L habiter temporaire des mobilités d affaires dans un espace urbain: l exemple de Lyon, une métropole régionale en construction
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- Eloi Pierre-Yves Beausoleil
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1 UNIVERSITE PARIS 1 PANTHEON SORBONNE INSTITUT DE RECHERCHE ET D ETUDES SUPERIEURES DU TOURISME (IREST) L habiter temporaire des mobilités d affaires dans un espace urbain: l exemple de Lyon, une métropole régionale en construction Mémoire de recherches présenté pour l obtention du Diplôme de Paris 1-Panthéon-Sorbonne Master professionnel Mention Tourisme (2 ème année) Spécialité Développement et Aménagement Touristique des Territoires (VAE) Par Cathy DEDE Sous la direction de Mme GRAVARI-BARBAS JURY Membres du Jury :......
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3 Remerciements Je tiens à remercier sincèrement toutes les personnes qui m ont entourée et qui ont participé, de près ou de loin, à la réalisation de ce mémoire : Maria GRAVARI BARBAS, pour sa direction, sa compréhension et ses orientations qui ont permis de construire de façon significative ma réflexion. Nathalie FABRY pour les différentes pistes qui ont pu faciliter l élaboration de mon sujet. Josette VIGNAT et Dominique GRANDJONC pour leur disponibilité et la pertinence des commentaires et conseils avisés. Valérie DUCAUD et Candice ARLEN pour avoir accepté un entretien. Les guides touristiques et les différents professionnels du Grand Lyon qui m ont donné des informations précieuses parfois confidentielles sur le thème de mon mémoire. Enfin, mes proches pour m avoir apporté un soutien très précieux sur le plan technique et moral jusqu à l achèvement de ce mémoire. Mémoire de M2 DATT Page 3
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5 SOMMAIRE Introduction ère partie : Le concept du tourisme urbain des mobilités d affaires dans un contexte d hypermobilité contemporaine Les mobilités d affaires et l hypermobilité contemporaine : quelle place pour le tourisme? «Du tourisme d affaire» au principe du tourisme urbain des mobilités d affaires Le marché des mobilités d affaires en France : un habiter touristique spécifique? ème partie : le tourisme des mobilités d affaires à Lyon comme substrat d une métropole en devenir Les fondements du positionnement stratégique de la ville de Lyon : les mobilités d affaires, un outil catalyseur du développement touristique Les mobilités d affaires : l imbrication des dispositifs liés aux mobilités d affaires aux dispositifs des mobilités touristiques Les mobilités d affaires et la production de nouveaux lieux touristiques ème partie : L habiter temporaire des mobilités d affaires : hybride touristique polytopique de la métropole fondu dans un hyperchoix global Un habiter touristique hybride urbain Le processus du choix d une destination : Lyon au cœur d un hyperchoix global Le tourisme urbain des mobilités d affaires et des mobilités touristiques dans le processus du choix de la destination : une complémentarité temporelle inséparable?...70 Conclusion Bibliographie Glossaire Annexes Table des illustrations Table des entretiens Table des matières «L université n entend donner aucune approbation aux opinions émises dans les mémoires et les thèses. Ces opinions doivent être considérées comme propres à leurs auteurs» Mémoire de M2 DATT Page 5
6 Introduction «Faut-il créer l outil pour susciter la demande? Faut-il adapter l outil à la demande?» (Antoine PERRAGIN, Directeur Général de la Cité-Centre des Congrès de Lyon) Des migrations internationales aux mobilités professionnelles en passant par les mobilités touristiques, jamais les mobilités n ont été aussi importantes et diverses 1 (Rémy Knafou). En 1997, le festival International de la Géographie de Saint-Dié-des-Vosges s empare du thème de la planète nomade qui semble caractériser la relation à l espace et au temps des hommes de notre siècle. L existence d une nouvelle ère du mouvement interroge l espace et les sociétés qui reposent sur des infrastructures structurantes du territoire avec pour conséquence des nouveaux rapports au monde des individus dans un contexte hypermobile. 2 (Edith Fagnoni) Le monde est donc aujourd hui mobile, interconnecté favorisant les transports de personnes qui se déplacent soit par nécessité ou bien par plaisir. Ces mobilités plurielles vont entrainer des relations avec l espace obéissant à des logiques convergentes, de par l utilisation d infrastructures de transports ou d hébergement vers des destinations identiques mais qui peuvent être fondamentalement différentes en fonction de la finalité du déplacement 3 (Rémy Knafou). Ce rapport à l espace va induire la question sur la façon d appréhender un territoire et donc de pratiquer les lieux, d habiter temporairement un territoire 4 (Mathis Stock). Mais la ville est une destination complexe, difficile à cerner et à appréhender car elle est multiforme (mobilités touristiques, mobilités d affaires, excursionnistes) avec des durées de séjour qui peuvent varier sensiblement. (Cahier espaces n 78) et avec pour conséquence des façons plurielles d habiter temporairement les lieux. De surcroit, l essor du tourisme urbain s'est inscrit dans le mouvement de globalisation et d'accroissement de la compétition interurbaine qui a mené les pouvoirs publics à développer de nouveaux outils de gouvernance comme le plan stratégique. Ce nouveau modèle de gestion urbaine s'est largement ouvert à une approche managériale de la ville qui la considère comme un produit à positionner sur un marché concurrentiel. C'est ainsi que les pouvoirs publics se 1 KNAFOU Rémy (dir.) (1998)- La planète «nomade». Les mobilités géographiques d aujourd hui 254 pages 2 FAGNONI Edith (2010) - Les mobilités - Chapitre 10 - Les mobilités de tourisme et de loisirs au cœur de l hypermobilité contemporaine - Editions Sedes - 19 pages 3 KNAFOU Rémy (dir) (2007)- Mondes urbains du tourisme Introduction - L urbain et le tourisme : une construction laborieuse -14 pages 4 STOCK Mathis (2004)- L habiter comme pratique des lieux Mémoire de M2 DATT Page 6
7 positionnent de plus en plus fréquemment dans une optique de différenciation afin de mettre en exergue la spécificité de la ville. Or, la question identitaire est une question politique, qui renvoie à une série de données anthropologiques et historiques liant une communauté humaine à un territoire, et en l'espèce, à un territoire urbanisé. Dès lors, de ce lien inédit entre optique managériale et question identitaire, semblent surgir de nouveaux enjeux (Vincent Calay -2007) Située au confluent du Rhône et de la Saône, Lyon est la deuxième agglomération française présentée comme une ville d affaires et industrieuse dominée par la fréquentation des segments affaires. A l heure de la métropolisation, cette «métropole régionale» souhaite se positionner sur la scène internationale. Elle intègre depuis 2006 dans sa stratégie de développement territorial le tourisme avec comme axe prioritaire «le tourisme d affaire». Pour autant en 2010, elle affiche un record de fréquentation touristique. Or si les mobilités d affaires se déplacent c est avant tout pour des raisons professionnelles. Pouvons-nous dès lors parler de tourisme? Le tourisme selon l équipe MIT correspond à un déplacement de plus de 24 heures en dehors de chez soi à des fins récréatives. En quoi l habiter temporaire des mobilités d'affaires favorise-t-il le développement du tourisme d'agrément catalyseur de la métropolisation d un espace urbain? Des pratiques touristiques convergentes (hébergement, restauration) aux dispositifs spécifiques (diversification de l'offre, aménagements et stratégie mise en place par les institutionnels), l appropriation du territoire des mobilités d affaires semble amorcer l émergence de nouvelles polarités touristiques. L interrogation principale est de savoir si les mobilités d affaires s approprient le territoire à l instar des touristes pouvant permettre la réalisation de nouveaux espaces urbains à vocation touristique catalyseurs de la métropolisation. Dès lors, plusieurs questions peuvent être posées : - Existe-t-il un tourisme urbain des mobilités d affaires? - Si oui, quelles sont ses spécificités? - Enfin dans quelle mesure ce tourisme urbain spécifique peut-il générer des nouvelles polarités touristiques et participer à la construction métropolitaine? Mémoire de M2 DATT Page 7
8 Les hypothèses : - Les mobilités d affaires peuvent être perçues comme un hybride touristique présentant certaines connivences avec les pratiques des touristes et les pratiques de loisirs des résidents permanents. Les mobilités d affaires sont plurielles et peuvent s approprier le territoire suivant des temporalités spécifiques marquant une rupture relative de la quotidienneté qui est le fondement des pratiques touristiques. - L exemple de Lyon démontre que les mobilités d affaires servent de substrat à la construction de la métropole régionale lyonnaise et plus spécifiquement à la dépolarisation des activités de loisirs. Les grands aménagements et les projets de territoire qui façonnent le Grand Lyon sont étroitement liés aux déplacements des mobilités d affaires. Des infrastructures «domestiques» (hôtels, restaurants) aux infrastructures de loisirs, l habiter temporaire des mobilités d affaires facilite un maillage du territoire touristique multipolaire. - L habiter temporaire des mobilités d affaires amorce le développement du tourisme d agrément. A travers les dispositifs et les aménagements mis en place pour les mobilités d'affaires, les touristes s'approprient progressivement de nouveaux "territoires" ainsi que de nouveaux produits touristiques dédiés initialement à une clientèle affaire. - Si les mobilités d'affaires favorisent la diversification et la montée en gamme de l'offre touristique et de fait la lisibilité d une destination, elles contribuent paradoxalement à lisser une offre de plus en plus globale sur le plan international et à uniformiser l offre touristique d un territoire, fragilisant les stratégies de positionnement des métropoles régionales sur la scène internationale. En effet, la mise en concurrence des territoires repose sur des attentes et des normes communes qui amoindrit le caractère distinctif d une destination: L implantation de grandes chaines hôtelières Développement des pôles de loisirs polyfonctionnels Des grandes enseignes commerciales, notamment de la restauration Des projets de construction pensés par des architectes renommés pour faciliter la lisibilité de la destination. Mémoire de M2 DATT Page 8
9 La principale hypothèse est de démontrer que l activité rémunératrice des mobilités d affaires peut s inscrire dans un cercle vicieux générant une banalisation de l offre touristique pouvant freiner les perspectives de rayonnement international dans un hyperchoix global. Méthodologie : Afin d infirmer ou confirmer les hypothèses, nous partons du concept de la mobilité à savoir déterminer le mobile du déplacement d un lieu vers un autre. Partons nous vers tel lieu parce que nous souhaitons le découvrir ou rencontrer des amis ou bien parce que nous y avons des obligations personnelles ou professionnelles? Cette détermination va impliquer un choix subi ou voulu impliquant une façon spécifique d habiter le territoire (Mathis Stock 2004, 2007). Ainsi l habiter touristique fait partie d un ensemble de logiques d appropriation du territoire qui va suivre un continuum de pratiques (Vincent Coeffe, 2009) caractérisé par un temps disponible plus ou moins important du fait de l intentionnalité du déplacement. Ce déplacement est aujourd hui contextualisé par un monde de plus en plus mobile et performant avec des nouvelles technologies. Ces nouvelles technologies vont permettre aux individus, qui se déplacent, à affronter des lieux étrangers et les rendre de plus en plus familiers notamment dans un espace citadin qui concentre les nouveaux moyens de télécommunications. Les mobilités d affaires se déplacent pour des raisons professionnelles et vont suivre un continuum qui parfois converge avec le continuum des touristes ce qui complexifie l identification de leurs pratiques de territoires. Ces pratiques vont être intégrées dans un ensemble de pratiques touristiques exercées dans un espace urbain (Partie 1). L exemple de Lyon souligne les tendances actuelles des grandes villes régionales qui souhaitent se positionner sur les rangs des grandes métropoles internationales. Lyon affiche une image de ville industrieuse dominée par la fréquentation des segments d affaires. L étude sur les dispositifs et les aménagements mis en place pour accueillir les mobilités d affaires met en avant l émergence d une urbanité spécifique amorçant de nouvelles polarités touristiques. A partir d une analyse faite sur les différents projets urbains de la ville et des dispositifs dédiés aux mobilités d affaires, il existe une imbrication sous-jacente des nouvelles polarités urbaines de loisirs crées autour des sites de rencontres professionnelles (Partie 2). A partir d enquêtes réalisées auprès de l offre et la demande, émergent des modes d habiter touristiques polytopiques des mobilités d affaires laissant supposer l existence d une Mémoire de M2 DATT Page 9
10 typologie de tourisme hybride. Cet habiter touristique hybride et polytopique génère une offre touristique générique qui se fond dans un hyperchoix global (Partie 3). Mémoire de M2 DATT Page 10
11 1ère partie : Le concept du tourisme urbain des mobilités d affaires dans un contexte d hypermobilité contemporaine Parce que les pratiques de lieux ne se différencient pas facilement 5 (Rémy Knafou), et parce que les mobilités d affaires et les mobilités touristiques peuvent converger vers une même destination, la perception réelle de la façon d habiter touristiquement et temporairement un espace devient très complexe. La confusion est certes un des mots clés pour comprendre le tourisme, mais la définition proposée par l équipe MIT «un système d acteurs, de pratiques et de lieux qui a pour finalité de permettre aux individus de se déplacer pour leur récréation hors de leurs lieux de vie habituels afin d aller habiter temporairement d autres lieux» 6 (Mathis Stock et Rémy Knafou, 2002) permet d établir une distinction significative entre les pratiques des touristes et les pratiques adoptées par les mobilités d affaires qui reposent essentiellement sur l intentionnalité du déplacement ; en d autres termes, la raison du choix de la destination va impacter la façon d appréhender le territoire. Les mobilités d affaires s opèrent dans un monde globalisé marquant une rupture avec quotidienneté rythmée notamment par le travail et ses territoires (1). Cette rupture spatiale et temporelle se chevauche avec celles des touristes. Elle implique un processus d autonomisation le long d un continuum entre autoproduction et co-production plus ou moins évident 7 qui complexifie l identification de l activité sur le plan touristique (2). En France, si l appropriation du territoire des mobilités d affaires est identifiée à partir d un système d acteurs qui disposent d une connaissance à demi mesure de ce continuum, des pratiques de territoires spécifiques aux mobilités d affaires semblent pourtant se dégager (3). 5 Ibidem 6 Equipe MIT (2008) Tourisme 1- Lieux Communs. Editions Belin, 320 pages 7 COEFFE Vincent (3 avril 2009) Le temps à l épreuve des touristes - Compte rendu de la 2 ème journée de Recherche sur le Tourisme - Groupe Sup de Co La Rochelle) Mémoire de M2 DATT Page 11
12 1.1 Les mobilités d affaires et l hypermobilité contemporaine : quelle place pour le tourisme? De plus en plus, la société se meut pour des raisons diverses. Le déplacement professionnel peut être à durée variable dans des espaces plus ou moins lointains qui va susciter une altérité plus ou moins importante et offrir la possibilité de découvrir un territoire méconnu comme lors d un déplacement d agrément. Mais la société évolue dans un monde interconnecté par des infrastructures toujours plus performantes modifiant le rapport au monde des individus. Qu est-ce qui conditionne aujourd hui les déplacements professionnels? Quelles sont les possibilités de pratiques de lieux et plus spécifiquement quelle place peuvent donner les mobilités d affaires au tourisme? Les mobilités et l altérité : le fondement des pratiques touristiques La société contemporaine se caractérise aujourd hui par un monde mobile. Nous déménageons pour le travail, nous partons en vacances à des échelles de territoires variées aussi bien au niveau national qu au niveau international etc. Il existe une pluralité de déplacements de court ou de long terme, définitifs, exceptionnels ou quotidiens, à des distances plus ou moins importantes que l on peut qualifier de mobilités. 8 (E.Bonerandi). Le concept des mobilités, dans le dictionnaire, est ce qui peut se mouvoir, la facilité à être mû ou encore la facilité à changer. Pour Mathis Stock et Philippe Duhamel, il existe deux grandes classes de mobilité : «la circulation» et la «migration» avec deux rapports distincts à l altérité : «transport» pour une circulation sans altérité et «déplacement» comme une mobilité avec altérité 9. Si nous reprenons les termes d Olier Lazzarotti, «se déplacer, c est, dans toutes les situations donc, «mettre en cause» ses propres repères, culturels, bien sur, comme la langue, mais aussi géographiques, en particulier ce que l on sait des lieux» BONERANDI Emmanuelle De la mobilité en géographie»- 9 STOCK Mathis, DUHAMEL (2005) - A Practice-based Approach of Geographical Mobility, Belgeo-Revue belge de géographie, n 1-2, pp LAZZAROTTI Olivier (2001) A propos de tourisme et patrimoine : les raisons de l «Habiter».Diplôme d HDR, Université Paris 7- Denis Diderot Mémoire de M2 DATT Page 12
13 L équipe MIT souligne que l altérité occupe une place centrale dans les pratiques touristiques parce que le lieu touristique a une raison d être du fait qu il est autre et parce qu il diffère du lieu de vie quotidienne 11. Ce différentiel induit par la rupture entre le quotidien et le hors quotidien génère une envie intrinsèque plus ou moins exacerbée de découvrir les lieux. Ainsi, si nous reprenons le cas des mobilités d affaires, elles correspondent à un déplacement professionnel qui va entraîner une altérité plus ou moins importante générant une rupture avec la quotidienneté et de fait susceptible de susciter à priori une envie de découvrir l altérité des lieux et de fait pratiquer touristiquement un territoire. Mais l ère du mouvement que caractérise le monde actuel modifie la relation de l espace aux sociétés et donc la façon d habiter, de vivre et de penser un territoire Les mobilités d affaires au cœur de l hypermobilité contemporaine et du tourisme urbain : un quotidien «hybridé» La dilatation de l espace temps facilité par une technicisation de plus en plus performante a considérablement impacté les façons d habiter temporairement les villes engendrant la multiplication et la diversification des mobilités (E.Fagnoni). Les gains de vitesse accroissent l espace accessible avec le même budget temps transport 12 modifiant l urbanité des villes et nous propulsent dans la «dromosphère» (Virilio, 2009) 13, l univers de la vitesse. De surcroit, les espaces sont de plus en plus transparents avec la puissance imaginaire de la télécommunication qui joue un effet significatif dans le processus de décision et l activation du déplacement in situ. Si nous reprenons l hypothèse du modèle de l habiter poly-topique 14 de Mathis Stock, (cf Figure 1), la valeur discriminante pour déterminer la familiarité avec les lieux n est plus la distance mais la fréquence. Ainsi les lieux proches ne sont plus nécessairement ceux qui sont les mieux connus et les plus familiers. L altérité d un lieu ne dépend donc pas de la distance parcourue. 11 Equipe MIT (2008) Tourisme 1- Lieux Communs. Editions Belin, 320 pages. 12 ASCHER François (2010) Métapolis ou l avenir des villes Edition Odile Jacob -346 pages - Loi de Zahavi 13 VIRILIO Paul (2009) Penser la vitesse, DVD, Edition.Arte 14 STOCK Mathis (2006) «L hypothèse de l habiter poly-topique : pratiquer les lieux géographiques dans les sociétés à individus mobiles», EspacesTemps.net, Textuel. Mémoire de M2 DATT Page 13
14 Figure I-1 : Les modèles des modes d habiter mono-topique et d habiter multi-topique. Mathis Stock, "L hypothèse de l habiter polytopique : pratiquer les lieux géographiques dans les sociétés à individus mobiles.", EspacesTemps.net, Textuel, Dès lors, l accélération temporelle et la réduction des distances facilitent les déplacements notamment les déplacements de courts séjours touristiques qui mêlent le «quotidien» et le «hors quotidien» des individus. Le tourisme est alors infusé dans la vie urbaine 15 (M.Lussault). Cette articulation entre les différentes mobilités va être fortement conditionnée par le changement du rapport au temps institué par la modernité et la révolution. Si le fait sociétal de l accroissement du temps libre a entraîné une nouvelle organisation de vie, une rupture dans le temps de travail et de nouveaux rythmes touristiques, il a contribué à l infusion progressive du loisir au tourisme 16. Dès lors «le quotidien s hybride du hors quotidien et réciproquement» avec un tourisme qui participe davantage à la mise en place d un habitat dispersé et d un habiter de traverse (M.Lussault) 17. Pour rappel, le loisir se distingue du tourisme du simple fait qu il ne s agit pas des mêmes clientèles. Le tourisme suppose un déplacement de plus de 24 heures qui implique d aller habiter ailleurs que chez soi (équipe MIT) tandis que les loisirs se développent dans l espace local et le temps du quotidien. Ainsi les mobilités d affaires sont au cœur d un nœud de personnes mobiles comprenant les résidents temporaires (primo visiteurs), les résidents occasionnels et les résidents permanents immergés dans une altérité relative des lieux. Cette mixité de personnes mobiles va engendrer des infrastructures qui vont organiser le territoire et générer une dynamique territoriale. 15 LUSSAULT Michel in KNAFOU Rémy (dir) (2007) - Mondes urbains du tourisme, éditions Belin,coll Mappemonde, Paris, P333 à FAGNONI Edith (2010) - Les mobilités - Chapitre 10 - Les mobilités de tourisme et de loisirs au cœur de l hypermobilité contemporaine - Editions Sedes - 19 pages 17 LUSSAULT Michel (2007) Le tourisme, un genre commun Mondes urbains du tourisme- Editions Belin- P333 à P349 Mémoire de M2 DATT Page 14
15 Les mobilités d affaires se déplacent au sein de sociétés hypermobiles avec des dispositifs de télécommunication ultra performants qui vont impacter de façon significative l imaginaire touristique et la gestion du temps. En d autres termes, puisque la logique spatiale n est plus une condition d altérité, la logique temporelle et la perception de la destination va déterminer la pratique du lieu Le continuum de pratique durant le temps «libéré du travail» : les distinctions entre le processus d autonomisation des mobilités d affaires et celui des touristes. S interroger sur le temps libre des mobilités d affaires c est établir un premier rapprochement avec la façon que le touriste a de s approprier le territoire puisqu il dispose d une enveloppe de temps libre qu il organise en fonction de ses préférences. Or l association générale de la réduction du temps de travail que l on pourrait faire à la progression du temps libre n est pas évidente. Il peut exister une distinction entre le temps libre et le temps libéré par le travail. Le temps libéré par le travail favorise le travail domestique qui comprend notamment le repas 18. Cette distinction établie par Françoise Pottier et Christophe Terrier pointe du doigt le conditionnement psychologique que peut avoir une personne en déplacement professionnel pouvant diverger de celle d un touriste qui choisit le lieu où il se rend, les pratiques qu il exerce et les temporalités dans lesquelles il se déplace 19. L expérience touristique sert de laboratoire pour essayer de nouveaux styles de vie introduisant une discontinuité (Orvar Lofgren) 20 et semble permettre de transcender l expérience quotidienne. Ainsi le tourisme place l individu en position de s affranchir des contraintes quotidiennes en allant habiter temporairement d autres lieux (Mathis Stock) 21. Cette perception de pouvoir expérimenter la nouveauté en toute liberté 22 peut ajouter une différence primordiale dans la façon de s approprier le territoire. Selon Vincent Coeffe, le tourisme est une pratique sociale pouvant être comprise comme une rupture de la 18 POTIER Françoise et TERRIER Christophe (2007) Atlas des mobilités touristiques en France métropolitaine, Editions autrement, collection atlas monde. 19 Equipe MIT (2008) Tourisme 1- Lieux Communs. Editions Belin, 320 pages 20 LOFGREN Orvar (1999) On Holiday. A history of Vacationing, Berkeley, University of California Press. 21 STOCK Mathis (2005) - Les sociétés à individus mobiles : un habiter poly-topique? L exemple des pratiques touristiques» 22 Ibidem Mémoire de M2 DATT Page 15
16 quotidienneté rythmée notamment par le travail et ses territoires 23. La rupture temporelle s accompagne d une rupture spatiale suivi d un processus d autonomisation. Ce processus va déterminer une appropriation du territoire, une façon d habiter les lieux que les touristes vont choisir en faisant plus ou moins appel à des intermédiaires pour organiser une même enveloppe de temps. Les modèles purs caractérisés par une totale autonomie d un côté et de l autre une «hétéronomie» radicale est plutôt rare. Les touristes développent davantage des «stratégies hybrides» qui placent le curseur de la pratique le long d un continuum entre autoproduction et coproduction. Ainsi plus l altérité de la destination est perçue comme forte et plus le touriste aura tendance à faire appel à des intermédiaires détenant l information dont il est plus ou moins dépourvu. 24 L équipe MIT a pu mettre en lumière cinq formes de pratique qui structuraient les façons d habiter le territoire par les touristes: - La découverte : la confrontation de la modernité avec le patrimoine - Les sociabilités : l appartenance des classes, les nouveaux espaces confidentiels pour la haute société et le rapprochement des résidents et non résidents pour les touristes «populaires» - Le jeu - Le repos (une enquête récente menée par Ipsos de 2006 auprès de 3500 européens a montré que 61 % des personnes interrogées recherchent le repos et la tranquillité d esprit en vacances : sieste, lecture, soin du corps etc.) - Le shopping (plus que l achat du souvenir, le shopping est devenu un motif structurant du déplacement touristique - à l instar de la fête, le shopping devient un moyen de conquérir les marges du temps urbain et facilite le positionnement attractif d une métropole). Les mobilités d affaires, si l on suit le cheminement de V. Coeffe, ont en premier lieu une rupture spatiale accompagnée d une rupture temporelle partielle puisque la 23 COEFFE Vincent (2009) - Le temps à l épreuve des touristes - (2ème journée de Recherche sur le Tourisme-Groupe Sup de Co La Rochelle). 24 Ibidem Mémoire de M2 DATT Page 16
17 discontinuité du travail s effectue sur le lieu du déplacement. La rupture de la quotidienneté est partielle car la finalité première du déplacement est professionnelle. Dès lors, les temporalités ne répondent pas à priori aux mêmes logiques. D autre part, certaines mobilités d affaires, font appel à des intermédiaires, organisateurs du voyage plus en fonction de la finalité du déplacement que de l altérité de la destination. Ainsi, les mobilités d affaires n obéissent pas à priori aux mêmes processus d autonomisation et aux mêmes logiques d autoproduction et coproduction. De surcroit ces intermédiaires interviennent à priori à la demande d une entité morale qui paie pour le compte des mobilités d affaires, l organisation du voyage. Ainsi, le choix de la coproduction paraît très éloigné d un choix personnel et rend le processus d autonomisation relativement complexe. Les formes de pratiques exposées par l équipe MIT soulignent l hypothèse de l habiter polytopique de Mathis Stock. Conclusion : La discontinuité entre travail et non-travail est au fondement du tourisme qui constitue une des manières de faire usage du temps libre 25. Le déplacement des mobilités d affaires induit une altérité des lieux relative avec une rupture de la quotidienneté relative puisque la motivation première du déplacement est professionnelle réduisant ainsi la discontinuité entre travail et non-travail.. Dès lors, les mobilités d affaires n obéissent pas aux mêmes temporalités puisqu elles ont une contrainte de travail. Le temps libéré du travail va déterminer un habiter touristique du territoire mais dans le cas des mobilités d affaires qui peuvent être plurielles, le temps «travaillé» peut également être employé pour pratiquer touristiquement les lieux si l on se réfère aux 5 formes de pratiques touristiques de l équipe MIT. Les mobilités d affaires semblent développer des pratiques de lieux en corrélation avec celles des mobilités touristiques qui se fondent elles mêmes avec les pratiques de lieux des résidents permanents. Bien que les logiques temporelles et intentionnelles du déplacement soient 25 COEFFE Vincent (3 avril 2009) Le temps à l épreuve des touristes - Compte rendu de la 2 ème journée de Recherche sur le Tourisme - Groupe Sup de Co La Rochelle) Mémoire de M2 DATT Page 17
18 différentes, elles semblent pourtant suivre des logiques spatiales convergentes pouvant se superposer. Ces différentes corrélations de pratiques ont pendant longtemps susciter une confusion (bien que toujours existante) sur le tourisme des mobilités d affaires encore nommé dans le langage courant le «tourisme d affaires.» 1.2 «Du tourisme d affaire» au principe du tourisme urbain des mobilités d affaires Définir le fait touristique est complexe puisqu il est de plus en plus impossible de l isoler des autres activités. Dès l origine, le transport touristique conduisit vers un détournement du but du tourisme; l exploitation commerciale s en empara aussitôt ( ) qu il est de plus en plus difficile de faire la part des choses. Nous constatons donc que le voyage d affaires est de façon croissante inséparable de l ambiance touristique 26». Cette confusion donne lieu à des définitions multiples de cette activité majeure mal identifiée. 27 (1.2.1) Mais il existe des études intéressantes qui appréhendent les mobilités d affaires à l instar du continuum de Vincent Coeffe (1.2.2) permettant d identifier leurs pratiques de territoire comme une pratique touristique urbaine polytopique (1.2.3) Les raisons d une définition plurielle et «contestée» Dans le langage courant nous utilisons le terme générique tourisme d affaire, le «mal nommé» 28 (R.Knafou), mais cette activité majeure reste mal identifiée (Rapport du conseil Economique et social de 2007, B. Plaisait) voire «contestée» du fait qu elle ne met pas en avant l objet du déplacement comme critère de distinction. Pendant longtemps les institutions touristiques ont pensé qu elles avaient intérêt à entretenir 26 WACKERMANN Gabriel (1993), Tourisme & transport. Collection mobilité spatiale, SEDES, p35, Paris, 279 pages 27 PLASAIT, Bernard (2007), Avis et rapports du Conseil Economique et Social : Le Tourisme d affaires : un atout majeur pour l économie, 144 pages KNAFOU Rémy (dir) (2007)- Mondes urbains du tourisme Introduction - L urbain et le tourisme : une construction laborieuse -14 pages Mémoire de M2 DATT Page 18
19 une «confusion» sur le tourisme d affaire 29 (R. Knafou) pour montrer leur importance et produire des statistiques. Aussi l intérêt d une différenciation n était pas indispensable. Mais très rapidement la nécessité d adopter des décisions adaptées pour ce segment de clientèle spécifique, a encouragé certains acteurs à faire la distinction. En effet, car si la dimension ludique tient une place importante dans certains des déplacements professionnels, elle est cependant dans certains cas, inexistante. En effet, la clientèle d agrément et la clientèle affaire obéissent à des logiques très différentes. La finalité de la première vise des activités récréatives tandis que la finalité de la seconde est avant tout professionnelle. La dimension récréative et ludique du voyage d affaires (au sens large du terme) est un plus un agrément qu une finalité. Ainsi, l activité des mobilités d affaires se confond avec celles des mobilités touristiques car elles ont toutes deux la particularité d habiter temporairement une ville. Elles utilisent les mêmes infrastructures de transports et utilisent les mêmes infrastructures d accueil dits de «tourisme» mais l objectif premier du déplacement des mobilités d affaires est professionnel tandis que celui des mobilités touristiques reste avant tout récréatif. Elles n obéissent pas aux mêmes temporalités puisque l une devra «penser récréativité» à partir d un temps libéré du travail et l autre sera immergée dans l intentionnalité récréative dès l origine du déplacement. En France, le tourisme d affaire est défini comme étant «des déplacements individuels ou organisés, effectués pour des motifs professionnels et dont la durée est d au moins 24 heures» ( ) et qui concernent 5 domaines d activités : Les foires et les salons : Les foires sont des manifestations grand public regroupant régulièrement tout type d entreprises afin de présenter des produits ou des services en vue de les vendre ou de les faire connaître. Les foires sont souvent régionales et annuelles. La Foire de Lyon en est un exemple. 30 Les salons (ou expositions), peuvent être grands publics, professionnels ou mixtes. Ils regroupent toutes les entreprises d un secteur particulier, au niveau national ou international. A titre d exemple, le Salon de l automobile ou de l agriculture... Ils font l objet d une 29 Ibidem 30 PLASAIT, Bernard (2007), Avis et rapports du Conseil Economique et Social : Le Tourisme d affaires : un atout majeur pour l économie, 144 pages- Mémoire de M2 DATT Page 19
20 réglementation. 31 Les congrès et les conventions d entreprises Les congrès associatifs sont organisés par des associations, des Sociétés savantes, des organismes internationaux, les pouvoirs publics, des universités ou des centres de recherche. Ils permettent la diffusion et l échange de connaissances, la confrontation d expériences sur un thème donné de nature scientifique, technique, culturelle entre spécialistes de la même filière. Une participation financière est généralement demandée aux congressistes. La fréquence des congrès est souvent régulière. 32 Les conventions sont organisées à l initiative d une société privée. Elles réunissent essentiellement des personnes liées à l entreprise organisatrice (force de vente, réseau de distributeurs...) et ne nécessitent pas de contribution financière des participants. L événement a un caractère obligatoire dont l objectif est de diffuser un message unilatéral d information, éventuellement médiatisé. Sa fréquence est généralement régulière. On utilise également l expression Conférence d entreprise. 33 Les incentives et les voyages de motivations D origine nord-américaine, l incentive est un voyage de stimulation ou de motivation organisé par une entreprise en vue de récompenser son personnel en groupes restreints pour les motiver et les fédérer. Ce voyage patronné allie information et tourisme d agrément. Il exige une préparation très soignée, une exécution parfaite et une exploitation des résultats très attentive. 34 Certaines entreprises organisent une fête pour célébrer un événement (Un anniversaire, un lancement de produit, une assemblée générale ou un conseil d administration...). Elles y trouvent un vecteur d image et un support de communication qui s intègre dans une stratégie globale de communication. 35 Cette forme d événementiel, s inscrit dans la convergence entre tourisme, loisir et culture. 31 Ibidem 32 Ibidem 33 Ibidem 34 Ibidem 35 Ibidem Mémoire de M2 DATT Page 20
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