Mettre le travail. Philippe Davezies. Comité régional CGT Rhône-alpes. 16 juin 2015,
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- Yvette Pagé
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1 Mettre le travail au cœur de l action syndicale? Comité régional CGT Rhône-alpes Philippe Davezies 16 juin 2015,
2 I Activité, pouvoir d agir, santé
3 La question de l aliénation Le modèle de Karasek Theorell, à la confluence de la théorie critique et des recherches sur la biologie du stress. exigences psychologiques autonomie (possibilités d expression personnelle et de développement) soutien social Un modèle opposant pouvoir d agir et aliénation. L impossibilité de développer ses propres normes - l aliénation - produit les pathologies du stress (pathologies cardiovasculaires, dépression, TMS, pathologies inflammatoires).
4 Autonomie/aliénation dans le questionnaire de Karasek dans mon travail, je dois apprendre des choses nouvelles dans mon travail, j'effectue des tâches répétitives mon travail me demande d'être créatif mon travail demande un haut niveau de compétence dans ma tâche, j'ai très peu de liberté pour décider comment je fais mon travail dans mon travail, j'ai des activités variées j ai la possibilité d'influencer le déroulement mon travail j'ai l'occasion de développer mes compétences professionnelles
5 II -De nouvelles formes de conflit au travail
6 1 ) Une sollicitation accrue de la subjectivité. Evolution vers le pilotage par l aval («serviciarisation»): Proportion de salariés dont le rythme de travail dépend d une demande extérieure obligeant à une réponse immédiate : 28 % en 1984 (France), 54 % en 1998 (France), 67% en 2010 (Europe). Travail dans la perspective du service : négociation et coconstruction avec celui que l on doit servir. Montée des questions éthiques. Une part importante de la définition des objectifs et des façons de faire échappe à l encadrement
7 2 ) Un pilotage beaucoup plus éloigné du travail Désengagement des hiérarchies vis-à-vis des modalités d exécution du travail. Eloignement des centres de décision. Pression des logiques financières. Montée en puissance des indicateurs statistiques, comptables. Exemple en centre d appel : «La conception du métier de conseiller et les critères d évaluation de la qualité du travail ont changé : les agents doivent s efforcer de passer d une conception individuelle (le client que j ai en ligne est satisfait) à une conception au niveau de l entreprise (l ensemble des clients appelant le service sont satisfaits)».
8 3 ) Une tension sur la qualité La qualité du point de vue de l activité : fournir une réponse adaptée aux particularités de la situation, donner forme humaine à l activité et au monde, suppose toujours une prise en compte beaucoup plus large que ce que vise la prescription. La qualité du point de vue de la gestion : Pression à l accélération et à la standardisation. La qualité pour le métier la qualité pour le management. «La qualité pour le marché, dans le temps du marché» Les salariés sont en difficulté pour faire ce qu on leur demande? Pas seulement! Les salariés sont en difficulté pour faire ce qu appellent les situations!
9 4 ) Une tension affrontée dans l isolement La pression impose de se focaliser sur les objectifs que l on juge prioritaires. Travailler, impose de trier. Réduction des espaces permettant d arbitrer collectivement les façons de trier. Individualisation du rapport au travail. Multiplicité conflictuelle des critères de tri.(en 2003, 17% des salariés déclarent être l objet d un comportement systématiquement hostile de la part d une ou plusieurs personnes dans leur travail ; en 2010, 22% -SUMER). La souffrance au travail révèle la résistance des salariés à l amputation de leur activité, mais aussi leur isolement. Nécessité d espaces d élaboration collective
10 III Problème : l obscurité de l activité
11 1 ) Les données d ordre biologique Si l action était assujettie à la réflexion consciente, il serait facile de la mettre discussion. mais elle serait beaucoup trop lente. Nous ne serions pas là. Les dispositions à l'action, incorporées au fil de l expérience, sont activées en situation sans appel à la réflexion consciente (la décision n est pas la cause de l action). La décision est un corrélat de l action, elle n en est pas la cause. La conviction selon laquelle l action serait le produit d une libre volonté apparait comme une illusion.
12 2 ) Activité, subjectivité, responsabilité Le sentiment d être maître de ses actes est une illusion, mais une illusion productive car elle incite à un retour réflexif sur l activité. L activité est en avance sur la conscience; c est dans l après-coup que se manifestent la subjectivité et la responsabilité. Un «je» (un sujet) doit assumer la responsabilité d un acte dont il n est pas la cause : «Qu ai-je fait?». La confrontation à l activité et à l expérience d autrui permet correction, enrichissement, développement.
13 Le fait de se penser libre et responsable ouvre sur une discussion et une réflexion à travers lesquelles le sujet se fait source de normes qui coloreront et orienteront son activité. L autonomie (la santé comme développement du pouvoir d agir) se construit dans la confrontation à l activité et à l expérience d autrui. L isolement croissant des salariés paralyse le processus d élaboration de l activité.
14 3 ) Conséquences Des conditions de débat déséquilibrées : normes de gestion chiffrées VS rapport sensible aux situations ; la victimologie réduit le conflit de normes à un conflit interindividuel. Fragilisés, les salariés eux-mêmes contournent les discussions sur le travail : les discours communs visent les attaques subies par le groupe (statuts, moyens, effectifs) ; les syndicats, sont cantonnés dans la position de réceptacle du négatif; les dimensions affirmatives de l activité sont portées par chacun comme s'il s'agissait d'une affaire privée. Les voies de développement individuel et collectif, explorées en permanence par l activité, restent en jachère.
15 III Les recherches-actions sur le travail syndical
16 1 ) Objectifs Renforcer les liens entre l action syndicale et les enjeux défendus par les salariés dans leur activité. Le syndicat peut servir à construire des perspectives collectives pour l élaboration et la défense de leur activité par les salariés, à renforcer les liens entre eux, à leur permettre d affirmer l autorité que leur confère leur expérience du travail. Le syndicat comme outil pour l action des salariés
17 2 ) Un processus d élaboration individuelle et collective Enquête syndicale : non pas expliquer aux salariés mais apprendre des salariés, au plus près des situations de travail. Passer systématiquement des discours généraux aux évènements localisables en temps et en lieu (le niveau de l activité où s exerce la résistance des salariés). Passer des dimensions réactives (contre quoi?) aux dimensions proactives (pour quoi?). Soumettre les constats et analyses à la discussion collective. Prêter attention aux différences, aux points de vue divergents ou minoritaires (objectif : faire des différences une ressource). Une analyse qui ne vise pas seulement à produire de l information, mais du tissu social et de la puissance d agir.
18 3 ) Résultats La discussion permet aux salariés de mesurer, d affirmer et de développer, individuellement et collectivement, leur capacité d expertise sur le travail et son organisation. La prise de conscience des difficultés, mais aussi des exigences communes, et de ce que chacun a l intelligence de faire pour les défendre, recrée des liens et des solidarités. L expérience concrète des contradictions de la situation permet d ouvrir de réelles perspectives pour une action dans laquelle les salariés affirment l autoritéque leur confère l expérience du travail. Elle permet d aborder des batailles institutionnelles sous de formes renouvelées et avec des résultats inattendus. Une dynamique anti-hégémonique qui ouvre un espace de démocratie.
19 4 ) Le politique au cœur de l activité Au cœur de leur activité, les travailleurs affrontent le conflit majeur de nos sociétés : le choc entre exigences de la vie sociale et exigences des marchés. L isolement, le désarroi, le sentiment d impuissance constituent des dangers pour la démocratie. Le développement des capacités de résistance et d expérimentation, au plus près du travail, peut constituer un puissant facteur de renforcement de l action syndicale, mais aussi d enrichissement du débat politique.
20 Des textes sur le travail sont accessibles et utilisables sur :
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