Qui s assemblent se ressemblent!
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- Germain Lefrançois
- il y a 8 ans
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1 Contextes et processus relationnels associés au développement des conduites agressives à la période préscolaire: L influence négative des amis Stéphane Cantin 1, Frank Vitaro 1, Mara Brendgen 2, Nadine Forget Dubois 3, Michel Boivin 3, Richard E. Tremblay 1, Daniel Pérusse 1 1-Université de Montréal, 2-Université du Québec à Montréal, 3-Université Laval Qui s assemblent se ressemblent! Les individus ont tendance à se regrouper sur la base de caractéristiques similaires (concept d homophilie). Les amis sont similaires sur le plan des comportements, des attitudes, des intérêts et de la personnalité. Ex.: Sexe, réussite scolaire, dépression, comportements sexuels à risque, abus de substance, troubles alimentaires Plusieurs études transversales mettent en évidence la forte similarité des amis sur le plan des conduites antisociales (Cairns et al., 1988; Kupersmidt et al., 1995; Poulin et al., 1997). 1
2 Modèle de la confluence (Dishion et al., 1994) Au début de l adolescence, la tendance des jeunes agressifs à s affilier avec d autres enfants agressifs deviendrait progressivement de plus en plus importante. - Les garçons agressifs convergent graduellement les uns vers les autres pour venir à former des groupes de plus en plus homogènes sur le plan des conduites agressives et antisociales. Processus de sélection mutuelle - Sélection proactive: caractère stratégique des affiliations, facilite l accès aux ressources, assure un statut dominant (Poulin & Boivin, 2000) - Sélection passive: Le rejet par les pairs incite les enfants agressifs à s affilier ensemble faute d alternative (Patterson et al., 1992) Processus de socialisation (renforcement mutuel des amis) Dans la mesure où les jeunes agressifs s influencent mutuellement, des conséquences négatives sur le plan du développement peuvent être anticipées. L affiliation avec des pairs déviants constitue un puissant prédicteur du maintien et l aggravation subséquente des conduites antisociales (Brendgen et al., 2000; Guilford-Smith, 2005). Effets iatrogènes rapportés dans les programmes d intervention qui regroupe des jeunes en difficulté Cambridge-Sumerville Youth study (McCord, 1978, 2003) Positive Peer Culture (Gottfredson, 1987) Adolescent transition program study (Dishion et al., 1995) Intervention de groupe avec des jeunes antisociaux (Feldman, 1992) Buddy System Intervention (O Donnell, 1992) Programme de prévention primaire en santé mentale (Durlak & Wells, 1995) Expérimentations cliniques (Kazdin & Weisz, 1998) Traitement des délinquants juvéniles(lypsey, 1992) 2
3 Processus d entraînement à la déviance (deviancy training) Les travaux de Dishion (1995, 1996, 1997) mettent en évidence certains processus par lesquels les adolescents antisociaux se renforcent mutuellement dans l adoption d attitudes et de comportements déviants. Adolescents antisociaux > Conversations déviantes > Réactions positives des amis. Fréquence et durée des conversations déviantes contribuent de manière indépendante à l accroissement des conduites délinquantes, des comportements sexuels à risque et l abus de substance sur une période de deux ans. Qu en est-il à la période préscolaire? De récentes études démontrent que déjà à la période préscolaire les enfants agressifs ont tendance à interagir ensemble (Estell et al., 2002; Farver, 1996; Snyder et al., 1997, 2005). Par exemple (Snyder, 1997) À 4-5 ans, 50% des amis d enfants agressifs sont également agressifs (12% chez enfants non agressifs). En situation de jeu libre, le nombre de temps passé à interagir avec des enfants agressifs prédit une augmentation des conduites agressives sur une période de trois mois (observation, enseignante). 30% à 100% du temps =Augmentation importante 15% et 30% du temps = Augmentation modérée 0% à 15 % du temps = Baisse modérée (majorité des enfants) 3
4 Snyder (2005) a récemment observé des enfants de maternelle (n=267) dans différentes situations d interaction sociale avec leurs camarades de classe (interactions dyadiques). Conversations déviantes et jeux de rôle déviants (obscénité, agression, blasphèmes, comportements délinquants, opposition à l autorité) L affiliation avec des pairs agressifs et la fréquences des conversations et jeux de rôle déviants en maternelle contribuent à rendre compte de l accroissement sur un an des conduites agressives tels que manifestées en classe, sur la cours de récréation et dans le milieu familial des enfants. Objectifs Évaluer les processus d entraînement à la déviance entre enfants agressifs dans différents contextes d observation. Évaluer la similarité des amis sur le plan des conduites agressives. Évaluer dans quelle mesure l affiliation avec des pairs agressifs contribue à rendre compte du maintien et de l accroissement des conduites agressives sur une période d un an. Évaluer dans quelle mesure les processus d entraînement à la déviance permettent de rendre compte de l influence négative des amis agressifs. 4
5 Étude des Jumeaux Nouveau-nés du Québec (EJNQ) Pérusse,, D., Boivin, M., Vitaro,, F., Brendgen,, M.R., Dionne, G., & Tremblay, R.E. 672 paires de jumeaux (n=1344), nés dans la grande région de Montréal entre avril 1995 et décembre Enfants ont été évalués périodiquement sur une variété de mesures à 5, 18, 30, 48, 60, 72, 84, 96, 108 & 124 mois. Les jumeaux font leur entrée en maternelle: Cohorte 1 (2001): 120 paires de jumeaux (n=240) Cohorte 2 (2002): 210 paires de jumeaux (n=420) Cohorte 3 (2003): 190 paires de jumeaux (n=380) Seules les données recueillies à 72 mois (maternelle) et à 84 mois (1ère année) sont considérées dans le cadre de cette étude. Évaluation par les pairs Statut social: méthode de désignations sociométriques menée en classe (indice de préférence sociale) Désignations comportementales par les pairs (17 items) Prosocialité-Leadership Comportements agressifs et perturbateurs Hyperactivité Retrait social Victimisation par les pairs Identification des relations d amitié réciproques 5
6 Évaluation de l enseignante Évaluation des comportements sociaux des jumeaux: Adaptation du Preschool Social Behavior Questionnaire (Tremblay et al., 1992). 75 items de type Likert (0-jamais à 2-souvent) Agressivité physique et verbale (relationnelle, réactive, proactive) Hyperactivité Prosocialité-Leadership Retrait social-dépression Victimisation par les pairs Comportements sociaux des trois meilleurs amis (17 items) Contextes d observation Chacun des jumeaux est observé séparément en interaction avec certains camarades de classe dans trois différentes mises en situation. Situation de jeu coopératif (Movie viewer; Charlesworth & LaFrenière, 1983) Mise en situations hypothétiques Situation de «tricherie» 6
7 Processus d entraînement à la déviance entre enfants agressifs dans différents contextes d observation Pour chacun des membres de la dyades, les variables observationnelles suivantes sont recueillies: Comportements de tricherie (accord=100%) (regarder derrière le paravent) Incitations à tricher (accord=71%; k=.68) (comportements d incitation verbale et non verbale) Renforcement des comp. de tricherie (accord=94%, k=.87) (manifestation d affects positifs) 7
8 Participants 356 paires de jumeaux (n=712; 368 filles et 344 garçons). Aucune données manquantes (observations et comportements sociaux de chacun des membres de la dyade). 53% de l échantillon original (attrition non aléatoire: tempérament à 5 mois et revenu familial). 140 paires de jumeaux MZ et 216 paires de jumeaux DZ. Participants répartis dans 605 classes. 107 paires de jumeaux dans la même classe (30% de l échantillon). Choix de l ami (même sexe) 62% (n=441) observés avec ami réciproque. 38% (n=271) observés avec ami unilatéral. 8
9 Agressivité du jumeau et de son ami (évaluation par les pairs) Alpha de Cronback = 0.88 Qui se bataillent le plus souvent? Qui frappent et poussent le plus souvent les autres? Qui disent le plus souvent des choses méchantes aux autres enfants? Qui se fâchent souvent quand ils n ont pas ce qu ils veulent? Qui disent le plus souvent à leurs ami(e)s de ne pas jouer avec les autres? Qui disent souvent à leur ami(e) des choses et des secrets méchants à propos d un autre enfant? Résultats Situation de «tricherie» 9
10 Régression logistique sur les comportements de tricherie du jumeau Prédicteurs Sexe Statut de la relation amitié Agressivité du Jumeau Agressivité de l Ami Jumeau X Ami Odds ratio 2.06*** *** 1.38** 1.47** Effet d interaction J. agressif A. agressif J. agressif A. non agressif J. non agressif A. agressif J. non agressif A. non agressif 81.8% (n=18) 44.6% (n=41) 45.2% (n=47) 33.8% (n=157) 10
11 Incitations, initiations et renforcements Enfants agressifs plus enclins à inciter leurs amis à tricher (26% vs 9%) Enfants agressifs plus enclins à initier le comportement de tricherie (73% du temps dans les dyades mixtes) Enfants agressifs ne sont toutefois pas plus enclins à renforcer positivement les comportements de tricherie de leur ami (moyenne=65%). Processus associés à l influence négative de l ami Prédicteurs Sexe Statut de la relation amitié Agressivité du Jumeau Agressivité de l Ami Ami initie le comportement de tricherie Ami incite à tricher Odds ratio 1.82*** *** *** 5.68*** 11
12 En somme Les enfants agressifs sont plus enclins à tricher (i.e. déroger aux règlements) lorsqu ils sont en présence d un ami agressif que lorsqu ils sont en présence d un ami non agressifs. Cela corrobore l hypothèse selon laquelle déjà à la période préscolaire les amis s influencent mutuellement dans l adoption de comportements déviants (i.e. modeling et incitations) À l inverse, les enfants agressifs respectent davantage les règles lorsqu ils sont en présence d un ami non agressif (i.e. entraînement à la conformité?) Autre façon de comprendre l interaction: L influence négative des amis agressifs est beaucoup plus faible chez les enfants non agressifs. Similarité des amis sur le plan des conduites agressives (cohorte 1 et 2; n=448) 12
13 Agressivité des jumeaux et de leur amis réciproques (évaluation de l enseignante) Alpha de Cronback = 0.89 Lorsqu on le/la taquinait, a réagi de façon agressive? Lorsque quelqu un lui a fait mal accidentellement, il/elle s est fâché(e) et a commencé une bagarre (une chicane)? A fait peur aux autres afin d obtenir ce qu il/elle voulait? A cherché à dominer les autres enfants? A attaqué physiquement les autres? Lorsqu il/elle était fâché/e contre quelqu un, a dit de vilaines choses dans le dos de l autre personne? Lorsqu il/elle était fâché/e contre quelqu un, a essayé d entraîner d autres à détester cette personne? Comportements agressifs des amis réciproques. Moyenne des scores obtenus par chacun des amis réciproques 29% des enfants n ont pas d amis réciproques Critère: Analyses multiniveaux Agressivité du jumeau en maternelle (enseignante) Prédicteurs en maternelle: (S) Sexe (R) Rejet par les pairs du jumeau (A) Agressivité des amis en maternelle Step Variable -2 Log/Likelihood Chi-Square 1- S S + R * 3- S + R + A * 4- S + R + A + (A x S) * p <.01; Homophilie: r =
14 Affiliation avec des pairs agressifs comme prédicteur de l accroissement des conduites agressives dans le temps Analyses multiniveaux Critère: Agressivité du jumeau en 1ère année (enseignante) Prédicteurs en maternelle: (S) Sexe (Aj) Agressivité du jumeau (enseignante) (Rj) Rejet par les pairs du jumeau (Aa) Agressivité de l ami (enseignante) Step Variables -2 Log/Likelihood Chi-square 1- S S + Aj * 3- S + Aj + Rj S + Aj + Rj + Aa S + Aj + Rj + Aa+(Aa x S) * p <.01; + p =.10 L influence de l ami est significative pour les garçons seulement 14
15 Analyses multiniveaux (garçons) Critère: Agressivité du jumeau en 1ère année (enseignante). Prédicteurs en maternelle: (Aj) Agressivité du jumeau (enseignante) (Rj) Rejet par les pairs du jumeau (Aa) Agressivité de l ami (enseignante) (Tj) Jumeau triche; (Ta) Amis triche (Ej) Jumeau encourage; (Ea) Ami encourage Step Variables -2 Log/Likelihood Chi-Square 1- Aj * 2- Aj + Rj Aj + Rj + Aa ** 4- Aj + Rj + Aa + Tj * 5- Aj + Rj + Aa + Tj + Ta ** 6- Aj + Rj + Aa + Tj + Ta + Ej Aj + Rj + Aa + Tj + Ta + Ej + Ea * 8% * p <.05; ** p <.01 En somme Déjà à la période préscolaire, les enfants agressifs en maternelle ont tendance à s affilier ensemble (garçons et filles). Chez les garçons seulement, l affiliation avec des pairs agressifs permet de rendre compte de l accroissement des conduites agressives sur une période d un an. Les comportements des amis tels qu observés dans la situation de «tricherie» contribuent de façon unique et indépendante à rendre compte de l accroissement des conduites agressives chez les garçons. 15
16 Recherches futures Refaire les dernières analyses à partir des trois cohortes. Identification des modérateurs potentiels de l influence négative des amis : Stabilité et qualité des relations d amitié Comportements prosociaux (valorisation de agressivité) Pratiques parentales D autres processus peuvent rendre compte des conséquences négative liées à l affiliation à des pairs agressifs : Contribuent à accroître la marginalisation sociale Conflits entre amis (entraînement à la coercition) Identification des caractéristiques des enfants qui respectent les règles malgré les comportements de «tricherie» de leur ami (n=150). Implications cliniques Nécessité d intégrer des pairs non agressifs/prosociaux (idéalement des amis) dans le cadre des programmes de prévention ciblant les enfants agressifs (Bierman & Furman, 1989; Prinz et al., 1994; Dumas et al., 1999; Vitaro & Tremblay, 1994) - Pairs prosociaux agissent comme modèles et comme sources de soutien social, entravent les processus d entraînement à la déviance, favorise le maintien et le transfert des acquis (témoins des changements). - Permet d éviter les risques de stigmatisation associés au fait de retirer de la classe uniquement les enfants en difficulté 16
17 Implications cliniques Mise en place de conditions susceptibles de favoriser le développement de relations d amitié avec des enfants prosociaux (Capuano et al., 2005; CPPRG, 2002; August et al, 2002) - Apprentissages coopératifs, pairage des enfants Utilisation des pairs prosociaux comme agents de changement (Guèvremont et al., 1990) Mise en place de conditions susceptibles de modifier les contingences sociales associées à la manifestation de conduites agressives - Good Behavior Game (Ialongo et al., 2003) 17
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