement des réserves de pétrole exploitables. Selon l AIE (Agence Internationale de l Energie), BP, l Association for the Study of Peak Oil (ASPO) et l Institut Français du Pétrole (IFP) plus de 50% des réserves ultimes (la totalité du pétrole extractible sur terre, y compris ce qui est déjà extrait), qui totalisent 2500 milliards de barils, soit 342 milliards de tonnes équivalent pétrole (une tonne! 7,3 barils), aurait été consommées en
5 Cela signifie que le pic pétrolier mondial aurait déjà été atteint ou sera atteint rapidement dans les prochaines années, entre 2015 et 2020 (source : ASPO/WEO). Alors que du coté de la demande, l AIE ne prévoit aucune baisse, elle estime même que la demande mondiale de pétrole va continuer d augmenter au moins jusqu en 2030 : Source : Manicore.com/jmJancovici La conjonction de ces deux facteurs ne laisse que peu de doutes sur le fait qu une hausse des coûts du pétrole est inévitable. Néanmoins il reste une inconnue de taille, encore plus valable dans la crise actuelle : dans combien de temps? Conscient de cette situation la question posée est : Quel effet un baril à 200$ aurait sur l exploitation d une station de ski? III_ Objectifs de l étude : Quantifier en termes monétaires les conséquences de l augmentation du prix du baril de brut sur l activité des stations, pour les professionnels de la montagne et pour les particuliers. IV_ Hypothèses : - Augmentation du prix du baril de brut jusqu à 200$ - Taux de change et taxation des produits pétroliers fixes - 3 grandes catégories de stations en France 5
6 Typologie des stations En nous basant sur les données de l Eco Guide des stations de Mountain Riders nous avons pu définir 3 stations type, représentatives du marché Français : Caractéristiques des stations types Petite station Station moyenne Grande station Nombre de lits Nombre d'habitants Taux Remplissage Hiver % 60% 60% 60% Journées d'ouvertures hiver Taux de Remplissage Ete % 40% 40% 40% Journées d'ouverture Eté Nuitées Hiver Nuitées Ete Distance Gare SNCF la plus proche Distance Aéroport le plus proche Cette étude ne s est pas penchée sur l aspect environnemental de la question, c est-à-dire l effet positif, ou négatif qu aurait une variation de la consommation d hydrocarbures sur les émissions de CO 2. V_ Méthode. L étude s appuie sur la méthode Bilan Carbone TM V5 pour les collectivités et de son outil économique qui permet d estimer les surcoûts et la dépendance des territoires au prix du baril. Avant de tester ces résultats face à l hypothèse d un baril de pétrole brut à 200$, nous avons pu estimer le surcoût qu entraînerait cette hausse sur les activités touristiques des trois stations type avant de ramener ce surcoût au niveau du consommateur afin de tenter d évaluer son effet sur la fréquentation des stations. 6
7 VI_ Résultats généraux. 1_ Impact économique d une augmentation du prix du baril Ce graphique caractérise le surcoût d exploitation lié à l augmentation du prix du baril de pétrole, par type de station. Ce surcoût prend en compte les consommations de produits pétroliers pour le transport touristique des vacanciers, le chauffage des logements et des commerces ainsi que le damage des pistes. 7
8 2_ Répartition du surcoût, par acteur économique. Dans le cas d une grande station avec un chiffre d affaire (CA) pour la société de remontée mécanique de 60 Millions ", le surcoût pour l exploitant est de 1 M", soit un surcoût direct de l ordre de 2 %. En revanche le client final devra supporter le surcoût restant, lié au transport et à l hébergement, soit 12 M". L augmentation du coût du baril aura un impact direct sur le vacancier via ses frais de transport, le reste de l augmentation lié à l hébergement et au domaine skiable sera répercuté sur les vacanciers de façon indirecte par les professionnels. 8
9 VII_ Surcoût pour le consommateur final. Le surcoût pour le consommateur final est la somme des différentes composantes (transports, chauffage et prix du forfait) ramenées à un niveau individuel. Pour que ces résultats soient représentatifs, nous avons séparé les consommateurs en trois catégories selon le moyen de transport utilisé pour se rendre en station. 1_ Coût du transport pour une famille de quatre personnes. Sur ce graphique, on constate clairement que la voiture, qui représente de loin le mode de transport touristique le plus utilisé, est aussi le mode de transport le plus impacté par l augmentation du prix du baril. Sur la base d un prix qui oscille entre 1500 " et 3000 " pour une semaine aux sports d hiver, l impact d une augmentation du prix du baril de brut représentera selon les cas entre 2% et 7% du prix total du séjour, soit jusqu'à 75 " pour une famille de 4 personnes. Un chiffre qui n est pas dissuasif en soi, mais qui aura sans doute un effet plus que proportionnel. En effet selon Kilian (2007) une augmentation du prix des produits pétroliers entraîne une baisse réelle et persistante de la consommation de produits de luxe et de tourisme. De plus il faut garder à l esprit que notre étude ne prend en compte que les surcoûts directement liés au transport, l hébergement et le forfait, alors que tous les autres secteurs : alimentation, fret, coût des marchandises, des salaires, des déplacements domicile travail seront aussi affectés par la hausse du prix des produits pétroliers et impacteront indirectement pour un surcoût à la hausse. 9
10 Les surcoûts envisagés ne sont qu une moyenne basse. Il faudrait toutefois effectuer une étude sur le terrain afin de déterminer le seuil exact et les différents facteurs influençant la prise de décision, à partir desquels cette augmentation devient dissuasive. Dans notre analyse, les touristes circulant en transport en commun pour se rendre en station de sports d hiver ne sont que marginalement impactés par la hausse du prix du baril de brut. C est un argument économique non négligeable qui pourra devenir un vrai argument de vente dans le cadre de l émergence d une demande pour de nouveaux produits comme : «une semaine de ski en Tarentaise par un autre mode que la voiture» (Beture conseil, 2002). Néanmoins, le coût du voyage Paris-Tarentaise en train pour une famille de 4 personnes reste plus cher que le même voyage en voiture, cette même famille de 4 personnes devra débourser 90! de plus pour se rendre en station en train si la station est proche d une gare et 160 si elle se situe à 30 km. 2_ Coût du transport pour un trajet de 2 personnes Pour un séjour de 2 personnes, le train reste plus cher, 50" pour la station proche de la gare et 130 " pour la station à 30 km de la gare. On constate que la station proche d une gare est moins dépendante du coût des énergies fossiles, les vacanciers étant moins impactés par l augmentation du coût du carburant. 10
11 Conclusions et pistes de réflexion En utilisant les caractéristiques de trois stations type représentatives du marché français, auxquelles nous avons opposé l hypothèse d un baril de brut à 200$, notre étude montre que : - Le surcoût direct pour un exploitant de domaine skiable est de l ordre de 2% de son chiffre d affaire - Le surcoût direct pour les vacanciers se fait essentiellement ressentir sur le transport en voiture, qui représente le moyen de transport le plus utilisé. Les touristes circulant en transport en commun pour se rendre en station de sports d hiver ne sont que marginalement impactés par la hausse du prix du baril de brut. Pour une famille de 4 personnes, le surcoût envisagé avec un baril à 200$ est de l ordre de 6" pour un trajet Paris-Tarentaise en train, et 75" en voiture. - Les surcoûts envisagés sont une moyenne basse. Tous les secteurs d activités de notre société possèdent une dépendance plus ou moins importante aux énergies fossiles. - Les stations proches d une gare ont un avantage concurrentiel sur les autres. En effet pour une famille de 4 personnes le coût d un A/R en bus entre la gare SNCF et la station atteint aujourd hui les 80", à rajouter au coût du déplacement en train. En France et en région Rhône-Alpes, le tourisme représente 6,8% du PIB (ODIT, 2006), une réflexion à moyen et long terme est nécessaire pour assurer la pérennité de ces activités. Pour plus d informations : Mountain Riders Tel: + 33 (0) Stewart Sheppard stewart@mountain-riders.org 11
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